
foins éXffàôrdîftaîres y les moirtS aimttgues Ôft£
quinze efclaves à leur fervice : fous prétexte de
lè s bien nourrir, leurs conduâeurs les font entrer
dans les terres 8c dans les jardins , qu’ils dévaluent
, à moins qu’on ne le rédime de cette
v exa tion par des préfens continuels. Perfonne
n’oferoit fermer fon champ aux éléphans du r o i ,
dont pluiieurs font décorés-de titres honorables»
8c élevés même aux premières dignités de l’état.
T an t d’ efpèces de tyrannie font que les Siamois
Ôéfeftent leur patrie , quoiqu’ils la regardent
comme le meilleur pays de la terre. Beaucoup
le dérobent à l’opprelfion, en fuyant dans les
forê ts » où ils mènent une v ie fauvage , cent
fois préférable à celle des fociétés flétries & co r rompues
par le delpotifme. La défertion eft: devenue
fi confidérable, que fur un fol excellent »
depuis le port de Mergui jufqu’ à Siam, on marche
huit jours dans des pays abandonnés, habités &
cu ltivés autrefois.
Les Siamois font peut-être le peuple le moins
porté '& le plus inhabile à l’ art militaire. Si les
P égu an s, leurs voifins , entrent d’ un côté fur
leu r s te r re s , ils entrent dans celles du P é g u ,
& les deux parties emmènent des villages entiers
en captivité. D e lièges ils n’en ont jamais faits y
& quand ils prennent quelques places, c’eft toujours
par la faim ou par la trahifon. Ils font
encore plus foibles fur mer que fur terre : à peine
le roi a - t- il cinq ou fix petits vaifleaux qui ne
peuvent fervir que pour porter des marchandifes.
S e s galères ne font que de médiocres bateaux
à un pont , avec des rames for t courtes qui
atteignent à peine à l’eau , & des ancres de bois.
Les finances du roi confiftent en droit dédouané
fur les marchandifes qui arrivent dans
les états , & en un droit annuel fur toutes les
terres labourables & fur tous les fruits qui le
recueillent ; il a outre cela des terres qu’ il fait
cultiver par fes fujets y il a les amendes &
eonfifcations y enfin il gagne beaucoup dans le
commerce qu’ il fa it fetil & exclufivement fur la
plupart des chofes rares qu’on vend enfuite à
fpn profit.
Les anciennes lo ix de Siam ordonnent qu’après
la mort du r o i , fon frère fuccédera à la couronne
y & après la mort du f rè r e , on s’il' n’ÿ a
point de f rè r e , fon fils aîn é..M a is ces lo ix ont
été fi fouvent v io lé e s , & la fuccefïTon a été fi
fouvent dérangée , qu’ à p ré fen t , lorfque le roi
v ien t à mou rir, celui de la famille royale qui
eft le plus pu iffant, s’empare de la couronne :
de forte qu’ il arrive rarement que le plus proche.
8ç véritable héritier monte fur le trône, ou foit
en état de s’y maintenir;
Le roi de Siam a plufieurs grands officiers y
fa voir, i ° . un officier qui a la d ireâion des cours
criminelles 8c des eonfifcations : c’ eft une place
de grande confiance y z°. un grand chancelier
qui a la dire d io n des affaires étrangères y 30. un
grand chambellan qui a la furintendance de$
palais du roi y 40. lé premier juge y 50. le receveur
général des revenus de la couronne y 6 ° . un
grand écuyer qui a l’infpe&ion des éléphans 8c
de leurs équipages y 7 0. un grand maître de la
maifon, qui a fous fon intendance tons les domef-
tiques du roi & les balons de fa majefté.
I l y a plufieurs autres officiers de la cour ,
d’un rang inférieur, comme le ch ef des Malagans,
celui des M o re s , le receveur des douanes, & c .
Les Siamois n’ont p o in r de nom de famille-
héréditaire y ils reçoivent les noms qu’ ils portent
de leurs maîtres & de leurs fupérieur$. Les premiers
de l’état portent lé nom de leurs charges y
mais nui officier n’ a de gages y il a feulement le
lo g em en t , & quelquefois de petits préfens du
p r in c e, comme quelques terres labourables, qui
reviennent encore au roi avec l’office, après la
mort de fofficier. Ainfi , le feul gain des offices
confifte dans les concufiions 8c les préfens des
particuliers y ce. qui eft fi commun , que les
moindres officiers en font aux plus grands à titre-
de re lp e é tm a is - en réalité .pour être protégés.
Le miniftère eft orageux dans ce pays-là, tant
par l’ inconftance naturelle du p r in c e, que parce
que les voies font ouvertes à tout le monde pour
lui porter fes plaintes.
Un ambaffadeur n’eft dans ce royaume, comme
dans tout l’O r ien t , qu’un meffager des rois y il
ne repréfente point fon maître y il eft arrêté à
l’entrée du royaume , jufqu’à ce que le roi foit
informé de fon arrivée : on le conduit d’abord
à l’audience , & il ne peut refter dans la capitale
après l’audience de.congé.
La fameiife ambaffadé de Siam en F r an c e ,
dans le dernier f iè c le , fut l’ouvrage d’un miniftre
amb itieux , Grec de n a t io n , qui y voyageant à
S iam , avoit plu au p r in c e, & étoit parvenu en
peu de temps à l’emploi de principal miniftre.
Phaulcon eft fon nom y il gouvernoit defpotique-
ment le peuple 8c le roi. V o y an t fon maître
fo ib le , valétudinaire & fans poftérité , il avoit
formé le projet de lui fuccéder, peut-être même
celui de le détrôner y entreprîtes auffi faciles &
aufli communes dans les pays fournis aux defpotes ,
qu’ elles font difficiles 8c rares dans les pays où
l’autorité du prince a pour principe , pour mefure
& pour r è g le , des lo ix fondamentales & immuables
, dont la garde eft confiée à des corps
de magiftrature éclairés & nombreux. Phaulcon
imagina de frire fervir les François à fon projet-
Ce tte ambaffadé nous a valu les relations de ce
ro y aume, compofées par le père Tachard , par
l’abbé 8e C h o i fy , par M M . D e lille , G e rva ife ,
de Chaumont, 8c de la Loubère y mais outre que
; toutes ces relations fe contred ifent, elles n’ontr
pas le mérite de celle de Kæm p fer , qui d’ailleurs
eft poftérieure à tous les voyageurs que je viens
de nommer, (i?.)
Siam , grande ville des Indes orientales ,
capitale
« p i ta le clu royaume de fon n ô it l, & la féfidence
du roi. Ce tte capitale eftappellée par les Siamois
M am a n g -S y o u th ia , & p a rle s Chinois Juthm &
J u d ia . L o n g , fuivant C a flin i, Lieu tau d, «t U e t -
places , i i S , n i , 30 ; fuivant le pere N o ë l ; t.iS ,,
6 , 30 : la t. fuivant les uns & les autres, 1 4 , i S - ’
Ce tte v ille eft renommée dans toutes les In de s,
quoique très-moderne , n’ayant pas au jouta nui
plus de trois fiècles d’antiquité. Elle etoit auparavant
dans le lieu où eft préfentement Banlcok,
fur le bord occidental de la grande riviereMenant;
mais on l’ a démolie pour la rebâtir où elle elt
à préfent, dans une île baffe, formée par cette
rivière. Ce tte île a la forme de la plante du
pied , le talon tourné à l’ oueft , & environ deux
milles d’Allemagne de c ircuit. Elle eft fituee dans
un pays to u t - à - fa i t plat , où rien ne borne la
v u e , & fur un terrain b a s , coupe par plufieurs
canaux qui viennent de la r iv ie re , & qui forment
tout autant de petites îles quarrees y de forte ■
qu’on ne pourroit aller for t loin lamT bateau.
- Elle eft environnée d’ une murarlle.de b riqu es,
qui doit être aujourd’hui tombée en ruines , fi on
ne l’a pas rétablie. On porte fa population a
600,000 hàbitans.
Plufieurs grands canaux qui viennent de la
r iv iè re , traverfent la v ille , & font affez profonds
pour porter lés plus grands bateaux & les faire !
aborder auprès des principales mailons. Les rues
fon t en droite ligne le .lon g des can au x, mais
la plupart font fort étroites y d’ ailleurs elles font
toutes fales 8c malpropres : il y en a même qui
fon t inondées en haute marée. A confidérer^ la
grandeur de cette-Ville , elle eft affez dépeuplée,
fu r -tou t du côté de l’oueft 8c du fud , où 1 on
v o it de grands efpaces vuides , 8c qui ne fo n t .
poin t cultivés. t ' '
Le roi a trois palais dans cette v i l le , dont le
plus ' remarquable eft dans le milieu de la ville
même. Ce palais eft un grand quatre , divifé en
plufieurs bâtimens , qui , fuivant l’ architeéhire
ch in o ife , font ornés de plufieurs toits l’un fur
l’ autre , 8c de plufieurs frontifpices , dont une
partie eft dorée. Dans l’enceinte du palais, auffi
bien qu’ au d eh o r s , il y a. de longues !écuries où
l’ on vo it une centaine d’ éléphans rangés de fuite
& magnifiquement harnachés y mais il n’y a
qu’ une feule ouverture pour entrer au; palais , 8c
quoiqu’ elle foit extrêmement fa le , perfonne n y
paffe qu’ à pied y d’ ailleurs, pour éviter toute fur-
prife , il* eft défendu à tous les bâtimens qui remontent
la riviè re, de s’approcher des murs du
palais ro y a l, qu’ à une certaine diftânee:1
On v o it aux portes %^-aux autres -avenues de
ce palais , une foule dé gens nuds, dont la peau
bafanée eft peinte de figures noires bigarrées,
comme lejf images du faint-fépulchre à Jérufalem.
Quelques-uns ne font marqués ainfi qu’ aux bras^y
mais les autres le font par tout le corps , jufqu-’ a
la ceinture , qu’ ils - couvrent d’un morceau de
Géogr. Tome I I I .
drap ,. fuivant la coutume générale du pays. Ou
leur donne le nom portugais de bracos-pintados ,
ou bras, p e in t s . Ce font la les gardes du roi >
fes portiers fes .bateliers : pour toutes armes ,
ils ont jdes bâtons gro.s 8c courts , & ne fon t
que roder autour du palais comme des vagabonds.
: Dans les autres parties de la v ille , il. y a un
quartier qui eft deftiné aux étrangers, où demeurent
les C h in o is , les Maures 8c les Indouftans : c’eft
un quartier très-peuplé, où il, fe fait un grand
commerce, parce que tous les vaiffeaux y abordent;
Les maifons de cesr; étrangers font en quelques
èndroits toutes bâties de pierre y mais elles font
fort petites;, n’ayant que huit -pas de lon gueu r,
quatre de largeur ,• 8c deux étages , quoiqu’elles
n’ aient pas plus de deux braffes ■ & demie de
hauteur. Elles font couvertes de tuiles plates
8c ont de grandes portes fans aucune proportion.
Le quartier des naturels du pays , e f t , comme
on peut bien le penfer , lé plus grand de tous y
' il eft habité par quantité d’ artifans , rempli de.
boutiques des deux côtés , & de grandes places
pour les marchés qui fe tiennent tous lés jours
loir 8c matin. Les maifons des gens du commun
qui y demeu ren t, ne font que de miferables
cabanes , bâties de bambou , & couvertes de
branches & de feuilles de palmiers q ui croiffent
dans les marais. Lés boutiques font baffes & mal
entendues , mais elles font affez bien fituées egy
lignes droites parallèles aux rues.
Le s mandarins ou miniftres d’é t a t , & les
courtifans , demeurent dans les quartiers voifins
dès palais du roi y leurs maifons , quoique bâties
de pierre 8c de chaux , font affez chétives y les
appartenons ne fon t ni propres ni g a rn is , 8g:
les cours font fort fales.
Les canaux de Siam ont donné lieu à un grand
nombre de ponts , dont la plupart font faits ds
b o is , 8c peu folides : ceux qu’on a bâtis fur le
grand canal font de pierre ou de brique , avec
des baluftfades de même y mais comme il n’y a
dans cette ville ni chariots ni charrettes , tous les
ponts font fort étroits : lès plus beaux ont 6 o
ou.8o pas de lo n g , 8c font fort hauts au milieu.
Comme tout le p a y s . de Siam fourmille de
prêtres 8c de moines , cette ville en particulier
eft pleine de temples , dont les cours aboutirfent
régulièrement au niveau des ru e s , 8c font remplies
de pyramides & de colonnes de différentes figures,
& dorées.. Ces temples ne font pas fi grands que
nos é g f ife s , mais ils les furpaffént en magnificence
extérieure , comme par le grand nombre
de leurs to i t s , par leurs frontifpices d o ré s, leurs
efcaliers avancés , leurs pyramides , colonnes ,
piliers , 8c autres embelliffemens. Le dedans eft
orné de plufieurs ftatues de grandeur naturelle ,
ou même plus grand es, artiftement faites d’un
J mélange de p lâ tre, de réfine 8c de p o i l , auquel
on donne d’abord un vernis n o i r , & que i’o &
B b