
59<î H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
Jerufalem en habit de religieux 5 au retour étant
encore en Syrie , il logea chez une veuve qui le
voulut corrompre ; mais s’étant apperçû de fon mauvais
deiTein, il laiiTa le lit quelle lui avoit préparé
, & aïant paffé la nuit en priere s’enfuit dès qu’il
fut jour : auiïi eut-il toute fa vie un grand zelc
pour la pureté. Etant revenu en Calabre il entra
dans le monaftere de Sambucine de l’ordre de C î-
teaux, fans y faire profeffion, & la fit enfuite dans
celui de Curace du même ordre. Il en fut élû abbé,
& aïant inutilement voulu fe cacher, il accepta
cette charge par les inftances de l’archevêque
de Cofence, de l’abbé de Sambucine & desperfon-
nés les plus eonfiderabîes du païs, Mais comme il
avoit un attrait tout fingulier pour s’appliquer a la
méditation & à l’explication des faintes écritures -, il
alla trouver le pape Lucius III. la fécondé annee
de fon pontifitat qui étoit l’an u8z. 8c en obtint la
permifïion d’expliquer l’écriture fainte, & quelque
temps après lui prefenta fon ouvrage de la concorde
de l’ancien & du nouveau teftament. Il travailla
auiïi dès-lors à l’explication de l’Apoèalypfe , &
continua fes ouvrages par l’autorité du pape. Enfin
Clement III. l’exhorta à les achever, & à venir en-
fuite les lui apporter & lesfoumettre à l’examen du
faint fîege. C ’eft ce qui paroît par la lettre dupape
du dix-huitiéme de Juin, la première année de fon
pontificat, qui eft l’an 1188. Il déchargea même
Joachim de l’abbaïe de Curace , & lui permit de
feretireroù il voudroit pour vaquer plus librement
| }a pompofition de fes livres.
L i v r e s o i x a n t e -q u a t o r z i e’m e . 597
Alors l’abbé Joachim fe retira avec Ramier fon
dïfciple dans les montagnes de Calabre, aux environs
de Cofence en un lieu nommé Flore, où
d’abord il fe bâtit un oratoire 8c une cellule -, puis
le nombre de fes difciples étant augmenté, il y
fonda vers l’an 1189. un nouveau monaftere, donc
l ’obfervance étoit plus étroite que celle de Cîteaux,-
& qui devint chef d’une congrégation particulière.
C e monaftere fut d’abord protégé par le roi Guillaume
le Bon ; mais enfuite l’abbé Joachim fut inquiété
par Tancrede, dont les officiers prétendoienc
que le lieu appartenoit au domaine. Tancrede lui
offrit le monaftere de Matine près la ville épifco-
pale de S. Marc; mais Joachim le refufa, ne voulant
pas profiter du travail des autres ; & le roi
défendit de l’inquiéter davantage.
Luc depuis archevêque de Cofence, qui avoit
connu particulièrement l’abbé Joachim en a rendu
ce témoignage : La fécondé année du pontificat de
Lucius, c’eft-à-dire, l’a n n S j. je vis la première fois
à Cafemaire un homme nommé Joachim alors abbé
de Curace. Il étoit moine de la maifon de Sambucine
fille de Cafemaire ; c’eft pourquoi il y étoit
aimé & honoré, mais encore plus à caufe du don
de fageife & d’intelligence qu’il avoit reçu de Dieu.
Alors il commença de découvrir au pape, & à fon
confiftoire la connoiffance qu’il avoit des écritu-
res& la concorde des deux teftamens ; il en obtint
la permiffion d’écrire, & commença à le faire. Or je
m’étonnois de voit qu’un homme d’un fi grand nom
& fi puiffant en parole, portoit de vieux habits très-
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c . 6.
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I t a l . S a c . ta . f .
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