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182. H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
juger dans le for feculier; non-feulement aucivii
mais au criminel. Or je vous defens à tous en vertu
del ’obéïflance 8c fous peine de perdre votre ordre,
d’afliller au jugement où on prétend me juger;
de peur que vous ne le faffiez j ’appelle à l’é-
glife Romaine.. Que fi les féculiers mettent les
mains fur moi , je vous ordonne de même d’employer
pour madéfenie les cenfures ecclefiaitiques;
Sachez au relie , qu’encore que le monde fremifle,
que l’ennemi s’élève, qu’il brûle mon corps : toutefois
avec 1 aide de Dieu je ne cederai point mon
troupeau. Leveque de Londres appella aufli-tôt
de cette ordonnance de l’archevêque, 8c ils le quittèrent
tous pour fe rendre à la cour : feulement il
y en eut deux qui demeurèrent encore quelque-
tems avec lui pour le conloler Se l’encourager fe-
cretement : favoir Henri évêque de VincheilreSc
JoiTelin deSariiberi.
Aufli-tôt que les évêques fe furent retirez Tho-Î
mas entra dans l’églife Se celebra la meife de faine
Etienne,^ portant même le pallium , quoiqu’il ne
fut pas fete , puis 1 ayant ôté 8c la mitre 8c g^r-.
xdant le relie de fes ornemens avec la chape clericale
pardeflus il alla a la cour : mais fachant le
péril ou il ecoit, il prit fur lui fecretement l’eu-
chariftie.A la porte de la-chambre où le roi l’atten-
doit il prit fa croix de la main de celui qui la por-.’
toit devant, 8c entra ainfi fuivi des évêques. Robert
eveque d’Herford s'offrit à lui fervir de porte-
croix , mais il répondit: il faut que je la porte moi-
meme, c efl ma fauve-garde, 8c elle me fait voir
L i v r e S o i x a n t e - o n z i e ’ m e . 183
fous quel prince je combats. L’évêquedeLondres
lui dit : fi le roi vous void entrer armé il tirera A
contre vous fon épée; 8c vous verrez alors dequoi
vous ferviront vos armes. Je m’en remets à Dieu
die l’archevêque. Et l’évêque ajouta : Jevois bien
que vous ne quitterez point vôtre entêtement. Le
roi fachant que l’archevêque venoit avec fa croix,
fe retira dans une autre chambre; 8c l’archevêque
s’aifit ieuld’ùn côté 8c les évêques devantlui.Ün
héraut appella tous les prélats 8c les feigneurs ; 8c
on propofa de la part du roi une grande plainte
contre l’archevêque, de ce qu’il étoit ainfi entré
dans la cour du roi portant fa croix pour lui faire
affront : tous prirent le parti du roi 8c traitèrent le
prélat de traître , d’ing ra t , 8c de parjure, criant
hautement contre lui.
Les afliilans furent faifis d’horreur, 8c Roger ar- .
chevêque d’Y o r c iortic , en difant à deux de fes
clercs qu’il trouva là: Retirons nous d’i c i , il ne
nous convient pas de voir ce que l’on va faire à
l ’archevêque de Cantorberi. Alors des huiffiers
avec leurs baguettes defeendirent à grand bruit de
la chambre où étoit le r o i , 8c fe tournèrent vers
Thomas étendans les mains 8c le regardant d’un
air menaçant. Tous ceux qui étoient préfens
firent le figne de la c ro ix, 8c Barthelemi évêque
d’Exceftre fe jettant aux pieds du prélat , lui dit:
Mon pere ayez pitiez de vous 8c de nous. Nous
allons tous périr aujourd’hui à caufe de vous. En
effet il y avoit un ordre du r o i , que quiconque
demeureroit avec l’archevêque feroit jugé enne-.