
Ce temple d’Apollon, qui étoît à Touloufe-,
a fait confondre , même dans l'antiquité-, cet
or de Touloufe avec celui du temple de Delphes j
& quelques-uns fe l’ont imaginés que Brennus,
general dès Gaulois, ayant pillé le temple de
Delphes, les Gaulois , & fur-tout les Teâofages ,
avoient remporté leur butin dans leur pays.
Strabon a réfuté ce conte , d’autant mieux que
le temple de Delphes avoir été pillé par les
Phocéens, avant la venue dès Gaulois, lefquels,
bien loin de prendre la ville de Delphes, & de
pouvoir piller fon temple , furent repouffés avec
perte , & périrent tous les uns après les autres.
Quoique Touloufe fût une des villes célèbres
de l’empire romain, néanmoins elle ne fut jamais
métropole ou capitale de province fous les
empereurs. Ce fut fous les rois Vifigoths, qui y
établirent leur réfidence , qu’elle devint une ville
royale , reconnoiffant toutefois pour métropole
eccléfiaftique Narbonne, dont elle n’a été fouf-
traite qu'au IV fiècle par Jean X II. Ce pape di-
vifa le grand diocèfe de Toulpufe en plufieurs, où
i l mit des évêques, leur donnant pour métropolitain
le cardinal Jean Raymond de Comminges,
qui fut le premier archevêque de Touloufe.
A l’égard de la jurifdiction temporelle, après
avoir été entre les mains des officiers de l’empire
romain , elle fut affujettie aux Vifigoths ,
lorfque le roi Ataulphe s’établit dans les Gaules ,
au commencement du cinquième fiècle
Cent ans après ou environ, Clovis ayant défait
Alaric, s’empara de Touloufe , & laiffa cette
ville à fes fucceffeurs qui la gouvernèrent par des
officiers qu’on nommoit comtes. Dagobert la donna
l’an 62,8 à fon frère le roi Aribert, qui y établit
fa réfidence , mais ce prince ayant à peine régné
trois ans, mourut , 8c fon état revint fous la
domination de Dagobert , qui laiffa la ville de
Touloufe à fon fils Clovis I I , roi de Neuftrie.
Les princes mérovingiens en ont toujours été
maîtres jufqu’au commencement du huitième
fiècle. Ce fut pour lors que’le duc' Eudes, qui
fe rendit abfolu dans l’Aquitaifiè, s’empara de
Touloufe, qu’ il défendit contre les Sarrafirts
Pan 72 i . Onze ans après ils la prirent , & la
faccagèrent avec Bordeaux & la plûpart des
villes d’Aquitaine ;1 qu’ils ne- cohferverent point,
parce qu’ ils furent défaits près de Poitiers par
Charles-Martel, maire, du palais : ainfi Eudes*
jouit comme auparavant de l’Aquitaine , 8c laiffa
cet état à fon fils Hunaud, à qui fon fils Gaifre
fuccéda. Le roi Pépin-, fils de Charles-Martel,
fit une cruelle guerre à Gaifre , qui perdit enfin
fes états & la vie.
Pépin s’empara l’an' '/ é j de la ville de Touloufe
, que lui & fes fu'ccôffeurs gouvernèrent
par des comtes , qui n’éfoient que de fimples
officiers , jufqu’au temps de • Gharles-le-Simple ,
qui fut dépofé & mis dans-une prifon où il mourut.
Ce fut fur la fin du règne de ce prince , que
Régîmond ou Raymond fe rendit abfolu à Toa-
loufe vers l’an 920. Il eut pour héritier fon fils
Raymond Pons. Ces premiers comtes de Touloufe
prenoient la qualité de ducs d’Aquitaine ,
quoiqu’ils n’euffent qu’une petite portion d’ un
fi grand pays, n’étant maîtres au commencement
que de l’ancien territoire de Touloufe , 8c n’ayant
aucune autorité fur le refte de la Gothie ou
Septimanie, appellée aujourd’hui le Languedoc.
Les comtes defcendans du premier Raymond
jouirent de cet état de père en fils , jufqu’ à
Guillaume , qui vivoit dans le onzième fiècle. Il
ne laiffa qu’ une fille nommée Philippin , qui
époufa le duc Guillaume, père du dernier duc
d’Aquitaine : elle ne fuccéda pas à fon père, parce
que fon oncle Raymond dé Saint-Gilles , comte
de Q uercy , 8c frère de Guillaume, comte de
Touloufe, fe trouvant le plus fort en cette
ville , s’en empara. Il prit enfuite le titre de
duc de Narbonne , fans aucun droit, 8c dé ligna
comté de Touloufe fon fils Bertrand, qui mourut
fans enfans l’ an 1115.
Après la mort de Bertrand , Guillaume, duc
d’Aquitaine, foutenant les droits dè fa femme \
prit1 Touloufe mais il en fut dépoffédé par
Alfonfe, fils de Raymond dé St. Gilles. Le dernier
Guillaume , duc d’Aquitaine , & fa fille
Eleonor , héritèrent des droits de Philippia ,
qu’Henri II ^ roi d’Angleterre, mari d’Eleonôre ,
foütint contre Raymond , comte de Touloufe ,
fils d’Alfonfe , & en demanda juftice à Louis le
jeune, roi de France.
Le roi Louis accorda les parties a cette condition
, que la propriété du comté de Touloufe
demeureroit à Raymond, qui feroit tenu d’en
faire foi & hommage au roi d’Angleterre , duc
de Gtrienne , ce qui fut exécuté.
Richard, fils du roi Henri & d’Eleonor, demanda
l’hommage du comté de Touloufe mais
cette affaire fut terminée l’an 1 1 9 6 , lorfque
Raymond, d it/ e vieux , comte de Touloufe,
fils d’Alfonfe, ayant époufé Jeanne, fille de Henri
& 'd’Eleonor & f’oeur de Richard , ce roi céda
tous fes droits fur le comté de Touloufe au
comté Raymond.
Ce fut le même Raymond, qui s’étant déclaré
proteâeür des Albigeois , fut pôiivrfuivi par
le pape Innocent III , qui donna le comté de
Touloufe à Simon de Montfort , général des catholiques,
du confentement de Philippe Augufte :
Raymond, abandonné par le roi , fon feigneur
féodal, reconnut un autre feigneur ou fouverain ,
qui fut Pierre , roi d’Aragon , à qui le comte
fit foi 8c hommage. C’eft-là l’origine du droit
que les Aragonnois prétendoient fur le comté
de Touloufe , auquel ils renoncèrent par la tran-
fadion paffée entre S. Louis & Jacques , roi
d’Aragon, l’an 12 5 8:
Simon de Montfort ne put fe maintenir dans
fa co'nquête , de forte que fon fils Amatiry céda
fe* droits à Louis V I I I , père de St Louis. Raymond
le jeune, fils & fucceffeur de Raymond
fe vieux, fit fa paix avec le roi de France , 8c
tranfigea l’an 1228 avec S. Louis. Par ce contrat,
la princeffe Jeanne, fille de Raymond, fut accordée
avec Alfonfe , comte de Poitiers, & frere
du roi. On convint que Jeanne fuccederoit aux
états de fon père , 8c qu’en cas qu’elle ou fon
mari vinffent à mourir fans enfans males, le
tout feroit réuni à la couronne.
Raymond mourut l’an 1249 > 8c eut pour fucceffeur
fa fille Jeanne & fon gendre Alfonfe , qui
finirent leurs jours l’ un 8c l’ autre, peu apres la
mort de S. Louis , l’an 1270 , après quoi Philippe-
le-hardi prit poffeffion du comté de Touloufe, 8c
le remit a la couronne.
I l y avoit dans l’ancienne Touloufe un amphithéâtre
, un capitole, & plufieurs autres mo-
numens fuperbes mais les Vifigoths , nation
barbare , ayant choifi Touloufe pour etre la capitale
de leur empire , ruinèrent tous fes beaux
monumens de fond en comble , en forte qu’ il
n’en refte d’autres veftiges , que quelques débris
de l’amphithéâtre.
Quoiqu’il n’y ait point de ville intérieure dans
le , royaume plus avantageufement fituée pour le
commerce que Touloufe, il s’y en fait cependant
fort peu. Le génie des habitans le» porte,
quand ils font aifés, à acquérir des charges de
robe , ou à tendre au capitoulat*, de là vient que
Touloufe , une des plus grandes villes du royaume,
' n’eft pas à beaucoup près au degré de richeffe &
de population que comporte la fituation la plus
heureufe.
Sous Raymond V , comte de Touloufe , s’éleva
dans cette ville un tribunal d’inquifition , aufujet
dé l’héréfie des Albigeois , 8c bientôt ce tribunal
fit trembler par fa rigueur les perfonnes même les
plus innocentes -, le foulèvement menaçant
d’éclater, on fut obligé de l’abolir-, mais ce qu’ il y
a de fingulier, c’eft qu’il en refte des veftiges -,
car , d’un côté M. de Montchal , archevêque
de Touloufe , fe fit attribuer le droit d’examiner
fi dans l’éleâion des.capitouls, il n’y a perfonne
qui foit fufpeft d’héréfie, 8c de l’autre les dominicains
continuent de faire pourvoir un religieux
de leur ordre de l’office d’inquifiteur de Touloufe
, parce qu’ il y a quelques gages attachés
à cette charge , qui par bonheur n’ eft aujourd’hui
qu’ un vain titre fans fondion.
On peut lire fur Touloufe l’abbé de Longue-
i;ue, Piganiol, defcription de la France , Nicol
Bertrand des geftes des Touloufains, 8c mieux
encore la Faille , annales de Touloufe , ainfi que
l ’hiftoire de cette v ille , qu’on y a imprimée en
J 759. m-40.
Long, fuivant de la Hire, z 9 , n , 30 ; (uivant
Lieutaud, des Places 8c Caflini, z9 , 3 G, 30 ;
lat. fuivant de la Hire , 4 ? , 30 ; fuivant Lieutaud
, des Places 8c C^ffini, 45», | S
Cette ville eft le fiége d’un parlement & d’ un
archevêché. Il y a un Lieutenant général pour
le ro i, un lieutenant de roi de la province , un
lieutenant des maréchaux de France , un gouverneur
particulier. Il s’y trouve une chambre
fouveraine eccléfiaftique , un grand-prieure de
l’ordre de Malte , offieialité , fénéchauffée &
préfidial -, univerfité, viguerie , juftice royale ,
amirauté , juftice de l’hôtel-de-ville, maîtrife des
eaux 8c forêts , lieutenance de maréchauffée , ju-
rifdiclion confulaire, généralité, bureau des tré-
foriers de France , bureau du contrôle , vifite des
gabelles, grenier à fe l, maîtrife des ports. On
n’y bat plus monnoie depuis 1757.
Le parlement de Touloufe eft le ‘fécond du
royaume en rang. I l eft compofe de & chambres >
la grand’ chambre, la tournelle, 3 chambres des
enquêtes * 8c une des requêtes.
L’univerfité fut fondée en 12 29, &: elle eft
compofée de quatre facultés , dont celle de droit
eft la plus renommée. Elle a dix collèges entre
lefquels on diftingue celui de l ’E fquille, où les
prêtres de la dodrine chrétienne enfeignent les-
humanités , 8c celui qu’occupoient les jéfuites :
ce font les feuls qui foient d’ exercice public
pour les arts 8c la philofophie.
II fe trouve d’ailleurs à Touloufe trois académies
: celle des jeux floraux , l’académie des
fciences , infcriptions 8c belles-lettres , établie
par lettres-patentes en 1746 , 8c l’académie de
peinture , fculpture 8c archite&qre , érigée en
1750. Les quatre prix fondés dans celle des jeux
floraux, pour les meilleures pièces qu’on y reçoit
de tous pays , font une amaranthe d’Or , une
églantine , une violette 8ç un fouci d’argent.
Le pape Jean XXII érigea le fiége épifcopal en
métropole en 1318 , après l’avoir fouftrait a l’archevêché
de Narbonne dont ildépendoit. L’églife
métropolitaine, fous l’ invocation de St. Etienne,
eft demeurée imparfaite. Le choeur feu! eft achevé ‘
le refte du vaiffeau eft une ancienne conftrudion ,
aufil lourde qu’elle eft fombre. On y voit la
chaire où Saint Bernard 8c Saint Dominique ont
' prêché. La tour contient un bourdon nommé
Cardaillac , du poids de 50 milliers. Le palais
archiépifcopal n’eft pas fans mérite -, le revenu
attaché à ce fiége, eft d’environ 110,000 liv.
Le diocèfe comprend 250 paroiffes. L’archevêque
de Touloufe a pour fuffragans les évêques deMon-
tauban , Mirepoix , Lavaur, Rieux, Pamiers ,
Saint-Papoul & Lombez, 8c il paie 5000 florins à
la cour de Rome pour l’expédition de fes bulles.
Cette ville a une célèbre collégiale , fous le
nom de Saint-Sernin, ou Saint-Saturnin, & qui
étoit autrefois une abbaye fameufe. Le chef du
chapitre eft encore revêtu du titre d’abbé , &
jouit d’un revenu confidérable.
Le palais de juftice où s’ affemble le parlement j
eft une maffe de bâtiment informe, qui ne rc^
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