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— s forçons d’ici. Ainfi mourut Thomas archevêque
A n . 1170. J e C antorberi ,dans la cinquante-troifiéme année
IIP de fon âge, le mardi vingt-neuvième Décembre
1170. fur les cinq heures du foir. Il reçut tous ces
coups fans parler, Si fans faire aucun mouvement
des pieds ni des mains.
Pendant qu’on le maifacroit dans l’églife, d’autres
pilloient fon palais. Ils rom pirent les portes
Si les ferrures, enleverent fes chevaux , battirent
fes domeftiques , ouvrirent fes coffres, partagèrent
entre eux l’argent, les habits Si les autres meubles.
Ils emportèrent même les titres de l’églife de C anto
rb eri, Si les donnèrent à Renoul de Broc pour
les porter au roi en N orm andie, afin qu’il pût fup-
primerceux qu’il trouveroit contraires à fes prétentions.
'U k A la nouvelle de ce m eurtre, toute la ville de
Cantorberi fut confternée ; mais les riches faifis
de crainte demeurèrent dans leurs maifons ; il n’y
eut que les pauvres qui accoururent auffi-tôt à
l’églife pleurer leur pere. Ils lui baifoient les mains
& les pieds, ils ramaffoient fon fang dont ils fe frot-
toient les yeux, Si y trempoient des morceaux de
leurs habits. Ce qui en demeura fur le p av é, fut
recüeilli ioigneufem ent, Si mis dans un vafe très-
net pour le garder dans l’églife. Les moines mirent
le corps fur un brancard devant l’autel , 8c
pafferent la nuit auprès en larmes Si en prières.
«.h.. Mais le lendemain matin on leur vint dire qu’il
y avoir hors de la ville une grande troupe de gens
arm ez, qui vouloient enlever le corps dufaint pre-
L i v r e s o i x a n t e -d o u z i e ’m s . jjj
!at pour le traîner par les rues à la queue des che- ~
Vaux , le pendre au gibet, ou le mettre en pièces 6c 11
le jetter en quelque bourbier. Les moines allar-
inez de ce b ru it, réfolurent de l’enterrer promptem
ent. Ils fermèrent les portes de l’églife, & portèrent
le corps dans la chapelle foûterraine, où
Tarant dépouillé ils trouvèrent que fous fon habit
monaftique il portoit un rude cilice -, & ce qui
éto it fans exemple,des fémoraux de même étoffe.
C e fpedtacle attira de nouveau des torrens de larmes
; car on avoit ignoré jufques-là qu’il pratiquât
■cette aufterité. O n le revêtit par-deffus de fes habits
pontificaux , on le mit dans un tombeau de
marbre tout neuf qui fe trouva dans cette chapelle
, Si on en ferma les portes foigneufement.
L ’églife demeura interdite pendant près d’une année
: on couvrit les croix Si on dépoüilla les autels
comme au Vendredi fam t, Si les moines reciterent
l’office dans leur chapitre fans chanter.
Le roi d’Angleterre aïant appris la m ort de Tho- xxxirr.
mas , envoïa peu de jours après de fes clercs , qui d'A*kterêc.ur°
étant arrivez à C antorberi, affemblercnt les moines cG’Ji“ foli mHrt'
de la cathédrale, Si leur dirent : Le malheur qui eft
arrivé chez vous, mes freres , a tellement affligé
le ro i, que pendant trois jours il s’eft abftcnu d’entrer
dans l’églife , Si n’a pris autre nourriture que
du lait d’amendes. Il n’a point reçu de confola-
tion Si n’a point paru en public , fçaehant le tort
que fait à fa réputation cette cruelle aétion des
iiens -, Si qu’on ne fe perfuadera pas aifément qu’il
n'aütpointdefîréla m ort d’un hom m e, dont il s’eft
Y y ij