Son utilité eft très-grande; car au moyen de la figure
elle remédie auxinégalités du reffort, qui étant
plus bande lorfque la montre eft nouvellement montée
& moins lorfqu’elle eft prefque au bas, la feroit
avancer dans le premier cas, & retarder dans le fécond.
Les premiers horlogers qui firent des montres,
tâchèrent de remédier, à cet inconvénient du reffort
au moyen d’une machine qu’ils appelloient flochfred.
Mais les défauts les engagèrent bien-tôt à la perfectionner
, ou à y fupplécr par une autre. Ainli on 1 a-
bandonna dès qu’on eut inventé la/w/ie.^Quelqu in-
génieufe que fôit cette decouverte, on n en connoit
point l’auteur ; ce qu’il y a de fur, c eft qu elle eft
fort ancienne.
Pour bien concevoir de quelle maniéré la fufée
compenfe les inégalités du reffort, il faut faire attention
que dans une montre au bas, la chaîne eft entièrement
fur le barilletoütambour, & que lorfqu’-
on la remonte, on ne fait autre chofe que la faire
paffer fur la fufée. Mais par-là on fait la même choie
que fi l’on tiro'it la chaîne jufqu’à ce qu’il n’y en ait
plus fur le barillet. Or ce mouvement ne fe peut faire
fans qu’on faffe tourner le barillet, & cela preci-
fément autant de fois que la chaîne feroit de tours
deffus. De plus on a vu à Yart. Barillet , que par
-la difpofition des pièces, en le tournant on bande le
reffort. Il fera donc bandé d’autant de tours exactement
que le barillet aura tourné de fois, ce qui fera
de trois tours & demi, qui eft la quantité des tours
qu’une chaîne fait ordinairement autour du barillet.
Ceci bien entendu, on voit manifeftement que la
plus grande bande du reffort, & par conféquent fa
plus grande force, a lieulorfque la montre eft montée
jufqu’au haut ; & que cette force va toujours en diminuant
à mefure que h fufée tourne ; & qu’elle eft
la plus petite de toutes lorfque la montre eft pref-
qu’au bas.- Pour faire donc que malgré cette inégalité
de force fon a&ion foit toujours égale fur le rouage
, on diminue le diamètre de la fufée en haut, Sc
on lui donne une forme telle que lorfque le reffort a
le plus de force, le bras de levier de la fufée par lequel
la chaîne tire, eft auffi le plus petit, de façon
que dans im point quelconque de la fufée, le produit
formé de ce bras de levier multiplié par la force
du reffort dans ce même point, eft toujours égal.
Par ce moyen i’aôion du reffort tranfmife au rouage
, eft conftammént le même ; & il eft pour ainfi
dire mû prefque auffi uniformément que s’il l’étoit
par un poids.
C ’eft un problème parmi les Géomètres, que de
trouverla figure précife que doit avoir h fufée d’une
montre, c’eft-à-dire quelle eft la courbe qui tournant
autour de fon axe, produiroit le folide dont
cette fufée doit être formée. M. de Varignon a déterminé
cette courbe , pag. i<)8. des mémoires de l'académie
royale des Sciences, année i jo z , pour toutes
fortes d’hypothefes de tenfions du i effort. Ce qu’il
y a de fingulier dans la folution, c’ eft que la bafe de
la fufée, au lieu de s’étendre à l’infini, comme il
fembleroit que cela devroit être, pour que le reffort
tirât également lorfque fa force feroit infiniment
plus petite ; cette bafe , dis-je, eft déterminée, &
d’une certaine grandeur. Enfin pour parler plus géométriquement
, la courbe qu’il trouve, & dont la
révolution autour de fon axe donneroit la figure de
la fufée y rYa qu’une afymptote, au lieu qu’elle devroit.
en a voir deux ; parce que d’un côté elle doit s’approcher
de plus en plus de fon a x e, fans jamais le toucher
, 6i de l’autre côté s’en éloigner toujours à l’infini.
Au refte la détermination de cette courbe ne feroit
pas d’un grand fecours dans l’Horlogerie, car
quelque parfaits que foient les refforts, ils ne feront
jamais affez uniformément élaftiques, & par la
nature de l’acier, & par le défaut d’exécution, pour
qu’on puiffe fe fervir d’une fufée formée félon une
courbe trouvée d’après une hypothefe quelconque
des tenfions du reffort. Les Horlogers ont trouvé un
moyen plus fûr de lui donner la forme requife, en
fe fervant d’un inftrument nommé levier, voye^ L evier
; par lequel ils vérifient à chaque point de la
fufée, fi la force du reffort eft la même en la mettant
toujours en équilibre avec un même poids.
Les horlogers en Angleterre fe fervent de fufées
dans les pendules à reffort, mais ici on ne les employé
pas. i°. Parce qu’on fait faire le reffort un peu
plus long, & que l’on ne fe fert que des tours qui
font les plus égaux; & i° . parce qu’on peut toujours
conftruire l’échappement de façon que malgré que
la force du reffort diminue à mefure qu’il fe débande,
la pendule aille toujours avec la même jufteffe.
Voye{ les articles PENDULE, ÉCHAPPEMENT, RESSORT,
| 'C.
Après avoir parlé de la forme que doit avoir la fufée
, nous allons expliquer fa conftru&ion. Elle eft com-
pofée d’un arbre (yoy. les PI. ) avec lequel elle ne fait
qu’un feul corps. Cet arbre a deux pivots C & P à
fes deux extrémités; le pivot P doit être affez gros
& affez long pour pouvoir déborder un peu le cadran
, & pour qu’on y puiffe faire un quarré fur lequel
entre la clé. Lorlqu’on veut monter la montre J
le pivot C doit être beaucoup plus menu, parce que
le rayon de la fiifée étant beaucoup plus petit à fon
fommetqu’à fa bafe, le frottement fur ce pivot en
eft beaucoup augmenté ; inconvénient auquel on
remédie en quelque façon par la petiteffe de ce pivot.
Parmi tous les avantages que les montres à la
françoife ont fur celles qui font à l’angloife, celui-
ci n’ eft pas un des moindres ; car dans celles-ci le
quarré fe trouvant du côté du fommet de la fufée ,
oblige à faire le pivot de ce côté fort gros, ce qui en
augmente beaucoup le frottement ; frottement déjà
affez confidérable par la petiteffe des bras de leviers
de la fufée de ce cô té, & par l ’augmentation de la
force du reffort.
Du même côté eft le crochet C (voyeç les PI.) qui
fert à empêcher qu’on ne remonte la montre plus
qu’il ne faut. f^oye^ Guide-C haîne.
Du côté de fa bafe elle a un petit rebord, où il
y a des dents dont la figure reffemble à un triangle ;
ces dents compofent ce que l’on appelle le rochet, on
en verra l’ufage plus bas.
La grande roue ou première roue ( V'. les PI.') portée
fur l’arbre de la fufée, vient s’appliquer contre fa
bafe. Elle eft mobile circulairement fur cet arbre,
qui pour cet effet eft rond. Pour qu’elle pofe continuellement
contre la bafe de la fufée, elle eft retenue
par la goutte i!" qui tient à frottement fur cet
arbre, & qui entrant dans la, petite creufure de la
roue, la preffe toujours contre cette bafe. Voyeç
Grande Roue, Goutte, &c. voyez les Planches,
& leur explication.
Lorfque la fufée & la grande roue font montées
enfemble, le cliquet C de la grande roue entre dans
les dents du rochet, & il s’y engage de façon que la
fufée tournant dans le fens où elle eft entraînée par
la chaîne la montre allant, lès dents s’appuient fur
le cliquet; enforte que la fufée & la grande roue
tournent enfemble du même côté; & qu’au contraire
quand on tourne la fufée dans le fens oppofé, elle
fe meut indépendamment de la grande roue, le cliquet
ne s’oppofant plus à fon mouvement. Cette mécanique
eft néceffaire pour qu’en remontant la montre
, la fufée tourne fans la grande roue ; car un point
d’appui étant néceffaire, fi la grande roue tournoit
avec la fufée, il feroit impoflible de remonter la
montre.
Il y a des fufées qui font difpofées de façon qu’en
tournant leur quarré d’un fens ou de l’autre, on remonte
monte egalement la montre. On appelle les montrés
qui ont de cesfprtes As fufées, montres à mvrogne 'm
comme il eft rare, que l’on en faffe ufage, nous n’en
parlerons point, d’autant plus que ces fortes Aefu-
fèes font tort inutiles, Montre. ( ï ) ■
Fusée, (Machine à tailler les) Méchanique, Horlogerie
, &c. c’eft un outil dont fe fervent les Horlogers
pour former les rainures qui font fur les fufées
des montres.
On fait par ce qui précédé, i°. que la fufée eft une
efpece de cône tronqué, fur lequel s’enveloppe une
chaîne dans une rainure faite en ligne fpirale, fur fon
contour, de la bafe au fommet. Un bout de la chaîne
tient au barillet, & l’autre à la fufée.
2°. Que la propriété de la fufée eft de rendre égale
l’a&ion du reffort fur le roiiage.
3°. Qu’au moyen de la grandeur différente de fes
rayons, lorfque le reffort eft à fon premier tour de
bande , & par conféquent lorfque fa force eft
moindre, la chaîne s’enveloppe fur la plus grande
partie de la fufée (ou plus grand rayon), & agit avèc
la même force lur le roiiage, que dans le cas où le
reffort étant monté au plus haut, la chaîne s’enveloppe
fur le plus petit rayon de la fufée ; & de même
à tous les autres degrés de tenfion du reffort; car à
mefure qu’on le remonte, fa force augmente : mais
en même tems auffi les diamètres de la fufée diminuent
; de forte que l’aûion du reffort fur le roiiage
eft toujours la même.
4°. Qu’une autre propriété de la fufée, & qui eft
line fuite de cette égalité de force fur le roiiage, eft
de faire marcher plus lpng-tems une montre, en fe
fervant cependant d’un même reffort ; ce qu’il eft
aifé de concevoir. Le barillet qui contient le reffort
& fur lequel s’enveloppe la chaîne, eft cylindrique ;
je le fuppofe du même diamètre que la plus grande
partie de la fufée : dans ce cas fi toutes les parties du
premier tour de bande du reffort étoient égales en-
tr’elles, lorfque la fufée fait un tour, le barillet en feroit
auffi un ; mais comme cela n’eft pas, & qu’à chaque
degré de tenfion du reffort fa force augmente, &
qu e , comme nous l’avons dit, les rayons de la fufée
diminuent dans la même proportion, il s’enfuit de-là
que pour le développement de la chaîne fur un tour
de barillet, la fufée fera plus d’un tour ; 8c elle en fera
d’autant plus que le reflort deviendra plus fort, jufqu’au
point qu’étant au-haut, Sc dans ce cas fuppo-
fant que fa force devînt double de celle de fon premier
tou r, la partie de la fufée fur laquelle la chaîne
s’enveloppe, fera de la moitié plus petite qu’au premier
tour, & par conféquent un tour.de barillet en
fera faire deux à la fufée.
5°. Qu’afin que les diamètres de la fufée foient
moins inégaux entre eux , on n’employe dans les
montres qu’environ quatre tours du reffort, quoiqu’ils
en puîffent cependant faire davantage : qu’on
ne prend que les tours qui ont le plus d’égalité entre
eux en ne remontant pas ce reflort jufqu’au-haut,
& en ne le laiffimt pas développer juiqu’au-bas ; d’où
l’on voit par ce qui vient d’etrfe dit, que les formes
des fufées ne font pas exaftement les memes, & qu -
elles font relatives aux différentes forces des refforts.
Ainfi on ne les détermine, que par l ’execution ; car
ce qui fe feroit par la théorie, quoique latislaifant,
feroit en pure perte. On a acquis par l’habitude une
formé approchante de celle qui convient aux fufées;
de forte qu’on les tourne d’abord de cette forme qui
approche affez de celle d’une cloche ; enfuite on les
taille avec les outils que nous allons décrire ; enfin on
les égalife par le moyen d’un levier qui s’ajufte lur le
quarré de la fufée. Ce -levier porte un poids mobile,
que l’on met d’équilibre âvec la moindre force du
reffort, & l’on diminue les parties de la fufée qui font
irop groffes. V o y e{ L e v i e r à égaler les Fusées.
Terni V IL
Je ne cotftlbis ni l’auteur de la fufée, ni celui de la
première machine pour les tailler. Il y a apparence
que comme les premières montres ont été faites en
Angleterre, de même cette partie effentielle pour la
jufteffe des montres y a été trouvée. Au refte ces
machines n’ont pas été compofées d’abord telles qu’elles
font à-préfent. Je donnerai la defeription des
deux conftru&ions de machine à tailler les fufées. La
première eft tirée du traitéd'Horlogerie de M. Thiout,
pag. 66". Je ne fais que tranferire fa defeription ; fa
planche même a fervi.
On dit que la fécondé eft de la compofition de feu
M. le Lievre , horloger fort habile. M. Profelle fon
neveu, a bien voulu me communiquer cette machine.
Defeription de la machine à tailler les fufées à droite.
& à gauche, avec la meme vis, par M. • Regnauld de
Chaalons, p. €6. du traité d?Horlogerie de M. Thiout.
« Les pièces U 8c X(voyeç nos Planches) marquent le
» chaffis qui porte les pièces depuis Z jufqu’en V.
» Z V eft un arbre, que l’on peut tarauder à droite
» ou à gauche ; cela ne fait rien, quoique celui-ci le
» foit à gauche, 8c dans le fens que font taillées les
» fufées à l’ordinaire. Cet arbre eft fixé fur la piece
» X par les deux tenons g g , qui font la même piece
» que X , en le faifant entrer par g. On paffe enfuite
» une piece en forme de canon, taraudée en-dedans
» y y fur le même pas que la vis. On place fur la mê-
» me vis une autre piece taraudée X , qui fert à dé-
» terminer le nombre de tours que l’on veut mettre
» fur la fufée. On paffe l’arbre dans le tenon g , Sc
» après avoir placé la manivelle T deffus en m, dont
» le bout eft quarré, on le fixe par le moyen de l’é-
» crou n. A la piece .y eft jointe celle ƒ ou petit b ras,
» par la cheville ç qui fait charnière avec elle; 8c
» comme cette piece ƒ eft fixée au chaffis par une
» autre cheville au point k , ce point lui fert de cen-
» tre lorfque l’on tourne l’arbre. Par le moyen de la
» manivelle, la v is fait avancer ou vers g , ou vers
» X . La piece y ne peut tourner avec la vis, & fe
» promener feulement deffus. Ce mouvement d’al-
» 1er & de venir eft répété fur le grand bras e , par
» le moyen de la traverfe a a , que l’on fixe fur l’un.
» &c fur l’autre bras par les chevilles b, que l’on met
» dans les trous dont on a befoin, à proportion des
» hauteurs dt fufée. Ce grand bras a vers fon milieu
» un emboîtement L percé quarrément, dans lequel
» paffe la piece L, dont une partie de la longueur eft
v> limée quarré; elle remplit l’emboîtement L: l’au-
» tre partie eft taraudée 8t paffée dans un écrou N £
» elle fert à faire avancer pu reculer la piece. Z. , qui
» à l’autre extrémité porte une tête fendue, dans la-
» quelle on fixe à charnière la piece H y par la che-
» ville L ; laquelle piece H porte à l’autre bout l’é-
» chope G , qui pafle au-travers de la tête de cette
» piece, où elle eft fixée par la vis 7. L’arbre Z V
» porte une alonge ou affiette C , percée en canon,
» laquelle entre dans l’arbre, & y eft fixée par une
» cheville à l’endroit Z . C’eft deffus cette affiette
» que l’on fait porter la bafe de la fufée A , dont la
» tige entre dans le canon B du taffeau ou affiette.
» Cette fufée eft fixée à cet endroit par l’autre vis
j » D y pour y être taillée.
» Tout étant ainfi difpofé , il faut confidérer
» deux mouvemens différens au grand bras e; par
» exemple , fi on le fixe au chaffis par une de fes
» extrémités, & par la cheville R ; & que l’on tour-
» ne la manivelle T , tellement que la piece y avan-
» ce vers G , & qu’alors on baiffe la barre H qui por-
» te l’échoppe G jufqu’à ce qu’elle touche la lu-
» perficie de la fufée A ; cette fufée fe taillera dans le
» lens que la vis de l’arbre ^ v eft taraudée, qui eft à
m gauche. Si au contraire on ôte la cheville R , qui
» fervoit à fixer le grand bras e ; fk que l’on donne à
D d d