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ordonnances, & notamment dans une du 16 Juin
1349 , portant que les officiers ne feront payés de
leurs gages qu’à proportion du tems qu’ils ferviront.
C ’eft apparemment de-là que vint l’ufage de faire
donner par les officiers une cédule appellée fervivi,
par laquelle ils atteftoient le nombre de jours qu’ils
avoient fervi dans leur office. Il eft encore parlé de
ces gages à termes oupar jour, dans une ordonnance
du roi Jean., du 13 Janvier 13 $ 5. Voye^ ci-après
G a g e s à v i e . ( A j
G a g e s a v i e , étoient des appointemens ou pensions
qui étoient affûrés aux officiers du ro i, leur
vie durant, pour leur Service aétiiel, foit qu’ils le fif-
fent en plein, & fans y manquer un feul jour, ou
qu’ils fuffent abfens fans nëceffité ou empêchement
légitime pendant un tems plus ou moins considérable.
On appelloit ces gages à vie , pour les distinguer
des gages ordinaires, que l’on appelloit alors gages
à termes ou à jours, qui ne fe payoient aux officiers
qu’ à proportion du tems & du nombre de jours qu’ils
avoient réellement fervi.
Piufieurs perfonnes du confeil, & autres officiers
du ro i, qui prenoient gages de lu i, ayant obtenu de
lui des lettres par lefquelles ces gages leur étoient allurés
à vie y comme on vient de le dire, foit qu’ils fuffent
préfens ou abfens, qu’ils exerçaflent ou n’exer-
çaSTent pas leurs offices, & ceux qui avoient obtenu
ces Ietrres , prenant de-là occauon de s’abfenter
fans néceffité ; Philippe de Valois ordonna le 19
Mars 134 1 , que ces lettres ne pourroient fervir aux
impétrans, Si ce n’eSt à ceux qui par maladie ou
vieilleffe, ne pourroient exercer leurs offices, ou
à fes officiers , qui après fa mort feroient privés fans
qu’il y eût de leur faute,de leurs charges par fes fuc-
çeffeurs ; mais on conçoit aifément que cette dernière
dii'poSition ne pouvoit avoir d’effet, qu’autant
qu’il plaifoit aux fuccelfeurs de ce prince, étant
maîtres chacun de révoquer leurs officiers, & de
continuer ou non les penfions accordées de grâce
par leurs prédécefleurs.
Il y eut néanmoins encore dans la fuite de ces
gages à vie; car on trouve une autre déclaration du
3 Févr. 1405, par laquelle ils furent révoqués. (A )
GAGEMENT, f. m. ( Jurifprud. ) dans la coutume
d’Orléans, Signifie Ü obligation & hypotequc des
biens d’un débiteur. Vcyer^ l'article 3 60. ( A )
GAGER , ( v . neutre. ) voye[ l'article G a g e u r s .
G a g e r , ( Jurifprud.) Ce terme a dans cette matière
différentes Significations.
Gager dans quelques coutumes^ c’eft'prendre gage.
Voyt^ Melun, articles3 2 7 & 3x8. Sens, 12$.
Senlis, 288. Chaumont, g 6. Vitry, 120. Bourbon-
nois, /34. Auxerre, 128. Bayonne, tit. vüj. art. 2.
lit. xxvj. article 73. (A )
Gager l'amende ou l 'émende, c’eft payer & acquitter
l’amende de juftice. Voye^ la coutume de Saint-
Paul , art. 32. qui eft le 63e de la plus ample coutume.
Emtndce gagiatce eft l’ordonnance de faint Louis
de l’an 1259. (^4)
Gager la clameur de bourfe, en Normandie c’eft
lorfque celui qui eft affigné en retrait, tend le giron.
Foyei l'art. 4^7 de la coutume de Normandie. (A )
Gager la loi, dans l’ancienne coutume de Normandie
, Signifie offrir de faire ferment. La loi n’étoit gagée
qu’en Simple a&ion perfonnelle de fait ou de droit,
qui fe nommoit defrene. L’ancienne coûtume de Normandie
porte que defrene eft l’épurgement de ce dont
aucun eft querellé, qu’elle fe fait par fon ferment
& par le ferment de ceux qui lui aident ; cet anr
cien droit eft aboli. Foye^ le gloffaire de M. de Lau-
riere au motgager. {A')
. Gager partage, en Normandie, c’eft offrir en .jugement
partage à fes freres puînés, Voyez Normandie
, articles 3 4 7 ÔC3|jjg (A )
G A G
'Gager'perfonnes en fon dommage, c’eft prendra le
chapeau pu autre habillement du pas du bétail qui
fait dommage en l’héritage d’autrui. Voye^ la coûtume
d’Auxerre, articles 27/ & 272. (-*4)
Gager le rachat, c’eft offrir réellement au feigneur
le droit de rachat à lui dû. C ’eft ainfi que s’énoncent
quelques coûtumes , telles que Tours, article 144.
Lodunois, chap. x j. art. G. chap. xjv. art. 3 . Anjou ,
articles u à & 226. Maine, articles 126 & 284. (-<4)
GAGERIE, f. f. (Jurifprud,) eft une fimple Saisie
& arrêt de meubles, fans déplacement ni tranfport.
.Cette faifie fe fait ordinairement pour caufe privilégiée
, fans qu’il y ait obligation par écrit ni con^
damnation.
L’effet de cette Saifie eft que les meubles font mis
fous la main de la juftice pour la sûreté du créancier.
Le faifi doit donner gardien folvable, ou fe charger
lui-même comme dépofitaire des biens de juftice
, autrement l’huiffier pourroit enlever les meubles;
mais la vente ne peut en être faite qu’en vertu
d’un jugement qui l’ordonne.
Le feigneur cenfier peut, fuivant l'article 18 6 de
la coûtume de Paris, procéder par fimple gagerie fur
les meubles étant dans les maifons de la ville & banlieue
de Paris, faute du payement du cens, & pour
trois années dudit cens, & au-deffous.
article 1G1 de la même coûtume permet au propriétaire
d’une maifon donnée à loyer, de procéder
par voie de gagerie pour les termes à lui dûs fur les
meubles étant dans cette maifon.
Anciennement on procédoit par voie de gagerie
fans que l’ordonnance du juge fût néceflaire en aucun
cas ; mais cet abus fut réformé par un arrêt de
l’an 1389.
Il n’eft pas befoin d’ordonnance du juge pour ufer
de.fimple gagerie, lorfque le bail eft paffé devant notaire
; mais il en faut une, lorfque le bail èft fous
feing-privé ou qu’il n’y en a point.
On peut auffi ufer de gagerie, fuivant l’article
/ 63. pour trois années feulement d’arrérages d’une
rente foncière dûe fur une maifon fife en la ville
& fauxbourgs de Paris, fur les meubles étant dans
cette maifon appartenans au détenteur & débiteur
de la rente.
Enfin le droit que Xarticle 173 de la même coûtume
accorde aux Bourgeois de Paris d’arrêter les biens
de leurs débiteurs forains trouvés en la ville , eft.
encore une faijie-gagerie qui fe peut faire, quoiqu’il
n’y ait point de titre ; mais il faut auffi une permif-
fion du juge. Voye^ ci-devant Gager, & Saisie-
G a g e r i e . ( A )
G A G E U R E , f. f. ('Analyfe des hafards.j eft la.
même chofe que pari., qui eft plus ufité en cette rencontre.
V o y tPa ri, Jeu, & Gageure ([Jurifprud.)
Cet article nous fournit une occafion que nous
cherchions d’inférer ici de très-bonnes objeétions
qui nous ont été faites fur ce que nous avons dit aie
mot Croix ou Pil e , de la maniéré de calculer l’avantage
à ce jeu fi commun. Nous prions le leâeur
de vouloir bien d’abord relire le commencement de
cet article Croix ou Pile. Voici maintenant les ob-
jeétions que nous venons d’annoncer. Elles font de
M. Necker le fils, citoyen de Genève, profeffeur
de Mathématiques en cette v ille , correfpondant de
l’académie royale des Sciences de Paris, & auteur
de \article Fr o t t em en t ; nous les avons extraites
d’une de fes lettres.
« On demande la probabilité qu’il y a d’amener
» croix en deux coups. Vous dites qu’il n’y a que
» trois évenemens poffibles, i°. croix d’abord,
» pile & croix, 30. pile & pile ; & comme de ces é ve-
» nçmens deux font favorables & un nuifible, vous
» concluez que la probabilité d’amener croix en deux
, » coups, eft de deux contre un, Cette conclufiorç
G A G
9 fuppofc deux chofcs; i° . que cette énumération de
»tous les évenemens poffibles eft complctte ; i° .
si qu'ils font tous, trois également poffibles, oe.juhpro-
» clives, comme dit Bernoulli. Je conviens avec vous
» de la vérité du premier chef ; mais nous différons
» fur le fécond point. Je crois que la probabilité
» d’amener croix d’abord eft double de celle.d’ame-
» ner pile & croix ou pile & pile. La preuve di-
» refre que je crois en avoir, eft celle-ci. Il eft auffi
» facile d’amener croix d’abord que pile d’abord ;
» mais il eft bien plus probable qu’on amènera pile
» d’abord, que pile & croix: car pour amener pile &
» 'croix, il faut non-feulement amener pile d’abord,
» mais après avoir amené pile, il faut enfuite ame-
» ner croix ; fécond événement auffi difficile que le
» premier. S’il étoit auffi facile d’amener en deux
» coups pile & pile que pile en un coup, il feroit
» par la même raifon encore de la même facilité d’a-
» mener pile, pile, & pile en trois coups, & en gé-
» néral d’amener n fois pile en n coups ; cependant
»qui eft-ce qui ne trouve pas incomparablement
» plus probable d’amener pile en un coup, que d’a-
» mener pile cent fois de fuite ? Voici une autre fa-
» çon d’envifager la chofe. Ou j’amenerai croix du
» premier coup, ou j ’amenerai pile. Si j’amene
» croix, je gagne toute la mife de l’autre ; fi j ’amene
» pile, je ne perds ni ne gagne, parce qu’enfuite au
» fécond jet j’ai une efpérance égale à la fienne.
»D o n c , puifque j’ai'chance égale à avoir fa mife
» ou à n’avoir rien, c’eft comme s’il rachetoit tout
» fon rifque, en me donnant la moitié de fa mife. Or
» la moitié de fa mife qu’il me donne, avec la mien-
» ne que je rattrape, fait les \ du tout, & l’autre
» moitié de fa mife qu’il garde fait l’autre quart du
» tout : j’ai donc trois parts, & lui une ; ma proba-
» bilité de réuffir étoit.donc de 3 contre 1. Mais voi-
» ci quelque chofe de plus décifif. Il fuivroit de vo-
» tre façon, Monfieur, de compter les probabilités,
» qu’on ne pourroit en aucun nombre de coups ga-
» ger avec parité d’amener la face A d’un dez à trois
» faces A , B , C; car vous la trouverez toûjoursde
„ a” — 1 contre z” , n étant le nornbe de coups dans
» lequel on entreprend d’amener la face A. Voici en
» effet tous les cas poffibles en quatre coups, par
» exemple :
A . B B B A. B B , B , B. c , B , B, B.
B , A . B B C A. B B , B C. Ci B c . B.
c , A. B C B A. B B c , B. c B Ci C.
B , B A. B c , m A . B C B , B. Ci B B C.
B , c . A . c , B B A. B B C C. Ci c . c . G.
C B , A. c , B C A. B c , B } C. c c . c , B.
C, c . A. C c , B A. B c , c , B. Ci c , B , C.
C C, C A . B , C C C. Ci c . B, B.
Il eft aifé de voir qu’il y a ici 15 cas favorables
& 16 défavorables; de façon qu’il y a z 4— ^1 contre
z 4 , qu’on amènera la face A . Il me paroît donc
certain que le cas A ne peut pas être regardé comme
n’étant pas plus probable que le cas B, C, B , B , &c.
Ces objections, fur-tout la derniere, méritent fans
doute beaucoup d’attention. Cependant il me paroît
toûjours difficile de bien expliquer pourquoi
& comment l’avantage peut être triple, lorlqu’il n’y
a que deux coups favorables ; & on conviendra du-
moins que la méthode ordinaire par laquelle on ef-
time les probabilités dans ces fortes de jeux, eft
très-fautive, quand même on prétendroit que le
réfultat de cette méthode feroit exaft ; c’eft ce que
nous examinerons plus à fond aux articles Je u , P a r
i , Pr o b a b i l i t é , & c. (O )
G a g e u r e , ( J u r i fp r u d . ) ç ft une convention fur
une chofe douteufe & in certaine, pour raifon de laquelle
chacun dépofe des gages entre les mains d’un
tie r s , lefquels doivent être acquis à celui qui a gagné
la gageure.
G A G 4*1
On fait des gageures fur des chofes dont l’exécution
dépend des parties, comme de faire une courfe
en un certain tems fixé, on fur des faits paftes, préfens
, ou à venir, mais dont les parties ne font pas
certaines.
Les gageures étoient ufitées chez les Romains ; on
les appelloit fponfiones, parce qu’elles fe faifoient
ordinairement par une promette réciproque des
deux parties, pcr flipulatiomm 6* reftipulationem; au
lieu que dans les autres contrats, l ’un ftipuloit, l’autre
promettoit.
En France on appelle ce contrat gageure, parce
qu’il eft ordinairement accompagné de confignation
de gages ; car gager lignifie proprement bailler des
gages ou conftgner l'argent, comme on dit gager l'amende
, gager le rachat. Néanmoins en France on fait
auffi les gageures par fimples promettes réciproques
fans dépofer de gages ; & ces gageures ne laiffent pas
d’être obligatoires, pourvû qu’elles foient faites par
des perfonnes capables de contrarier & fur des chofes
licites, & que s’il s’agit d’un fait, les deux par-,
ties fuffent également dans le doute.
Les Romains faifoient auffi comme nous des gageures
accompagnées de gages ; mais les fimples
fponfions étoient plus ordinaires. ,
Ces fortes de fponfions étoient de deux fortes
fponfio erat judicialis aut ludicra.
Sponfio judicialis étoit lorfque dans un procès le
demandeur engageoit le défendeur à terminer plû-
tôt leur différend, le provoquait à gager une certaine
fomme, pour être payée à celui qui gagne-
roit fa caufe, outre ce qui faifoit l'objet de la con-
teftation.
Cette première forte de gageure fe faifoit ou par
ftipulation & reftipulation, ou per facramentum. On
trouve nombre d’exemples de gageures faites par fti-
pulations réciproques dans les orailons de Cicéron
pour Quintius, pour Cecinna contre Verrès, dans
fon livre des offices; dans Varron, Quintilien, ÔC
autres auteurs.
La gageure per facramentum eft lorfque l’on dépo-
foit des gages in ade facrâ. Les Grecs pratiquoient
auffi c es fortes de gageures, comme le remarque
Budée. Ils dépofoient l’argent dans le prytanée ; c’é-
toit ordinairement le dixième de ce qui faifoit l’objet
du procès, lorfque la conteftation étoit entre
particuliers, & le cinquième dans les caufes qui in-
térefloient la république, comme le remarque Jul-
lius Pollux. Varron explique très-bien cette efpece
de gageure ou confignation dans fon livre II, de la langue
latine. C ’eft. fans doute de là qu’on avoit pris l’idée
de l’édit des confignations, autrement appelle
de l’abbréviation des procès, donné en 1563 ,& que
l’on voulut renouveller en 1^87, par lequel tout
demandeur ou appellant devoit configner une certaine
fomme proportionnée à l’objet de la conteftation;
& s’il obtenoit à fes fins, le défendeur ou intimé
étoit obligé de lui rembourfêr une pareille
fomme.
L’ufage des gageures judiciaires fut peu-à-peu aboli
à Rome; on y lubftitua l ’aâion de calomnie, pro p
décima parte litis, dont il eft parlé aux infiit. de pana
temerè litigant. ce qui étant auffi tombé en non-ufa-
g e , fut depuis rétabli par la novelle 112 de Juftinien,
On diftinguoit auffi chez les Romains deux foiy
tes de gageures, ludicres. L’une qui fe faifoit par ftipulation
réciproque, & dont on trouve un exem- .
pie mémorable dans Pline, Hv. IX . chap. xxxv. oîi
il rapporte la gageure de Cléopâtre contre Antoine ;
& dans Valere Maxime, liv. II. où eft rapportée la
gageure de Valerius contre Lu&atius. Il eft auffi parlé
de ces gageures en la loi 3. au digefte de aleo lufu &
aleat. qui dit, licuiffe in ludo qui virtutis caufd fit fpon-
fiionem facere ; fuivant les lois, Cornelia & Publicia,
alias non licuiffe.