cas obliques, la feule terminaifon « y eft changée ;
koriL-in-is , hom-in-i ; hom-in-em , hùm-in-e, hom-in-es ,
hom-in-utn, hom-in-ibus. De même de t:mp-or-is, génitif
de tempus, font venus temp-or-i, temp-or-e, temp-
or-a, temp-or-um, temp-or-ibus. C ’eft par une fuite de
cet ufage du génitif, que ce cas a été choifi comme
le ligne de la déclinaifon, voyeç D éc linaison.
C ’eft le fignal de ralliement qui rappelle à une même
formule analogique tous les noms qui ont a ce cas
la même terminaifon. Il efl vrai que la diftm&ion
des déclinaifons doit réfulter des différences de la
totalité des cas ; mais ces différences fuivent exaéle-
nicnt celles du génitif, & par conféquent ce cas fcul
peut fuffire pour cara£térifer les déclinaifons.
Les noms de la première ont le génitif fxngulier en
e t , comme menfa ( table ) gén. menfoe : ceux de la
fécondé ont le génitif en g , comme liber (livre) , génit.
libri. Ceux de la troifieme l’ont en is , comme
jjater ( pere ) , gén. patris. Ceux de la quatrième
l’ont en u s , comme fruclus (fruit), génit. fruclus; ÔC
ceux de la cinquième l’ont en ei, comme dits (jour),
génit. diei. On en trouve quelques-uns dont le génitif
s’éloigne de cette analogie ; ce font des noms
grecs auxquels l’ufage de la langue latine a confervé
leur génitif originel : Andromache (Andromaque) ,
génit. And.roma.chts, première déclinaifon : Orpheus
( Orphée ) , génit. Orphei ÔC Orpheos , fécondé déclinaifon
: fyntaxis (fyntaxe), génit. fyntaxis ÔCfyn-
taxcos, troifieme déclinaifon.
Ces exceptions font, pour ainfi dire, les reftes
des incertitudes de la langue naiflante. Les cas, &
fpécialement le génitif, n’y furent pas fixés d’abord
à des terminaifons confiantes, ôc les premières qu’on
adopta étoient greques, parce que le latin eft comme
un rejetton du grec ; elles s’altérèrent infenfible-
ment pour fe défaire de cet air d’emprunt, 8c pour
fe revêtir des apparences de la propriété.
Ainfi as fut d’abord la terminaifon du génitif de
la première déclinaifon, ôc l’on difoit mufa, mufas,
comme les Doriens p.oZea. , piattç : outre le pater fa-
milias connu de tout le monde, on trouve encore
bien d’autres traces de ce génitif dans les auteurs ;
dans Ennius, dux ipfe vias, pour vice ; ÔC dans Virgile
(Ænatid. x}.~) nihil ipfa , nec auras , nec fonitus
mtmor, félon Jules Scaliger qui attribue à l’impéritie
le changement Sauras en aura. Le génitif de la
première déclinaifon fut aulfi en aï , terrai, aulaï ;
on lit dans V irgile, aillai in medio, pour au La : comme
on rencontre plus d’exemples de ce génitif dans
les poètes, on peut préfumer qu’ils l’ont introduit
pour faciliter la mefure du vers, ÔC qu’ils fe régloient
alors fur la déclinaifon éolienne, où au lieu du
pésaç dorien, on difoit /xiraiç.
Les noms des antres déclinaifons ont eu également
leurs variations au génitif. On trouve plufieurs
fois dans Salluftefenati. Aulu-Gelle ( lib. VI. c. xvj.')
nous apprend qu’on a dit fenatuis, ftucluis; ôc le génitif
fenatus , fluet us paroît n’en être qu’une contraction.
Le génitif de dits fe préfente dans les auteurs
fous quatre terminaifons différentes : i° . en es, comme
équités daturos illius dies panas (Cic. pro Sext.) ;
a°. en e, comme Céfar l’avoit indiqué dansfies analogies
, & comme Servius ôc Prifcien veulent qu’on
le life dans ce vers de Virgile (/. Géorg. 208
Libra die fomnique pares ubi fecerit horas.
30. e n « , comme dans cet autre paflage du même
poète, rnunera loetitiam que dii ; quod imperitiores dei
legunt, dit Au lu -G elle, lib. j x . cap. xjv. 40. enfin
en ei, & c’eft la terminaifon qui a prévalu.
II. Dans la dérivation philofophique le génitif eft.
la racine génératrice d’une infinité de mots, foit dans
la langue latine même, foit dans celles qui y ont pui-
fé ; on en reconnoît fenfiblement la figurative dans
fes dérivés.
Ainfi du génitif des adje&ifsl’on forme, à peu d’exceptions
près, leurs degrés comparatif & fuperlatif,
en ajoutant à la figurative de ce cas les terminaifons
qui caraûérifent ces degrés : docli, docli-or, docli-Jfi-
mus ; prudenti-s, prudend-or, prudenti-fftmus. Il en eft
de même des adverbes dérivés des adjeûifs ; ils prennent
cette figurative au pofitif, Ôc la confervent dans
les autres degrés : prudent-is, prudent-er, prudent-ius ,
prudent-iftimé.
Le génitif des noms fert à la dérivation de plufieurs
efpeces de mots : de patris font fortis les noms depa-
tria, patriciatus , patratio , patronus , patrona , pa-
truus ; les adjeétifspatrius, patricius, patrimus ; l’adverbe
patrie ; les verbes patrare, patriffare. On trouve
même plufieurs noms dont le génitif, quant au
matériel, ne diffère en rien de la fécondé perfonne
du fingulier du préfent abfolu de l’indicatif des verbes
qui en font dérivés : Lex, legis ; lego , legis : dux,
ducis ; duco, ducis. Quelques génitifs inufités hors de
la compofition, fe retrouvent de même dans des verbes
compofés de la même racine élémentaire : ubi-
cen , tibi-cinis ; con-cino , con-cinis ; parti-ceps , parti-
cipis ; ac-cipio, ac-cipis.
Nous avons dans notre langue des mots qui viennent
immédiatement d’un génitif latin ; tels font capitaine,
capitation, qui font dérivés de capitis ; tels encore
les monofyllabes art, mort, part, fort, &c. qui
viennent des génitifs art-is , mort-is, part-is, fort-is ,
dont on a feulement fupprimé la terminaifon latine.
De-là les dérivés fimples : de capitaine, capitainerie ;
d'art, unifie , artifement ; de mort, mortel, mortellement,
mortalité, mortuaire ; de part', partie , partiel ;
de fort, forte ,fortable, &c.
III. Dans la compofition, c’eft encore le génitif
qui eft la racine élémentaire d’une infinité de mots ,
foit primitifs, foit dérivés. On le voit fans aucune
altération dans les compofés legis-lator, legis-latio ;
juris-peritus , juris-prudentia ; agri-cola, agri-cultura.
On en reconnoît la figurative dans patri-monium,pa-
tro-cinium , fronti-fpicium , juri-fiitium ; &C on la retrouve
encore dans horni-cidium malgré l’altération;.
hom-o, c’eft le nominatif ; hom-in-is, c’eft le génitif
dont la figurative eft in ; &c la confonne n de cette
figurative eft retranchée pour éviter le choc trop
rude des deux confonnes n e , mais i eft refté.
Nous appercevons fenfiblement la même influence
dans les mots compofés de notre langue, qui ne font
pour la plupart que des mots latins termines à la fran-
çoife ; pat à-moine, légis-lateur , légis-lation , jur'ts-
confulte , juns-prudence, agri-culture, frontis-pice ,
homi-cide : & l’analogie nous a naturellement conduits
à conferver les droits de ce génitif dans les mots que
nous avons compofés par imitation;part-ager, as-
fort-ir , res-fort-ir, & c .
On voit par ce détail des fervices du génitif dans
la génération des mots, que le nom qu’on lui adonné
le plus unanimement a un jufte fondement ; quoiqu’il
n’exprime pas l’efpece de fervice pour lequel il paroît
que ce cas a été principalement inftitué, je veux
dire la détermination du fens vague du nom appella-
tif auquel il eft fubordonné.
C ’eft pour cela qu’en latin iln ’eft jamais conftruit
qu’avec un nom appellatif, quoiqu’on rencontre fou?
vent des locutions où il paroît lié à d’autres mots :
mais on retrouve aifément par l’ellipfe le nom appel?
latif auquel fe rapporte le génitif.
I. Il eft quelquefois à la fuite d’un nom propre ;
Terentia Ciceronis , fupp. uxor ; Sophia Septimi , lupp.
filia.
\i. D ’autres fois il fuit quelqu’un de ces adjeélifs
préfentés fous la terminaifon neutre, & réputés pronoms
par la foule des Grammairiens; ad id locorum,
c’ eft-à-dire ad id punctum locorum j quidrei eft? c’eft-
à-dire quod momentum rei eft ?
ÏII. Souvent il paroît modifier tout autre adje£if
dont le corrélatif eft exprimé ou fuppofé : plenus vin
t, laffus viarum , fupp. de copia vint, de labore via-
rum. C ’eft la même chofe après le comparatif & le
fuperlatif ; fortior manuum, primus ou doctiffimus omnium
, fupp. è numéro manuum, è numéro omnium.
IV. Plus fouvent encore le génitif eft à la fuite
d’un verbe, & les méthodiftes énoncent exprefle-
ment qu’il en eft le régime ; c’eft une erreur, il ne
peut l’être en latin que d’un nom appellatif, & l’el-
lipfe le ramene à cette conftruélion. Il eft aifé de le
vérifier fur des exemples qui réuniront à-peu-près
tous les cas. Eft regis, c’eft - à - dire eft ojftcium regis.
Refert Ccefaris, c’eft-à-dire refert ad rem Coefaris, comme
Plaute a dit ([in Perfé). Quid id ad me aut admeam
rem refert ? Intereft reipublicoe ; eft inter négocia , eft inter
commoda reipublicoe. Manet Romtz, c’eft à-dire ma-
net in urbe Romoe.
On trouve communément le génitif après les ver-
bes pcenittre, pudere, pigere , toedere , miferere ; & les
rudimentaires difent que ces verbes font imperfon-
nels, que leur nominatif fe met à l’accufatif, 8c leur
régime au génitif. Il eft aifé d’appercevoir les abfur-
dités que renferme cette décifion : nous ferons voir
au mot Impersonnel, que ces verbes font réellement
perfonnels, 8c que leur fujet doit être au nominatif
quand on l’exprime. Nous allons montrer ici
que leur prétendu régime au génitif eft le régime déterminatif
du nom qui leur fert de fujet ; 8c que ce
qu’on envifage ordinairement comme leur fujet fous
la dénomination ridicule de nominatif, eft véritablement
leur régime objectif.
On lit dans Plaute (Stick, in arg.) & me quidemhoec
condicio nunc non pcenitet : il eft évident que hoec con-
ditio eft le fujet de pcenitet, 8c que me en eft le régime
obje&if ; 8c l’on pourroit rendre littéralement ces
mots me hoec conditio non pcenitet, par ceux-ci : cette
condition ne me peine point, ne me fait aucune peine ;
c ’eft le fens littéral de ce verbe dans toutes les cir-
conftances. Cet exemple nous indique le moyen de
ramener tous les autres à l’analogie commune, en
fuppléant le fujet foufentendu de chaque verbe : pcenitet
me facli veut dire confcientia facti pcenitet me , le
fentiment intérieur de mon aûion me peine.
Pareillement dans cette phrafe de Cicéron ( pro
domo) , ut me non folnm pigeâtftultitioe meoe , fed etiam
pudeat ; c’eft tout Amplement, ut confcientia ftultitioe
meoe non folum pigeât , fed etiam pudeat me.
Dans celle-ci, funt homines qaos infamioe fuoe ne-
que pudeatneque tctdeat (2. verr.') ; fuppléez lurpitudo,
ôc vous aurez la conftruûion pleine : funt homines
quos turpitudo infamioe fuoe neque pudeat neque toedeat.
De même dans cette autre qui eft encore de C icéron
, miferet me infelicis familioe ; fuppléez fors, &
vous aurez cette phrafe complété ,/ors infelicis familioe
miferet me.
On voit donc que les mots facli, ftultitioe, infamioe
, familioe, ne font au génitif dansxes phrafes,
que parce qu’ils font les-déterminatifsdes noms conf-
cientia, turpitudo, fors, qui font les fujets des verbes.
Le.génitif ie conftruit encore avec d’autres verbes1;
quanti emifti ? c’eft-à-dire ,pro re quanti pretii emifti ?
Cicéron (Attic. viij.) parlant de Pompée, dit facioplu-
ris omnium hominum neminem; c’eft comme s’il avoit
dit ,facio neminem ex numéro omnium hominum virum
pluris momenti : c’eft la même chofe du paftage de
Térence (inPhorm.) meritb tefemper maximifeci, c’eft-
à-dire virum maximi momenti. Mais fi le régime ob-
je&if eft le nom d’une chofe inanimée, le nom appellatif
qu’il faut fuppléer, c’eft res ; illosfeeleftos qui
tuum fecerunt fanum parvi (Plaut. in Rudent. ) , c’eft-
à-dire, qui tuum fecerunt fanum rem parvi pretii. Accu-
fare furti , c’eft accitfare de crimine furti ; condemnare
capitis, c’eft condemnare ad pcenam capitis i Obliyifci,
edrdari , tneminiffe alicujus rei ; fuppléez metnoriam
alicujus rei; c’eft ce même nom qu’il faut fous-enten-
dre dans cette phrafe de Cicéron & dans les pareilles
, tibi tuarum virtutum veiùat in mentem (de orat. if.
(T/.) fuppléez memoria.
V . Quand on trouve un génitif avec un adverbe,
il n’y a qu’à fe rappeller que l’adverbe a la valeur
d’une prépofition avec fon complément, voye^ A d v
e r b e ; & que ce complément eft un nom appellatif
: en décomposant l’adverbe, on retrouvera l’ana-
logie.Ubi terrarum, décompofez ; in quo loco tenarum:
nufquam gentium , c ’eft-à-dire in nullo loco gentiuni.
Il faut remarquer ici qu’on ne doit pas chercher par
cette voie l’analogie du génitif, après certains mots
que l’on prend mal-à-propos pour des adverbes de
quantité, tels que parum, multum, plus, minus,plu-
rimum, minimum , fatis, & c . ce font de vrais adjectifs
employés fans un nom exprimé, & Souvent comme
complément d’une prépofition également fous-
entendue : dans ce fécond c a s , ils font l’office de
l’adverbe : mais par-tout, le génitif qui les accompagne
eft le déterminatif du nom leur corrélatif ; J'atis
nivis, c’eft copia fatis nivis, ou copia conveniens nivis.
De l’adjeftiffatis vient fatioh
VI. Enfin on rencontre quelquefois le génitif à la
fuite d’une prépofition ; il fe rapporte alors au complément
de la prépofition même qui eft fous-enten-
due. A d Cafloris, fuppléez oedem;ex Apollodori (Cic.)
fuppléez chronicis ; labiorum tenus, fuppléez extremi-
tate.
Nous nous fommes un peù étendus fur ces phrafes
elliptiques ; premièrement, parce que le génitif
qui eft ici notre objet principal, y paroiflant employé
d’une autre maniéré que fa deftination originelle ne
femble le comporter, il étoit de notre devoir de
montrer que ce ne font que des écarts apparens, &
que les aflertions contraires des méthodiftes font
raufles & fort éloignées du vrai génie de la langue
latine : en fécond lieu , parce-que nous regardons la
connoiffance des moyens de fuppléer l’ellipfe, comme
une des principales clés de cette langue*. 7
On doit être fuffifammerit convaincu par tout ce
qui précédé, que le génitif fait' l’office de déterminatif
à l’égard du nom auqùè’l il eft fubordonné : mais
il faut bien fe garder de conclure que ce foit le feul
moyen qu’on puiffe employerpour cette détermination.
Il faut bien qu’il y en ait d’autres dans les langues
dont les noms ne reçoivent pas les inflexions app
elles cas.
En françois on remplace aflez communément' là
fonftion àwgénitiflatm par le fervice de la prépofition
de, qui par le vague défia fignification femble exprimer
un rapport quelconque ; ce rapport eft fpéci-
fié dans les-différentes occurrences (qu’on nous permette
les termes propres ) par la nature de fon antécédent
& de fon conféquent. Le créateur de l ’univers,
rapport de là caufe à l’effet : les écrits dé Cicéron-,
rapport de l’effet à la caufe : unvafed'or, rapport de
la forme à la matière : l ’or de ce vafe , rapport de là
matière à la forme, &c. En hébreu , on employé'des
préfixes, fortes de prépofîtiohs inféparables, dont
quelqu’une eft fpécialement déterminative d’un terme
antécédent. Chaque langue a fon génie 8d fes ref-
fources.
La langue latine elle-même n’èft pas tellement ref-
trainte à fon génitif déterminatif, qu’elle ne puifle
remplir les mêmes vues par d’autres moyens: Evan-
drius enfts., c’eft la même ôào(è qù'enjis Evandri ; /&.
ber meus, c’eft liber mei , liber pertinens ad me ; domus
rema, c’eft domus régis. Oh Voit que le ràppdrt dé
la chofe poffédée au poffeffeur; s’exprime par un ad-
je â if véritablement dérivé du nom du poflefleur ,
mais qui s’accorde avec le nom de la chofe poffédée';
parce que le rapport d’appartenance eft réellement
en elle.& s ’identifie avec elle.