
1 0 R O M
de Colonie commodlenne ; en vain le roi des Goths
Cappella Gothie ; en vain même l’appella-t-on là
ville d’Augujh, par flatterie pour ce prince -, l’ intention
de tous les. fouverains qui prétendirent à
la gloire de lui donner leurs noms, n’ à point
été lui vie par leurs fuccefféurs.
Un prince d’une naiffànce incertaine , dit l’abbé
de V er tot, nourri par une femme proftituée ,
élevé par des bergers , & devenu depuis chef de
brigands , jetta les premiers fondemens" de cette
capitale du monde , dans la quatrième année de
lafixième olympiade, & la fept cent cinquante-
troifième avant la nai (Tance de' Jéfusr-Chrift. I lia
confacra au dieu de la guerre , dont il vouloir
qu’on le crût lorti •, il admit pour habitans. des
gens de toutes conditions & venus de différens
endroits , Grecs, Latins, Albains & Tofcans , la,
plupart pâtres & bandits , mais tous d’une valeur
déterminée. Un afÿle qu’il ouvrit en. faveur dès
efclaves 8c des fugitifs, y en attira un grand
nombre, qu’ il augmenta depuis, des prisonniers
de guerre , & il fut de fës ennemis en faire fes
premiers citoyens*
Il choifit le mont Palatin pour y placer favifte,
& il employa toutes les cérémonies fuperftitieul’es i
que les Etrufques~ avoient introduites pour de
femblables fondations; il fit attacher aune charrue
dont le foc étoit d’ airain , une vache & un
taureau , & leur fit tracer l’enceinte de Rome
par un profond fillon. Ces deux animaux, fym-
boles des mariages qui dévoient peupler les villes,
furent enfuite égorgés fur les autels ; tout le peuple
fiiivoit la charrue , & pouffoit en dedans les-
mottes de terre que le foc rejettoit quelquefois
en dehors; on foulevoit cette charrue, 8c onia
portoit dans les endroits où l’on avait deffein de
faire des portes.
Comme le mont Palatin étoit îfo lé , on l’enferma
tout entier dans le circuit que l’on traça, !
& l’on forma une figure à peu. près, quarrée au '
pied de la montagne;, là on creufa en rondime.-j
foffe affez profonde, où. tous les nouveaux habitans
jettèrent un peu de terre des différens. pays
où ils avoient pris naiffance, & ce trou refia en
forme d’une efpèce de puits dans la place publique,
où fe tinrent depuis les comices;
Rome fut ainfi formée par des hommes paür
Vres & grofliers ; on y comptoit environ mille
chaumières ; c’é to it, à- proprement parler , un
village, dont les principaux habitans. labouroient
la terre ingrate d’un pays flérile qu’ils, s’étoient :
partagé ; le palais même de Romulus n’étoit conf-
truit que de joncs , & n’étoit couvert que de
chaume.
Chacun avoit choifi fon terrain pour bâtir fa
cabane , fans égard à aucun alignement ; c’étoit
une efpèce de camp de foldats , qui fervoit d’a-
fyle à des aventuriers, la plupart fans femmes 8c
fans enfans, que le défir de faire du butin avoit réunis.
Ce fut d’ une retraite de voleurs que forcirent
RO M
les concjuérans de l’univers;, dît a ce iiïjét l’ècrï-
vain des Révolutions de la République Romdine;
Il nous faut prendre de la. ville de Rome ,
dans, les comniencemens-, l’ idée que nous donnent
les. villes- de la Crimée , faites, pour renfermer
le butin , les beftiaux & les fruits.de la
campagne. Les- noms anciens des principaux lieux
, de Rome, ont tous-dù rapport à cet ufage ;..cette-
ville n’avoir pas même de rues,, fi l’ on n’appelle
de ce“ nom la continuation des- chémins qui y
abputiffoient. En un mot | jufqu’ à la prife de
Rome par les. Gaulois, cette ville n’étoit. en partie
qu’un amas informe de huttes • féparées*
Telle eft la peinture que nous font les hiftorîens
des commencemens de cette capitale du mondé 5
qni ne fut jamais plus digne de commander à l’ ù-
ni ver s-, que’quand la pauvreté' y conferva l’amour
des vertus- civiles & militaires. Ce furent ces îl-
luftres laboureurs , qui en moins de cinq cents,
*n®> affujettirent les peuples les. plus belliqueux
de l’ Italiè , défirent des armées prodigieufes de
Gaulois-, de Cimbres. & de Teutons ,. & ruinée
! rent la puiffance formidable de Carthage;
A peine cette- ville riaiffànte fut-elle élevée au-
deffus de fes fondemens , que fes habitans fe pref-
; ferent de donner quelque formé au gouverne-
j ment ; leur principal objet fut de concilier la liberté
avec. l’empire, & ppur y parvenir , ils.
• établirent une- elpèce de monarchie mixte , &
partagèrent la fouveraine puiffance entre le chef.'
ou le pcinoe de la nation, un fénat qui.lui dévoie:
fervir de confeil, & l’affembléê du peuple. Romulus,,
le fondateur de Rome , en-fut élu le pre-.
mier roi.; il fut.reconnu en même temps-pour le-
chef de la religion , le fouverain magiflrat de la
ville , & le général né de l’état. Romulus qui:
d abord, n’hvoit environné de tnurs-& de foffés.
que le' mont Palatin, j r ajouta le' mont Tar-
péxen ,.lorfque Titus Tatius & les Sabinsde fa.
fuite eurent pris le parti. de fe faire 'citoyens de
Rome. Numa étendit encore la ville, & y joignit:
le mont Quirinal.,, où l’on avoit dreffé un temple
a Romulus , fous.le nom de Quirinus. Tullus Hof-
tiliiis., quand il eut tranfporté-à Rome les Albains
, "apres, avoir détruit Albe1,. enferma le mont
Ccelius. dans l’enceinte de Rome. Sous Ancus Mar-
cius, le mont; Janicule, fitué au-delà du T ibre,' fut
joint a- la ville par un pont de bois.. A la vérité 9
le premier Tarquin s’étoir contenté^ de conftmire
de belles, pierres-, au. moins^en partie, les murs
. Rome ,, fans faire d’augmentation à fon enceinte.
Pour Servius- Tullius , non content d’achever
l’ ouvrage que fonprédéceffeur avoit commence,
il fit enclorre le montEfquilin & l e mont-;
Viminal dans: les nouveaux murs qu’il érigea*
Ainfi Rome commença pour lors à porter le nonv
fameux de 'Septicollis , à caufè des fept collines,
lîir lefquelles. elle étoit bâtie. Voye^ Palatin;
( mont ).
Une des caufes de fa profjpérité, fut que fés
‘fois furent tous de grands' perfônnages ; bn ne
trouve point ailleurs , dans les hiftoires , une fuite
non-interrompue de tels hommes d’é ta t, & de
tels capitaines -, comme M. de Montefquieu l’a
remarqué .lé premier. Les ouvrages qui ont donné
& qui donnent encore aujourd’hui la plus haute,
idée de fa puiffance, ont été faits; fous les rois.
On peut voir l’étonnement de Denys d’Halicar-
naffe , A nt. Rom. I. I I I . fur les. égoûts faits par
Tarquin,. 8c ces égoûts fubfiftent encore.
On fait que quelques années, avant le défaffre
de Rome par les Gaulois., les tribuns du peuple
avoient voulu partager le fénat & le gouvernement
de la république entre les. deux villes de
Véïes & de Rome. Après le faccageiuent de cette
dernière-,, les mêmes tribuns penfèrent à faire
abandonner tout-à-fait Rome détruite , à tranf-
porter à. Véïes le fiége de l’é ta t , & à en faire
la feule' capitale. Le peuple fembloit affez difpçfé
a prendre ce parti; mais Camille l’emporta fur
la faction des tribuns , & d’un confentement
unanime., il fut arrêté qu’on rétabliroit la ville
de Rome.
On rebâtit les temples fur les mêmes fondemens;
enfui té on répara les ruines des. maifons
particulières ; le tréfor public y contribua du fien ,
& les édiles furent chargés, dé régler & de hâter
les ouvrages ;, on. fit- marché avec des entrepreneurs
,. qui s’obligèrent d’édifier les maifons dans
l’année; le trélbr public fournit la charpente 8c le
bardeau, pour couvrir les toits-; il y eut ordre à
tous les propriétaires des. campagnes, d’y laiffer
fouir des carrières , 8c de fouffrir qu’on en- enlevât
gratuitement les pierres. Enfin tous les Roumains:
mirent la main à l’oeuvre, 8c nul ne fut
exempt des. rravaux; précédemment les égoûts
publics, ne paffoient que fous les. rues., on bâtit
alors indifféremment fur leurs, voûtes qui fervi-
rent de fondemens., 8c par-là lés égoûts eurent
leur cours, fous les maifons particulières;
Cependant la précipitation fit tort à la fécondé
conftruélion de Rome / les rues demeurèrent
étroites. & mal alignéés;; il eft vrai que fur la fin
de la république , 8c fur-tout fous Augufte,.Rome
étant devenue la capitale du monde ,, la magnificence
augmenta dans, les,temples , dans, les palais ,
& dans les. maifons dès citoyens. ; mais cette
nouvelle décoration ne réforma pas les défauts du
plan fur lequel on avoit rétabli la ville après fa
première, conftruétion les. choies changèrent
bientôt après.
L’ incendie:- de Rome ,, q u i, fous le règne- de
Néron, dura fix jours & fix nuits, la réduilit presque
en cendres , & de. quatorze quartiers de la
ville,, quatre feulement furent épargnés ; tous les
foins , dit Tacite , que. fe donna l’empereur , pour
le foulagement du peuple affligé ÿ furent inutiles
a fa réputation on l’àccufa long-temps d’avoir
été lui-même l’auteur de l’èmbrafemênt. Qiioi
qu’ il en fo it , Néron fe feryit des ruines, de fa
patrie pour faire éclater fa magnificence ? il ordonna
que, fans garder l’ordre ancien, ni laiffer la
liberté aux particuliers de bâtir à leur fantaifie ,,
comme ils avoient fait jufqu’ alors , on tirât au.
cordeau de grandes rues , on élargît les places r
on environnât les quartiers de portiques, quei
l’empereur fe chargea de conftruire à fes dépens r
comme aufïi de faire enlever les démolitions 8c
les décombres.
Le même Néron voulut que les maifons fiiflent
voûtées jufqu’ à une certaine hauteur, & bâties,
d’une pierre qui réfiftât au feu ; il preferivit encore
que les particuliers ne tireroient point l’eau-
publique à leurs ufages, afin que l’ on eût des=
réfervoirs auxquels on poürroit avoir recours en
cas d’ incendie , & que chaqùe maifon feroit fé—
parée l’une de l’autre fans un mur mitoyen; il
bâtit pour lui-même un palais moins fuperb©
par la dorure , que le luxe avoit déjà rendue:
communé ,. que par les champs , les lacs , les forêts
, 8c les campagnes dont il étoit accompagné*
On peut voir une courte defeription de ce palais j
au mot Maison dorée.
Il nous refie quelques deferiptions de la v ille
de Rome, telle qu’elle' fe trouvoit vers le fiècle;
dès empereurs Valentinien 8c Valens ; 8c dans,
ces temps-là elle étoit partagée en quatorze régions
, dont nous, avons, une. defeription attribuée:
à P. Viéior.
Quant aux autres details .qui concerne l’ ancienne
Rome , on les trouvera dans ce Diciionnaire, fous-
leurs divers articles particuliers.
Rome moderne eft toujours la plus fameufe
ville de l’univers-, quoique l’empire romain foie
détruit. Elle eft fituée fur le T ib re , environ à
155 li. de. Turin, à 350 de Madrid,, à. 315 au
f. e. de Paris, à 340 d’Amfterdam y à 310 n. o*
de Conftantinople T 8c à 190 f. o. de Vienne*
Long: fuiyant Caflini- 8c Bianchini, jo y. zo , 30 *■
lat. 42 , ^4. félon Gréave ,. 4Z , 46V 1
Rome eft non-feulement la première ville de
l’Italie , mais elle eft encore , à quelques égards
Un centre d’autorité pour les états catholiques «,
puifque: chacun d’ eux nomme un miniftr.e. pour
la décifion dé plufieurs efpèces- de caufes, qui: y
font jugées par le tribunal de la Rote , compofiç
de juges, de chaque nation. Dans cette, ville 3,
Près dé ce capitole, où régnoient tant d’alarmes 5,
Sur les pompeux débris de Bellone & de Mars,,
Un Pontife: eft aftis au trône des Céfars».
Des prêtres fortunés, foulent d’un pied tranquille
Les tombeaux des-. Ca,tons- & la cendre d’Emile 5,
Le trône eft fur faute!, & I’abfolu pouvoir
Met- dans les mimes mains le feeptre & l’encenfoir*
{ V o l t a i r e .}r
La différence eft néanmoins Bien grande entré
ftttwenne ? 8c Rojae moderne. Je ne dirai