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çes mots étoient y»ides de fens ; que ne rappellant
aucune jdée, ou ne rappellant que des idées qu’il ;
lcijr ,étoit défendu d’avoir fous peine d’héréfie, on
faifoit dépendre leur faffit éternel du caprice des
dieux ; & qu’il vaudroit autant qu’ils enflent attaché
leur fort à venir à la croy ance d’u ne propofition conçue
dans une langue tout-à-fait étrangère. Ils répondirent
qu’ils n’a voient garde de s’ériger en fcrutateurs
de la volonté des dieux ; que Xaca étoit un homme
faint ; & que leur ayant promis un bonheur infiniment
aû-deflus de ce que l’homme pouvoit jamais mériter
par lui-même, il étoit jufte qu’il en exigeât toutes les
fortes de facrifices dont il étoit capable: qu’après
avoir immolé les pallions de leur coeur, il ne lelir
refltoit plus que de faire un holocaufte des lumières
de leur efprit ; que Xaca en ayoit donné l’exemple au
monde ; qu’ils avoient cmbraffé fa lo i, avec une pleine
confiance dans la vérité de fes promeffes ; Ôt qu’ils
mourroient mille fois plutôt que de renoncer au na-
ma, mio, fortn, qui, quio. Xaca eft repréfenté avec
t] ois têtes : il s’appelle au ffxfotage ou lefugueur. Voy.
ies cérémonies fuperjlitieufes & le dictionnaire de Moréry.
FOISILS ou FAZIN, yoye[ Fazin.
FOIX > ( Géog.) en latin Fuxum ; petite ville de
France, capitale du comté de même nom, qui fait
un gouvernement particulier dans le haut Languedoc.
Elle eft fur l’Auziege , au pié des Pyrénées, entre
Pamiers & Tarafcon ; à trois lieues S. O. de Pa-
miers ; 12 S. E. de Touloufe. Long. iS. 55. latitude
comté de Foix a le Touloufain au levant, le
Conferans au couchant, le comté de Cominges au
nord, les Pyrénées & le Rouffillon au midi. Foye^ fur
ce comté l’abbé de Longuerue, defcript. de la France
, part. 1. De Marca, hift. de Bcarn, liv. VIII. &
Catel mém. de Chili, de Languedoc , liv. II.
Ce comté peut fe glorifier d’avoir donné le jour à
Bayle. 11 naquit à Carlat le 8 Novembre 1647, &
mourut à Roterdam la plume à la main le 28 Décembre
1706 : fon dictionn. hijlor. eft le premier ouvrage
de raifonnement en ce genre , oii l’on puifle
apprendre à penfer : mais il faut abandonner, comme
dit M. deVoltaire, les articles de ce vafte recueil,
qui ne contiennent que de petits faits, indignes à la
fois du génie de Bayle, d’un leâeur grave, & de la
poftérité. (D . J .)
FOK.IEN, (Géog.) province maritime de la Chine
, & la onzième de cet empire. Elle a l’océan des
Indes à l’eft & au fud-eft ; la province de Quanton,
au fud- oiieft ; celle de Kianfi à l’oueft, & celle de
Tchekian, au nord, félon M. de Lifte. V . le P. Martini
dans fon Atla s de laChine. Long. 13 4 . i$S}. lot.
ĥ)
FOL ou FOU , f. m. voye[ Folie.
Fo l , & depuis Fou , ( Littéral. mod.) bouffon de
cour entretenu aux dépens du prince.
L’ufage des rois d’ayoir des fous ou des bouffons à
leur cour, pour les divertir par leurs, bons mots, leurs
geftes, leurs plaisanteries , ou lents impertinences :
cet ufage, dis-je , tout ridicule qu’il e ft , remonte af-
fez haut dans l’hiftoire moderne.
Au commencement du neuvième fiecle , l’empereur
Théophile avoit pour fou un nommé Dauderyy
qui par fon indiscrétion penfa caufer les plus cuifans
chagrins à l’impératrice Théodora. Il s’avifa d’entrer
un jpur brufquement dans le cabinet de cette prin-
c e lle , lprfqu’elle faifoit fes prières devant un oratoire
orné de très. - belles images qu’elle gardoit en
grand fecret, pour éviter que l’empereur qui étoit
Iconoçlafte, en eût connoiflance. Daudery , qui
n’avoit jamais, vû d’images, lui demanda vivement
ce que c ’étoit: à quoi Théodora répondit que c’é-
toit des poupées qu’elle préparoit pour donner à fes
filles : fur çela Daudery vint dire au dîner de l’ecn-
F 0 1
pereur, qu’ il avoit trouvé l’impératrice occupée à
baifer les plus jolies poupées du monde. Théodora
eut bien de la peine à fe tirer de ce mauvais pas :
mais elle fit fi bien châtier le fou de l’empereur,quelle
le corrigea pour jamais de parler de tout ce qui
pourroit la regarder.
Après l’expédition des croifades, on yit la mod»
d’avoir des fous s’établir dans toutes les cours de
l’Europe, dans celles d’Italie, d’Allemagne, d’Angleterre,
& de France. Ici les princes du bon air voulurent
avoir des fpus à leur fuite, qui leur ferviffent
de jouet ÔC d’amufement. Là les grandes maifons fe
procuroient un fo l qu’on habilloit ridiculement, afin
que l’héritier préfomptif eût occafion de fe divertir de
les difcours ou de fes bévues. En Italie,Nicolas III.
marquis d’Eft & de Ferrare, avoit à fa cour un fou
ou bouffon nommé Gonelle , qui devint célébré par
fes reparties.
En France, on pouffa la chofe plus loin que partout
ailleurs : car l’emploi de fou à la cour y fut érigé
en titre d’office particulier. On conferve dans les
archives de Troies en Champagne une lettre de Charles
V . qui écrivit au maire & aux échevins, que fon
fou étant mort, ils euffent à lui envoyer un autre fou9
fuivant la coûtume, A S. Maurice de Senlis, on lit
cette épitaphe ; « Ç y gift Thévenin de Saint-Légier,
»fou du roi notre fire, qui trépafla le premier Juillet
» 1374 : priez P ieu pour l’ame de Iy ».
Le fou de François I. nommé Triboulet, difoit que
Charles-Quint étoit plus fou que lui de paffer par la
France pour aller aux Pays-bas ; mais, lui dit François
I. Si je le laiffe paffér ! En ce cas , dit Triboulet,
f effacerai fon nota de mes tablettes , & j 'y mettrai le
vôtre. Cependant Charles-Quint avoit raifon de ne
pas héliter, en fe rendant dans les Pays-Bas, de paffer
en France fur i’invitation d’un monarque, qui
après la bataille de Pavie, mandoit à la duchefle
d’Angouleme : tout efl perdu , hormis l'honneur.
Le dernier fou de cour dont il foit parlé dans notre
hiftoire, eft le fameux l’Angely , que M. le Prince
amena des Pays-Bas, & qu’il fe fit un plaifir de donner
à Louis XIV. Mai$ l ’Angely étoit un fou plein
d’efprit, qui trouva le fecret de plaire aux uns, de fe
faire craindr,e des autres, &c d’amafler par cette
adreffe une fomme de vingt - cinq mille écus de ce
tems-là. On fait à ce fujet les deux vers de Defpréaux,
& le bon mot de Marigny, qui étant un jour au dîner
du roi, dit à quelqu’un, en voyant l’Angely qui amu-
foit Louis XIV. par fes bons mots : « De tous nous
» autres fous qui avons fuivi M. le Prince , il n’y a
» que l’Angely qui ait fait fortune ». Cependant les
railleries piquantes de l’Angely le firent à la fin chaf-
fer de la cour ; & depuis, cette efpece de fous n’y a
plus. paru. L’Angely difoit qu’il n’alloit pas au fer-
mon, parce qu'il n'aim.oit pas le brailler y & qu'il n'en-
tendoitpas le raifonner. (D .J .)
Fol Appel , ( Jurifprud.) eft celui qui eft interjette
témérairement & fans caufe, ni moyens vala-'
blés. L’amende du fo l appel', proprement dit, eft la
groffe amende à laquelle on condamne celui que
l’on déclare non recevable dans fon appel. Foyeç
Vordonnance de ‘ 5j ( ) . art. t\G. & le praticien de Fer-
riere , Ut. des appellat. Cependant quelques-uns entendent
par fo l appel tout appel dans lequel l’ap-
pellant fuccombe ; & par amende du fol appel ils
entendent auffi l’amende ordinaire à laquelle en ce
cas on condamne l’appellant. (//).
FOLIATION., f. f. (Bot.) c’eft proprement l’affeme
blage des feuilles ou pétales colorés qui compofent la
fleur même.
FOLIE, f. f. (Moraje.) S’écarter de la raifon, fans
le favoir, parce qu’on eft privé d’idées., c’efli être
imfécille ; s’écarter de la raifon le fachant, mais à
regret, parce qu’on eft efclave d’unepaflàon violeur
F O L
te c’eft être foible .- mais s’en écarter avec confiance,
Sc dans la ferme perfuafion qu’on la fuit, v oilà, ce me
femble, ce qu’on appelle être fou. Tels font du moins
ces malheureux qu’on enferme, & qui peut-être ne
different du refte des hommes, que parce que leurs
folies font d’une efpece moins commune, & qu’elles
n’entrent pas dans l’ordre de la fociété.
Mais puifque la folie n’cft qu’une p rivation, pour
en acquérir des idées plus diftinâes, tâchons de
connoitre fon contraire. Qu’eft-ce que la raifon ?
Ce qu’on appelle ainfi, au-moins dans un fehs contraire
à la folie, n’eft autre chofe en général que la
connoiflance du vrai ; non de ce vrai que l’auteur
de la nature a réfervé pour lui feul, qu’il a mis loin
de la portée de notre efprit, ou dont la connoiffan-
ce exige des combinaifons multipliées ; mais de ce
vrai fenfible, de ce vrai qui eft à la portée de tous
les hommes, & qu’ils ont la faculté de connoître,
parce qu’il leur eft néceffaire, foit pour la confer-
vation de leur ê tre, foit pour leur bonheur particulier,
foit pour le bien général de la fociété.
Le vrai eft phyfique ou moral : le vrai phyfique
confifte dans le jufte rapport de nos fenfations avec
les objets phyfiques, ce qui arrive quand ces objets
nous affeûent de la même maniéré que le refte
des hommes : par exemple, c’eft unq folie que d’entendre
les concerts des anges comme certains en-
thoufiaftes, ou de voir, comme dom Quichotte, des
géans au lieu de moulins à v en t, & l’armée d’Ali-
fanfaron , au lieu d’un troupeau de moutons.
Le vrai moral confifte dans la juftefle des rapports
que nous voyons, foit entre les objets moraux,
foit entre ces objets & nous. Il réfulte de-là que
toute erreur qui nous entraîne eft folie. Ce font donc
de véritables folies que tous les travers de notre efprit
, toutes les illufions de l’amour propre , & toutes
nos pallions, quand elles font portées jufqu’à l’aveuglement
; car l’aveuglement eft le caraftere dif-
tinftif delà folie. Q u’un homme commette une a&ion
criminelle, avec connoiflance de caufe, c’eft un fcé-
lérat ; qu’il la commette, perfuadé qu’elle eft jufte,
c ’eft un fou. Ce qu’on appelle dans la fociété dire ou
faire des folies, ce n’eft pas être fou , car on les donne
pour ce qu’elles font. C ’eft peut-être fageffe, li l’on
veut faire attention à la foiblefle de notre nature.
Quelque haut que nous faflions fonner les avantages
de notre raifon, il eft aifé de voir qu’elle eft
pour nous un fardeau pénible, & que, pour en fou-
îager notre ame, nous avons beloin de tems-en-
tems au moins de l’apparence1 de la folie.
La folie paroît venir quelquefois de l’altération
de l’ame qui fe communique aux organes du corps,
quelquefois du dérangement des organes du corps
qui influe fur les opérations de l’ame ; c’eft ce qu’il
eft fort difficile de démêler. Quelle qu’en foit la caufe
, les effets font les mêmes.
Suivant la définition que j’ai donnée de la folie phyfique
& morale, il y a mille gens dans le monde,
dont les folies font vraiment phyfiques, & beaucoup
dans les maifons de force qui n’ont que des folies
morales.[N’eft-ce pas, par exemple, une folie phyfique
que celle du malade imaginaire ?
Tout excès eft fo lie, même dans les chofes louables.
L’amitié, le defintéreflement, l’amour de la
gloire, font des fentimens louables, mais la raifon
doit y mettre des bornes ; c’eft une folie que d’y fa-
crifier fans néceflité fa réputation, fa fortune, & fon
bonheur.
Quelquefois néanmoins cet excès eft vertu, quand
il part d’un principe de devoir généralement reconnu.
C’eft qu’alors l’excès n’eft pas réel ; car fi le
principe eft tel qu’il ne foit pas permis de s’en écarter
y il ne peut plus y avoir d’excès. En retournant à
Tome VIT.
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Carthage, Régulus fut un homme vertueux y il ne
fut pas un fou.
Quelquefois aufli on regarde comme vertii un excès
ree l, quand il tient . à un motif louable : c’eft
qu’alors on ne fait attention qu’au motif, & au petit
nombre de gens capables de li beaux excèà.
Souvent l’excès eft .relatif foit à l’âge, foit à l’é-
^ ^ortune* qui eft folie dans un vieilmrd
ne 1 eft pas dans un jeune homme; ce qui eft
folie dans un état médiocre & avec une fortune bor-
nee, ne le ft pas dans un rang eleve ou. avec une
grande fortune.
Il y a des chofes oh la raifon ne fe trouve que
dans un jufte milieu ,-les deux extrêmes font égale-
men t folie; il y a de la folie à tout condamner comme
à tout approuver;' c’eft un fou que le.diflipateur
qui donne tout à fes fantaifies, comme l’avare qui
refufe tout à fes befoins; & le lybarite plongé dans
les voluptés n’eft pas plus fenfé que l’hypocondriaque
, dont l ’ame eft fermée à tout fentiment de piai-
fir ; il n’y a de vrais biens fur la terre que la fanté
la liberté, la modération des defirs, la bonne conf-
cience. C ’eft donc une folie du premier ordre que de
facrifier volpntairement de fi grands biens;
Parmi nos folies il y en a de triftes, comme la mélancolie
; d’impétueufes, comme la colere & l’humeur
; de douloureufes, comme la vengeance qui a
toujours devant les yeux un outrage imaginaire ou
rée l, & l’envie, pour qui tous les fuccès d’autrui
font un tourment.
II y a d es fous gais ; tels font en général les jeunes
gens : tout les, intérefle, parce que tout leur eft-in-
connu ; tous^ leurs fentimens font exceflifs, parce
que leur ame eft toute, neuve ; un rien les niet au
defefpoir, mais un rien les tranlporte de joie ; ils
manquent feuverit de Faifance & de la liberté,mais
ils poffedent un bien préférable à ceux-là : ils font
gais. Folie aimable, & qu’on peut appeller /iettre«-
fe y puifque les plaifirs l’emportent fur les peines ;
folie qui pafle trop v îte , qu’on regrette dans un âge
plus avancé, & dont rien ne dédommage.
II eft des folies fatisfaifantes, fans être gaies ; telle
eft celle de beaucoup de gens à talens, fur-tout à
petits talens. Ils attachent d’autant plus d’important
ce à leiir art, que dans la réalité il en a moins. Mais
cet te folie flate leur amour-propre; elle a encore
pour eux un autre avantage ; ils auroient peut-être
été médiocres dans leur état, elle les y rend fupé-
rieurs, elle a même quelquefois reculé les limites
de Fart.
Il eft enfin des folies auxquelles on fer.oit tenté de
porter envie. De cette elpece eft celle d’un petit
bourgeois, qui, par fon travail & par fon économie
, s’étant acquis une aifance au-deffus de fon état,
en a conçu pour lui-même la plus fincere vénération.
Ce fentiment éclate en lui dans fon air, dans
fes maniérés, dans fes difcours. Au milieu de fes amis
il aime à faire le dénombrement de ce qu’il poflede.
Il leur raconte cent fois, mais avec une fatisfaÛion
toujours nouvelle, les détails les moins intéreflans
de fa vie & de fa fortune. Dans l’intérieur de fa
maifon il ne parle que par fentences ; il fe regarde
comme un oracle, & eft regardé comme tel par fa
femme, par fes enfans, & par les gens qui le fervent.
Cet homme-là aflurément eft fo u , car ni fa petite
fortune, ni le petit mérite qui la lui a procurée, ne
font dignes de l’admiration & du refpeft qu’ils lui
infpirent ; mais cette folie ne fait tort à perfonne,
elle amufe le philofophe qui en eft Ipeâateur ; &c
pour celui qui la poflede, elle eft un vrai thréfor,
puifqu’elle fait fon bonheur.'
Que fi quelques-uns de ces fous paroifloient pour
la première fois chez une nation qui n’eût jamais
connu que la raifon, il eft vraiffemblable qu’on les
F ij