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5 7 6 H i s t o i r e e c c l e s i a s t i q u e .
de cette fubvention. Ilefttemps, dit-il, de parler ;
& vous né devez pas fuivre l’exemple des autres
évêques qui flattent votre roi. Si le refpeét vous retient,
prenez avec vous quelques-uns de vos confrères,
qui foient pouffez par l’efprit de Dieu, &
parlez avec force mêlée de douceur. Si le roi veut
faire ce voïage , qu’il n’en prenne pas les frais fur
les dépoiiilles des églifes & des pauvres, mais fur
fes revenus particuliers , ou fur les dépoiiilles des
ennemis, dont on devroit enrichir l’églife, loin de
la piller elle même fous prétexte de la défendre.
Le prince ne doit exiger des évêques & du clergé,
que des prières continuelles pour lui. Reprefentez
au vôtre qu’il a reçu le glaive des mains de l’e-
glife pour la protéger,& que s’il a maintenant be-
foin de fes prières, il en aura encore plus grand
befoin après fa mort , à laquelle s’évanoüira toute
fa puiffance. Mais on ne voit pas que cette remontrance
ait eu d’effet, non plus que ce qtie Pierre
écrivit fur le même fujet à Jean de Coutances
doïen de l’églife de Roüen , & neveu de l’archevêque
Gautier. Il l’exhorte d’emploïer le crédit
qu’il avoit auprès du roi d’Angleterre pour maintenir
la dignité de l’églife. Elle eft libre , dit- i l ,
par la libertéy que J. C . nous a acqui• lre ; mais 11 on
J ’accable d'exaétions, c’eft la réduire en fervitude
comme Agar. Si vos princes, fous prétexte de ce
nouveau pelerinage,veulent rendre leglffe tributaire,
quiconque eft fils de l’églife doit s’y oppo-
fe r , & mourir plûtôtque de la foumettre à lafer-
yitude. On voit ici les équivoques ordinaires en
ce
L i v r e s o i x a n t e q u a t o r z i e ’m e . ^7 7
ce temps la fur les mots degliie & de liberté,corn- j—"■
me fi 1 eghfe delivree par J. C. n etoit que le clergé, HMN*
ou qu’il nous eût délivré d’autre chofe que du péché,
& des cérémonies légales.
Pierre de Blois dit encore un mot contre la de-
cime Saladine, dans le traite du voïage de Jeruia-
lem. Les ennemis de la cro ix , dit-il, qui devroient
être fes enfans, anéantiffent leur vceù par leur ava- t. 4iti
rice, fous prétexte d’une damnable colleéte, &
tournent la croix en fcandale. Ce traité tend principalement
à hâter le départ des croifez ; & à blâmer
les feigneurs qui differoientpour leurs intérêts
particuliers.
■ Le meme jour que le roi Philippe tenoit fon par- chr.Reichirfpi
lement a Paris, l’empereur Frideric tint à Maïence
une diette folemnelle , c’eft-à-dire , le dimanche ^
de la mi-Carême vingt-feptiéme dé Mars. A cette * ' 3t
affemblée fe trouva le cardinal Henri évêque d’Al-
bane ; on y lue publiquement la relation de k pri-
fe de Jerufalem, & l’empereur fe croifa avec fon
fils Frideric duc de Souabe, & lbixante-huit des
plus grands feigneurs tant ecclefîaftiques que Séculiers.
On exhorta generalement tout le monde
à la croifade ; & on fixa le rendez-vous pour le dé- An*», un. p
part à Ratiibonne à la faint George vingt, troifiéme CaniJ’
d’Avril de l’année fuivante. Pour éviter la trop-
grande multitude, l’empereur fit défendre fou®
peine d excommunication à ceux qui nepouvoient ehr.cixr^aii
pas faire la dépenfe de trois marcs d’argent , de a 'J ^ ^ Î
marcher avec fon armée. De Maïence le légat Henri
yint à Liege, où il prêcha il fortement cotkre les.
Tome X V . D d d d