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H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
d’autres perfonnes capables, les lieux de Ton diocefe,
où le bruit commun fera que des heretiques demeurent
; & il fera jurer trois ou quatre hommes
ou plus de bonne réputation, & même s’il le juge
à propos tout le voilînage ; que s’ils apprennent qu’il
y ait là des heretiques, ou des gens qui tiennent
des conventicules fecretes, ou qui mènent une vie
différente du commun des fideles, ils les dénonceront
à l’évëque ou à l’archidiacre. L’évêque ou l’archidiacre
appellera devant lui les accufez; & s’ils
ne fe purgent fuivant la coûtume du païs, ou s’ils
retombent, ils feront punis' par le jugement des
évêques. Que s’ils refufent de jurer, ils feront dès-
là jugez heretiques.
Nous ordonnons de plus que les comtes, les
barons, les reéleurs, & les confuls des villes , &i
des autres lieux, promettent par ferment fuivant la
inonition des évêques, d’aider efficacement l’églife
en tout ce que deffus contre les heretiques & leurs
complices, quand ils en feront requis & qu’ils s’appliqueront
de bonne foi à executer félon leur pouvoir
ce que l’églife & l’empire ont ftatué fur cette
matière -, finon ils feront dépoüillez de leurs charges,
& ne feront admis àvaucune autre ¡ outre qu’ils
feront excommuniez & leurs terres mifes en interdit.
La ville qui réfi fiera à ce décret, ou qui étant
avertie par l'évêque, négligera de punir les contre-
venans, fera privée du commerce des autres villes^
& perdra la dignité épifcopale. Tous les fauteurs
d’heretiques feront notez d’infamie perpétuelle, &
comme tels, exclus d’être avocats & témoins, &
des
L i v r e s o i x a n t e - t r e i z i e ’ me. ' 9
•des autres fonétions publiques. Ceux qui font
exemts de l’évêque & foûmis feulement au faint fie-
ge,ne bifferont pas pour ce que deffus, de fubir le
jugement des évêques comme déléguez du faint fie-
ge , nonobftant leurs privilèges.
On voit dans ce décret le concours des deux
puiffances pour l’extirpation des herefies ; l’éghfe
emploie l’excommunication & les autrescenfures ,
l’empereur , les feigneurs & les magiftrats em-
ployent les peines temporelles; Je croi de plus y voir
l’origine de l’Inquifition contre les heretiques :
en ce que l’on ordonne aux évêques de s’informer
par eux-mêmesou par commiffaires des perfonnes
fufpeéàes d’herefie , fuivant la commune renommée
&c les dénonciations.particulières ; que l’on
diftingue les degrez de fufpeéts, convaincus, pe-
nitens & relaps, fuivantlefquels les peines font
différentes. Enfin qu’après que l’églife a employé
contre les coupables les peines fpirîtuelles , elle
les abandonne au bras feculier , pour exercer encore
contre eux les peines temporelles ; ayant reconnu
par expérience que pluiieurs Chrétiens, &
particulièrement ces nouveaux heretiques , n’é-
toient plus feniîbles aux peines fpirituelles. On
recônnoiffoit donc enfin , qu’outre la peine fpiri-
tuclle, il étoit permis d’employer la temporelle
contre la même perfonne pour le même crime ; fans
craindre de violer la maxime Nonbis in idem : dont
la defenfe fut vingt ans auparavant la principale
caufede la perfecution que fouffrit faint Thomas
de Captorheri.
Tome X V . X x x
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