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—— Le lendemain dimanche veille de S. Jacques ,
*7 7 * le pape envola dès le grand matin fix cardinaux ,
fçavoir, deux évêques, trois prêtres & un diacre
vers l’empereur, pour l’abfoudre. Ii ienonça au
fçhifme d’Oétavien , de Gui de Crème & de Jean
de Strume , & promit obéïflance au pape Alexandre
& à Tes fucceiTeurs légitimes ; & il fut abfaus
par les cardinaux, de l’excommunication, & réuni
à l’églife catholique. Les prélats &c les feigneurs
Allemands en firent autant, & reçûrent auml’ab-
folution. Alors le duc de Venife avec le patriarche
de Grade, & une grande multitude de clergé & de
peuple vint à faint Nicolas du Lido où l’empereur
étoit ; & le duc l’aïant pris dans fa barque, le mena
à faint Marc , où le pape l’attendoit à la porte de
l’églifeavecfesévêques, fes cardinaux, le patriarche
d’Aquilée', les archevêques & les évêques de
Lombardie , tous affis & revêtus pontificalement,
en preience d’un peuple innombrable. L’empereur
s’étant approché ôta fon manteau , Sç fe profterna
aux pieds du pape, qui touché jufquesaux larmes,
le releva & lui douna le baifer de paix. Auffi-tôt
les Allemans entonnèrent le 7 e Deum à haute v o ix ,
& l’empereur prenant le pape par la main droite
le mena jufques dans le choeur de l’églife , puis
baiifant la tête il reçut fa bénédiction , & fe retira
au palais du duc.
Le foir il envoïa prier le papç de célébrer la
jmçiTeàS. Marc le lendemain fête de S,. Jacques ,
parce qu’il defiroit l’entendre ; le pape l’accorda ;
§£ çorume il alloità l’autel, l’empereur fans man-
L i v r é s o i x a n t e -t r e i z i è m e . 431
teau &£ une verge à la main fit la fonction d’huif- -
fie r , marchant devant lui pour chaffer les laïques ^ N> II7 7 *
du choeur & lui faire place. Il demeura dans le
choeur avec les prélats & le clergé Allemand , qui
cejour-là chanta l’office-, après l’évangile le pape
monta au jubé pour prêcher le peuple ; & comme
il parloit Latin , il chargea le patriarche d’A -
quilée d’ expliquer fon fermon en Allemand,pour
iarisfaire à la dévotion de l’empereur. Après le fer- cf,r- •
mon & le Credo , l’empereur avec les feigneurs de Lab.p. î4,
fa cour , vint baifer les pieds du pape & faire fon
offrande, il communia de fa main ; & après la
mefle il le prit par la main & le mena- jufques à là
porte de l’églife : quand il monta à ch e v a l, il lui
tint letrier & le conduifit par la bride quelque
temps, jufques à ce que le pape lui donna fa bénédiction
& lui permit de fe retirer, le difpenfant du
refte du chemin jufques à la mer, qui étoit trop
long.. Le lendemain vers l ’heure de none l’empereur
rendit au pape une vifite d’amitié , & vint
avec peu de fuite jufques à fa chambre , où il s’en-
tretenoit familièrement avec les cardinaux. La
converfation entre le pape & l’empereur fut affec-
tueufe & gaïe , mêlée de quelques railleries fans
préjudüte de leur dignité.
Six jours après, c’eft-à-dire , le lundi premier v.
jour d’A o û t , la paix fut jurée folemnellement.
L’erripereur accompagné des prélats & des fei-
gneur de fa cour, vint au palais patriarcal, où lo,
geoit le papejla féance fe tint dans la falle quiétoit
longue & fpacieufe ,1e pape s’aifu au fond dans un