
»> je viens de les décrire. C ’eft ainfi qu’un foigneux
„ examen des noms impofés aux chofes, en nous ap-
„ prenant la caufe de leur impofition, nous fait re-
» monter aux chofes mêmes ; nous donne lieu de pe-
» nétrer leurs caufes 8c leurs effets ; nous remet fur
» les voies des premiers principes des Arts 8c de leurs
» progrès fucceffifs ; nous fait fuivre les opérations
» de l’inventeur à la trace des termes appellatifs,
» qu’il a mis en ufage.
» Au refte, notre méthode d’ufage aôuel inven-
» tée par Guy*d’Arezzo , de tracer la Mufique fur le
» papier par des notes noires difpofees fur les lignes
» 8c les entre-lignes de cinq raies , quoique tres-in-
» génieufe, n’eft pas fort bonne : elle eft compliquée
» de figures embarraffantes & nombreufes. On fent
» affez que, foit que l’on fe fervît de raies, de notes,
» de lettres, de chiffres, ou des fept couleurs, il fe-
$> roit facile d’inventer dix méthodes différentes d’é-
» crire les chants, plus fimples, plus courtes, 8c plus
» commodes, fur-tout pour la mufique vocale : car
» l ’inflrumentale plus chargée de chants, préfenteroit
» peut-être un peu plus de difficulté. L’ancienne tabla-
» ture greque par lettres étoit, p. ex. meilleure que la
» nôtre. Mais à quoi ferviroit d’introduire une nou-
» velle méthode plus parfaite, aujourd’hui que nous
» avons tant d’ouvrages célébrés imprimés félon l’an-
» cienne ? On ne fupprimera pas tout ce que nous
» avons de Mufique gravée, imprimée, manufcrite,
» pour le publier de nouveau fur une nouvelle tabla-
» ture. Ainfi la nouvelle introdu&ion auroit le plus
» grand inconvénient qu’elle puiffe avoir ; c’eft celui
» de ne pas abolir l’ancienne, & de ne procurer aux
» hommes qu’un travail de plus. Il faudroit que ceux
» qui favent lire notre Mufique apprîffent à lire une
» fécondé fois ; & que ceux à qui l’on enfeigneroit à
» lire félon la nouvelle réforme, apprîffent auffi l’an-
» cienne maniéré, pour pouvoir jouir des ouvrages
» écrits avec nos figures aâuelles. Ceci foit dit en
» paffant, pour tous les projets de cette efpece ten-
» dant à introduire une réforme fur des chofes où il
» n’eft pas poffible de fupprimer les grands établiffe-
» mens déjà faits fur l’ancien pié ».
Nous avons donné au mot É c h elle , la comparai-
fon de la gamme ou échelle diatonique des Grecs avec
notre giz/n/nemoderne.Nous avons fait voir comment
ces gammes fe formoiént par le moyen des fons f a ,
ut , fo l , 8c de leurs harmoniques : ces trois fons font
le fondement des deux gammes, par la raifon fuivan-
te. Le fon ut fait réfonner fa douzième au-deffusfol, &
fait frémir fa douzième au-deffousfa. Voye£ Fondamental.
Or ail lieu des douzièmes, on peut prendre
ici les quintes, qui en font les oélaves ou répliques.
Voye^ Octave & Réplique. Ainfi on peut aller
indifféremment du fon ut à fes deux quint es fo l 8c fa ,
quoiqu’avec un peu plus de prédilection pour fol, &
ré venir de même de fa 8c de fo l à ut. Ces trois fons
forment la baffe fondamentale la plus ftmple du mode
d'ut (Voye{ Mode) ; & ces trois fons avec leurs
harmoniques, c’eft-à-dire leurs tierces majeures 8c
leurs quintes (Voye^ Fondamental) , compofent
toute la gamme d'ut.
Le fon fondamental ut renfermant en lui-même fa
tierce majeure 8c fa quinte ( J'oyeçFoNDAMENTAL),
il s’enfuit que le chant le plus naturel en partant d'ut,
eft u t, mi, fo l, ut: mais le chant diatonique.le plus
naturel,; c’eft-à-dire celui qui procédé par les moindres
degrés naturels à 1a-voix, eft celui de la gamme,
foit des anciens, foit des modernes.
Nous avons vu au mot Échelle, que pour former
la baffe fondamentale de- notre gamme moderne, il
faut ou répéter deux fois le {on fo l dans cette gamme;
ou ,ce qui revient au même, faire porter à ce feul fon
deux notes de baffe fondamentale, favoir ut 8c fo l ;
ou en faifant porter à chaque-nQte d é jà gamme une
feule note de baffe, introduire dans la baffe des accords
de feptieme, favoir ,fol>Jî, r é , f z , 6c ré, fa ,
la, ut; 8c dans tous les cas, introduire dans la balle
la note ré, 8c par conféquent, le mode de fol. Voye£
M o d e . C ’eft cette introduction du mode de fo l dans
la baffe fondamentale, qui fait que les trois tons fa±
fo l, la ,J i, peuvent fe fuccéder immédiatement dans
no tre gamme ; ce qui n’a pas lieu dans celle des Grecs *
parce que fa baffe fondamentale ne porte & ne peut
porter que les fons fa , u t, fol. De plus on ne peut
entonner facilement ces trois tons qu’à la faveur
d’un repos exprimé ou fous-entendu après le fon fa ;
enforte que ces trois tons f a , f o l , la, f i , font cenfés
appartenir à deux tétracordes différens. La difficulté
d’entonner naturellement trois tons de fuite , vient
donc de ce qu’on ne le peut faire fans changer de
mode.
Pour former la gamme du mode mineur, il faut dans
la gamme des Grecs, fubftituer des tierces mineures
au lieu des tierces majeures que portent les fons de
la bafl’e fondamentale. Prenons pour exemple cette
baffe fondamentale ré, la , mi, du mode mineur de
la ; il faudra faire porter le f a 8c Vue Miré 8c au la *
au lieu du fa dièfe 8c de Vue d ièfe, qu’ils porteraient
fi le mode étoit majeur. A l’égard de la dominante
mi (Voyei D o m i n a n t e ) , elle portera toûjours la
tierce majeure fol d ièfe, lorfque ce fo l montera au
la: on en dira la raifon, d’après M. Rameau, au mot
N o t e s e n s i b l e ;& on peut,en attendant, la voir
dans nos élémens de Mufique , art. y y. Ainfi la gamme
des Grecs, dans le mode mineur de la , eft
fo l % , la, f i , u t, ré, mi ,fa .
Mais dans le même mode mineur de la , la gamme
des modernes fera
la , f i ut, ré, mi, fa % , f o l l a ,
dans laquelle le mi porte ou eft cenfé porter deux
notes de baffe fondamentale , l a , mi, 8c dans laquelle
le fa eft dièfe, parce qu’il eft quinte du f i de
la baffe ; la baffe fondamentale de cette gamme étant
la , mi, la, ré, la, m i,fi, mi, la.
Ainfi la gamme des modernes dans le mode mineur ;
différé encore plus de celle des Grecs , que dans le
mode majeur, puifqu’il fe trouve dans celle-là un
fa % , qui n’eft point & ne doit point être dans celle
ci.
La gamme du mode majeur en defcendant, eft la
même qu’en montant ; 8c nous avons vu , au mot
É c h e l l e , quelle eft alors la baffe fondamentale de
cette gamme : on peut encore lui donner celle-ci :
ut, fo l, ré, fol, ut , fa ;u t ; fo l ,u t ,
qui eft la même (renverfée) que la baffe fondamen-'
taie de la gamme en montant, & dans laquelle le fon
fo l de la gamme porte â-la-fois les deux Ions fo l ,u e9
de la baffe. Au moyen de cette baffe, qui eft la même,
foit que la gamme monte, foit qu’elle defcende,
on peut expliquer un fait qui feroit peut-être difficile
à expliquer autrement, fçavoir pourquoi la gamme
s’entonne auffi naturellement en defcendant qu’en
montant.
La difficulté eft plus grande pour la gamme du mo*
de mineur ; car on fait que cette gamme n’eft pas la
même en defcendant qu’en montant: la gamme de la
mineur , par exemple, eft en montant, comme on
l’a déjà v u ,
la , f i , u t, ré, m i , f a % , f o l l a ;
8c cette gamme en defcendant, e ft ,
la, fo l, fa , mi , ré', u t; fi, la ,
qui n’a plus ni fo l ni fa dièfe. La baffe fondamentale,
de cette gamme eft fort difficile à trouver: car le fo l
ne peut porter que mi , 8c le fa que ré : or deux fons
mi, ré, immédiatement confécutifs, font exclus par
les réglés delà baffe fondamentale. Voy. B a s s e f o n *
d a m e n t a l e , H a r m o n i e , 6* M o d e . M . Rameau
détermine cette baffe, en retanchant de l’échelle
le fon fo l a en ççtte forte :
la ,fa ;m i, ré, u t , f i , la ,
dont la baffe fondamentale eft
la ,r é , la , ré, la,m i , la.
C ’eft ce qu’on peut dire de plus plaufible là-deifus;
8c c’eft auffi ce que nous avons dit, d’après M. Rameau,
dans nos élémens de Mufique : mais on doit
avoiier que cette folütion ne fatisfaitpas pleinement,
puifqu’il faut, ou ne point faire porter d’harmonie à
fo l , b ü anéantir l’ordre diatonique de la gamme ;
deux partis dont chacun a fes incohvéniens. Cet
aveu donnera lieu à une autre obfervation que nous
avons quelque droit de faire, ayant eu l’honneur
d’être du nombre des juges de M. Rameau dansç l’académie
des Sciences, 8t ënfuite fes interprètes auprès
du public ; c’eft que cette compagnie n’a jamais
prétendu approuver le fyftème de Mufique de M.
Rameau , comme renfermant une fcience démontrée
* , mais feulement comme un fyftème beaucoup
mieux fondé, plus clair, plus fimple, mieux lié,
8c plus étendu qu’aucun de ceux qui avoient précédé
; mérite d’autant plus grand, qu’il eft le feul auquel
on puiffe prétendre dans cette matière , où il ne paraît
pas poffible de s’élever jufqu’à la démonftration.
Tout le fyftème de M. Rameau eft appuyé fur la ré-
fonnance du corps fonore : mais les conféquences
qu’on tire de cette réfonnance n’ont point 8c ne fau-
raient avoir l’évidence des théorèmes d’Euclide ; elles
n’ont pas même toutes un égal degré de force &
de liaifon avec l’expérience fondamentale. Voyeç
H a r m o n ie , N o t e s e n s ib l e , Mode m in e u r ,
S e p t iè m e , &c. Auffi M. Rameau dit-il très-bien au
fujet de la diffonnance, qui eft une branche étendue
de la Mufique : « c’eft juftement parce que la diffon-
» nance n’eft pas naturelle à.l’harmonie , quoique
» l’oreille l’adopte, que pour fatisfaire la raifon fur
» ce point, autant qu'il ejl poffible, on ne fauroit
» trop multiplier les rapports, les analogies , les con-
» venantes, même les métamorphofes, s’il y en a».
D ’où il s’enfuit, qu’il ne range fa théorie muficale
que dans la daffe des probabilités. C ’eft auffi uniquement
comme un fyftème très-fupérieur aux autres,
que nous avons expliqué cette théorie dans un ouvrage
particulier ; très-difpofés en même tems à recevoir
tout ce qui pourra nous venir de bon d’ailleurs.
Voye^ F o n d a m e n t a l .
Sur les différences de la gamme des Grecs dans les
genres diatonique, chromatique, & enharmonique,
yoye^ G e n r e . ( 0 )
* GAMU TO , 1. m. (Commerce.) efpece de chanvre
qu’on tire du coeur de quelques palmiers des Indes;
on en fait des cordages, mais que l’eau détruit
facilement. Les Efpagnols 8c les autres Européens,
excepté les Hollandois, en achètent des infulaires
des Philippines. Les Hollandois les tirent de Men-
danao.
G ANACHE,f. f. ( Maréchallerie. ) On appelle en
général de ce nom l’os qui compofe la mâchoire
poftérieure. Cet os eft partagé en deux branches
dans le poulain. Dans le cheval elles font tellement
unies, qu’il ne refte qu’une legere trace de leur jonction
; trace que l’on obferve à la partie inférieure,
& qui forme la fymphife du menton. L’efpace qu’elles
laiffent entr’elles contient intérieurement un canal
dans lequel la langue eft logée , & extérieurement
un autre canal nommé proprement l'auge.
Celui-ci doit être tel, qu’il puiffe admettre 8c recevoir
une portion de l’encolure, dans le moment
où l’animal eft déterminé à fe placer. S’il n’eft point
affez évidé , ft fupérieurement les deux branches
font trop rapprochées, ft elles ont trop de volume
* M B . La démonfiration du principe de lharmonie, par M. Rameau
, ne portoit point ce titre quand elle a été préfentée à
l’académie, & n a point aufli été annoncée fous ce titre dans
le rapport qui en a été fait.
Tome V II.
8c trop de rondeur aux angles dé la mâchoire, cé
qui rend d’ailleurs la ganache quarrée, 8c la tête difforme
8c pefante ; il eft fort à craindre que l’animal
ne fe ramene point & porte conftamment au vent.
Il importe donc d’examiner attentivement la conformation
de cette (partie, lorfque l’on acheté uri
cheval, 8c de rechercher encore dans le canal extérieur
, fi les glandes maxillaires & fublinguales ne
font point fenfibles au ta û , c’eft-à-dire fi elles font
non-appercevables 8c dans, leur état naturel’. Lorf-
qu’elles fe manifeftent aux doigts, elles font gorgées
d’une lymphe épaiffie ; 8c félon qu’elles font plus ou
moins dures, plus ou moins groffes, plus ou moins
adhérentes ou mobiles, 8c que le cheval eft plus ou
moins â g é , elles .préfagent des maladies plus ou
moins dangereufes 8c plus ou moins funeftes. (e)
G A N C H E , f. m. fHifl. mod.') forte de potence
dfeffée pour fervir de fupplice en Turquie. Le gauche
eft une efpece d’eftrapade dreffée ordinairement
à la porte des villes. Le bourreau éleye les condamnés
par le moyen d’une poulie; & lâchant en-
fuite la corde, il les laiffe tomber fur des crochets
de fer, où ces miférables demeurent accrochés tantôt
par la poitrine, tantôt par les aiffelles, ou par
quelqu’autre partie de leur corps. On les laiffe mourir
en cet état, 8c quelques-uns vivent encore deux
ou trois jours. On rapporte qu’un pacha paffant devant
une de ces potences en Candie, jetta les yeux
fur un de ces malheureux, qui lui dit d’un ton ironique:
Seigneur, puifque tu es'fi charitable, fui?ani
ta loi, fais-moi tirer un coup de moufquet po,urfinit,
cette tragédie. (Z?, ƒ.)
GAND, Gandavüm , (fGéogrf ville capitale de la
Flandre autrichienne, avec un fort château bâti par
Charles-Quint pour tenir- en bride les habitans, 8c
un évêché fuffragant de Malines, érigé par Paul IV*
en 1^59. L’Efcaut, la L y s , la L iev e, & la Moëre ,
coupent cette ville en plusieurs îles. Elle eft fituée
à 9 lieues S. O. d’Anvers, n O. de Malines, 10 N*
O. de Bruxelles, 8 S. E. de Middelbourg.
Cette ville fi fou vent prife, reprife, 8c cédée par
des traités, perd tous les jours de fon luftre & de fa
force. Les Gantois étoient plus libres dans le xv. fie-
cle fous leurs fouverains, que les Anglois même ne
le font aujourd’hui fous leurs rois. Perfonne n’ignore
que le mariage de leur princeffe qu’ils conclurent
avec Maximilien, fut la fource de toutes les guerres
qui ont mis pendant tant d’années la maifon de France
aux mains avec celle d’Autriche.
Charles-Quint , rival de François I. plus puiffant
& plus fortuné, mais moins brave 8c moins aimable,
naquit à Gand le 24 Février 1500. On le vit*’
; dit M. de Voltaire, en Ëfpagne, en Allemagne, en
| Italie, maître de tous ces états fous des titres différens,
toujours en aftion & en négociation, heureux
long-tems en politique 8c en guerre, le feul empereur
puiffant depuis Charlemagne, 8c le premier roî
de toute l’Efpagne depuis la conquête des Maures *
oppofant des barrières à l’empire ottoman, faifant
des rois, & fe dépouillant enfin de toutes les couronnes
dont il étoit chargé, aller mourir en trifte
folitaire, après avoir troublé l’Europe, 8c n’ayant
pas encore 59 ans.
La patrie de Charles-Quint n’a pas été féconde
en gens de lettres célébrés. Je né me rappelle parmi
les littérateurs que Levinius Torrentius : ce favant,
après s’être diftingué par quelques ouvrages en vers
8c en profe, 8c fur-tout par une édition de Suétone
accompagnée de bonnes notes, mourut le 26 A vril 169 5. I ; .
La longitude de Gand, fuivânt Caffini, eft 2.1 A zS*;
30". latit. i / d. 3 '. (D . /.)
GANDERSHËIM, (Céogr.) petite ville d’Allemagne
au cercle de la baffe Saxe, dans le duché de
N n n ij