core le long des rivages de la mer, ou à une certaine
diftance de ces rivages.
Dans une maffe de montagnes prife en une partie
déterminée d’un continent, il eft toujours un point
d’élévation extrême d’où les fommets des autres
éprouvent une dégradation 'fenfible, & dans la di-
reftion du prolongement de la chaîne départ & d’autre
.jufqu’à une certaine diftance, & fuivant les parties
collatérales.
Les plus hautes montagnes font entre les tropiques
& dans le milieu des zones tempérées, & les plus
baffes avoifinent les pôles. On a entre ou proche les
tropiques les Cordelieres au Pérou, les pics des Canaries,
les montagnes de la Lune, le grand & le petit
Atla s, le mont Taurus, le mont Imaiis, les montagnes
du Japon. LesCordelieres ont prefque le double
de la hauteur des Alpes. L’ancien continent eft tra-
verfé depuis l’Efpagne jufqu’à la Chine par des chaînes
parallèles à l’équateur ; mais elles jettent des
branches qui fe dirigeant au midi, traverfent & forment
différentes prelqu’iles, comme l’Italie, Malaie,
&c. Les Alpes fe ramifient dans le nord de l’Europe,
& le mont Caucafe dans celui de l’Afie. Le grand &
le petit Atlas font de même parallèles à l ’équateur;
mais il eft à préfumer qu’ils fe lient aux autres chaînes
qui vont fe diriger aufli vers le m idi, pour former
la pointe du cap de Bonne-Efpérance. Dans l’Amérique,
le gifement des montagnes eft du nord au
fud.
Les pentes des montagnes, foit dans la direétion
de leurs chaînes, foit par rapport à leurs adoffemens
collatéraux, font beaucoup plus rapides du côté du
midi que du côté du nord, & beaucoup plus grandes
vers l’oiieft que vers l’eft ; les précipices font plus fré-
quens vers le midi & l’oiieft ; & les plaines ont une
pente infenfible, ainfi que les fommets, vers l’eft &
le nord. ,
Si l’on examine en particulier la configuration de
ces différentes montagnes, que nous venons de prendre
en grand, on obfervera des phénomènes très-
curieux.- "
Les côtés de ces chaînespréfentent des adoffemens
confidérables de terre, ou des avances angulaires
dont les pointes font angle droit avec l’alongement
de la chaîne montueufe : ainfi la chaîne ayant fa direction
du nord au fud, les angles s’étendront d’un
côté vers l’orient, & de l’autre vers l’occident.
Lorfque deux chaînes gifent & courent parallele-
xnentl’une à l’autre, elles forment dans l’entre-deux
des gorges alongées & des vallons figurés , comme
les bords d’un canal creufé par les eaux courantes ;
enforte que l’angle faillant de l’une fe trouve oppo-
fé à l’angle rentrant de l’autre.
Les avances angulaires ou adoffemens font plus
fréquens dans les gorges ou vallons profonds &
étroits, & leurs pointes angulaires plus aiguës : mais
lorfque la pente eft plus douce , l’adoffement s’appuyant
alors fur une bafe plus large, les angles font
plus obtus ; ils font aufli plus éloignés les uns des autres
: c’eft ce qui a lieu dans les vallées qui aboutif-
fent à de larges plaines.
En général on diftingue plufieurs parties dans une
maffe montueufe ; les parties les plus élevées font
des efpeces de pics ou de cônes dégarnis ordinairement
de terre ; au pié on trouve des plaines ou des
vallons plus ou moins étendus, & qui font proprement
les fommets applatis d’autres montagnes , lef-
quelles préfentent fur leurs croupes différens enfon-
cemcns, & font adoffées par des collines dont les
avances angulaires vont enfin fe perdre dans les
plaines étendues. Ainfi nous voyons qu’il y a deux
fortes de plaines ; des plaines en pays bas, & des
plaines en montagnes.
Si une chaîne de montagnes après avoir couru
dans un-continent fe dirige en fe foûtenant encore à
une moyenne hauteur vers une certaine mer, elle s’y
continue fous les flots, & va rejoindre & former par
fes pointes les plus élevées, les îles qui font ordinairement
dans la fuite de fa première direction. Les
parties de la continuation de ces chaînes marines ,
forment des bas-fonds, des écueils, & des rochers à
fleur-d’eau: enforte que ces terres proéminente?
nous tracent fenfiblement la route que fuivent les
chaînes montueufes fous les flots : il y a quelque apparence
qu’il y a peu d’interruption.
En conféquence, les détroits ne font que l’abaif-
fement naturel ou bien la rupture forcée des montagnes
, qui forment les promontoires : aufli leur prolongement
fe retrouve-t-il dans les îles féparées par
les détroits ; & leurs appendices font conftamment
affujettis à l’alignement des chaînes qui traverfent
les continens. Par une fuite de la même difpofition,
les détroits font les endroits où la mer a le moins de
profondeur ; on y trouve une éminence continuée
d’un bord à l’autre; & les deux baflins que ce détroit
réunit, augmentent en profondeur par une progref-
fion confiante ; ce qu’on peut voir dans le Pas de C alais.
Cette correfpondance des montagnes fe remarque
bien fenfiblement dans les îles d’une certaine étendue
,ôc voifines des continens ; elles font féparées en
deux parties par une éminence très-marquée, qui les
traverfe dans la direction des autres îles ou des con-
tinens, & qui en diminuant de hauteur depuis le cen-,
tre jufqu’à leurs extrémités de part & d’autre, s’abaiffe
infenfiblement fous les eaux : il en eft de même de
tous les promontoires & des prefqu’îles; les chaînes
de montagnes les traverfent dans leur plus grande
, longueur &c par le milieu ; telles font l’Italie, la pref-
qu’île de Malaie, &c.
Ce qui fépare deux mers & forme les ifthmes, eft
affujetti à la même régularité. Les ifthmes ne font
proprement que le prolongement des chaînes de montagnes
foûtenues à une certaine hauteur, avec leurs
avances angulaires ou adoflemens collatéraux, mais
moins confidérables que les maffes étendues où les
continens s’élargiffent & écartent les flots en s’arron-
diffant davantage : l’ifthme de Panama eft ainfi formé
par l’abaiffement & le retréciffement de la chaîne
des Cordelieres, qui va fe continuer du Pérou
dans le Mexique.
C’eft par une fuite de la dépendance des configurations
du baflin de la mer avec le prolongement &
le gifement des montagnes, que fa profondeur à la
côte eft proportionnée à la hauteur de cette même:
côte ; & que fi la plage eft baffe & le terrein plat, la
profondeur eft petite ; il eft aifé d’en fentir les rai-
fons. Un promontoire élevé s’abaiffe fous les flots
par une pente brufquée.
On diftingue trois efpeces de côtes; i°. les côtes
élevées qui font de roche ou de pierres dures coupées
ordinairement à-plomb à une hauteur confidé—
rable ; z ° . les baffes côtes, dont les unes font unies
& d’une pente infenfible, les autres ont une médio-,
cre élévation , & font bordées de rochers à fleur-
d’eau ; 30. les dunes formées par des fables que la
mer accumule.
C ’eft encore une fuite de la ftruCture extérieure du
globe hérifle de montagnes, qu’il fe trouve entre les
tropiques beaucoup plus d’îles que par-tout ailleurs :
nous avons de même remarqué lur les continens les
plus hautes montagnes dans cette partie du globe ;
enforte que les plus grandes inégalités fe trouvent en
effet dans le voifinage de l’équateur.
Ces grands amas d’îles qui préfentent une multi-
tude de pointes peu éloignées les unes des autres ,
font voifins des continens, & fur-tout dans de grandes
anfes formées par la mer. Les îles folitaires font
au milieu de l ’Oçéan.
Si nous examinons ce que l’Océan nous offre encore
, nous y découvrirons différens mouvemensré-
gulierS & conftans qui agitent la maffe .de fes eaux.
Le principal eft celui du flux & reflux, qui dans
vingt-quatre heures éleve deux fois les eaux vers les
côtes, & les abaiffe par un balancement alternatif;
il a un rapport confiant avec le cours de la lune ; l’in-
tumefcence des eaux eft plus marquée entre les tropiques
que dans les zones tempérées, & plus fenfible
dans les golfes ouverts de l’eft à l’oüeft, étroits
& longs, que dans les plages larges & baffes ; elle fe
modifie enfin fuivant le gifement des terres & la hauteur
des côtes.
Il réfulte de ce premier mouvement une tendance
continuelle & générale de toute la maffe des eaux
de 1 Océan de l’eft a l ’oiieft; ce mouvement fe fait
fentir non-feulement entre les tropiques, mais encore
dans toute 1 étendue des zones tempérées & froides
où l’on a navigué.
On remarque certains mouvemens particuliers Sc
accidentels dans certains parages , & qui femblent
fe fouftraire au mouvement général du flux & reflux
; ce font les courans : les uns font conftans &
étendus tant en longueur qu’en largeur, & fe dirigent
en ligne droite ; fouvent ils éprouvent plufieurs
finuofites & plufieurs directions ; d’autres font rapides
, d’autres lents. Ils produifent des efpeces de
tournoyemens d’eau ou de gouffres, tels que le Mael-
ftroom, près de la N orvège: cet effet eft la fuite de
1 affluence de deux courans qui fe rencontrent obliquement.
Lorfque plufieurs courans affluent, il en ré-
iùhe ces grands calmes, ces tornados où l’eau ne pa-
roît affujettie à aucun mouvement.
; Une derniere obfervation que nous préfente l’Océan
, eft celle de fa falure ; toute l’eau de la mer eft
falée & mêlée d’une huile bitumineufe; elle contient
environ la quarantième partie de fon poids en fe l,
avec quelques différences pour les golfes, qui reçoivent
beaucoup d eau douce que le? fleuves y ver*
fent des continens.
Cette obfervation nous conduit naturellement à
examiner ce qui concerne les eaux qui féjournent &
celles qui circulent fur la furface des continens, pour
en faifir les phénomènes les plus généraux.
Je remarque d’abord que les principales fources
des fleuves, & l’origine des canaux qui verfent l’eau
des continens dans la mer, fe trouvent placées ou
dans le corps des chaînes principales qui traverfent
les continens, ou près de leurs ramifications collaterales.
J’apperçois dans différentes parties des
continens des contrées élevées qui font comme
des points de partage pour la diftribution des eaux
qui fe précipitent en fuivant différentes directions
dans la mer ou dans des lacs : j’en vois deux principaux
en Europe , la Suiffe & la Mofcovie ; en
Afie, le pays des Tartares Chinois ; & en Amérique,
la province de Quito : outre ces principaux, il en
eft d’autres affujettis toujours aux montagnes collatérales.
Enfin certaines rivières prennent leurs fources
au pié & dans les cul-de-facs des montagnes qui
s’étendent lé long des côtes de la mer.
Les fources ou fontaines peuvent fe diftinguer par
les phénomènes que préfente leur écoulement, &
par les propriétés des eaux qu’elles verfent : par rapport
à leur écoulement, on en diftingue de trois fortes
; i°. de continuelles, qui n’éprouvent aucune interruption
ni diminution rapide ; z°. de périodiques
intercalaires, qui font affujetties à des diminutions régulières
lans interruption ; 30. de périodiques intermit- .
tentes, qui ont des interruptions plus ou moins longues.
Voye{ Fontaine.
Par rapport à la nature de leurs eaux, il y en a de
minérales, chargées des particules métalliques, de
©îtununeufes, de lapidifiques chargées de particules
^ rre^ es 9 de claires & de troubles, de froides & de
chaudes : d autres ont une odeur & une faveur particulière.
V o y e i Hydro lo gie.
Lorfque plufieurs fources ne trouvent pas une
pente favorable pour former un canal, leurs eaux
s amaffentdans un baflin fans iffue, & il en réfulteun
lac ; cette eau franchit quelquefois les bords du baf-
iin ,& fe répand au-dehors;ou bien une*riviere dans
Ion cours ne trouvant pas de pente jufqu’à la mer,
1 eau qu’elle fournit recouvre un efpace plus ou
moins étendu fuivant fon abondance, & forme un
lac. D ’après ces confidérations , nous diftinguons
quatre fortes de lacs ; i° . ceux qui ne reçoivent fenfiblement
leurs eaux d’aucun canal, & qui ne les
verfent point au-dehors; i° . ceux qui ne reçoivent
point de canal, & qui fourniffent des eaux à des
rivières, à des fleuves ; 30. ceux qui reçoivent des
fleuves fans interrompre leur cours ; 40. ceux qui reçoivent
les eaux des rivières & les raffemblent fans
les verfer au-dehors: tels font la mer Cafpienne, la
mer Morte, le lac Morago en Perfe, Titacaca en Amérique,
& plufieurs lacs de l’Afrique qui reçoivent les
nvieres d’une affez grande étendue de pays ; ces
terreins forment une exception à la pente affez générale
des continens vers la mer.
Les lacs qui fe trouvent dans le cours des fleuves,
qui en font voifins, ou qui verfent leurs eaux au-dehors,
ne font point îalés : ceux au contraire qui reçoivent
les fleuves fans qu’il en forte d’autres, font
falés ; les fleuves qui fe jettent dans ces lacs, y ont
amené fucceflîvement tous les fels qu’ils ont détaches
des terres. Ceux qui ne reçoivent aucun fleuve
& qui ne verfent point leurs eaux au-dehors , font
ordinairement falés s’ils font voifins de la mer ; ils
font d’eau douce, s’ils en font éloignés.
La plupart des lacs femblent aufli difperfés en
plus grand nombre près de ces efpeces de points de
partage que nous avons obfçrvés fur les continens :
en Suiffe, j ’en trouve jufqu’à trente-huit ; il en eft de
même dans le point de partage de Ruffie, & dans celui
de la Tartarie Chinoife en A fie, &c.
Mais j’obferve généralement que les lacs des montagnes
font tous furmontés par des terres beaucoup
plus élevées, ou font au pié des pics & fur la cime
des montagnes inférieures.
Les rivières fe portant toujours des lieux élevés
vers les lieux bas, & des croupes de montagnes ou
principales ou collatérales vers les côtes de la mer
ou dans des lacs ; c’eft une conféquence naturelle que
la direction des fommets & des chaînes alongées foit
marquée par cette fuite de points où tous les canaux
des eaux courantes prennent leurs, fources, & par
cet efpace qu’ils laiffent vuide entre eux en fe diftri-
buant vers différentes mers.
Ainfi les crêtes des chaînes principales, des ramifications
collatérales, des collines mêmes de moyenne
grandeur, fervent à former ces partages des eaux
que nous avions découverts & indiqués en général :
c’eft ainfi que les Cordelieres diftribuent les eaux
vers la mer du Sud & dans les vaftes plaines orientales
de l’Amérique méridionale. Les Alpes de même
diftribuent leurs eaux vers diverfes mers par quatre
canaux différens, le Rhin, le Rhône, le P ô . & le
Danube. -
On voit fenfiblement, d’après ces obfervations
générales,, que les rivières & les fleuves font des canaux
qui epuifent l’eau répandue fur les -continens,
J’obferve qu’au lieu de fe ramifier en plufieurs branches
, ils reuniffent au contraire leurs eaux , & les
vont porter en maffe dans la mer ou dans les lacs. Je
ne vois qu’une exception à cette difpofition générale
, c’eft la communication de l’Orénoque avec une
riviere qui fe jette dans le fleuye des Amazones : les
hommes ont fenti l’avantage de cette efpece d’anaf