Le fond d’un tableau, c’eft ce qui fert comme de
bafe 8c de champ aux figures ; c’eft ainfi que l’on dit
que le fond du damas eft de taffetas > 8c que les fleurs
lont de fatin. ., ,
4°. Fond fe dit par extenfion pour propriété
alors il eft oppofé à ufufruit : la veuve n a que 1 u-
fufruit de Ton doiiaire ; les enfans en ont le fond ou
la propriété. ' •
5°. Fond le dit par imitation d une lomme d.ar-
gent qu’on amaffe 8c qu’on çleftine à certains ufa-
ges. Faire vin fond pour bâtir, pour joiier, &c. On
dit d’un joueur qu’il eft en fond on en fonds au pluriel
, pour dire qu’il a de l’argent comptant.
Fond, dans le même fens , fe dit pour le capital
d’une lomme d’argent : aliéner fon fond à la charge
d’une rente qui tient lieu de fruits. Quand on donne
de l’argent à rente viagère, pour en retirer un denier
plus fort, on dit qu’on l’a placé à fond perdu.
6°. Fond fe dit aufli par figure des chofes fpirituel-
les, comme on le dit d’étendue. Un fond d’efprit, de
bon fens, de v ertu , de probité, &c.
On dit faire fond fur quelqu’un ou fur quelque cho-
fe , y compter, s’en croire affûre. L’abbe de Belle-
garde dit qu ’il ne faut pas toujours faire fond fur les
perfonnes qui fe répandent en témoignages extérieurs
de politeffe. ■
M. de Vaugelas, remarques , tom. I I . pag.314. dit
que fond 8c fonds font deux chofes différentes ; car
fond fans 5, d i t - il, fe dit en latin hoefundum , o’eft
la partie la plus baffe de ce qui contient, comme le
fond du tonneau, le fond du verre : mai s fonds avec
un s fe dit en latin hic fundus ; 8c c’eft proprement la
terre qui produit des fruits, & par figure tout ce qui
rapporte du profit. Mais le dofre Ménage defaprouve
ce fentiment de Vaugelas ; il ne connoît en latin que
fundus, 8c ajoute que fi l’on d it, il n'y a point de
fonds , c’eft qu’ alors fonds eft au pluriel , nulli funt
fundi. ■ , i v. r*;
II eft vrai que quelques-uns de nos diéhonnaires
ont adopté fundum , i , mais c’eft fans autorité ; fun-
dum n’eft que l’accufatif de fundus. Danet 8c le pere
Joubert ne reconnoiffent cpxe fundus.
Quoique le thréfor d’Etienne mette fundum , i ,
après Laurent V a lle , dit l’auteur du Novitius , cependant
ni l’un ni l’autre n’en apportent aucune autorité.
' -, .-.r • •! . ' 3 , . ... ;;7> • : •
Martinius dit qu’on trouve fundum & fundus dans
Calepin 8c dans quelques autres difrionnaires :,fed
de primo nullum exemplum , neç hoefundum apud ido-
neos autores reperias.
Faber, dans fon thréfor , ne met que fundus, &
ajoute, comme s’il vouloit répondre à Vaugelas :
non audiendi funt grammatici & lexicographi rétentions
qui inter fundus & fundum dijlingûunt, ut fundus
de agro , fundum de imo cujufque rei dicatur ; neque verb
id exemplis probari potejl.
Je me fuis peut - être trop étendu fur un article
aufli peu important; je finis par ces paroles de Thomas
Corneille, dans fa note fur la remarque de Vaugelas
, tom. II. pag. 2, 'ff- « Je fuis ici du fentiment de
» M. Ménage, 8t cela me fait écrire fond fans s , 8c
» jamais fonds, à-moins que ce mot ne foit au plu-
» riel >>, ( F )
Fond , ( Jurifpr. ) s’entend de plufieurs chofes différentes.
1 ( . -
Fond y en tant qu’il eft oppofé à la forme, figni-r
fie ce qui eft de la fubftance d’un a&e, ou ce qui fait
le vrai fujet d’une conteftation : on dit communément
que la forme emporte le fond , c’eft-à*dire que les
exemptions péremptoires , tirées de la procédure,
font déchoir le demandeur de fa demande, quelque
bien fondée qu’elle pût être par elle-même, abftrac-
tion faite de la procédure : on dit conclure au fond,
pour diftinguer les conclurions qui tendent à faire décider
définitivement la conteftation de celles qui tendent"
feulement à faire ordonner quelque préparatoire.
(i/df)
Biens- Fonds , font les terres , maifons , 8c autres
héritages ; ils font ainfi appelles, pour lès diftinguer
des immeubles fifrifs, tels que les rentes foncières
8c conftituées, les offices, &c. ( A )
Fonds , eft pris fouvent pour l’héritage tout nud,
c’eft-à-dire abftraérion faite des bâtimens qui peuvent
être conftruitsdeffus;lesboisde haute-futaie 8c
les fruits pendans par les racines font partie du fonds.
On diftingue quelquefois le fonds de la fuperficie de
l’héritage; mais la fuperficie fuit le fonds, fuivant la
maximë fuperficies folo cedit. Quand on veut exprimer
que l’on cede non-feulement la fuperficie d’une
terre, mais aufli tout le fonds, fans aucune réferve,
on cede le fonds St, très- fonds de l’héritage , c’eft-à-
dire jufqu’àu plus.profond de la terre , de maniéré
que le propriétaire y peut fouiller comme bon lui
lemble , en tirer de la pierre, du fable, &c. ( A )
Fonds de terre , fignifie ordinairement la propriété
d’une portion de terre, foit qu’il y ait un édifice
conftruit deffus ou non. On entend aufli quelquefois
par fonds de terre, la redevance qui le repréfente
, telle que le cens ou la rente foncière ; c’eft
en ce fens que l’on joint fouvent ces mots cens Sc
fonds de terre, comme fynonymes. L ’auteur du grand
coûtumier , 8c autres anciens auteurs , ont pris ces
termes fonds de terre pour le premier cens, appelle
dans les anciennes chartes fundum terra. Voyer la
Thaumafliere furie chap. xxjv. de Beaumanoir ,• Bro-
deau fur l'art. 74. de la coutume de Paris , verbo cens
OUfonds de terre. Voye1 auffi CENS. (A )
Fonds dotal , eft un immeuble réel que la femme
s’eft conftitué en dot. La loi julia de fundo dotali
défend au mari d’aliéner le fonds dotal de fa femme ;
mais quand le fonds dotal eft eftimé par le contrat de
mariage, cette eftimation équivaut à une vente , 8c
dans ce cas le mari eft feulement débiteur envers fa
femme du montant de l’eftimation, 8t peut aliéner le
fonds dotal. Voye^ D ot. (A )
Fonds perdu , eft un principal qui ne doit point
revenir au créancier qui a prêté fon argent à rente
viagère.
Donner un héritage à fonds perdu, c’eft le donner
à rente viagère.
L’édit du mois d’Aout 1661, fait défenfes de donner
aucuns héritages ni deniers comptans à fonds perdu
à des gens de main-morte , fi ce n’eft à l’Hôpital
général, FHôtel Dieu ou aux Incurables. ( A )
Fond , en terme de Marine; c’eft la terre ou fable
qu’on trouve fous les eaux : on lui donne différens
noms, fuivant la nature du terrein ou du fable ; par
exemple, on dit fond de fable, fond de vafe, fond de
coquillages pourris, fond d'équilles , 8cc. ce font de
petits coquillages de la groffeur d’un ferret d’éguil-
îette, & qui fe terminent en pointe. Lorfque le fond
eft u n i, ni trop dur ni trop mou , 8c que l’ancre y
entre aifément & y tient bien, on dit bon fond ; lorf-
qu’il y a des roches aiguës , qui gâtent ou peuvent
couper les cables, on l’appelle mauvais fond. (Z )
Fond de cale , ( Marine. ) c’eft la partie la plus
baffe du vaiffeau, comprife entre le premier pont 8c
le fond du vaiffeau. On partage cette étendue en plufieurs
parties deftinées à différens ufages. Voy. Planche
IV . de Marine ,f ig . 1. n. g 1. L e fond de cale avec
fes différentes divifions ; favoir , n°. 40. foffe aux
lions, 42. foffe aux cables, 44. chambre aux voiles
, 46. foute du chirurgien , 47. parquet des boulets
,5 5 - foutes aux poudres pour y mettre les bar-
rils à poudre, 56. caiffons à poudre pour les gar-
gouffes ,6 1 . foutes au pain, 62. couroir des foutes,
65. foute du capitaine, 66. foute du canonnier. (Z )
Fqnd de voile ; ç’cft le milieu d’une voile par
le bas, 8c ce qui retient le vent par le milieu. ( Z )
Fond de la hune ; ce font les planches qu’on
pofe fur les barres de la hune, 8c fur lefquelles on
marche. ( Z )
Fond , dans le Commerce , fignifie le capital ou le
fonds que poffede un commerçant, compagnie ou
corps ; ou bien c’eft la fomme d’argent qu’il met dans
le commerce. Voye^ Capital, trc.
- Dans ce fens, nous difons en général fond, pour
lignifier les fonds publics, c’eft-à-dire ce qui appartient
aux compagnies ou corps célébrés du royaume,
comme la compagnie de la banque , de la mer du
Sud , des Indes orientales. Voyes^Banque , Compagnie
, &c.
Fonds fignifie encore toutes les marchandifes d'un
marchand. Ce négociant s’eft retiré : il a vendu fon
fonds. Il fe dit pareillement des machines , métiers,
inftrumens fervans à une manufacture, &c. (G)
FOND, en Peinture , fignifie ou les derniers plans
éPune compofition , ou le champ qui entoure un objet
peint.
Ce dernier fens comprend les préparations fur lefquelles
on ébauche un tableau , c’eft-à-dire. l’apprêt ;
ouïes premières couches de couleurs dont on couvre
la toile, le bois, le cuivre, ou la muraille fur laquelle
on veut peindre.
Il me femble que les Artiftes laiffent fouvent à
l’habitude, à l’exemple, ou au hafard, à décider de
la couleur fur laquelle ils commencent à ébaucher
leurs ouvrages ; je crois cependant que cette partie
de leur a r t , ainfi que plufieurs autres qui paroiffent
de médiocre conféquence, devroient être quelquefois
l’objet de leurs recherches, de leurs épreuves,
8c de leurs réflexions.
Il eft vrai qu’il eft des peintres difficiles, qui dans
l ’indécifion de leur compofition , qu’ils n’ont point
affez réfléchie, couvrent plufieurs fois leurs ébauches
, 8c fubftituent des maffes claires à des maffes
fombres, en cherchant leur effet. Pour ces peintres,
le premier apprêt ne peut devenir l’objet de leur
combinaifon ; mais un peintre facile ou prudent, qui
fe feroit une loi de ne commencer un tableau qu’a-
près avoir fait une efquiffe arrêtée, pourroit fe décider
fur le premier apprêt , pour rendre par fon
moyen fes maffes claires plus brillantes, 8t pourroit,
en ménageant fa couleur , leur donner un tranfpa-
rent, qui ferviroit à mieux imiter l’éclat de la lumière.
Rubens, cet artifte à la fois facile & profond, cet
homme de génie, qui a vû la Peinture en grand , a
fû tirer parti du fond de fes tableaux & des glacis ,
& c’eft aux artiftes de cette claffe que les pratiques
même les plus dangereufes fourniffent des reffour-
ces & des beautés ; il peignoit fouvent fur des fonds
blancs ; mais pour éviter l’inconvénient que peuvent
avoir les fonds de cette couleur dans les grandes
maffes d’ombres , ne pourroit-on pas, d’après une
efquiffe bien arrêtée , faire préparer fon fond par
grandes maffes blanches 8c brunes, 8c cette pratique
ne vaudroit-elle pas mieux que celle de peindre fur
des fonds gris , bruns , ou rouges, qu’on regarde
comme des fonds indifférens , 8c qui en effet ne font
favorables ni aux maffes claires,ni aux maffes d’ombres
? mais en voilà affez pour les artiftes intelligens,
8c trop pour ceux qui, efclaves de l’habitude,croyent
que ce qu’ils n’ont pas vû faire à leurs maîtres ne peut
être bon.
Après avoir parlé de l’apprêt qui fait le principal’
fond général du tableau , je vais dire quelque chofe
du champ particulier fur lequel fe trouvent les objets
que renferme un tableau.
Ce qui diftingue les objets les uns des autres, c’eft
l’oppofition des nuances claires 8c obfcures. Dans
tous les objets qu’offre la nature, la nuance que pré-
1 d’on corps , fait paroître celui
qui elt à cote plus teinté. La partie ombrée produit
1 ettet contraire ; fans cette loi.de la nature, les objets
confondus enfemble ne. nous offriroient point ce ;
que nausjfadmmons h tmit, qui eft la ligue claire ou
■ ■ H M B ] donne l’idée de leur tbrnie. f , “ oc.on de neige, lorfque nous le diftinguons
dans les a,rs, fe détaché en brun fur la teinte que la
lumière répand dans le ciel ; fi ce même f,ocol af.
fe devant un nuage obfcur, il reparoît blanc , en rai-
W Ëm 1 oppofition du fond fur lequel il fe trouve *
s il le montre enfin vis-à -v is d’un mur noirci par le
tems, il prend cet éclat dont nous ne devonsTidée
generale qu’à la plus grande habitude que nous avons
de voir la neige en oppofition avec des objets qui
relèvent fon éclat ; une branche d’arbre , examinée
avec loin, donnera une idée jufte de cet effet. Quelquefois
dans l’efpace de quelques piés, elle fe détachera
plufieurs fois , alternativement en clair & en
brun ; ce font ces. variétésfondéesfur la nature; q u i,
prêtent leurfecours au peintre],jlorfqu’il veut .cher-.»
cher dans les oppofitions des reliburces pour dhar-,
manie; il.reconnoîtra , en examinant ce Jeu- des
couleurs cauféespar \esfonds,<p’ il peut à fon gré diftinguer
plus ou moins le ï 'Sgjets par des feofflbinai-
lons d oppofitions qui font abfolument à fa difpofi-
tion. Il trouvera auffi, pour rendre fon.celôris plus-
brillant , que certames couleurs fe détruifent, tandis
que d autres fe font valoir ; l’incarnat devient plie
lur un fondxoage, le rouge pâle paraît v if & ardent
forun/oaf jaune; la décoration des fonds étant au
choix de 1 artifte, il eft autorité à donner aux objets
de tes premiers plans.& aux. draperies de fes figures'
principales, le s fonds qui doivent leur être lesB plus '
favorables.. Cette teflexioBconduit naturellement à
parler, de: ce quon appelle fonds ,lorfqn?ôij. entend
P t a J?i!erniers plans d’une compofition.
Les differentes modifications qu’on ajoute ordinairement
à ce.terme, lorfque l’o n s ’enfert dans ce
lens, indiquent ce que l’artifte doit obferver.
r , iSffi d ’un tableau de payfage HH repréfente un
litq tres-étendu dans lequel une dégradation de plans
înlenfible & multipliée fe fait appercevoir, .due l e .
jond^ de ce tableau eft uwfond-vague.
L artifte qui peint l’étendue des mers, doit par un
fond aerien faire fentir cette immenfité de lieu dont
la diftance n eft pas défignée par des objets fuccef-
Uts qui la font concevoir dans la repréfentation des
objets terreftres. Un/omf agréable eft celui qui nous
ottre limage d’un lieu où nous fouhaiterions'nous
trouver.
Un fond devient picquant par le choix de la cou-
leur du ciel & de l’inftant du jour.
•1 11 frais» s’il rePréfente le ton de l’air au matin-
il eft chaud, fi le coucher du foleil lui donne une
couleur ardente.
Le fond pittorefque eft celui dans lequel un choix
ingemeux raffemble des objets favorables au pein.
t re , 8c agréables au fpeûateur.
Il faut dans certains fujets d’hiftoire des fonds ri^
ches : telle eft une partie des aérions tirées de la Fable;
tels font les traits que fourniffent les hiftoires
afiatiques, les triomphes, les fêtes, &c.
La fimplicite, l’auftérité même, conviennent aux
fonds des tableaux qui repréfentent les objets de notre
culte; ils font favorables aufli à la plûpart des
objets pathétiques : rien ne doit détourner de l’intérêt
qu’ils font naître ; c’eft à l’ame qu’il faut parler
principalement.
Cependant toutes ces qualités différentes,quela
raifon & le goût diftinguent, font renfermées dans
celle-ci. Les fonds doivent être toûjours convenables
au fujet qu’on traite.
Voyelle mot Fabrique , dans l’explication du