
1 3 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t t q j j e : A n . u 6 6 . pen(Jant ¡e roi d’Angleterre envoïa des lettres mer/
s. n. c. 17. naçantes au. chapitre général de Cîteaux, le plaignant
qu’ils avoient reçu Thomas ion ennemi dans
une de leurs maifons ; âc ieur défendant de le garder
davantage, s’ils ne voulaient perdre tout ce
qu’ils poifedoient dans fes terres, tant deçà que
de-là la mer. Après donc que le chapitre fut fini,,
l’ab.bé de Cîtaux lui m êm e, vint à Pontigni accompagné
de l’évêque de Parme autrefois moine
de l’ordre, & de quelques abbez. Us déclarèrent à
l’archevêque de la part du chapitre , ¡’ordre qu’ils;
avoient reçu du roi ; ôc ajoutèrent; Seigneur , le
chapitre ne vous chaffe pas pour cela, mais il vous
prie de confiderer avec vôtre fage confeil ce que
vous avez à faire. Le prélat ayant délibéré avec les
liens répondit auifi-tôt : Je ferois bien fâché que
l’ordre qui m’a reçu avec tant de charité, fouft'rit
quelque préjudice à mon occafion : c’eflpourquoi'
quelque part que j’aille, je m’éloignerai promptement
de vos maifons. Mais j’efpere que celui qui
nourrit les oifeaux du ciel,aura foin de moi ôc descompagnons
de mon exil.
Il envoïa donner part de cette nouvelle au roi
de France Loüis, qui en fut fort étonné , & la com-
munica à ceux qui fe trouvèrent auprès de lui
puis il s’écria. O religion, religion où es-tuT
Voilà ces gens que nous croïons morts au monde
qui craignent les menaces du monde; &qui pouc
des biens temporels, qu’ils prétendent avoir mé-
prifez pour Dieu , abandonnent l’oeuvre de Dieu,,
en chaffant ceux qui font bannis pour fa caufe.
L i v r e S o i x a n t ë - o n z i î ’ m e .’ z j j ------------------------
Puis fe tournant vers celui que le prélat avoir en-
voie, il dit: Salüez vôtre maître de ma part, ôc
lui dites hardiment, que quand il feroitabandonné
de tout le monde, ôc de ceux qui paroilTent
morts au monde, je ne l’abandonnerai p o in t;&
quoique faiTe contre lui le roi d ’Angleterre mon
vaiTal, je le protégerai toujours, parce qu’il fouf-
fre pour lajuftiee. Q u ’il me faflfe donc favoir en
quel lieu de mes états il aime mieux fe retirer, & il
le trouvera prêt.
Le S. prélat choific la ville de Sens, tant pour fa
fituation commode, que pour la douceur des habi-
tans & leur honnêteté envers les étrangers ; & le
roi envoïa au-devant de lui un feigneur qualifié ,
avec trois cens hommes pour l’amener de Pontigni. aerVMf- t-
lien fortitversla S. Martinl’an i l 66. après y avoir WtM,, Ig-
demeuré deux ans ; ôc comme il prenoic congé de
la communauté touchée jufques aux larmes, il
commença toutd’uneoupàenrepandre abondamment.
Surquoi l’abbé qui l’accompagnoit,lui dit:
J ’admire cette foibleife dans un homme fi ferme ,
vous manque-t-il quelquechofe pour votre depen-
fs^n o u s y fupplerons félon nôtre pouvoir.
Ce n’eft pas cela , répondit-il : mais Dieu m’a
fait connoître cette nuit la fin de ma vie : j e mourrai
parTépée. Quoi répondit l’abbé, vous ferez
m a rty r, vous nourriifant délicatement comme
vous faites ? Et le preifa de lui raconter fa révélation.
Je ne vous la dirai p o in t, dit le prélat,:fi
vous ne me promettez de n’en point parler de mon
vivan t, ôi l’abbél’àiantpropiis,il continua : Il m’a