naiffent du mélange de différentes matières. Les acides
& les alkalis mêlés enfemble, fe détruifent. Rien
n’eft plus defagréable que le goût falé que contractent
les acides par le mélange des yeux d’écreviffes
qui font naturellement fades, & de tous les autres
abforbans marins. Les terres graffes, infipides, jointes
à un acide, deviennent aluminèufes ; le plomb
uni aux acides, acquiert une douceur de fucre ; le
fer de doux devient ftiptique. On fait quel goût affreux
ce même mélange donne aux autres métaux.
Quelquefois même il arrive des chofes qu’on n’at-
tendoit pas naturellement dans le mélange. En voici
quelques exemples. Les acides & les alkalis mêlés
enfemble, perdent leurs forces particulières , & deviennent
un fel neutre. Les terres bolaires, médicinales,
jointes aux acides, acquièrent une force af-
tringente plus confidérable, & même alumineufe.
Un acide joint à la fcamonée, la rend auffi peu active
que le fable ; au lieu qu’un alkali fixe en aide
l’aâion. Le fel de tartre adoucit la force du jalap &
de la coloquinte. Le fucre affoiblit les mucilagineux
les aftringens.
Le mercure mêlé au foufre & changé en æthiops
ou en cinnabre, ceffe d’être falivant. Si vous le
broyez bien exaûement avec le double de fucre
ou d’yeux d’écreviffe, vous produirez un æthiops
blanc qui n’aura que peu d’a&ion. Remarquez néanmoins
que le turbith minéral, mêlé avec les pilules
de duobus & le camphre, d’évacuant qu’il étoit devient
altérant. Le mercure doux joint au foufre d’antimoine
, a de la peine à exciter le ptyalifme, le vo-
miffement, à pouffer par les felles & les urines. Le
fublimé corrolif devient doux, quand on y mêle une
quantité de mercure crud. Plufieurs chaux de mercure
où l’acide fe fait fentir par fon âcreté, s’adou-
ciffent en les broyant avec des alkalis ou des abforbans
terreux. L’æthiops ou le cinnabre mêlé avec
les alkalis fixes, ne fe change-t-il pas ?
Les alkalis'diffous par les acides, & les acides par
les alkalis, font ordinairement une effervefcence &
perdent beaucoup de leurs forces. Le vitriol de Mars
mêlé avec les alkalis, fe change en une efpece de
tartre vitriolé & d’ochre. Il en eft de même dans
les autres métaux & demi-métaux, excepté le cuivre.
Les alkalis précipitent l’alun en une chaux morte
; ce qui fait connoître la nature des magifteres alumineux.
Le foufre diffous par un fel a lkali, eft chaffé
de cet alkali par un acide, &c.
Si donc dans une formule l’on joint fans précaution
les acides, furtout les foffiles, aux métaux ou aux minéraux
de quelque efpece qu’ils foient, il en peut ré-
fulter des changemens étonnans, fouvent même de
violens poifons. Le mercure fublimé, le précipité '
rouge, la pierre infernale, le beurre d’antimoine &
plufieurs autres, en font des preuves.
Enfin les vertus médicinales d’un corps diffous ou
extrait par tel & tel menftrue, font fort différentes.
La plûpart des purgatifs végétaux extrait par un menftrue
aqueux, réufliffent fort bien. Ceux qui l’ont
été par un menftrue fpiritueux, donnent des tranchées
, & purgent moins. Le verre d’antimoine, ou
le fafran des métaux, communique au vin une vertu
émétique; ce qu’il ne fait point à l’eau, au vinaigre
diftillé, à l’efprit-de-vin, ou à fon alcohol. Le cuivre
diffous par un acide eft très - émétique ; par un alkali
volatil, il pouffe efficacement par les urines ; par le
fêl ammoniac, il devient cathartique, &c. Boerhaa-
Ve , elem. chifn. vol. I I . pag. 476. &feq.
Il feroit aifé de citer beaucoup d’autres exemples,
& je voudrois pouvoir les rapporter tous : mais comme
il n’y a point de bornes dans les compofitions &
les mélanges, il s’en faut de beaucoup que nous con-
noiffions au jufte les altérations qui en réfultent ; on
n’y parviendra que quand on aura découvert les
principes naturels des (impies, les rapports réciproques
qu’ils ont chacun entr’eux, & la véritable maniéré
dont ils agiffent.
Cependant un homme inftruit de la Chimie, s’il
veut mêler plufieurs drogues dans fes formules, fera
toûjours fur fes gardes ; parce qu’il fait mieux que
perfonne que de certains mélanges il réfulte des changemens
prodigieux, & qu’il y en a fans doute une infinité
qu’on ne connoît pas : car on n’a point encore
ni fait les mélanges poffibles de tous les corps, ni
bien examiné les produits de ceux qui ont été mêlés,
(Z )./ .)
FORMULÉ, adj. (Jurifprud.) Papier formulé. On
appelle quelquefois ainfi le papier timbré, à caufe
que dans l’origine il étoit deftiné à contenir des formules
imprimées de toutes fortes d’aâ es; & comme
on a confondu les termes de timbre & de formule ,
on dit auffi indifféremment papier timbré ou formulé.
ÇA')
FORNACALES ou FORNICALES, (Mytholog.)
nom propre d’une fête que les Romains célébroLent
en l’honneur de la déeffe Fournaife. Voyez Fête.
On y faifoit des facrifices devant une fournaife
ou devant le four, où l’on avoit coutume de brûler
le-blé ou de cuire le pain, &c.
C’étoit une fête mobile que le grand Curion indi-
quoit tous les ans le ia des calendes de Mars.
Elles furent inftituées par Numa. Les Quirinales
étoient pour ceux qui n’avoient pas célébré lès for-
nacales. Voyt{ QUIRINALES. Trév. & Chambers. ÇG)
F O R N IG A T IO N , f. f. (Morale.) Le dictionnaire
de Trévoux dit que c’eft un terme de Théologie.
Il vient du mot latin fornix , petites chambres
voûtées dans lefquelles fe tenoient les femmes pu*
bliques à Rome. On a employé ce terme pour lignifier
le commerce des perfonnes libres. Il n’eft point d’u-
fage dans la converfation, & n’eft guere reçu aujourd’hui
que dans le ftyle marotique. La décence l’a
banni de la chaire. Les Cafuiftes en faifoient un
grand u fage, & le diftinguoient en plufieurs efpeces.
On a traduit par le mot de fornication les infidélités
du peuple juif pour des dieux étrangers, parce que
chez les prophètes ces infidélités font appellées impuretésifouillures.
C ’eft par la même extenfion qu’on
a dit que les Juifs a voient rendu aux faux dieux un
hommage adultéré. Article de M. d e V o l t a i r e .
La fornication, entant qu’union illégitime de deux
perfonnes libres, & non parentes, eft proprement
un commerce charnel dont le prêtre n’a point donné
la permiffion. L’ancienne loi condamne celui qui
a commis la fornication avec une vierge, à l’époufer,
ou à lui donner de l ’argent, fi fon pere la refufe eft
mariage. Exode 22. Elle ne paroît pas avoir impofé
de peine pour la fornication avec une fille publique,
ou même avec une veuve. Ce n’eft pas que cette
fornication fût permife ; nous voyons par un paffage
des actes des apôtres, xv. 20. 2 cj. qu’on preferivoit
aux Juifs nouvellement convertis, de conferver,en-
tr’autres obfervations légales, l’abftinence de la fornication
& des chairs étouffées. Cette attention à faire
marcher de pair deux abftinences fi différentes, par
roît prouver, ou que la manducation des chairs étouffées
( indifférente en elle-même) étoit traitée par la
loi des Juifs comme un grand mal, ou que la fornication
étoit regardée comme une fimple faute contre
la lo i, plûtôt que comme un crime. La loi nouvelle
a été plus févere Sc plus jufte. Un chrétien regarde
comme un plus grand mal de joiiir d’un commerce
charnel, qui n’eft pas revêtu de la dignité de
facrement, que de manger de la chair de cochon ou
de la chair étouffée. Mais la fimple fornication, quoique
péché en matière grave, eft de toutes les unions
illégitimes celle que le Chriftianifme condamne le
moins; l’adultere eft traité avec raifon pa rl’Evangile
comme un crime beaucoup plus grand. Voyei
A dultéré. En effet, au péché de la fornication il
en joint deux autres: le larcin, parce que l’on dérobe
le bien d’autrui ; la fraude, par lequel on donne
à un citoyen des héritiers qui ne doivent pas l’être.
Cependant, abftraâron faite de la religion, de
la probité même, & confidérant uniquement l’économie
de la fociété, il n’eft pas difficile de fentir que
la fornication lui eft en un fens plus nuifible que
l’adultere ; car elle tend, Ou à multiplier dans la
fociété la tnifere & le trouble, en y introduifant
des citoyens fans état & fans reffource ; ou ce qui
eft peut-être encore plus funefte , à faciliter la dépopulation
par la ruine de la fécondité. Cette ob-
fiervation n’a point pour objet de diminuer la jufte
horreur qu’on doit avoir de l’adultere, mais feulement
de faire fentir les différens afpe&s fous lef-
quels on peut envifager la Morale, foit par rapport
à la religion, foit par rapport à l’état. Les Iegifla-
teurs ont principalement décerné des peines contre
les forfaits qui portent le trouble parmi les hommes
; il eft d’autres crimes que la religion ne condamne
pas moins, mais dont l’Êtrè fuprème fe ré-
ferve la punition. L’incrédulité, par exemple, eft
pour un chrétien un auffi grand crime, & peut-
être un plus grand crime que le vol ; cependant il
v a des lois contre le v o l , & il n’y en a pas contre
les incrédules qui n’attaquent point ouvertement la
religion dominante ; c’eft que des opinions (même
abfurdes) qu’on ne cherche point à répandre, n’apportent
aux citoyens aucun dommage : auffi y a-t-il
plus d’incrédules que de voleurs. En général on peut
obferver, à la honte & au malheur du genre humain
, que la religion n’eft pas toûjours un frein af-
fez puiuant contre les crimes que les lois ne purtif-
fent pas, ou même dont le gouvernement ne fait pas
une recherche févere, & qu’il aime mieux ignorer
que punir. C ’eft donc avoir du Chriftianifme une
très-fauffe idée, & même lui faire injure, que de
le regarder, par une politique toute humaine, comme
uniquement deftiné à être une digue aux forfaits.
La nature des préceptes de la religion, les peines
dont elle menace, à la vérité auffi certaines que
redoutables, mais dont l’effet n’eft jamais préfent,
enfin le jufte pardon qu’elle accorde toûjours à un
repentir fincere, la rendent encore plus propre à
procurer le bien de la fociété, qu’à y empêcher le
mal. C ’eft à la morale douce & bienfaifante de l’Evangile
qu’on doit le premier de ces effets ; des lois
rigoureufes & bien exécutées produiront le fécond.
On a remarqué avec raifon ci-deffus, que la fornication
fe prend dans l’Ecriture non-feulement pour
une union illégitime, mais encore pour fignifier l’i-
dolâtrie & Vherijîe, qui font regardées comme des
fornications fpirituelles, comme une efpece de copulation,
s’il eft permis de parler de la forte, avec l’ef-
prit de ténèbres. Cette diftin&ion peut fervir à expliquer
certains paffages de l’Ecriture contre la fornication
y & à les concilier avec d’autres. (O)
FO R T , adj. voye^ les articles Fo r ce .
FO R T , f. m. c’eft dans l'Art militaire, un lieu ou
un terrein de peu d’étendue fortifié par l’art ou par
la nature, ou par l’un & l’autre en même tems.
Les forts different des villes fortifiées, non-feulement
parce qu’ils renferment un efpace plus petit,
mais encore parce qu’ils he font ordinairement occupés
ou habités que par des gens de guerre. Ce font
des efpeces de petites citadelles deftinées à garder
des paffages importans, comme le fort des Barraux.
Ils fervent encore à occuper des hauteurs fur lefquelles
l’ennemi pourroit s’établir avantageufement,
• à couvrir dés éclüfes, des têtes de chauffées, &c.
T el eft le fore de Scarpe auprès de Doüay, celui de
Nieulay à Calais, de faint François à A ire, &c.
Lorfque la ligne dé défenfe de ces forts a 110 toi-
fes, ou environ, on les appelle forts royaux. (O )
Fo r t de C am p a g n e ; c ’eft une efpecé de grande
redoute dont les côtés fe flanquent réciproquement,
& qui ne fe conftruit que pendant la guerre. On
s en fert alors pour couvrir & garder des poftes ou
des paffages importans.
Lorfqüe les forts de carfipngnc font triangulaires ou
quarres, & qu’ils font ouverts d’un côté, on leur
donne le nom de redoutes. Voye^ Redoute. Mais
quand ils font fermés de tous côtés, & qu’ils donnent
des feux croifés, c’eft alors qu’ils portent ptoa.
prement le nom de forts.
La grandeur des forts de campagne varie fuivant
l’ufage auquel on les deftine ; mais leur ligne de défenfe
doit toûjours être pk s petite que celle des vil*
les fortifiées. On peut lafixer entre 40 & 60 toiles
au plus, ce qui eft à-peu-près la plus grande longueur
que l’on peut donner aux côtés de ces forts.
Ils font formés d’un foffé de 10 ou 12 piés de pro*
fondeur fur 15 ou 18 de largeur ; d’un parapet dé
huit ou neuf piés d’épaiffeur & de fept dé hauteur,
& affez ordinairement d’un chemin couvert, palïf-
fadé lorfqu’on a la commodité de le faire.
Pour conftruire un fort de campagne triangulaire
décrivez d’abord un triangle équilatéral. Divifez
chacun de fes côtés en trois parties égales ^prolongez
une de ces parties au-delà du triangle, & faites
ce prolongement égal à cette partie. Tirez enfuite,
de fon extrémité au fommet de l’angle oppofé au
côté prolongé, la ligne de défenfe. Faites là gorge
égale au tiers du côté, & élevez le flanc de maniéré
qu’il faffe un angle à-peu-près de 100 degrés , avec
les deux autres tiers du meme côté. Faites après cela
la même chofe fur les autres côtés du triangle ;
& il fera fortifié par trois demi-baftions. Il y a des
auteurs qui fortifient le triangle avec des baftions
entiers ; mais les angles de ces baftions fe trouvent
alors fi aigus, qu’ils n’ont aucune folidité.
La fortification du quarré avec des demi-baftions
fe fait de la même manière que celle du triangle ;
excepté qu’au lieu de divifer le côté en trois parties
égales, on le partage en quatre, & que le prolongement
de chaque côté' eft pris du quart de ce
cô té , de même que la gorge du demi-baftion.
Cette forte de fortification donne dès angles
morts ou rentrans, qui ne font pas défendus ; mais
le peu d’élévation des forts de campagne rend ces
angles bien moins défe&ueux ou préjudiciables que
dans les villes de guerre, parce que i ’éfpace qui
n’eft pas défendu fe trouve alors beaucoup plus
petit.
Parmi les forts de campagne, il y en a qu’on nomme
forts à étoile, parce qu’ils en ont à-peu-près la
figure. Ils font formés de quatre, cinq, ou fix côtés
qui donnent autant d’angles faillans & rentrans.
Pour faire un fort en étoile qui foit êxagonâl ou
qui ait fix angles rentrans, il faut d’abord décrire un
triangle équilatéral, divifer chaque côté en trois
parties égales des deux extrémités de la partie du
milieu de chaque côté & de fon intervalle décrire
deux arcs qui fe coupent dans Un point en-dehors le
triangle ; tirant de ce point dès lignes aux centrés de
ces arcs, on aura le fort tracé.
Si l’on veut un fort pentagonal à étoilé, on com^
mencera par décrire un pentagone de la grandeur
qu’on jugera néceffaire ; on divifera ènfüifë cKàque
côté en deux également, & du point du milieû on
élevera une perpendiculaire én-dedans lé pentagone.
On donnera à cette perpendiculaire le quart du
côté ; & par fon extrémité on tirera aux anglés du
pentagone des lignes qui formeront les angles rentrans
ae ce polygone.