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FRONT, f. m. (Ânat. & Chir.') le front eft une des
grandes parties de la face, & une de celles qui contribuent
le plus à la-beauté de fa forme, & au plai-
11 r de la confidérer ; frons ubi vivit honor! Un poete
galant du fiecle d’Augufte, difoit, en parlant de celui
de fa mâîtreffe, frons ubi ludit amor !
Chez* les Grecs & les Latins , c’étoit une beaute
d’avoir le frönt petit, & même cette petiteffe paffoit
encore pour une marque d’efprit: Horace en parlant
de fa chère Lycoris, la peint inßgnis tenuifronte ; ce
goût étoit 11 général, & les dames li curieufes de cet
agrément, qu’elles s’appliquoient à cacher une partie
de leur front par des bandelettes, qu Arnobe appelle
nimbos. t
Il femble que nous avons un goût de beaute un peu
plus exaû que les Romains fur cette partie du vifa-
ee. Il faut que le front, félon nous, comme le dit l’auteur
de Y hiß. nat. de L'homme, foit uni, fans plis ni
rides, & d’une jufte proportion ; qu’il ne foit ni trop
rond, ni trop plat, ni trop étroit, ni trop court, &
qu’il foit régulièrement garni de cheveux au-deffus,
& aux côtés. Mais fans nous occuper de ces idées ac-
cefibires, venons aux détails qui intereffent 1 anato-
mifte & le chirurgien; quelque fecs que foient ces
détails, il s’agit de les tracer dans cet article, & d’abandonner
tous les autres.
L’os frontal qui forme ce que nous appelions le
front, eft un des cinq os communs du crâne, dont
nous donnerons la defeription au mot Frontal (V).
Nous nous contenterons de remarquer ici que fa figure
eft fymméirique, & à-peu-près comme une ef-
pece de coquille de mer, qui eft large & prefqim arrondie;
de forte que deux os frontaux d’une même
grandeur, joints enfemble par leurs bords, repréi'en-
tent en quelque maniéré cette forte de coquillage
dans fon entier.
Comme la peau qui couvre le crâne a un peu de
mouvement, principalement dans fa partie anterieure
où ellefe ride fenfiblement dans quelques perfon-
nes, ces mouvemens font executes par laflion de
quatre mufeles; deux nommés frontaux, & deux occipitaux.
Les premiers font attachés par l’extrémité
inférieure de leurs fibres charnues, immédiatement
à la peau & aux apophyfes angulaires de l’os frontal
; leurs fibres s’avancent jufqu’à la partie moyenne
& prefque fupérieure de cet os, où elles fe terminent
à la face externe d’une efpece de coiffe ou
calotte aponévrotique, qui, apres avoir recouvert
le crâne, femble fe continuer autour du cou jufqu’au
haut des épaules ; c’eft dans les mufeles frontaux que
fe diftribue une branche du nerf ophtalmique qui
paffe par le trou fourcilier.
Les mufeles occipitaux attachés par leur extrémité
inférieure immédiatement au-deffus de l’apo-
phyfe tranfverfale de l’occipital, s avancent jufqu-
aux apophyfes maftoïdes, & vont aufli fe terminer
à la calotte aponévrotique. Ces quatre mufeles pa-
roiffènt toûjours agir de concert, les occipitaux n e-
tant que les auxiliaires des frontaux. Telle eft du-
moins l’opinion de la plûpart des anatomiftes, à laquelle
M. Winflow n’a pas donné fon fuffrage.
Quoi qu’il en foit, il éft bon d’avertir les jeunes
chirurgiens de prendre garde, en faifant des incifions
profondes au front, dé couper les mufeles frontaux
tranfveffalëment ; il faut les couper en long, félon,
la direétion de leurs fibres; cependant quand les incifions
fe font feulement à la peau, pour détruire des
finuofités fuperficielles, il vaut mieux fuivre la direction
des rides de la peau que celle des mufeles ;
& l ’on peut en ce cas faire des incifions tranfverfa-
les; mais s’il arrivoit à un chirurgien de couper par
impéritie un mufcle frontal tranlverfalement & totalement,
le fourcil tombèrent fur la paupiete> ce
gui laifferoit une difformité confidérable au v ifage,
empêcheroit même le globe de l’oeil de pouvoir, fe
découvrir dans toute fon étendue , Ô£ nuiroit à l’action
de cet organe.
Alors dans les coupures & les plaies tranfverfales
du front, où les fibres des mufeles frontaux font coupées
, & les fourcils pendans, & où la peau du front
ne peut plus fe rider comme auparavant, la meilleure
méthode, après avoir nettoyé la bleffure, fera de
rapprocher les levres au moyen de deux points d’aiguille
, d’y appliquer quelque poudre ou baume vulnéraire
, & par-dèffus une emplâtre agglutinalive
que l’on affûrera par le moyen du bandage ; le mala?
de de fon côté doit fe tenir en repos pendant quelque
tems. -
Il arrive pourtant quelquefois, fur-tout quand le
fujet eft jeune, que les fibres des mufeles qui ont été
coupées, fe réunifient fans que la plaie tourne en fup-
puration; mais s’il furvenoit une hémorrhagie v iolente
, on tâchera de s’en rendre maître avec des
bourdonnets, des compreffes, & un fort bandage;
enfuite on lavera la bleffure avec du vin tiede, ÔC
on réunira fes levres avec une emplâtre agglutina-,
tive.
Dans prefque toutes les plaies du front, il faut
commencer par bien effuyer le fang, & oindre la
plaie avec quelque baume, tel que celui de copahu,
du Pérou, ou autre femblable ; on doit enfuite rapprocher
les levres de la, plaie au moyen d’une emplâtre
vulnéraire; cependant lorfque la plaie eft confidérable,
ces moyens ne fuffifent point pour la cica-
trifer également ; il faut donc pour y parvenir, fau-
poudrer la plaie de poudre de farcocolle, ou d une
poudre préparée avec la racine de grande confoude,
de la gomme adraganth, & de la gomme arabique ;
on appliquera par-deffus les emplâtres dont nous
avons parlé, &: on affûrera le tout avec des compreffes
& un bandage.
Il ne convient point d’ufer de.future dans ces fortes
de plaies, fans une néceflité indifpenfable, non
plus que dans toutes les autres plaies du vifage; parce
que la future augmente l’efcarre, & rend la cicatrice
beaucoup plus difforme. Dans les plaies longitudinales
du front, le bandage unifiant eft ce qu’on
peut employer de mieux pour cicatrifer la bleffure
fans difformité.
Il fe forme aifément des plis au front des enfans ;
plis qui ne manquent pas d’augmenter avec l’âge, &
qui font très-difficiles à effacer. Le meilleur moyen
pour y réuffir, feroit peut-être de mettre fur leur
front une bonne bande d’une largeur convenable, &
de l’y laiffer très-long-tems.
D ’autres enfans ont le haut du front couvert de
cheveux, qui leur viennent jufque fur la racine, du
nez. Il faut pour les détruire jetter avec un pinceau
quelques gouttes de l’efprit de-fel.dulcifié fur la partie
où naiffent les cheveux, enfuite frotter legere-
ment &C fouvent cette partie avec du linge. On fe
conduira de la même maniéré pour faire tomber de
petites excroiffances rondes, pointues, & fembla-
bles à de la corne, qui pouffent quelquefois au-def-,
fus du front. • ;• •
Enfin les enfans font fujets, foit par accident ou
autrement, à fe donner en courant des coups au
front, qui y font des boffes, fe durciffent, & rendent
le front inégal. On préviendra cet accident par
des bourrelets ; on guérira le mal en appliquant fur
la boffe fraiche une petite lame de plomb, & par-
deffus une compreffe imbibée d’eau vulnéraire. On
maintiendra la compreffe par un bandeau, & on la
laiffera quelques jours appliquée fur le front, en L’hu-
meûant de-tems-en-tems au-dehors avec de l’eau-de-
vie tiède. (D ./ .)
Fr o n t d e F o r t i f i c a t io n , c’eft un côté de
l’enceinte d’une p la c e , compofé d’une courtine ÔC
dede ux demi-baftions. v^oye^ Fo r t if ic a t io n .'
Front d’une Armée , d’un bataillon, ou d’un
efeadron, c’eft la partie qui regarde l’ennemi, ou
l’étendue qu’occupe la première ligne de l’armée, le
premier rang du bataillon & de l’efcadron. Voye^
Armée , Bataillon & Escadron.
Front de Bandiere d’un camp , c’eft la ligne
qui fert à en déterminer l’étendue, & fur laquelle
font placés les drapeaux & les étendards des troupes
qui occupent le camp. V. Camp. Cette ligne exprime
la longueur de la face ou du front du camp. (Q)
Front du Camp , voye^ Front de Bandiere.
F R O N T , ( Maréchallerie. ) partie de la tête du
cheval. Elle occupe precifément l’efpace qui eft au-
deffus des falieres, du chamfrin & des y e u x , & elle
fe trouve couverte par le toupet. Elle ne doit être
ni trop large, ni trop étroite ; les chevaux dont le
bas du front rentre en-dedans, fe nomment chevaux
camus ; & nous appelions tête bufquée, tête moutonnée,
celle dont cette partie eft avancée, relevée, & pour
ainfi dire tranchante. Ces fortes de têtes bufquées
font plus communes dans de certains pays que dans
d’autres ; les chevaux napolitains & les chevaux an-
glois ont prefque tous une tête moutonnée. ( e )
FRONT A IL , f. m. ( Manège. ) partie du harnois
& de la tétiere. C’eft proprement la bande de cuir
qui appuie & qui paffe fur le front du cheval, à
l’effet de contenir les montans dans leur place. Elle
eft terminée à chacune de fes extrémités par deux
chaffes qui réfultent du retour de la courroie fous
elle-même ; & là le repli qui forme ces chaffes eft
arrêté par quelques points de brediffure. Dans les
deux antérieures paffent les courroies qui de chaque
côté defeendent du deflùs de tête, pour s’unir au-
deffous d’elles avec les montans, par le moyen de
boucles de métal. Les deux poftérieures qui tèrmi-
nent cette piece, reçoivent les deux autres courroies
, qui de ce même deflùs de tête defeendent
pour s’unir à la fous-gorge, au moyen de boucles
iemblables. Quelquefois ces deux chaffes n’en font
qu’une, divifée Amplement par les deux griffes du
bouton qui fert d’ornement dans les brides, ou dans
les tétieres avec garniture, ( e ) •
FRONTAL, (o s ) Anat. l ’or frontal, autrement
dit l’or coronal, eft le premier des os du crâne. Il eft
fitué à la partie antérieure du crâne, & a une figure
demi-circulaire.
On le regarde comme un feul o s , quoiqu’il foit fé-
paré dans les enfans en deux pièces égales, par une
future qui paroît comme la continuation de la fagit-
ta le, & qui n’eft pas plus particulière à un fexe qu’à
l’autre.
, En confidérant ici l’or frontal comme un feul os ,
on le peut divifer en partie fupérieure, qui contribue
à former le fommet de la tête, en partie inférieure,
qui appartient à Ia'bafe du crâne, en antérieure
ou front, & en latérales où commencent les
tempes.
Il y a deux faces, une externe, & une interne ;
l’externe fe trouv’e convexe dans la plus grande partie
de fon étendue , & l’interne eft concave.
On découvre dans la partie inférieure de fa face
externe, cinq apophyfes , dont quatre font angulaires
, parce qu’elles repondent aux angles des yeux;
quelques-uns les appellent orbitaires, & les diftin—
guent en internes &c en externes ; la cinquième apo-
phyfe nommée natale , fert d’appui aux os propres
du nez , & dans quelques fujets, fait une partie de
fa cloifon offeufe. On remarque encore dans la face
externe de Vos frontal, deux enfoncemens qui font
partie des orbites, & au bord fupérieur des orbites,
deux trous nommés fourciliers, lefquels le plus fou-
vent ne font que des échancrures ; ces trous font
quelquefois doubles. La partie inférieure & moyen-
Torne VU %
ne de Vos frontal fe trouve échancrée, pour loger
l’os ethmoïde. On obferve à la jon&ionde ces deux
os., principalement du côté des orbites, un trou de
chaque cô té, auquel on donne le nom de trou orbitaire
interne.
Onconfidere dans la face interne du frontal, deux
foffes dites coronales, une épine, une feiffure, un
trou nommé borgne ou épineux , & plufieurs enfoncemens
fùperficiels, qui répondent aux inégalités
des lobes du cerveau : enfin on y remarque des filions
pour le paffage des vaiffeaux fanguins. En appliquant
le trépan dans cet, endroit, l’hémorrhagie
eft à craindre, & l’on court le danger de bleffer la
dure-mere.
Ajoûtons que Vos frontal eft compofé de deux tables
& du diploé : au milieu de la partie inférieure
de cet o s , les deux tables font ordinairement écartées
l ’une de l’autre, pour former les deux cavités ,
qu’on appelle jinus frontaux ou finusfourciliers. Voye£
Fr o n t a u x (S in u s ) ; & les pièces ainfi écartées font
encore compofées de deux tables, ou pour le moins
ont chacune deux furfaces, ce qui fait quatre furfa-,
ces ou quatre tables en tout.
Mais pour avoir une idée jufte de là vraie fitua-
tion de toutes les parties de l’or frontal, il eft bon
qu’en l’examinant & en le démontrant, on le tienne
de la même maniéré qu’il eft fitué dans une tête
offeufe élevée droite à fon attitude naturelle. Par-
là , on verra que la partie fupérieure de l’or frontal
panche.un peu en-arriere, & que la circonférence
de fes bords eft dans un plan incliné.
Il contient les lobes antérieurs du cerveau, & une
portion du finus longitudinal ; il forme le front, la
partie fupérieure des orbites, & une portion des
tempes.
Il s’articule par en-haut avec les pariétaux, & par
en-bas avec l’os ethmoïde, l’os fphénoïde, les os lacrymaux
ou unguis, les os propres du nez, les os
maxillaires, & ceux de la pomette.
Quoique l’or frontal ne foit pas exempt de jeux de
la nature au fujet de fon épaiffeur en particulier ,
puifqu’on voit quelquefois des crânes où il eft épais
d’un travers de doigt, néanmoins il eft généralement
fi mince vers la partie fupérieure des orbites
qu’il y paroît de la tranfparence. Aufli l’on peut dans
cet endroit, c’eft-à-dire à la partie fupérieure de la
paupière, au-deflùs du globe de l’oe il, porter de bas
en-haut un coup mortel avec un inftrument pointu ,
& ne faire en même tems qu’une fort petite plaie à
la peau. En effet, un coup femblable un peu violent
, perceroit l’o s , atteindroit les méninges , le
cerveau même, & cauferoit la mort.
J’ai remarqué en commençant cet article, que l’or
frontal étoit féparé dans les enfans en deux pièces
égales, par une future qui s’ efface lorfque les os ont
pris leur accroiffement. J’ajoûtq ici que cette future
refte quelquefois dans les adultes, & même pendant
toute la vie : M. Palfin en faifant une incifion cruciale
au milieu du front à un religieux âgé de quarante
ans, s’apperçut que cette future s’étoit con-
fervée ; & ce n’eft pas le feul exemple qu’en four-
niffent les obfervations anatomiques. Il faut donc
s’en reffouvenir quand on examine une plaie de
tête, afin de ne point prendre une telle future pour
une frafture. On découvrira la caufe de cette divi-
fion de l’or frontal par la future fagittale, en remontant
jufqu’à l’état des os du crâne dans l’enfance.
Dans cetems-là, cet os eft toûjours partagé en deux
parties latérales ; ainfi la même féparation qui fe
trouve entre les deux pariétaux, fe rencontre aufli
entre les deux pièces qui compofent alors le frontal:
les deux pièces du frontal commencent à s’unir entre
elles par des dents, enfuite elles fe foudent enfem-
bie, & la future difparoît. Cette foudure qui fe fait y v ij