
nusphyjîquc a commencé par propofer de revenir au j
mélanoe des deux femences, fait de celle qui eft attribuée
à la femme, comme de celle de l’homme ; 6c
pour rendre raifon du réfultat de ce mélange, il a
recours à l’attraCtion : pourquoi, dit-il, fi cette force
exiftl dans la nature, n’auroit-elle pas lieu dans la
formation des animaux ? Qu’il y ait dans chacune
des femences des parties deftinées à former le coeur,
les entrailles, la tête, les b ras, 6c les jambes ; & que
ces parties ayent chacune un plus grand rapport d u*
nion avec celle qui pour la formation de l’animal,
doit être fa voifine, qu’avec toute autre, le fétus fe
formera ; & fut-il encore mille fois plus organifé qu il
n’eft, ajoute ce phyficien , il fe formeroit ; ce qu il
aflûre comme une induCtion, par comparailon de ce
qui fe paffe dans la formation de l’arbre de Diane, qui
fe fait par un pareil principe du rapport d’affinité ;
d’après lequel il ne s’agit, dans le phenomene de
cette végétation, que de rapprocher des parties métalliques
abfolument fans organifation, qui ne forment
après tout dans cette réunion, rien de plus admirable
que ce qui fe paffe à l’égard de la formation
de la glace dans de petites lames d’eau, dans lefquel-
les la congélation commence toujours par former de
petites ramifications de glace abfolument femblables
à des branches de fougere.
Mais dans l’un 6c l’autre cas, ce font des particules
de matière homogènes qui s’unifient les unes aux
autres d’une maniéré affez uniforme dans-la difpofi-
tion & la fubftance de toutes ces ramifications ; au
lieu que dans la formation des animaux , il n’y a
point d’uniformité dans l’arrangement 6c dans la
confiftance des parties qui les compofent. La force
qui unit les molécules néceffaires pour les parois d’un
conduit dans le corps animal, doit être de nature à
éviter d’attirer de ces molécules dans l’efpace qui
doit former la cavité de ce vaiffeau. Cette force doit
attirer 6c unir entre elles un plus grand nombre de
molécules pour les parties d’une fubftance plus den-
fe , comme les os,que pour les parenchymes. Voi-
-là des modifications néceffaires dont on ne trouve
point le principe dans l’attraCtion, qui forme l’arbre
de Diane ou les ramifications de la glace : d’ailleurs
les parties élémentaires du corps humain étant vraif-
femblablement les mêmes pour tous les organes qui
le compofent, 6c ne différant dans les différens ag-
grégés qui en réfuitent, que par la différence de leur
pofition différemment combinée ; il s’enfuit que la
force qui diftribue ces parties intégrantes , ne peut
pas être foumife à une feule loi,telle que celle du rapport
de l’affinité. Il y a des vaiffeaux de différente
efpece dans chaque partie du corps ; il y a des muf-
cles, des tendons, des nerfs, des os dans les doigts;
il y a de toutes ces parties dans les orteils : cependant
chacun de ces organes eft différemment combiné tant
dans l’un que dans l’autre ; quoique les parties élémentaires
d’un mufcle du doigt puiffent vraiffem-
blablement entrer dans la compofition d’un mufcle
du p ié , 6c réciproquement. Ainfi le total des parties
compofées des mains, eft un tout hétérogène, mais
feulement par rapport à la différence des organes qui
entrent dans la compofition des mains : la différence
n’étant donc que dans l’organifation, de ce qu’un
principe particulier de mouvement peut feul donner
une forme déterminée à un corps, mais fans organifation
, il ne s’enfuit pas qu’il puiffe être fuffifant pour
la formation d’un corps organifé : ainfile fyftème de
la Vénusphyjique femble manquer effentiellement par
fon propre fondement, quelque fpécieux qu’il pa-
roiffe d’abord, fur-tout pour rendre raifon des ref-
femblances des enfans aux peras & meres, des conformations
monftrueufes, & de la plupart des autres
phénomènes relatifs à la génération, dont l’explication
eft fi difficile à donner.
Peu de tems après que ce dernier fyftème a été mis
au jour, il en a paru un autre d’une nature approchante,
mais plus compliqué; c’eft celui du célébré
auteur de Vhijloire naturelle générale & particulière. Il
admet d’abord que les femelles, ainfi que le fyftème
précédent, ont une liqueur féminale prolifique, tout
comme les mâles ; il admet encore, d’après un grand
nombre d’expériences 6c d’obfèrvations microfco-
piques , que cette liqueur, dans chacun des deux fe*
xes, contient des corpufcules en mouvement ; mais
il prétend être fondé à aftïirer que ces petits corps
ne font pas de vrais animaux , mais feulement des
parties des molécules qu’il appelle organiques, parce
qu’elles ont la propriété exclufive de pouvoir entrer
dan$ la compofition des corps organifés ; il les regarde
cependant comme vivantes, quoique prifes fépa-
rément elles foient fans organifation. Selon cet auteur
, tous les animaux mâles 6c femellès ,tous ceux
qui font poui’Vus des deux fexes ou qui en font privés
; tous les végétaux , de quelque efpece qu’ils
foient ; tous les corps, en un mot, vivans 6c végé-
tans, font compofés de parties organiques qu’il prétend
que l’on peut démontrer aux yeux de tout le
monde. Ces parties organiques font en grande quantité
dans les liqueurs féminales des animaux, dans les
germes des amandes des fruits,dans les graines , enfin
dansles parties les plus fubftantielles de l’animal
ou du végétal.
C ’ e f t d e l a r é u n i o n d e s p a r t i e s o r g a n i q u e s r e n v
o y é e s d e t o u t e s l e s p a r t i e s d u c o r p s d e l ’ a n im a l o u
d u v é g é t a l , e n t a n t q u ’ e l l e s c o m p o f e n t l e f u p e r f l u d e
c e l l e s q u i f o n t d e f t i n é e s à l a n u t r i t i o n 6c a u d é v e l o p p
em e n t d e l ’ in d i v i d u , q u e f e f a i t l a r e p r o d u c t i o n d e c e s
ê t r e s t o u j o u r s f e m b l a b l e à c e l u i d a n s l e q u e l e l l e s ’o p
è r e ; p a r c e q u e l a r é u n i o n d e c e s p a r t i e s o r g a n i q u e s
n e f e f a i t q u ’ a u m o y e n d u m o u l e i n t é r i e u r , c ’ e f t - à -
d i r e d a n s l ’ o r d r e q u e p r o d u i t l a f o rm e d u c o r p s d e l ’ a n
im a l o u d u v é g é t a l ; S i c ’ e f t e n c ju o i c o n f i f t e l’ e f -
f e n c e d e l ’ u n i t é & d e l a c o n t i n u i t é d e s e f p e c e s q u i
d è s - lo r s d ’ e l l e s -m ê m e s n e d o i v e n t j a m a i s s ’ é p u i f e r . .
Pour un plus grand détail des idées de notre natu-
ralifte fur ces parties organiques 6c le moule où elles
s’arrangent, il faut recourir à fon ouvragé même,
& à l'art. Organiques ( parties) , où on en trouvera
l’expofition abrégée qui donneroit trop d’éten-,
due à celui-ci.
Comme l’organifation de l’homme & des animaux
eft la plus parfaite & la plus compofée, dit M. de
Buffon, leur reproduction eft aufîi la plus difficile 6c
la moins abondante ; il prend pour exemple celle de
l’homme. Il conçoit que le développement ou l’ac-
croiffement des différentes parties de fon corps , fe
faifant par une force propre à faire pénétrer intimement
dans le moule intérieur des organes , les molécules
organiques analogues à chacune de c.es parties
; force qui ne peut être autre que celle de l’attraction
: toutes ces molécules organiques font abfor-
bées dans le premier âge, 6c entièrement employées
au développement : par conféquent il n’y en a qu©
peu ou point de fuperflues, tant que le développement
n’eft pas achevé : c’eft pour cela que lés enfans
font incapables d’engendrer ; mais lorfque le corps a
pris la plus grande partie de fon accroiffement, il
commence à n’avoir plus befoin d’une auffi grande
quantité de molécules organiques pour fe développer
ultérieurement. Le fuperflu de ces mêmes molécules
qui ne peut pas trouver à fe faire un établiffe-
ment local en pénétrant les parties du corps organifé
, parce que celles-ci ont reçu tout ce qu’elles pou-
voient recevoir, eft donc renvoyé de chacune des
parties du corps dans des réforvoirs deftinés à les recevoir
; ces réfervoirs font les véficules féminales
dans l’homme, 6c dans la femme les tefticules, dont
les corps glanduleux contiennent ainfi une vraie liqueur
ipieur féminale qui diftille continuellement fur la matrice
6c la pénétré , 6c qui y eft même auffi portée
par les trompes enfuite de leur éreCtion, dans les cir-
conftances propres à l’exciter. Les molécules orga-
. niques forment dans ces différens réfervoirs la liqueur
prolifique, qui dans l’un & l’autre fexe eft, comme
l ’on v o it, une efpece d’extrait de toutes les parties
du corps ; enforte que la liqueur féminale du mâle répandue
dans le vagin, & celle de la femelle répandue
dans la matrice, font deux matières également
aCtives, également chargées de molécules organiques
propres à la génération : ces deux liqueurs ont entre
elles une analogie parfaite ; puifqu’elles font compofées
toutes les deux de parties non - feulement fimi-
lairespar leur forme, mais encore abfolument femblables
dans leur mouvement 6c dans leur aCtion :
'ainfi par le mélange des deux liqueurs féminales,
cette activité des molécules organiques de chacune
des liqueurs, eft comme fixee par l’aCtion contre-balancée
de l’une & de l’autre ; de maniéré que chaque
molécule organique venant à ceffer de fe mouvoir,
refte à la place qui lui convient ; & cette place ne
peut être que celle de la partie qu’elle occupoit auparavant
dans le moule intérieur de l’animal, où plutôt
dont elle a été renvoyée avec les difppfitions propres
à entrer dans la compofition de cette partie :
ainfi toutes les molécules qui auront été renvoyées
de la tête de l’animal, fe difpoferont 6c fe fixeront
dans un ordre femblable à celui dans lequel elles ont
en effet été renvoyées ; & il en eft de même de toutes
les autres parties du corps : par conféquent cette
nouvelle difpofitiondes molécules organiques formera
néceffairement par leur réunion un petit être organifé
femblable en tout à l’animal dont elles font
l ’extrait.
On doit obferver, continue notre naturalifte, que
ce mélange des molécules organiques des deux individus
mâle 6c femelle, contient des parties femblables
6c des parties différentes. Les parties femblables
font les molécules qui ont été extraites de toutes les
parties communes aux deux fexes; les parties différentes
ne font que celles qui ont été extraites des parties
par lefquelles les males different des femelles.
Ainfi il y a dans ce mélange le double des molécules
'organiques pour former, par ex. la tête ou le coeur,
ou telle autre partie commune dans les deux indivir
dus ; au lieu qu’il n’y a que ce qu’il faut pour former
les parties du fexe. Or les parties femblables peuvent
agir les unes fur les autres , fans fe déranger, 6c fe
raffembler comme fi elles avoient été extraites du
même corps : mais les parties diffemblables ne peuvent
agir les unes furies autres ni fe mêler intimement,
parce qu’elles ne font pas femblables. Dès-lors ces
parties feules conferveront leur nature fans mélange,
& fe fixeront d’elles-mêmes les premières, fans avoir
befoin d’être pénétrées par les autres ; 6c toutes celles
qui font communes aux deux individus fe fixeront
enfuite indifféremment 6c indiftinCtement, foit celles
du mâle, foit celles de la femelle ; ce qui formera un
être organifé, qui par les parties fexuelles reffem-
blera parfaitement à fon pere fi c’eft un mâle, 6c à
fa mere fi c’eft une femelle ; mais qui, à l’égard des'
autres parties du corps, pourra reflembler à l’un ou
à l’autre, ou à tous les deux, par le mélange plus ou
moins dominant des molécules organiques qui proviennent
de l’un ou de l’autre individu.
Il fuit de tout ce qui vient d’être dit, que les mêmes
molécules qui font deftinées à la nutrition & au
développement du corps animal, fervent auffi à la reproduction
; que l’une & l’autre s’opèrent par la même
matière 6c par les mêmes lois : fe nourrir, fe développer,
& fe reproduire, font donc les effets d’une feule
ik même caufe. Le corps organifé fe nourrit par les
parties organiques des alimens quiluifont analogues;
Tome VH*
il fe développe par la fufeeption intime des fnolécu3
les organiques qui lui conviennent ; & il fe repro*
duit parce qu’il contient un fuperflu de ces mêmes
parties organiques qui lui refiemblent, en reffemblant
à celles qui forment les organes dont il eft com*
pôle.
T el eft le précis du fyftème de M. de Bufton, oui
prefente autant de difficultés dans toutes fes parties •
qu’il fournit de preuves du génie & de la fagacité de
Ion auteur. En effet, peut-on bien concevoir & conçoit
il bien lui-même ce que font les molécules organiques
fans organifation ; des parties vivantes, fans
la condition effentielle qui peut feule rendre la matière
fufceptible des effets auxquels on a attaché l’i*
dee delà vie? Peutonâifementferendre raifon pourri1101
les molécules organiques fuperflues par rapport
a la nutrition 6c au développement, & deftinees à
la reproduction, après avoir néanmoins pénétré comme
les autres dans le moule intérieur , par la force
attraftive, n’y font pas retenues par cette même force,
à 1 egard de laquelle on ne voit rien qui doive
en fufpendre l’effet .^pourquoi & Comment elles acquièrent
la liberté d’être portées dans les réfervoirs?
Si tous les matériaux qui doivent fervir à la conf-
truCtion d’un nouvel animal, fe trouvent réunis dans
les réfervoirs de chacun des individus mâle & femelle
; pourquoi la formation d’un fétus ne fe fait-
elle pas dans le corps du mâle & dans celui de la femelle
, indépendamment l’un de l’autre, comme
cette formation fe fait dans les animaux qui ont les
deux fexes dans chaque individu, tels que les limaçons
? ce qui exclut le point d’appui fourni par les
molécules organiques provenues des parties fexuel-
les? Peut-on le contenter de la folution que donne
1 auteur à cette difficulté, après avoir examiné bien
des réponfes qu’il ne trouve pas fatisfaifantes ? fuffit-
il de dire avec lui, que c’eft uniquement faute d’organes,
de local propre à la formation, à l’accroiffe-
ment du fétus, que le mâle ne produit rien par fa
propre vertu ? Mais s’il s’eft formé des fétus dans
les petites bulles des tefticules des femelles que l’on
a prifes pour des oeufs, pourquoi ne s’en pourroit-il
pas former dans les véficules féminales des mâles ,
qui ont bien plus de capacité que ces bulles ? D ’ailleurs
, pour faire fentir en un mot l’infuffifance de
cette folution ; pourquoi les femelles qui ont tous les
organes néceffaires pour fervir de local à l’oeuvre
de la reproduction, ne fe fuffifent-elles pas à elles-
mêmes , au moins pour former d’autres individus, de
même fexe, fans le concours de la liqueur féminale
des mâles ? M. de Buffon paroît porté à croire que
chaque liqueur féminale, foit du mâle foit de la femelle,
peut feule produire quelque chofed’organifé:
pourquoi ne peut-elle pas produire un animal parfait?
Mais en admettant même que les molécules organiques
diffemblables fournies par les parties fexuelles,
puiffent former un centre de réunion pour les parties
femblables ; pourquoi le mélange des liqueurs féminales
des deux fexes ne produit - il pas toûjours la
formation d’un mâle 6c d’une femelle en même tems;
puifqu’il fe trouve toûjours dans ce mélange des matériaux
fuffifans au-moins pour la reproduction d’un
individu de chacun des fexes?
Mais fi la formation du fétus fe fait par la réunion
des molécules organiques, dans le même ordre que
celui des parties d’où elles ont été renvoyées, quelles
feront les parties organiques deftinées à former
le placenta 6c la double membrane qui forme la double
enveloppe du fétus ? Il n’y a ni dans le mâle ni
dans la femelle aucun moule intérieur qui ait pû préparer
les matériaux de ces organes acceffoires ;il n’y
en a aucun par conféquent qui ait renvoyé dans les
réfervoirs des matériaux propres à former ces organes
particuliers 6c à déterminer l’ordre dans lequel
CCc c