ôc dans la Philolbphie par la méthode. Il y a des moyen
s où il fauve fa patrie, qu’il perdroit dans la fuite
s’il y confervoit du pouvoir. Les fyftçmes font plus
dangereux en Politique qu’en Philofophie : l’imagination
qui égare le philofophe ne lui fait faire que
des erreurs ; l’imagination qui égare l’homme d’état
lui fait faire dès fautes & le malheur des hommes.
Qu’à la guerre donc & dans le confeil le génie
femblabié à la divinité parcoure d’un coup d’oeil la
multitude des poffibles, voye le mieux ôc l’exécute ;
mais qu’il ne manie pas long-tems les affaires oh il
faut attention, combinaifons, perfévérance : qu Alexandre
& Condé 1 oient maîtres des éyenemens, ÔC
paroiffent infpirés le jour d’une bataille, dans ces inf-
tans où manque le tems de délibérer, Ôc où il faut que
la première des penfées foit La meilleure ; qu’ils décident
dans ces momens où il faut voir d’un eoup-d’oeily
les rapports d’une pofition ôc d’un mouvement avec
les forces, celles de fon ennemi, ôc le but qu’on fe
propol'e: mais que Turenne ÔC Marlborough leur
foient préférés quand il faudra diriger les opérations,
d’une campagne entière.
Dans les Arts, dans les Sciences, dans les affaires,
le génie femble changer la nature des chofes ; fon caractère
fe répand fur tout çe qu’il touche ; ôc fes lumières
s’élançant au-delà dupaffé ÔC du préfent,
éclairent l’avenir : il devance fon fiecle qui ne peut
le fuivre ; il laiffe loin de lui l’efprit qui le critique
avec raifon-, mais qui dans fa marche égale ne fort
jamais de l’uniformité de la nature. Il eft mieux fenti
que connu par l’homme qui veut le définir: ce fe-
roit à lui - même à parler de lui ; ôc cet article que
je n’aurois pas dû faire, devroit être l’ouvrage d’un
de ces hommes extraordinaires * qui honore ce üe-
c le , Ôc qui pour connoître le génie a auroit eu qu’à
regarder en luUmême.
Gen ie , (Zc) f. m. {Art. milit.') ce mot fignifie
proprement dans notre langue la fcience des Ingénieurs
; ce qui renferme la fortification, l’attaque &
la défenfe des places. Foyei Fortification , Attaque,
D éfense. Il fignifie auffi le corps des Ingénieurs
, c’eft-à-dire des officiers chargés de la fortification
, de l’attaque ÔC de la défenfe des places.
F o y t i INGENIEUR.
C ’eft à M. le maréchal de Vauban que l’on doit
l’établiiTement du génie ou du corps des Ingénieurs,
» Avant cet établiffement rien n’étoit plus rare en
» F rance, dit cet illuftre maréchal, que les gens de
» cette profeflion. Le peu qu’il y en avoit fubfiftoit
» li peu de tems, qu’il étoit plus rare encore d’en
» voir qui fe fuffent trouvés à cinq ou fix fiéges. Çe
» petit nombre d’ingénieurs obligé d’être toujours
» fur les travaux étoit fi expofé, que prefque tous fe
» trouvoient ordinairement hors d’état de fèrvir dès
» le commencement ou au milieu du fiége ; ce qui
» les empêchoit d’en voir la fin, & de s’y rendre fa-
» vans. Cet inconvénient joint à plufieurs autres dé*
» fauts dans lefquels on tomboit, ne contribuoit pas.
» peu à la longueur des fiéges, & autres pertes con-
« fidérables qu’on y faifoit ». Attaque çles plants par
M- le maréchal de Vauban.
Un général qui faifoit un fiége avant l’établiffe^
ment des corps des Ingénieurs, choififfoit parmi les
officiers d’infanterie ceux qui avoient acquis quel-
qu’expérience dans l’attaque des places, pour en
conduire les travaux ; mais il arrivoit rarement,
comme le remarque M. de Vauban,qu’on en trouvât
d’affez habiles pour répondre entièrement aux
vues du général, ôc le décharger du foin & de la
direction de ces travaux. Henri IV. avoit eu cependant
pour ingénieur Errard de Barleduc, dont le
traité de fortification montre beaucoup d’intelligence
& de capacité dans l’auteur. Sous Louis 3ÇHL le
* M. de yoltaire, par exemple*
chevalier de Ville fervit en qualité d’ingénieur avec
la plus grande diftinClion. Son ouvrage fur la fortification
des places, ôc celui où il a traité de la charge
des gouverneurs, font voir que ce favant auteur
étoit également verfé dans l’artillerie ÔC le génie ;
mais ces grands hommes qui ne pouvoient agir partout
trouvaient peu de gens en état de les féconder.
Dans le commencement du régné de Louis XIV.
le comte de Pagan fe diflingua beaucoup dans l’art
de fortifier. Il fut le précurfeur de M. le maréchal do
Vauban, qui dans la fortification n’a guère fait que
reâifier les idées générales de ce célébré ingénieur ; ■
mais qui a par-tout donné des marques d’un génie fu-
périeur ôc inventif, particulièrement dans l’attaque
des places , qu’il a portée à un degré de perfection
auquel il eft difficile de rien ajouter.
Le chevalier de Cler ville paroît auffi, par les difi.
férens mémoires furies troubles deda minorité du rot
Louis X IV , avoir eu beaucoup de réputation dans
l’attaque des places. M. de Vauban commença à fer-
vir fous lui dans plufieurs fiéges ; mais il s’éleva en-
fuite rapidement au-deffus de tous ceux qui l’avaient
précédé dans la même carrière.
Par l’établiffement du génie, le roi a toujours un
corps nombreux d’ingénieurs, fuffifant pour fçrvir
dans fes armées en campagne & dans fès places. On
ne fait point de fiége depuis long-tems'qu’il ne s’y
en trouve trente-fix ou quarante, partagés ordinairement
en brigades de fix ou fepfrhommes, afin que
dans chaque attaque on puiffe avoir trois brigades,
qui fe relevant alternativement tous les vingt-quatre
heures, partagent entr’eux les foins & les fatigues
du travail, ôc le font avancer continuellement
fans qu’il y ait aucune perte de tems.
' C ’eft à l’établiffement du génie que la France doit
la fupériorité qu’elle a , de l’aveu de toute l’Europe,
dans l’attaque ôc la défenfe des places fur les nations,
voifînes.
Le génie a toujours eu un minift-re ou un dire&eur
général, chargé des fortifications & de tout ce qui
concerne les I n g é n i e u r s .D irecteur ou Inspecteur
GÉNÉRAL DES FORTIFICATIONS.
L’Artiilene qui avoir toujours formé un corps particulier
fous la dire&ion du grand-maître de l’Artillerie
, vient, depuis la fuppreffion de cette importante
charge, d’être unie à celui du génie. Par l’ordonnance
du 8 Décembre 1755, ees deux corps n’en
doivent plus faire qu’un feul fous la dénomination
de corps royal de l'Artillerie & du Génie. (Q)
GENIES en Architecture, figures d’enfans avec des
ailes ôc des attributs, qui fervent dans les ornemens
à repréfenter les vertus & les pallions, comme ceux
qui font peints par Raphaël dans la galerie du vieux
palais Chigi à Rome. Il s’en fait de bas-reliefs, comme
ceux de marbre blanc dans les trente-deux tym-
pansde la colonnade deVerfailles,qui font par group-
pes, ôc tiennent des attributs de l’amour, des jeux ,
des plaifirs, &c. On appelle génies fleuronés., ceux
dont la partie inférieure fe termine eh naiflance de
rinceau de feuillages, comme dans la frife du fron-
tifpice de Néron à Rome. Foye^nos Vlanch, d 'A relût.
On fe fert auffi du mot de génie, pour défigner le
feu & l’invention qu’un architecte, un deffinateur,
décorateur, ou tous autres Artiftes mettent dans la
décoration de leurs ouvrages ; c’eft une partie très-
néceffaire dans l’ArchiteCture. Un homme fans génie,
quoique muni des préceptes de fon art, va rarement
loin : la diverfité des oecafions ôc le détail immenfe
d’un bâtiment, exigent abfodument des difpofitions
naturelles, qui foient aidées d’un exercice laborieux
ôc fans relâche ; qualités effentielles à un architefte
pour mériter la confiance de ceux qui lui abandonnent
leurs intérêts, Foye^ Architecte.
Genie en Peinture, Foye^ Peinture.
GENIOGLOSSE, adj. pris f. en Anatomie, fe dit
d’une paire de mufcles qui prennent leur origine de
la partie interne de la fymphife du menton, au-def-
fousdes génio-hyoïdiens; ils s’élargiffent enfuite, ôc
vont s’attacher à la bafe de la langue. Foye^ Langue
, Menton. CL)
GENIO-HYOÏDIEN, adj. en Anatomie, fe dit
d’un mufcle de l’os hyoïde, qui auffi-bien que fon
pareil eft court, épais ôc charnu ; ils prennent leur
origine de la partie interne de la mâchoire inférieure
qu’on appelle menton ; ils font larges à leur origine ;
ils fe retréciffent enfuite, ôc vont s’attacher à la partie
fupérieure de la bafe de l’os hyoïde. Foyc^ Hyoïde.
{L)
GENIO-PHARYNGIENS, enAnat. fe dit d’une
paire de mufcles du pharynx qui viennent de la fymphife
du menton, au-dellousdes mufclesgenio-glof-
lè s , & qui s’attachent aux parties latérales du pharynx.
Foyc^ Pharynx. {L)
GENIPANIER, f. m. {Hijt. nat. bot.) genipa, genre
de plante obfervé par le P. Plumier ; la fleur eft
monopétale, campaniforme, évafée ; il fort du calice
un piftil qui entre dans la partie poftérieure de
la fleur ; le calice devient un fruit qui a ordinairement
la figure d’un oeuf, qui eft charnu ôc partagé
en deux fortes de loges, ôc qui renferme des femen-
ces plates pour l’ordinaire. Tournef. rei herb. appen-
dix. Foyei PLANTE. ( 1 )
GENISTELLE, f. f. genijlella , {Hijt. nat. bot. )
genre de plante qui diffère du genêt en ce que fes
feuilles naiffent l’une de l’autre, ôc font comme articulées
enfemblè. Tournef. injt. rei herb. & élémens
de Botanique. Foye% Plante. { I )
GENITA-MANA , {Mythol.) déeffe qui préfi-
doit aux enfantemens ; les Romains lui facrifioient
Tin chien, comme les Grecs en facrifioient un à Hécate.
On faifoit à cette déeffe une priere conçue en
termes fort finguliers : on lui demandoit la faveur
que de ce qui naîtroit dans la maifoii rien ne devint
bon. Plutarque dans fes queftions romaines, quejt.
5x , donne deux explications de cette façon de parler
énigmatique ; l’une eft de ne pas entendre la priere
des perfonnes, mais des chiens. Alors, dit-il, l’on
demandoit à la déeffe que ces animaux qui naîtroient
dans la maifon, ne fuffent pas doux ôc pacifiques,
mais méchans & féroces ; ou b ien, félon Plutarque,
en appliquant la priere aux perfonnes, le mot devenir
bon fignifioit mourir ; dans ce dernier fens l’on
prioit la déeffe qu’aucun de ceux qui naîtroient dans
la maifon, ne vînt à mourir dans cette même maifon.
Cette derniere explication, ajoûte-t-il,ne doit
pas paroître étrange à ceux qui favent que dans un
certain traité de pâix conclu entre les Arcadiens &
les Lacédémoniens, il fut ftipulé qu’on ne feroit bon,
c’eft-à-dire, félon Ariftote, qu’on ne tueroit per (onne
d’entre les Tégates pour les fecours qu’ils auroient
pu prêter aux Lacédémoniens. QD. J.).
GENITAL, adj. dans Yéconomie animale, c’eft ce
qui appartient à la génération. ^oyc^GÉNÉRATiON.
Parties génitales dénotent les parties qui fervent
à la génération dans les deux fexes. F Verge ,
Testicule , Clitoris, Hymen , &c. ôc les Planches
anatomiques.
■ GENITES , adj. pl. {iris fub. {Théplog.) c’eft-à-
dire engendrés; nom qui parmi les Hébreux fignifioit
ceux qui defeendoient d’Abraham fans aucun me»
lange de làng étranger, c. à d. dont tous les ancêtres
paternels ôc maternels étoient ifraëlites, & iffus
en droite ligne d’autres ifraëlites en remontant ainfi
jufqu’àAbraham. Les Grecs diftinguoient par le nom
des genitts, les Juifs nés de parens qui ne s’étoient
oint alliés avec les Gentils pendant la captivité de
abylone. Chambtrs. {G)
GÉNITIF, f. m, ç’eft le fécond cas dans les lan-
Tomt F IL
gués qui en ont reçu : fon ufage univerfel eft de pré- •
lènter le nom comme terme d’un rapport quelconque
, qui détermine la lignification vague d’un nom
appellatif auquel il eft fubordonné.
Ainfi dans lumen folis, le nom folis exprime deux
idées ; l’une principale, défignée fur-tout par les premiers
élemens du mot, fo l, ôc l’autre acceffoire, indiquée
par la terminaifon is : cette terminaifon préfente
ici le foleil comme le terme auquel on rapporte
le nom appellatif lumen (la lumière) , pour en déterminer
la lignification trop vague par la relation
de la lumière particulière dont on prétend parler ,
au corps individuel d’où elle émane ; c’eft ici une
détermination fondée fur le rapport de l’effet à la
caufe.
La détermination produite par le génitif peut être
fondée fur une infinité de rapports differens. Tantôt
c’eft le rapport d’une qualité à fon fujet, fortitudo
regis ; tantôt du fujet à la qualité , puer egregice indo-
lis : quelquefois c ’eft le rapport de la forme à la matière
, vas auri; d’autre fois de la matière à la forme
, aurum vajis. Ici c’eft le rapport de la caufe à
l’effet, creator mundi ; là de l’effet à la caufe, Cicero-
nis opéra. Ailleurs c’eft le rapport de la partie au
tout, pes montis; de l’efpece à l’individu, oppidum
Antiochice ; du contenant au contenu, modius fru-
menti ; de la chofe poffédée au poffeffeur, bona ci-
vium; de l’aûion à l’objet, me eus fupplicii, &c. Partout
le nom qui eft au génitif exprime le terme du
rapport ; le nom auquel il eft affocié en exprime
l’antécédent; ôc la terminaifon propre du génitif an-*
nonce que ce rapport qu’elle indique eft une idée
déterminative de la lignification du nom antécédent.
Foyt^ Rapport.
Cette diverfité des rapports auxquels le génitif
peut avoir trait, a fait donner à ce cas differentes
dénominations, félon que les uns ont fixé plus que
les autres l’attention des Grammairiens. Les uns
l’ont appelle poffejff, parce qu’il indique fouvent le
rapport de la choie poffédée au poffeffeur, prædium
Terentii; d’autres l’ont nommé patrius ou paternus ,
à caufe du rapport du pere aux enfans, Cicero pater
Tullice : d’autres uxorius , à caufe du rapport de l’é-
poufe au mari, Hecloris Andromachc. Toutes ces dénominations
pèchent en ce qu’elles portent fur un
rapport qui ne tient point direftementà la lignification
du génitif, Ôc qui d’ailleurs eft accidentel. L’effet général
de ce cas eft de fervir à déterminer la lignification
vague d’un nom appellatif par un rapport
quelconque dont il exprime le terme ; c’étoit dans
cette propriété qu’il en falloit prendre la dénomination
, ÔC on l’auroit appellé alors déterminatif avec
plus de fondement qu’on n’en a eu à lui donner touo
autre nom. Celui de génitif a été le plus unanimement
adopté, apparemment parce qu’il exprime
l’un .des ufages les plus fréqu.ens de ce cas ; il naît
du nominatif, ÔC il eft le générateur de tous les cas
obliques ôc de plufieurs efpeces de mots : c’eft la remarque
de Prifcien même , lib. V. de cafu : Geniti-
vus , dit-il, naturale vinculum generis pofjldet, nafei-
tur quidem à nominativo , générât autem omnes obli-
quos fequentes; ôc il avoit dit un peu plus haut, Generales
videtur ejfe hic cafus genitivus , ex quo feri omnes
derivationes, & maximï apud Grcecos , foient fieri.
En effet les fervices qu’il rend dans le fyftème de la
formation s’étendent à toutes les branches de ce fyf»
tème. Voyt{ Formation. •
I. Dans la dérivation grammaticale, le génitif eft
la racine prochaine des cas obliques; tous fuivent
l’analogie de fa terminaifon, tous en confervent la
figurative. Ainfi homo a d’abord pour génitif hom-in-
is où l’on voit o du nominatif changé en in-is ; is
eft la terminaifon propre de ce ca s, in en eft la figurative
: or la figurative in demeure dans tous les