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dont en fon abfence & pendant les guerres civiles \
fes amis fe fervirent pour fceller en fon nom des
lettres & des édits ; mais ce qui fut pratiqué dans
ce cas de nécelïité ne formoit pas un ufage ordinaire
, & les empereurs ne fe fervoient communément
dejeur cachet que pour clorre leurs lettres particulières
, & non pour leurs édits & autres lettres
qui dévoient être publiques.
Juftinien ordonna feulement par fa novelle 104,
que tous les refcrits lignés de l’empereur feroient
aulïi foufcrits ou contre-fignés par fon quefteur , auquel
répond en France l’office de chancelier;
En France au contraire , dès le commencement
de la monarchie, nos rois au lieu de foufcrire ou
fceller leurs lettres , les fcelloient ou faifoient fceller
de leur fceau , foit parce que les clercs & les religieux
étoient alors prefque les feuls qui euffent l’u-
fage de l’écriture, ou plutôt parce que les rois ne
voulant pas alors s’affu.jéttir à ligner eux-mêmes
toutes les lettres expédiées en leur nom, chargèrent
une perfonne de confiance de la garde de leur
fceau, pour en appofer l’empreinte à ces lettres au
lieu de leur fignature.
Celui qui étoit dépolitaire du fceau du ro i, du
tems de la première race, étoit appellé grand référendaire
, parce qu’on lui faifoit le rapport de toutes
les lettres qui dévoient être fcellées ; & comme fa
principale fonéfion étoit de garder le fcel royal qu’il
portoit toujours fur lu i, on le défignoit aulïi fouvent
fous le titre de garde ou porteur du fcel royal: geru-
lus annuli regalis , cujîos regiifgilli.
Le premier qui foit deligné comme chargé du
fcel royal eft Amalfindon, lequel fe trouve avoir
fcellé du fceau de Thierri premier roi de Metz, la
charte portant dotation du monaftere deFlavigny,
au diocèfe d’Autun ; fgillante , eft-il d it, perilluf-
triviro Amaljîndonejigilloregio. Le titre de perilluf
tris que l’on donne à cet officier, marque en quelle
confidëration étoit dès-lors celui qui avoit la garde
du fceau.
Grégoire de Tours, liv. V. ch. iij. fait mention
de Siggo référendaire qui gardoit l’anneau de Sige-
bert premier, roi d’Auftrafie , qui annulüm Sigeberti
tenuerat ; & que Chilpericroi de Soiflons , follicita
d’accepter auprès de lui le même emploi qu’il avoit
eu près de fon frere.
Sous Clotaire II. Ansbért archevêque de Rouen
fut chargé dé cette fonôion, ainli qu’il eft dit en fa
v ie , écrite par Angradè bu Aigraae religieux bé-
nédi&in, qui fait mention que ce prélat étoit con-
ditor regalium privilegioruni , & gerulus annuli regalis
quo eademfgnabantur privilégia.
Surius en la vie de S. Oiien, qui fut grand référendaire
de Dagobert premier , & enfuite de Clovis
II. fort fils, dit qu’il gardoit le fcel ou anneau du
roi pour fceller toutes les lettres & édits qu’il rédi-
geoit par écrit : ad objîgnandà fcripta vel edicla regia
quce ab ipfo confcribebantur , jigillum vel annulum régis
cuflodiebat. Aimoin , liv. IV. ch. x lj. & le moine
Sigebert en fa chronique de l’ année 6 3 7 , font àulîi
mention que S. Oiien avoit la. garde de l’anneau ou
fcel royal dont il fcelloit toutes les lettres du roi qui
dévoient être publiques.
On lit en la vie de S. Bonit évêque de Clermont
en Auvergne, qu’étant aimé très-particulierement
de Sigebert III. roi d’Auftrafie, il fut pourvu de
l’office de référendaire, en recevant de la main du
roi fon anneau, annulo ex manu regis accepto.
Du tems de Clotaire III. la même fon&ion étoit
remplie par un nommé Robert : quidam illuflris Ro-
bertus nomifie, generofa exjlirpe proditus , gerulus filtrat
annuli regii Clotarii ; c’eft ainfi que s’explique
Aigrard qui a écrit la v ie de Ste Angradifine fa fille.
Ilparoîtpar ces différens exemples, que tous ceux
qui remplifToient la fonôion de référendaire fous
la première race de nos rois, étoient tous, en même
tems chargés du fcel ou anneau royal. •
Il en fut de même fous la fécondé race, des chanceliers
qui fuccéderent aux grands-référendaires ;
quoiqu’on n’ait point trouvé qu’aucun d’eux prît le
titre de garde du fcel royal, il eft néanmoins certain
qu’ils étoient tous chargés de ce fcel.
Sous la troifieme race de nos rois, la garde des
fceaux du roi a aufli le plus fouvent été jointe à l’office
de chancelier, tellement que la promotion de
plufieurs chanceliers des premiers fiecles de cette
ra c e, n’eft défignée qu’en difant qu’on leur remît
le fceau ou les fceaux, quoiqu’ils fuffent tout-à-la-
fois chanceliers & gardes des fceaux.
On voit aufli dans les hiftoriens de ce tems
qu’en parlant de plufieurs chanceliers qui fe démirent
volontairement de leurs fondions, foit à caufe
de leur grand âge ou indifpofition, ou qui furent
deftitués pour quelque difgrace, il eft dit Amplement
qu’ils remirent les fceaux ; ce qui dans cettè
occafion ne fignifie pas Amplement qu’ils quittoient
la fonction de garde des fceaux , mais qu’ils fe démettaient
totalement de l’office de chancelier que
l’on défignoit par la garde dufceau, comme en étant
la principale fon&ion. Aufli voit-on que les fuccef-
feurs de ceux qui avoient ainfi remis les fceaux ,
prenoient le titre de chanceliers , même du vivant
de leur prédéceffeur ; comme le remarque M. Ri-
bier confeillër d’état, dans un mémoire qui eft inféré
dans Joli, des off. tom, I . aux addit.
On ne parlera donc ici ni de ceux auxquels on
donna les fceaux avec l’office de chancelier, ni de
ceux qui les quittèrent en ceflant totalement d’être
chanceliers ; mais feulement de ceux qui fans
être pourvus de l’office de chancelier, ont tenu les
fceaux, foit avec le titre de garde des fceaux, ott
autre titre équipollent.
Depuis la troifieme race, il y a eu plus.de quarante
gardes des fceaux ; les uns pendant que l’office
de chancelier étoit vacant, les autres dans; le tems
même que cet office étoit rempli, lorfquè nos rois
ont jugé à propos pour des raifons particulières,
de féparer la garde de leur fceau de la fonftion de
chancelier ; on comprend dans cette fécondé clafle
plufieurs chanceliers qui ont tenu les fceaux féparé-
ment, avant de parvenir à la dignité de chancelier.
Oh fera aufli mention des vices-chanceliers, attendu
qu’ils ont fait la fonction de gardes des fceaux.
Les rois de la première & de la fécondé race n’a-
voient qu’un feul fceau ou anneau, dont le chancelier
ou le garde du fcel royal étoit dépolitaire. Pour
le conferver avec plus de foin, & afin que perfonne
ne pût s’en fervir furtivement, il le portoit toujours
pendu à fon cou : cet ufage avoit pafle de- France
en Angleterre. En effet , Roger vice-chancelier de
Richard I. roi d’Angleterre , ayant péri furmer par
une tempête , on reconnut fon corps parce qu’il
avoit le fcel du roi fufpendu à fon cou.
Depuis que l’on fe fervit en France de fceaux
plus grands , & que le nombre en fut augmenté, il
ne fut pas poffible au chancelier ou garde des fceaux
de les porter à fon cou ; il n’en a plus porté que les
clés qu’il a toujours fur lui dans une bourfe.
Anciennement le coffré dès fceaux étoit couvert
de velours azuré , femé de fleurs-de-lis d’or ; &
dans les cérémonies ce coffre était porté Air un©
hacquenée qli’iùn valet - de - pie conduifoit par la
main : autour dè cette hacquenée chevauchoient
les héraux & pourfuivans du ro i, & autres feigneurs
qui étaient préfens ; d’autres difent que c’étojent
des archers, d’autres les appellent des chevaliers
vêtus de livrée : cela fe trouve ainfi rapporté par
Alain ' Chartier, fous l’an 1449 & 1451? & pàç
Monftrèlet au troifemèvolume, en parlant des ëntréès
faites par le roi Charles VII. à Roüen & à Bordeaux.
On trou ve ailleurs que quand le chancelier alloit
en voyage , e’étoit le chauffe-cire qui portoit le fcel
royal fur fon dos, ainfi qu’il eft dit dans un hommage
rendit par Philippe archiduc d’Autriche , au roi
Louis XII. le 5 Juillet 1499, pour les comtés de
Flandre, Artois & Charolois.
Préfentement le roi donne pour renfermer les
fceaux un grand coffre couvert de vermeil, lequel
eft diftribué en trois cafés, contenant chacune une
petite caflette fermante à clef.
La première qui eft couverte de vermeil renferme
le grand fceau de France & fon contre-fcel.
La leconde qui eft couverte de velours rouge,
parlemée de fleurs-de-lys & de dauphins de vermeil
, contient le fceau particulier dont on ufe pour
la province de Dauphiné, & fon contre-fcel.
La troifieme caflette contenoit le fceau & le Con-
tre-fceau de l’ordre de S. Louis, établi en 1693 ;
mais préfentement cette caflette eft vuide, les fceaux
de cet ordre ayant été donnés en 1719 au Chancelier
garde des fceaux créé pour cet ordre, par édit du
mois d’Avril de la même année.
Comme il n’y a plus que les deüx premières caf-
fettes qui fervent, le garde des fceaux pour les tranf-
porter plus facilement, a fait faire un petit coffre
de bois dans lequel ces deux caffettes font renfermées
; & lorfqu’il marche par la ville ou qu’il va
en voyag e, il fait toujours porter avec lui ce coffre
dans fon carrofle.
Ce fut vers lé commencement de la troifieme race
que le nombre des fceaux du roi fut multiplié ,
que le roi garda lui-même depuis ce tems fon petit
fcel ou anneau, qu’on appelloit/e petit fignet du roi,
dont il fcelloit lui-même toutes les lettres particulières
qui dévoient être clofes ; & au lieu de ce
fcel ou anneau, on donna au chancelier ou au garde
des fceaux d’autres fceaux plus grands, pour fceller
les lettres qui dévoient être publiques, & que par
cette raifon l’on envoyoit ouvertes, ce que l’on a
depuis appellé lettres-patentes.
Le premier exemple que j’aye trouvé de ces grands
fceaux , eft dans une charte du tems de Louis-Ie-
Gros, datée de l’an 1106, pour l’églife de S. Eloy
de Paris ; elle eft fcellée de deux grands fceaux appliqués
fur le parchemin de la lettre : dans l ’un le
roi eft aflis fur fon throne, dans l’autre il eft à chev
al , & à l’entour font écrits ces mots, Philippus gracia
Dei Francorum rex ; ce qui prouve que ces fceaux
étoient en ufage dans le tems de Philippe I.
Depuis que l’on fe fervit ainfi de plufieurs fceaux,
il étoit naturel que celui qui en étoit dépolitaire fût
appellé garde des fceaux ; cependant on continua encore
long-tems à l’appeller Amplement garde du fcel
royal, comme fi le fcel du roi étoit unique ; ce qui’
foroit croire que le fécond fceau dont on a parlé,
repréfentant le roi à cheval, n’étoit autre chofe que
le revers du premier fceau : mais on n’étoit point
encore dans l’ufage d’appliquer ce fécond fceau par
forme de contre-lcel, c’eft-a-dire, derrière le premier.
Le fcel fabriqué du tems de Philippe I. étant beaucoup
plus grand que le fceau ou anneau dont on s’é-
toit fervi jufqu’alors, fut furnommé le grandfcel, &
celui qui en ctoit chargé étoit quelquefois appellé le
porteur du grand fcel du roi.
Cette diftinâion du grand fcel fut fans doute établie
, tant a caufe du cachet ou fceau privé du roi,
qu’à caufe' du cOntre-fcel ou fcel fecret, qui fut établi
fous Louis VII. & qui'étoit porté par le grand
chambellan.
- La chancellerie était vacante en 1128 , fuivant
une charte de Louis-le-Gros pour S. Martin-des-
Tome V i f
Champs, à la fin de laquelle il eft dit cdnceîlario nul-
10 ; ce qui peut d’abord faire penfer qu’il y avoit
alors quelqu’un commis pour tenir le grand fcel dit
r o i , mais il n’en eft point fait mention ; & il eft plû-
tôt à croire que pendant cette vacance le roi tenoit
lui-même fon fceau, comme plufieurs de nos rois
l’ont pratiqué en pareille occafion. On trouvé plü-
fieurs chartes du douzième fiecle , que les rois
faifoient fceller en leur préfence, & à la fin def-
quelles il y a ces mots, data per mànum regiam Vacante
cancellaria ; ce qui fait de plus en plus fentir
la dignité attachée à la fonttiôn de garde des fceaux,
puifque nos rois ne dédaignent point de tenir eux^.
mêmes le fceau en certaines occafions;
La chancellerie étoit dite vacante lorfqu’il n’y
avoit ni chancelier ni garde des fceaux.
Hugues de Chamfleuri fut nommé chancelier dè
France en 115 r , mais fa difgrace le fit deftituer de
cet office ; de forte que la chancellerie vaqua durant
les années 1 1 7 2 , 1 1 7 3 , 1 1 7 4 , 1 175, 1 176& 11774
11 paroît néanmoins que Hugues fut rétabli dans fes
fondions en 1 1 7 5 , qui eft l’année de fa mort.
La chancellerie vaqua encore en 1 17 9 , comme
il paroît par un titre du cartulàirede S. Vi&or.
Elle vaqua pareillement durant tout le régné de
Philippe-Augufte, fi l’on en excepte les annéeS 1180
& 1185, où il eft parlé de Hugues de Puifeaux en
qualité de chancelier, l’année 1201, où Gui d’A-*
thies vice-chancelier pendant la vacance de la chancellerie,
fit la fon&ion de garde des fceaux , & les
années 1203, 1204, 1205. & 1207, où frere Guérin
, chevalier de l’ordre de S. Jean de Jérufalem
fit la même fonôion de garde des fceaux, vacanti
cancelldriâ ; il fut depuis élevé à la dignité de chancelier
dont il releva beaucoup l’éclat.
Il paroît par une charte de l’année 1226, qui eft
la première du régné de S. Louis, que frere Gue*
■ rin faifoit encore les fondions de chancelier : mais
depuis il n’y en eut point pendant tout le régné de
S. Louis ; il fe contenta de commettre fucceflive-*
ment différentes perfonnes à la garde du fceau.
Suivant une cédule de la chambre des comptes au
mémorial A , qui eft fans date ; & une autre cédule
au mémorial E , fol. ig z . Philippe d’Antogny portait
le grand fcel du roi S. Louis : il prenoit pour foi,
fes chevaux ôc valets a chevai, fept fous parifis par
jour pour l’avoine & pour toute autre chofe, excepi
té fon clerc, & fon valet qui le fervoit en lachambre,1
qui mangeoient à la cour ; & leurs gages étoient doubles
aux quatre fêtes annuelles.' !
La derniere des deux cédules .dont on vient de
parler, fait aufli mention de Philippe deNogaretqui
portoit le grand fcel du roi.
Nicolas, doyen & archidiacre de Chartres, chapelain
& confeiller du roi S.Louis, fut choifieh 1249
pour porter le fceau çlu roi dans le voyage de la T erre-’
Sainte ; il mourut en Egypte après, là prife de Da-;
miete, en 1250^
Gilles, archevêque de-Tyr en Phénicie, aufli cori-
feiller du roi S. Louis , avoit la garde du fceau de ce
prince en 1253 , comme on l’apprend de l'hifioire de
Joinville , & de la vie de S. Louis écrite par Guillaume
de Nangis.
Raoul de Piris, doyen de S. Martin de Tours , fut
fait garde des fceaux au retour de la Tèrrè-Sainte, &C
évêque d’Evreux en 1256 ; il fut cardinal & légat
& mourut l’an 127b1: il fe trouve un titre pour l’ab-,
baye de S. Remi de Reims, fcellé par lui, Où on lit
ces mots : & has litteras dominüs epifcopüs ebroïberifs J.
tune decanus turonerijîs ifgillavit. '■
Plufieurs titres de S. Denis & du prieuré. de S.''-
Sauveur-lez-Bray fur Seine j font mention que la
chancellerie vaqua en 1255 & 1258. ‘
Mais dans cette même1 année 1258, Raoul de
1 R r r i j