
pond point a la dignité de* fondions de la Ma-
giftrature fuprême.
L’hôtel-de-ville de Toulouft , d’architeéhire
moderne j efl le plus magnifique qu’il y ait en
France , après celui de Lyon, qu’il furpaffe même
par la beauté du développement. On lui donne
le nom de Capitole, dénomination trop faftlieufe.
; Cet édifice , orné de colonnes de marbre tacheté
de rouge , efl un quarré parfait., de 54
■ toifes de face. Sa hauteur efl de 11 toifes ou
environ, la façade a Ton afpeâ- fur la place
-royale, dont elle forme un des côtés. Les capi-
tou 1s ou Ichevins acquièrent'là noblefie , & la
tranlmettent à leur pofterité. Ils font au nombre
de huit. Ils ont la juftice criminelle-& la police..
Dans une des falles de l*hôtël-de-ville on voit
la ftatue de Clémence Yfaure, fondatrice en même
temps de l’hôtel-de-ville & des jeux floraux. I l x
s’y trouve aufli quelques bons tableaux de Bou- "
lôgne l’aîné, de Jouvenet, de Çoypel & de
Rivais. Dirons-nous enfin, que c’ eft de cethôtel-
de-ville que le barbare Richelieu conduifit le duc
de Montmorenci fur l’échafaud.
Le couvent des dominicains efl: le' plus ancien
& un des plus confidérables de l’ordre. II. fut
fondé par Saint-Dominique en 1x16. L’églife fe
fait plus remarquer par la décoration 8c les or-
nemens, que par fon architecture irrégulière.
Mais ce qui efl: à obforver, c’eft le tombeau de
Saint Thomas-d’Aquin , formé d’une châfle de
•vermeil , d’une grande richefle , qui renferme
le corps du fàint, dont le chef efl: à la facriftie.
L’églife des. cordeliers efl: un très-beau vaifleau-,
mais ce qui y excite fur-teut l’attention des curieux
, c’eft le caveau qu’on dit avoir la propriété
de conferver les corps qu’on y dépofel Ceux qu’on
y voit rangés autour des murs , . au nombre
d’environ 70 , ne font cependant autre chofe
que des fquelettes revêtus d’ une chair deflechée ,
qui ne forme plus qu’une efpèee de peau fort
épaiffe , 8c noire. Ces fquelettes ont été exhumés
de la nef de l’églife où ils s’étoient confervés
fans pourriture , parce qu’en rebâtiffant la voûte
de la nef , on avoit fait éteindre de la ch’aux
dans toute fa largeur, la terre qui en étoit èn-
core imprégnée, a pu d’abord préferver les corps
de la putréfaction , dont elle ne les ’garantit
plus aujourd’hui. .
Touloule, a plufieurs hôpitaux & plufieurs
féminaires -, une belle abbaye de bénédiflins , &
un très-graad nombré d’autres communautés. Sa
confrairie des pénitens bleus compta autrefois
parmi fes membres Louis XIII , Louis X IV ,
un duc de Bourgogne , un duc de Berry , &
quelques membres du haut clergé.
La population de Touloufe efl de 90,000 ha-
bitans. Son commence n’embraffe guères que les
laines d’Efpagne ; il ne fort de les fabriques
que des bergames, tapifferies de très-peu de
valeur, & de petites étoffes foie 8c laine.
Ce qui s’oppofe à la profpérité de cette ville -f'
efl l’attrait qu’a pour les meilleures maifons de
• commerce la perfpeéhve de la noblefle attachée
au capitoulat, 8c qui les détermine à quitter le
négoce au moment où ils feroient à portée d’en
faire un plus lucratif 8c plus étendu, pour fe
jeter dans la magiftrature.
On remarque en cette ville le moulin de Bs-
facle, qui a i 6 meules que fait mouvoir la Garonne
, fans le cliquetis, incommode des autres
moulins ; chaque meule peut convertir en farine 40
ou 50 foptiers de blé par jour. Ce moulin qui appartient
à différens particuliers , produit environ
ixb,-ooo liv. de rente.
Par lettres-patentes de 1786, il a été établi
deux foires franches a Touloule ', de quinze jours
chacune, avec les mêmes privilèges & à l’inftar
de celles de Lyon. L’ouverture en e fl fixée aux
i 1’ 1. mai, 8c 10 feptembre de chaque année.
A un mille de Toiiloufe fe termine le fameux
Canal de I.angùedoc. On.le nomme aufli le Canal
royal, parce que Louis X IY 9-fous le règne 8c
les ordres duquel il fut exécuté , entra: pour
beaucoup dans les frais de l’entreprife. On coin1
mença à y naviguer en 1682.
Touloufe efl à 50 li. fl e. de Bordeaux, 45 0.
de Montpellier , 15 e. d’Auch , 150 fl fl ov
de Paris.
Elle a produit des perfonnages connus dans ,
les armes & dans les lettres. On voit les buftés
en marbre de plufieurs dans l’hôtel-de-ville. Je
commence par Antonius.
Antonius primus ( Marcus , ) étoit ami de Martial
8c l’on Mécène -, aufli cepoëte l’élève-t-il jufl- .
qu’aiix nues. Marcus Antonius fut un des premiers
capitaines de fon temps , 8c qui a joué un grand
rôle dans 1?Jiifloire. romaine -, c’étoit un homme
éloquent dont Tacite nous a confervé quelques
fragmens de harangues j mais un homme chargé
de crimes, & dont la fcélératefle égala la. valeur.
Comme c’étoit un homme intrigant , hardi ,
8c entreprenant r banni de Rome, il trouva le
moyen d’y rentrer, 8c d’obtenir de Galba le
commandement, d’une légion. Sur le .déclin des
affaires de Vkellius , il prit le parti de V ef-
pafien , lui rendit de grands flervices, & le plaça ,
pour ainfi dire :, fur le trône. Il s’empara de
Padoue, d’Atefte ( aujourd’hui E fl) , embrafa,
détruifit & faccagea Crémone , avec la barbarie
la plus incroyable. Enfuite il ravagea l’Italie
comme pays de conquête , ruina la difeipline
dans les troupes, & fe fervit de ce moyen
pour s’eiiridhir par le pillage.
Il attaqua l’armée de. Vitellius aux portes de
Rome, & la jaourfuivit jufque dans Rome même ÿ
la le combat le renouvella , & continua pendant
quelque temps , en trois différens: endroits avec
beaucoup de furie & de carnage, jufqm’à ce
qu’enfin les Vitel liens furent défaits , & An-
tonius demeura maître, de Rome 5 alors il
dévoila pleinement fon exécrable avarice, enlevant
des palais , fans fcrupule, or , argent, meubles ,
efclaves, comme s’ il eût ëncore pillé Crémone.
C’eft ainfi qu’il termina la guéri e civile, & qu’il
affermit la couronne impériale fur la tête de
Velpafièn.
Mais la jaflance, l’orgueil, lés richefles 8c
l’ ayidité d’Àntoniüs, le perdirent-, tous les chefs
de l’armée, ayant Mucien à leur tête , fe liguèrent
contre lui. Ils l’accusèrént auprès de
Vefpafien d’être.un efprit dangereux, d’avoir
perdu la difeipline militaire pour fe'faire des
créatures , d’être arrivé’ trop tard au fecours de
Sabinus , 8c d’avoir voulu élever à l’empire
Craflus Scribonianus -, à quoi ils ajoutèrent le
détail de tous fes crimes précédens. Enfin , il
déchut peu à peu de fon crédit, & fe vit obligé
de fe retirer à Touloufe, où il mourut fans
honneur, âgé de 65 ou 75 ans.
Voilà le portrait qu’en fait- Tacite dans fan
hiftoire,,^/. I I , l. I I I & l. I V , où vous trouverez
de grands détails.
Pour les affembler en deux mots , Antonius
étoit un homme d’ intrigue & d’exécution ÿ-Jhardi
de la langue & de la main, maniant la parole
avec une adrelîe merveilleufe , propre à décrier
qui il vouloit, habile à gagner les bonnes grâces
des foldats , vrai boute-feu de guerres civiles ,
prompt à piller & à prodiguer, pernicieux dans
la paix , & de grand prix a la guerre.
S'tatius Surculus, ou Urculüs , rhéteur, qui
vivoit du temps de Néron, vers l’an 60 de J. C .,
parut peu de temps avant Antonius. Ne le confondez
pas avec le poëte Publius Papinius Sta-
tius , qui floriflbit du temps de Domitièn.
Æmilius Magnus Arborichus , rhéteur, en-
feigna, dit-on, dans Touloufe les belles-lettres
au frère de Conftantin.
On voit enfuite les bùftes des Théodoric I
8c I I , rois de Touloufo V de Raymond de Saint-
Gilles, comte de Touloufe-, de Bertrand, comte
vde Touloufe i de Guillaume & de Jean Nogàret.
Parlons à préfent des hommes de lettres, nés à
Touloufe, dont les buftes font dans la galerie.
Bynel- ( Pierre ) , l’un des plus polis écrivains
du feizième fiècle, fe diftingua par fa vertu , fon
défintérefiement 8c fa fcience. Il mourut à Turin
en 154$ , à l’âge.de 47 ans. On a des lettres
latines dè cet honnête h om m e q u i font écrites
àvec la dernière pureté. Charles Etienne les imprima
en 1.551, & Henri Etienne, fort correctement,
en 1581. L’édition de Touloufe , 1687,
efl eftimable par les notes de Graverol -, mais
le texte efl rempli de fautes. On tr,ouve à la
bibliothèque du roi quelques lettres de Bunel,
qui n’ont pas encore été imprimées.
Catel (Guillaume) , confeiller au parlement
de Touloufe, mort en 172.6 , s’eft fait connoître
par une hiftoire des comtes de Touloufo, 8c fes
mémoires du Languedoc.
1 Cafeneuve ( Pierre de ) , né en 15 9 1 , mort
en 1652,, donné les origines ou étymologies
françoifes, qui font à la fuite du diétionnaire de
Ménage-, fes autres petits ouvrages font dans
l’oubli. Le père Niceron a mis l’auteur parmi
les hommes illuftres -, mais le fuivant Cujas étoit
digne de ce titre.
Cujas (J a cqu e s), Cujacius, le plus célèbre
jurifconfulce du feizième fiècle , naquit à Touloufe
en 15x0, de parens obleurs -, c’étoit iin de
ces génies rares 8c heureux qui apprennent tout
d’eux-mêmes, 8c qui l’enfeignent merve illeu-
foment aux autres. Touloufe ne connut point
fon mérite, elle lui préféra un indigne compétiteur
pour la. chaire de droit -, il fe retira à
Bourges , fe fit adorer des étudians , 8c mourut
dans cette ville en 1590 , à l’âgè de 70 ans.
La meilleure édition des oeuvres de ce grand
jurifeoniulte efl celle de Fabrot , en 10 vol.
in-fol. Papyre Maflon a écrit fa vie.
Duranti ( Jean Etienne ) , premier préfident
au parlement de Touloufe, 8c l’un des plus favans
magiftrats de fon fiècle, efl auteur de l’excellent
livre intitulé, de Ritibus ecclefîoe. Il foutint avec
zèle le parti du roi contre la ligue , 8c fut
tue d’ un coup d’arquebufe dans une émeute populaire
, après la nouvelle de la mort du duc de
Guifo , le 10 février 15S9, a 55 ans.
Faur, feigneur de Pibrac (Gui du), efl connu
par les charges qu’il a exercées avec gloire ", il
devint chancelier de la reine Marguerite de Navarre
, femme de Henri I V , & mourut à Paris
le X7 mai 1584, à 56 ans. On a de lui des plaidoyers
, des harangues & des quatrains , dont
j’ai parle ailleurs.
Faur (Pierre du) , premier préfident au parlement
de Touloufe, cultiva les lettres avec
éclat , & mit au jour des ouvrages pleins d’érudition
-, tels font trois livres des femeftres, celui
des agoniftiques , c’ eft-a-dire, . des exercices &
des jeux des anciens , & fon traité des magiftrats
romains. Il mourut en 1600 , en prononçant
un arrêt à l’âge de 60 ans.
Ferrier (Arnould du) , préfident au parlement
de Paris , enfuite maître des requêtes, fut employé
par Charles IX à diverfes ambaflades ,
mourut en 1585 , à 79 .ans , & en faifant pro-
fefiion ouverte du proteftantifine. Il harangua
dans le concile de Trente , & s’exprima d’ une
manière vigoureufo fur les abus de la cour de
Rome. Il efl très-vraifomblable q ue , zélé pour
la grandeur de la monarchie françoife , il forma
le projet, conjointement avec le chancelier de
l’Hôpital, de couper le noeud qui attachoit le
roi très-chrétien au faint-fiége , & d’alfembler
un concile national, où le roi de France à
l’imitation de celui d’Angletetre , fût déclaré chef
de l’églifo gallicane , 8c indépendant à tous
■ égards du pontife romain.
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