
ioo H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
—---- — fiens , avoienc envoie à Thomas en France depuis
A n. 1164. fon éxil de grandes fommes d'argent. Or quoique
ce rapporc fut faux,toutefois parce qu’on le croioit,
on obligea Gilbert, tous les fuperieurs ôc tous les
procureurs de fon ordre à fe prefenter devant les
juges du roi , pour être tous bannis, s’ils ctoienc
convaincus du fait. Les jùges ayant pitié de Gilbert
dont ils connoiffoient la fainteté , lui offrirent de
fe purger par ferment de cette accufation , promettant
de lerenvoïet abfouslui 8c les fiens. Mais
Gilbert déclara qu’il aimoit mieux aller en é x i l ,
que de prêter ce ferment. Car encore qu’il fçût
bien , qu’un ferment contenant vérité ne peut
nuire à celui qui le fa i t , mais tout au plus à celui
qui 1 exige : toutefois il crut de mauvais exemple
de fe juftifier d'une telle accufation , comme fî
c’eût été un crime de iecourir en un tel cas un prélat
fouffrant pour l’églife. Comme donc il refufoit
le ferment ôc que les juges n’ofoient le condamner,
il demeura quelquetemsà Londres avec les fiens :
qui fe voïanc à la veille d’abandonner leurs maifons
pour un ferment qu’ils étoient prêts àfaire, étoient
dans la crainte ôc l’afHiétion , pendant que Gilbert
affecloit de témoigner fa joïe en toutes maniérés.
Le dernier jour du terme, comme ils s’atten-
doient tous à être bannis, arrivèrent des mefTa-
gers du roi qui étoit deçà la mer , avec ordre
de remettre l’affaire de Gilbert jufques à ce
qu’il en prît par lui même une plus ample con-
noiffance. Auffi-tôt Gilbert fut renvoïez avec-les
fiens ; ôc alorsfevoïant libre , il déclaraaux juges,
mais
L i v r e S o i x a n t e - o n z i e ’ m e . aoi
mais fans aucune forme de ferment, que ce qu on
lui avoit reproché étoit entièrement faux. Cette
fermeté fut admirée de tou t le monde. Gilbert ve-
cut encore vingt-trois ans ; ôc mourut âge de cent
fix ans, l’an 1183». le famedi quatrième de Février
jour auquel l eglife honore fa mémoire.
Thomas de fon coté touché de ce que les fiens
fouffroient à caufe de lui, commença à Pontigny
de mener une vie plus penitente; Outre le cilice
qu’il portoit continuellement ôc les difciplines
qu’il fe faifoit fouvent donner en fecret : il ordonna
au moine qui le fervoit à table , de lui donner
tous les jours, fans que l’on s’en apperçût, avec les
mets plus délicats qu’on lui fervoit, la portion de
la communauté , ayant réfolu d’en faire fa feule
nourriture. Ainfi pendant quelques jours il ne v é cut
que de légumes feches ôc infipides , fuivant
qu’on l’obfervoit alors dans l’ordre de Cîteaux.
Maiscetce nourriture fi différente de celle a laquelle
il étoit accoûtumé de jeuneffe, lui caufa une
griéve maladie ; ôc il fut obligé de revenir a des
alimens plus convenables.
Cependant on portoit des paroles entre le pape
ôc le roi d’Angleterre, pour tenir une conférence
où l’on traitât de la paix. Le roi dit, qu’il s’ytrou-
■veroit, mais à condition que Thomas n’y feroic
pas, autrement qu’il ne verroit pas le pape même.
Thomas au contraire manda au pape de ne point
entrer fans lui en conférence avec le roi. Je con-
nois , difoit-il , fes maniérés , il lui fera plus facile
de vous furprendre s’il n’y a un interprète
Tome X V . C c
A n. 1165.
Monttft» Angl.
to. 3./». 691,
XVI.
Thomas à Pou-
tig n y .
V it a» u . c . ry;
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