de la nation fur laquelle il doit regner, afin qu un joitr
il puiffe la gouverner fuivant fon génie, & en faire
le cas qu’elle mérite : f i, par exemple, il eft deftiné à
regner fur les François, qu’on ne manque pas de lui
vanter leur induftrie, leur aftivite dans le travail,
leur attachement inviolable pour leurs rois, & cette
ame noble & fiere qui répugne à la violence, mais
qui fait tout pour l’honneur.
Que dès fes premières années on le rende capable
d’application 8c de travail. L ’ignorance ô c l’inapph-
cation des princes eft la fource la plus ordinaire des
maux qui defolent leurs états. Dans leur enfance on
leur donne des maîtres fans nombre dont*aucun ne
fait fon devoir : on perd un tems précieux a leur en-
feigner mille chofes inutiles qu’ils n’apprennent
point : tout le néceffaire efi négligé. Leur grande étude
8c peut-être l’unique qui leur convienne, eft celle
qui peut les conduire à la fcience des hommes 8c du
gouvernement ; ce n’eft que dans l’Hiftoire & dans
la pratique des affaires, qu’ils peuvent la puifer. L’éducation
de l’empereur Charles-Quint eft à cet egard
le meilleur modèle qu’on puiffe propofer.
L’étude de l’Hiftoire parut fi importante à Chie-
vres fon gouverneur, qu’il ne s’en rapporta qu’à foi-
même pour la lui enfeigner ; il feignit de l’étudier
avec lui. Il commença par lui donner la connoiffan-
ce de l’Hiftoire en général ; enfuite il paffa à celle
des peuples de l’Europe avec lefquels Charles devoit
avoir un jour des affaires à démêler : il s’attacha fur-
tout à l’hiftoire d’Efpagne 8c à celle de France, dans
laquelle on comprenoit alors l’hiftoire des Pays-Bas;
il lui faifoit lire chaque auteur dans fa langue & dans
fon ftyle ; perfuadé que pour un prince il n’y a rien
d’inutile dans l’Hiftoire, 8c que les faits qui ne fervent
pas dans la vue qu’on a en les lifant, ferviront
tôt ou tard dans les vûes qu’on aura.
Lorfqu’il lui eut donné par l’Hiftoire les connoif-
fances générales dont il avoit befoin, il l’inftruifit
en particulier de fes véritables intérêts par rapport
à toutes les puiffances de l’Europe : de-là il le fit paf-
fer à la pratique , convaincu que fans elle la fpécu-
lation eft peu de chofe. Il étoit, comme on l’a d it ,
gouverneur des Pays-Bas, 8c c’étoit dans les Pays-
Bas qu’il élevoit Charles. Dans un âge où l’on ne
parle aux enfans que de jeux 8c d’amufement, il voulut
non-feulement que le jeune prince entrât dans fon
confeil, mais qu’il y fut autant 8c plus affidu qu’aucun
des confeillers d’état ; il le chargea d’examiner
& de rapporter lui-même à ce confeil toutes les requêtes
d’importance qui lui étoient adreffées des di-
verfes provinces ; & de peur qu’il ne fe difpenfât d’y
apporter l’attention 8c l’exaûitude néceffaires, s’il
lui étoit permis de fe ranger de l’avis des autres confeillers,
fon gouverneur l’obligea toujours à parler le
premier.
Arrivoit-il quelque dépêche importante des pays
etrangers? Chievres lui faifoit tout quitter pour
la lire, jufque-là que s’il dormoit, & qu’elle demandât
une prompte expédition, il l’éveilloit 8c l’obli-
-geoit à l’examiner devant lui. Si le jeune prince fe
trompoit dans la maniéré dont il prenoit l’affaire, ou
dans le jugement qu’il en portoit, il étoit repris incontinent
par fon gouverneur : s’il trouvoit d’abord le
noeud de la difficulté 8c l’expédient propre pour l’éviter
, cela ne fuffifoit pas. Il falloir encore qu’il appuyât
ce qu’il avoit avancé par de bonnes raifons,
de qu’il répondît pertinemment aux objeftions que
Chievres ne manquoit pas de lui faire.
Lorfqu’il furvenoit une négociation de longue haleine
, 8c qu’un prince étranger envoyoit fon ambaf-
fadeur dans les Pays-Bas, la fatigue de Charles redou-
bloit;fon gouverneur ne donnoit audience qu’en fa
préfence, ne travailloit qu’avec lui, n’expédioit que
*par lui. Si ramb^ffadeiu: préfontoit fes propofitfons
par écrit , Charles étoit chargé d’en informer fori
confeil, 8c de rapporter ce qu’il y avoit pour ou contre
, afin que ceux qui opineroient après lui puffent
parler avec une entière connoiffance de caufe. Si
l’ambaffadeur fe contentoit de s’expliquer de vive
v o ix , & que l’affaire dont il s’agiffoit fût trop fecrete
pour être confiée au papier, il falloit que Charles retînt
précifément 8c diftin&ement ce qu’il entendoit ;
qu’il ne lui en échapât point la moindre circonftan-
ce : fans quoi le défaut de fa mémoire eût été releve
en plein confeil, 8c fa négligence exagérée dans le
lieu où il avoit plus à coeur d’acquérir de l’eftime :
telle étoit la vie de Charles avant même qu’il eût quatorze
ans.
Hangeft de Genlis, ambaffadeur de France dans,
les Pays-Bas, paroiffant appréhender que l’excès de
travail 8c d’application n’akérât le tempérament
8c l’efprit du jeune prince, Chievres lui répondit
qu’il avoit eu la même crainte ; mais qu’après y avoir
réfléchi, il étoit perfuadé que le premier de fes devoirs
confiftoit à mettre de bonne heure fon éleve
en état de n’avoir point de tuteur ; & qu’il lui en fau-
droit toute fa v ie , s’il ne l’accoûtumoit de jeuneffe
à prendre une connoiffance exaéle de fes affaires.
A r t ic le de M. L E F E B V R E .
Gouverneur , pour dire timonier, (Mar.) celui
qui tient la barre du gouvernail, pour le diriger fui»
vant la route 8c l’air de vent qu’on veut faire. Le
mot de gouverneur n’eft guere d’ufa'ge. Foye^ Tl-,
MONIER. (Z )
Gouverneur, (Hijl. mod.) fe prend aufli quelquefois
pour un préfident ou furintendant, comme
eft le gouverneur de la banque d’Angleterre, le gouverneur
8c les direûeurs de la compagnie du fud, le
gouverneur d’un hôpital, &c. Fyye^ Banque , COMPAGNIE
, HÔPITAL. Chambers.
Gouverneur, terme de Papeterie, c’eft le nom
que l’on donne à un ouvrier qui eft chargé du foin
de faire pourrir le chiffon, de le couper, de le remettre
dans les piles, de l’en retirer quand il eft af-
fez piloné, Sc enfin de conduire tout ce qui concerne
l’aétion du moulin.
Gouverneur, ( Salines. ) c’eft dans les Salines
de Lorraine, le premier des quatre juges qui forment
la jurifdiâion de la faline. Les fondions de cet
officier font de veiller à la confervation des droits
du roi, à la bonne formation des fels, de conftater l’état
des bâtimens 8c les variations de la fource falée.
GOYANE , (Géog.) Foye.i Gu ian e.
G O Y A V E , 1. f. fruit du goyavier. Foye^ ci-aprh
Goyavier.
GOYA VIER, f. m. (B o t. exotiq. ) arbre étranger
d’Amérique & des Indes orientales. Quelques - uns
l’appellent poirier des Indes ; en anglois the guava.
Nos voyageurs écrivent auffi gajavier, goujavier ,
guajavier ; mais c’eft le mêfne arbre.
Les bienfaits de la nature dans la multiplicatioii
des plantes nous deviendroient quelquefois incommodes
8c nuifibles, fi nous n’en arrêtions le cours.
Il y a un excellent fruit fi commun dans toute l’Amérique
, qu’on en trouve fouvent où on ne vou-
droit point en avo ir, 8c du-moins plus qu’on ne
voudroit ; parce que l’arbre qui le porte, croît facilement
par - fout où fes graines tombent. Ce fruit
en renferme quantité, qui font blanches ou rougeâtres,
inégales, raboteufes, de la groffeur des graines
de navet, fi dures qu’elles ne le digèrent jamais.
Les hommes 8c les animaux les rendent comme il les
ont prifes, fans qu’elles perdent rien de leur vertu
végétative : il arrive de-là que les animaux qui ont
mangé de ces graines, les reftituent avec leurs ex-
cremens dans les favalnnes, c’eft-à-dire dans les prairies,
où ils paiffent toute l’année. Bien-tôt ces graines
prennent racine, leYCnt. 8c prçduifent des arbres
• qui
qui font à charge dans une infinité de lieux, & en
particulier dans les favannes qifils c o u y « |p ,en -
ïierement, fi on n’avoit grand foin de les arracher.
Le fruit qui porte ces graines s’appelle la goyave.
Donnons d’abord les noms , les caraèteres 8c la description
de l’arbre qui produit ce fruit, car nous le
connoiflbns parfaitement.
C ’eft le guajava, Cluf. hift. i. Guayava indica ,
jruclu ma h fa d e , J. B. Pomifera indica, maliformis ,
guayava dicta , Raii, hift. Guajabo pomifera indica ,
C . B. p. 437. Xalxochitl , Jeu pomum arenofeum ,
Hernand , 84. Pela, Hort. Malab. 3 .3 1 .
L’extrémité du pédicule paffe dans l’ovaire, qui
eft de figure ovale , couronné & découpé en cinq
parties, comme le calice. Sa fleur eft en rofe à cinq
pétales & croît fur l’ovairé au - dedans de la cgfcr ;
rohiie ; elle eft muni* d’un grand nombre d’etami.; >
nés. L’ovaire a un long tuyau , & fe change en un
fruit charnu rempli de pluiièurs petites femenees.,
11 y a plulieurs efpeces de goyavier , mais nous ne
connoiflbns dans nos jardins que les deux fuivans.
1°. Guajava, alba , dulcis , \ i L 1 e goyavier blariâU
2.°. Guajava, rubra , aeida » f u i ï u rôtundwri, H.
L. le goyavier rouge.
L e goyavier en Amérique, fuivant le P. Plumier,
eft d’environ vingt pies, & gros à proportion ; fon
tronC feft ®Bit, rameux ; ion écorce eft unie, de
couleur verte , rougeâtre, d’un goût auftere ; les
feuilles font longues de trois doigts, 8c larges d un
doigt 8c demi, charnues, pointues, un peu crepees,
veineufes, de couleur verte, brunes, iuifantes, attachées
à des queues courtes 8c groffes.
Ses fleurs font à-peu-près aufli grandes que celles
du coignaffier ; elles font à cinq pétales, prelque arrondies
, difpofées en rofe, oc accompagnées d’une
belle touffe d’étamines blanches, qui occupent tout
le dedans ; elles naiffent fur l’ovaire au-dedans de la
couronne. . . ,
Leur calice eft découpé en cinq pointes, oc devient
enfuite un fruit long ou o v a l, couronné com-
fne une nefle ; il eft à-peu-près gros comme une pomme
de rainette, couvert d’une pellicule mince, unie ;
toute fa chair eft remplie de petites femenees gra-
veleufes & à pointes aiguës ; il eft verd au commencement
6c d’un goût acerbe ; étant mur il devient
jaunâtre , par-deffus blanchâtre, ou rougeâtre
en-dedans. , , r ,
La racine de l’arbre eft longue de plufieurs aulnes
, rouffe en - dehors, blanche en - dedans, pleine
<le fu c , d’un goût doux.
L’écorce de cet arbre eft fort mince 6c fort adhérente
au bois, pendant que l’arbre eft fur pie ; mais
elle fe détache aifément, fe fend 8c fe roule quand
il eft abattu. Le bois eft grisâtre ; fes fibres font longues,
fines, preffées, melées 8c flexibles, ce qui les
rend difficiles à couper ; il eft très-bon à brûler, 8c on
en fait en Amérique d’excellent charbon pour les
forges. f r i
Ces arbres fe trouvent plantes par-tout dans les
îles Caraïbes pour l’utilité, quoique la maniéré ordinaire
de ces plantations foit d’en manger le fruit ;
les femenees paffant toutes entières dans le corps,
font rendues avec les excremens ; de forte que partout
où les Negres habitent, on ne manque point de
pepiniere de goyaviers, qui deviennent fouvent tres-
incommodes dans les plantations.
Quelques auteurs difent que la racine de cet arbre
eft aftringente, 8c qu’on en préparé une décoction
, qui eft un excellent remede pour la dyffente-
r ie , lorfqu’il s’agit de refferrer 8c de fortifier. Ils attribuent
auffi aux feuilles des vertus vulnéraires 8c
réfolutives, en les employant dans les bains. Hernandez
ajoûte qu’appliquees en fomentation, elles
guériffent la gale, 8c qu’çn en fait un firop très -effi-
Tomt FU ,
cace contre le flux de ventre. Il prétend encore que
la décoûion de l’écorce du goyavier eft bonne pour
l’enflure des jambes, pour les ulcérés fiftuleux 8c autres
maux : mais les goyaviers que nous cultivons en
Europe n’ont aucune de ces propriétés, 8c il eft vraif-
femblable que ceux de l’Amérique ne les ont pas davantage.
Le témoignage d’Hernandez n’eft pas d’af*
fez grand poids pour mériter créance, 8c les voyageurs
éclairés auxquels on peut fe rapporter, ne confirment
point le témoignage du médecin efpagnol.
Le fruit du goyavier eft regardé dans le pays comme
également fain 8c délicieux, 8c peut palier aveO
raifon, au rapport du chevalier Hans-Sloane, pour
le premier fruit des Indes, quand il eft mûr, bien
choili, 8c qu’il eft venu dans une bonne expofition.
Vers le tems qui approche de fa maturité, c’eft-à-dire
quand il eft encore verd , il eft dur 8c aftringent ;
en mûriffant un peu plus, il acquiert une nature
moyenne ; dans fa pleine maturité, il eft plein de
fuc doux, 8c a le goût Ôc l’odeur de la framboife :
il eft alors relâchant, au lieu qu’il refferroit auparavant.
Les hommes 8c les oifeaux en font égalé-
ment avides.
Les goyaves rouges 8c blanches ont le même degré
de bonté au goût, 8c different feulement en ce
que les unes ont le dedans blanc, 8c les autres l’ont
rouge, ou pour parler plus jufte, de couleur de
chair. Les habitans du pays mangent les goyaves
en plufieurs manières, crues, cuites au four, ou devant
le feu 8c en compote. On en fait auffi de la gelée,
des confitures, des candis 8c des pâtes. On les
employé en fanté 8c en maladie. Ce fruit, dit le chevalier
Hans-Sloane,a le feul inconvénient que quand
il eft bien mûr, il fe corrompt très-vîte ; quand il l’eft
moins, il eft aftringent, refferre prodigieufement, fi
l’on en mange beaucoup ; 8c fes graines étant parvenues
dans les gros boyaux, en particulier dans le rectum
, y occaiionnent avec les excrémens endurcis
par leurs pointes aiguës 8c irrégulières, une grande
douleur , 8c très - fouvent un flux de fang par le déchirement
qu’elles produifent.
On a eu en Europe la curiofité de cultiver les
goyaviers, 8c on eft parvenu à en avoir du fruit,
quoique ces arbres ne croiffent guere parmi nous
qü’à la hauteur de fix ou fept piés. Leur culture eft
très-difficile : on les multiplie en femant leurs graines
dans un lit chaud, 8c quand elles ont monté, en les
tranfplantant dans un petit pot rempli de bonne terre
, qu’on met dans un lit de tan, obfervant de leur
donner de l ’air à proportion de la chaleur qui régné;
enfuite on les met à l’étroit pour mieux fortifier leur
tige dans de plus grands pots, qu’on porte dans les
ferres à la fin d’Aout, dans un endroit où la chaleur
eft tempérée : on les arrofe fréquemment pendant
l’hyver avec de l’eau qu’on aura tenue au-moins 24
heures dans la ferre pour en ôter le froid. Il faut fouvent
nettoyer les feuilles avec une guenille de laine,
pour en ôter la pouffiere, les ordures 8c la vermine,
qui attaque ces fortes de plantes ; en é té , il faut leur
donner de l’air en ouvrant les fenêtres de la ferre qui
les regarde ; mais il faut éviter de les fortir, excepté
pour quelques heures, par .une pluie chaude, ou
pour les nettoyer ; autrement ils ne produiront ni
fleur ni fruit.
Les voyageurs françois, comme le P. du Tertre
Lonvilliers, le P. L abat, les auteurs des lettres édifiantes
, 8c Moore parmi les Anglois, parlent beaucoup
du goyavier & de fon fruit : mais outre qu’ils ne
font point d’accord dans leurs relations, ils fe font
attachés aux détails les moins intéreffans. (D . ƒ .)
GOYL AND, ( le) Géog. petit pays de la province
de Hollande, entre l’Amflel-land, la province
d’Utrecht 8c le Zuyderfée. Naerden en eft le lieu
principal, où Kn yf étoit né, Op peut confulter foi»
I I i i l