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àvec une armée de 80 , obô hommes. Tfara
Muftapha, qui ne voyoit qu’une poignée d’ennemis
, |e flatcoit d’être plus heureux, & il
commença fans crainte le fiége de cette ville.
Les Allemands font braves , fans doute, mais
ils ne fe font jamais préfentés aux portes de
Conftantinople, comme les Turcs à celles de
Vienne.
Le comte de Stahreriberg, homme de tête
8c d’expérience, gouverneur de la ville, avoit
mis le feu aux faubourgs, cruelle néceflité ,
quand il faut brûler les mai focs des citoyens
qu’on veut défendre Il n’avoit qu’ une garni-
fon de idcoo hommes -, on arma les étudians.,
& ils eurent un médecin pour major.
Cependant le fiége fe poufToit avec vigueur -,
T ennemi sfompara de la contrefcarpe après vingt-
trois jours de combat; l’efpérance de tenir encore
long-temps diminua. Les mines des Turcs,
leurs attaques continuelles, la garnifon qui
fe détruifoit, les vivres qui s’épuifoient, tout
donnoit la plus vive inquiétude. On s’occupoit
fans celle à éteindre le feu que les bombes
.& les boulets rouges portoient dans la v ille,
tandis que les dehors tomboient en éclats.
Dans cette conjoncture déièfpérée, Sobieski
arrive avec fon armée à cinq lieues au dëifus
de Vienne. L’éleéjteur de Bavière , âgé de dix-
huit ans , amenoit ïzopo hommes : Péleéteur
de Saxe e.n conduifoit 10,000. Toute l’armée
Chrétienne eomp.ofoit environ 74,000 hommes.
Sobieski délivra l’ordre de bataille , & après
.avoir examiné les .dilpofïtions de Kara Muftapha
, il dit aux généraux allemands : cet homme
-eft mal campé, c’eft un ignorant dans le métier
de la guette, npiis le battrons certainement.
ïl prophétifa jufte : la plaine qu’occu-
p.oient les Turcs devint le théâtre d’ un triomphe
que la poftérifé aura peine à croire. Le butin
fut immenfe, les Allemands & les Polonois
^ en r ich iren ton retourna contre les janiffaires
qui .étoient reftés dans les travaux du fiége ;
dn ne les trouva plus, 8c Vienne fut fauvée.
L’ordre militaire, dit de Marie - Therefe ,
fut établi en ,1759 , & perfectionné -en 1765
fa r l ’empereur Jofeph II. Ce prince a accordé
aux grand-croix une nouvelle marque de leur
dignité, qui eft une croix d’ argent en çhamp
rouge, entourée d’un laurier, avec la légende :
Fortitudini, & brodée fur le coté gauçhe de
l ’habit.
JCejp titres du fouverain font : empereur des
Romains , roi d’Allemagne, roi de Hongrie ,
de Bohème , de Dalmatie, de Croatie ? d’Ef-
clavonie ; archiduc d’Autriche, duc de Bourgogne
, de Stirie , de Carinthje, de Carniole -,
grand-prince de Tranfilvanie , margrave de Moravie
; duc di Brabant, de Limbourg, de Luxembourg
&: de Gueldres, de Wurtemberg,
d$ haute baffe-Siléfie, de Milan , de
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Mantouë , de Parme, de Plaifance , de’ Guaf-
falla; prince de la Suabe, comte de Habfbourg ,
de Flandre , de T ir o l, de Hainault, de K$y-'
bourg, de Goertz & de Gradiska -, margrave
du Saint-Empire Romain, de Burgau, de la
haute 8c baffe-Luface, comte de Namur, fei-
gneur de Malines, duc de Lorraine 8c de Bar;
grand-duc de Tofcane, duc de Montferrat &
de. Téfchen, prince -de Charleville , margrave
de Pont-à-Mouflon & de Nomeni; comte de
Provence, de Vauàemont, de Blankenberg ,
de Zutphen, de Saarwerdén, de S a Ira & de
Fâlkenftein , marquis de Berg-op-Zoom, &c.
Cette capitale, au refte, n’eft pas la ville d’Al-,
lemagne la plus féconde en favans 8c en hommes,
de lettres, 8c il ne fe.roit pas difficile d’en.,
indiquer la raifon. Cette ville a feulement produit
quelques hiftoriographes, & c’ eft à peu.
près tout. Je mettrai dans ce nombre'Gualdo,
( Galeaffo ) il a décrit en 16 livres les guerres,
des empereurs d’Allemagne depuis 1630 jufqu’en
1 <340- Cet ouyrage parut à Bologne -en 1.041,
à Genève en 1643, & à Venife en 1644.
Incofer ( Melchior ) naquit à Vienne en 1584,
& mourut en 1648. Il a donné un volume des
annales eccléiiaftiques de Hongrie; on le croit
généralement auteur d’un livre contre les conf-
titutions des. jéfuites , intiulé monarçhia Splip-
forum : ce livre a été publié en Hollande en
1648., avec une clef des noms déguifés. On en
a une traduction françoife , imprimée en 17.22 ,
avec des notes ; on trouve en général affez d’é-
.rudition dans fes écrits , mais beaucoup dé crédulité
, peu de choix & de critique.
Le' grand amphithéâtre voifin de la ville eft
deftiné aux combats de diverfes fortes d’ animaux
, fpeélacle que devroient profcrire les
peuples policés. A une lieue de cette capitale
eft le château impérial de Schcenbrun , fitué
fur la Vienne , dans une vallée aquatique ; if
fupaffe en beauté les autres maifons de plai-
fance du fouverain. Celle de Laxerfibourg eft
à deux milles de Vienne : au printemps, la
maifon impériale a coutume de s’y procurer le
jivertiffement de la chaffe au héron.
Vienne, fituée à fi.x milles des frontières de
Hongrie, eft à 9 lieues o. de Presbourg, 210
f. o. d’Amfterdam, 260 n- o, de Conftànti-
tinople, 408 n. e. de Madrid, .270 f. e. de
Paris. Long, 34 deg. a ', lat. 48 deg. 22. ' , 3A.
Suivant Caffini fa' long• eft de 33 deg. , a.31 ;
fa lat. de 45 deg. 24L Suivant Harris, long>
34 deg. x t 1 , 30^ j Idt 48 deg. 24'.' Sa long.
prifo du méridien de Paris eft de 14 deg4.
M , 3011 fuivant le P. ,-Liefganig.
Dans le faubourg de Wieden eft une mai- j. fon de plaifance de l’empereur , où il y a
de beaux jardins Sc une falle d’opera : il y
avoit un autre château de plaifance dans le
faubourg
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faubourg de Léopoldftadt : l’impératrice Marier
Thérèfe -le donna en 1746 aux jéfuites , pour
y établir une académie de jeunes gentils-hommes.
( R. )
V ienne, ou V ienn'e en Dauphiné, Vienna
A llo b rog um , Vindobona , ancienne & célèbre
ville de France, dans le Dauphiné, fur la rive
gauche du Rhône , à l’endroit où la Gère fe jète
dans ce fleuve , à 5 lieues au midi & au-deifous
de Lyon, à 14 au n. o. de Grenoble, & à .105
au f. è. de Paris.
Cette ville eft re'fTerrée entre des montagnes
qui la preffent contre le Rhône.'D’ailleurs il y
faut toujours monter ou defcendre ; les xues en
font étroites, mal percées, & les maifons mal
■ bâties. Au refte , c’eft Je fiége d’un archevêché,
d’un gouvernement particulier | il y a baillage ,
éleélion, jufti.ce préfidiale des -traites 8ç de la
douane , ,juftice royale & archiépifcopale alternativement,
maréchauffée, lieutenance générale de
police. La métropole eft un ouvrage gothique
affez eftimé. L’archevêché d.e Vienne eft fort
ancien ; car du temps .d’Eusèbe..,.. Lyon 8c Vienne
étoient les deux plus illuftres métropoles des
Gaules.
L’archevêque de cette ville prend le titre de
premier primat des .Gaules, 8c a pour fuffragans
les évêques de Valence, de D ie , de Grenoble,
de Viviers, outre celui de Genève ou d’A n e cy ,
dans la Savoie.Son diocèfe renferme 3Ô5 paroifîes,
cinq abbayes d’hommes , neuf de . femmes , & .
fix chapitres. Il jouit d’environ 35,000 liv. de
r e v e n u 8c fa taxe , en cour de Rome, eft de
1854 florins. On ve.ut que S. Crefcent, difciple
.de S. Paul, en ait été le premier prélat. Le chapitre
eft compofé de vingt chanoines, au nombre
defquels lés dauphins fe faifoieat autrefois
agréger.-
Outre le chapitre de l’églife métropolitaine ,
:fl y en a trois autres à Vienne ; celui de faint
JPierre eft compofé d’ un abbé & de vingt-quatre
chanoines, qui font obligés de faire preuve de
nobleffe dé trois quartiers. "
Il s’y trouve aufli trois abbayes entre lefquelles
on diftingue celle de S. André-le-bas, qui eft de
bonne architeâure, & près de laquelle eft une
plate-forme dite la table ronde , afilé autrefois
où les perfonnes qui s’y étoient réfugiées , & les
effets qu’on y avoit tranlportés.,. étoient faufs
contre toutes pourfuites. Il y a d’ailleurs un
prieuré , neuf maifons religieufes , un fémi-
naire dirigé par les prêtres de l’Oratoire , & un
collège régi ci-devant par les Jéfuites. L’églife
date Notre-Dame de la V ie , eft un édifice antique'
, de formé qùarrée, & qu’on préfume avoir
été un prétoire romain. Près"dé là eft l’ancien palais,
des dauphins de Viennois , transformé aujourd’ hui
en tribùnaùx de juftiçe. Daris le faubourg fainte-
Colonibe , eft une tour qui commande le pontv
L’ençeinte des murs de Vienne <iû de 17S0
Géogr. Tome IIIl
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toïfes ; îl y a quelques manufadures de toiles , de
papier, de peaux, de gros cuirs ; il y a une fabrique
pour les ancres; il s’y fait des lames d’épées Sc
autres ouvrages en fer , en acier, & en cuivre.
Des ouvriers Allemands y avoîént établi une
fabrique de fer-blanc qui méritoit des encourage-
tnens ; elle a été négligée , 8c elle ne fubiifte
plus.
Ce fut à Vienne que fè t in t , en 1311 , le
quinzième .concile général qui fupprimà l’ordre-
des .templiers , & auquel afiiftèrent le pape
Clément V , à la tête de ;300 prélats , les patriarches
d’Alexandrie & d’Antioche, & Philippe-
le -B e l, roi de France, accompagné de fon frère
& de les trois fils, dont l’aîné étoit roi de.
Navarre.
Vienne , qui fut comprife dans la Gaule Nar-
borinoife , & devint en fuite métropole d’ une
province des Gaules de fon nom, fut la capitale
des Allobroges,félon Strabon, l. IV . Il en eft parlé
dans Céfar, bel. gai. I. V i f c. /x;Pomponius Mêla,
l. I I I . c. v. la met au nombre des villes lés plus
opulentes , & Pline , l. I I I , c. iv , lui donne le
titre de colonie. Elle eft marquée dans Ptolémée,
l. Ily c. x , comme ‘la feule ville dés Allobroges ;
mais c ’eft que ce géographe s’eft contenté de
donner le nom de la capitale de ce peuple. Elle
étoit encore opulente du teins d’Aufone, qui en
a parlé ainfi, in are lat-
Accolit alpinis ppulenta Vienna colonis.
Les belles-lettres étoient cultivées à Vienne ,
8c on s’y faifoit un plaifir de lire les vers des-
poëtes de Rome. Nous en avons une preuve
dans ceux de Martial , l. VHy epigr.:,88. de fuis'
librisy qui fe félicite de ce que fes ouvrages
font lus à Vienne des grands 8c des petits :
Fertur Kabere meus y Ji vera ejlfama , libellas
Inter delicias pulchra Vienna fuas.
Me legit omnis ibi fenior, juvenifque puer que,
E t coram tetrico cafa puèlla viro. ''
Hoc ego maluerim quant f i mea cxrmina cantentÿ
Qui Nilum ex ipfo protinus ore bibunt.
Quàm meus hifpano f i me Tagus impleat aura ,
Pafcat& Hybla measp pafeat Hymetùus apes.
Cette ville enfin déjà célèbre du temps de
Jules, Céfar, fut connue de Strabon , de Pom-
ponius Mêla , de Ptolémée , de Velleius Pater-
culus , de Pline & de prel’que tous les hiftoriens.
; On prétend que Tibère y envoya une colonie
. nombreufe, que l’empereur Claude y établit
une efpècë .de fénat, qui étoit, apparemment le
: prétoire du Vicaire des G a u le s d ’où ell» prit 1®
aoni de fédatotienne que lui donnent quelques