
(deux places font les plus belles de fla ville :
‘les autres font peu de chofe ; celle du folle
offre une repréfenration de la Sainte-Trinité,
exécutée en marbre; le mariage de la Sainte
Vierge avec S. Jofêpn, auffi en marbre , fait
l’ornement de la place du marché haut.
L’ églife métropolitaine , fous l’invocation de
Saint Etienne , eft un édifice gothique fort
fombre, orné au dehors & en dedans de beaucoup
d’ arabefques en pierre. Ce qui la rend
fur-tout remarquable en: la fuperbe aiguille dont
elle eft furmontée : c’eft une des plus hautes
qu’ il y ait en Europe -, elle a 460 pieds, d’autres
difent 447 pieds 8c demi d’élévation' au
defius du pave : ( pied d’Autriche ) elle porte
un bourdon confidérable que l’empereur Jofeph I
‘fit fondre de plufieurs pièces de canon priîes
fur les Turcs : cette cloche a plus de dix
pieds de haut, 3a au moins de circonférence,
8c pèfe 354 quintaux. L’ intérieur de l’églife eft
.enrichi de beaucoup de marbres -, le maître-
autel fur-tout eft d’une très - grande richéîfq.
'On y dépofê dans un caveau les entrailles de;s
princes de la maifon archiducale, 8c on y remarque
le beau maufolée de l’empereur Frédéric I I I ,
ainfi que le fo.mptueux monument du prince
Eugène de Savoie7~achevé feulement en 1759’
Depuis le dernier fiècle, les .archiducs ont
leur fepulture aux capucins •, leurs coeurs font
dépofés dans l’églife des auguftins déchauffés ,
dite aulique , parce qu’elle eft la paroiffe de la
Cour, 8c le lieu de fes plus importantes cérémonies.
Les jéfuites avoient trois maifons a
Vienne ; l’eglife qu’ils y avoient conftruite dans
leurs derniers temps eft d’un fort bon genre.
Celle de l’abbaye de S. Grégoire mérite encore
d’être citée.
Cette, capitale avoit été jufqu’ ici furchargée
d’ une multitude prodigieufe d’égli-fes 8c de cou-
vens, d’ ailleurs très-vaftes 8c accompagnés de
jardins 8c de promenades il étoit référvé a la
fageffe de Jofeph II de reftreindre ces énormes :
familles parafites, comme un fardeau infupportable
à l’état aux dépens duquel elles fe perpétuent.
Le palais impérial eft un.édifice ancien , de
peu d’étendue, & qui n’annonce point la ma-
jefté du maître qui l’habite. Les jardins même
en font fi ferres ,' qu’on peut le regarder comme
71’en ayant point. Il renferme un cabinep
H’hiftoire naturelle, une colleélion de rare fes ,.
8c un médailler J’un fies plus précieux qui foient
en Europe. L’opéra s’v trouve aufli. .
| Entre les beaqx-édifices, qui décorent cette
capitale, on remarque l’hôtel de la banque , le
direéloire impérial, l’ hôtel ,de la monnaie , les
chancelleries privée , hongroife 8c tofcanç ; l’hô?
tel de l’ univerfité, celui des .poftes, l’hôtel de
ville : joignons-y l’hôpital d p a g n o l,le s deux
arfenaux, le palais du prince de Lichtenftein,
qui a une bonne collection de tableaux, un
autre palais de même nom dans le Hërrengafs,
les hôtels de Lobkowitz , d’Bfterazi , Schwar-
zenberg, d’Auersberg , de Stahrenberg , de Kau-
nitz , de Traun , de Caprara, de Traut-
fon , &c.
Cette capitale a une académie de peinture ,
fcûlpture & architëéhire, réformée en 1760;
une univerfité remife aufli fur un nouveau pied
en 175z , une école de génie , plufieurs collèges
entre lefquels on diftingue le collège
Thêréfien, fondé par l’impératrice Marie Thé-
rèfe pour la jeune ' nobleffe. Elle a une l’ociéte
économique ou d’agriculture qui diftribue annuellement
une médaille d’or de la valeur de
36 ducats à l’auteur du meilleur mémoire fur
le fujet propofé. Citons encore l’académie noble
de Savoie Lichtëriftein, l’académie de Loewen-
bourg régie par les pères des écoles pies , une
école publique 8c gratuite de gravure en taille-
douce , une école publique pour enfeigher gratuitement
aufli la manière noire , une autre où
l’on apprend à graver 8c à tailler les pierres
fines, 8c où les élèves ainfi que les maîtres
font penfionnés , enfin une école de commerce.
La bibliothèque impériale, qui a été transportée
dans les bâtimens de la nouvelle académie,
eft la féconde en Allemagne, & l’une
des plus riches de l’Europe. l’Univerfité, munie
d’un mujoeum 8c d’un obfervatoire, fut fondée
par ; les ducs d’Autriche, Rodolphe IV 8c
Albert III-, le re&eur, dans les procédions ,
précède immédiatement l’empereur.
Il exifte à Vienne une banque à laquelle
on affigna de grands revenus , & dont le dépôt
eft confie à la chambre co'nfulaire -, ceux
qui veulent établir des manufaéhires., ou exécuter
des fpéculations tendantes . à l’amélioration
des fabriques 8c l’avancement du commerce ,
en rèçoivent dès fecours fans aucun intérêt ,
8c on'leur avance depuis 10000 jufqu’3.100, 000
florins , pourvu qu’on .puiffe compter fur la
rentrée du capital.
■ Le commerce a beaucoup d’aélivité à Vienne ,
8c l’on y trouve des négocians de toutes les
contrées de . l’Europe. Les plus gros commerçant
régnicblës font ptefque tous prùteftans ;
ils descendent de ceux que Charles V I y na-
türalifa après les avoir fait venir des villes impériales1;'
on les nomme magajiniers, 8c ils
jouiffent de très-grands privilèges : ils font affranchis
de tout impôt 8c ne payent qu’une lé-
gè'rë redevance à' la chambre du commerce ;
lèur' nombrë eft fixé- à 48.
Lés .plus fortes affaires de commerce fe font
avec la Turquie, 8c ' leur aûivité croîtra fans
doute beaucoup par la' liberté du Danube &
lés derniers traités de l’empereur régnant avec
la Porté*: Il s’ eft même établi à Vienne des
sraifons turques , grecques , arméniennes., 8c de
quelques autres parties de l’empire Ottoman.
Ii s’y trouve une manufacture de porcelaines
eftimées fur-tout en ce qu’elles font a l’épreuve
du feu. Ses fabriqués de foie font devenues
très-floriffantes : on y fabrique auffi des galons
d’or 8c d’argent, des tapifferies & des glaces,
8c l’empereur Jofeph II y a établi une manufacture
d’armes. dan-s le palais Bathiani, qu’il'
a acheté à cet effet.
C’eft à Vienne que fe tient la diète du pays:
au deffous de l’Ens, 8c celle du pays, au • deffus
de l’Intz. L’évêché de Vienne-fut fondé en 1480,
8c érigé en, archevêché,.ven 17x2 : l’empereur
Charles VI obtint pour les archiducs le droit,
d’y nommer , & depuis une partie-'du diocèfe
de Paflaw y fut réunie. Le titre de prince du'
Saint-Empire eft afiéClé' aux archevêques de
Vienne , ils jouiffent de cette prérogative depuis
1631. Soumis à la foaveraine.té des archiducs,
ils ont pour fuffragant l’évêque de Neul-
tadt.
Les faubourgs de /Vienne font diftans de la
ville de 5 à 600 pas; le faubourg de Léopold
eft le plus beau & ïe plus grand, mais
il eft éxpofé aux inondations ; il eft fitué dans
une île formée par le Danube ; c’eft là que
font les valtes jardins publics dits VAugarten ,
fitués près dé l’ancien château de la Favorite ,
détruits par lès Turcs en 1683 ’• on remarqué
dans celui de Roffau les maifons de plaifancé
des .comtes de Kaunitz, de Coîàlto & de Zin-
zendorf qui méritent d’être vues. Le parc impérial'
ou- le Prater eft rempli de bêtes fauves
8c noires;, cet endroit, ouvert au public par
Jofeph I I , eft devenu la principale promenade
de Vienne.
L’hôpital bourgeois, fe diftingue entre les
autres étabiiffemens de charité de cette ville :
on y entretient jufquà 3000- malades, &: l’empereur
Jofeph, II à établi en 1786 un nouvel
hôpital militaire dans le couvent, fupprimé' des;
religieux de la Trinité.
En 12.37', cette ville fut" crée ville impériale
par Frédéric II y mais elle ne jouit que
quatre ans de cette prérogative1; vainement fut-
elle afiiégéé-par les Hongrois en 1477 8c par
les Turcs-'en 1529 8c 1683.' ElLp fut prifè par
Frédéric I I , duc d’Autriche* en 12 4 1, par Pem-,
pereur Rodolphe I , en 1277 , & par Mathias,
roi de Hongrie en 148.5. ' Elle, m’oubliera pas
fitôt le liège mémorable qu’elle effuya en 1603.
Ce fiége fut entrepris par Kara Muftapha , gér
néral des forces ottomanes. Toujours aime de
la. fultane -Validé^ après avoir aulfi gagné le
6oeur de Mahomet IV , il avoit époufé‘ fa fille;
Jamais l’ambition 8c l’orgueil, deux pallions qui
dévoraient K,ara. muftapha, ne . trouvèrent un
champ plus vafte, pour- être, affouvies. Il ne.lé
propoloit pas moins, après, s’être rendu maître
de Vienne , que de ponrfuivre la conquête de
l’occident, ayant fous-fes ordres plus de 209.-,
000 hommes , 31 bachas , cinq fouvèrains 8c
300 pièces de canon.
Il s’avance par la rive droite du Danube. ,
paffe. la Save & la Dra ye, fait mine d’en vouloir
à Raa,b , tandis qu’ il détache 50,000 Tar-
tares fur la route de Vienne. Le duc de Lorraine
Charles V , dont le no,m doit être, cité, parmi
ceux des grands capitaines, 8c qui commandoit
les troupes impériales , efiuie un échec a Pé-
tronel, & à peine a-t-il le temps-de gagner
Vienne , où il jète une partie de ion infanterie
pour renforcer la garnifpn. Il prend pofte dans
lMe de Léopold fermée par le Danube,, au
nord de la ville. Les Tartares , au nombre de
50, 000, arrivoient en même-temps du côté
du midi.
On vit alors un de ces fpeâacles qui font faits
pour inftruire les fouvèrains & attendrir les peuplés
, lors même que les fouvèrains n’ont pas mer
rite leur tendreffe 1 Léopold, le plus puiffant empereur
depuis Çhàrle.s-Quint , fuyant de fa capir
taie avec l’impératrice fa belle-mère , l’ impératrice
fa femme;, les archiducs, les archiducheffes., une
moitie des habitans fuiyant la. Cour en défordre.
La campagne n’offroit que des. fugitifs , des
équipages, des chariots chargés de meubies
jùfqu’à Lintz , capitale de la Haute-Au triche.
Çe.tte ville où l’on portoit la frayeur ne
parut pa-s .encore un affte. affuré, : il fallut fe
lauver à Pàffaw,, bh coucha la première nuit
dans un bois , où l’impératrice , : du ns une greffe
fie ayançëe , apprit, qu’on pouvoit repofer fçft
de. la, paille à caufe de la terreur. Dans les
horreurs de cette nuit on ap.percevoit la flamme
qui confumoit la b.affe-Hongrie 8c s’avançoit
vers. l’Autriche.
L’empereur, dès les premiers excès de - cette
irruption, payoit bien cher fes violences contre
la Hongrie & le, fahg de fes feigneurs qu’ il
avoit. répandu. I l n’ avoit pu fe perfuader que
Kar,a Muftapha, laiffant derrière lui plufieurs.
bonnes places , telles que Raab 8c Comore, fe
portât fur, Vienne : Jean Sohiefki mieux inf-
tru it, comme le font toujours les. princes qui
font la guerre par eux-mêmes,, l’en avoit inu-
tilem.ent averti.
Vienne étoit devenue , fous dix empereurs
çonficùtifs de la.;; maifon d’Autrichp , la capitale
de 'l’empire romain en occident ; mais
bien „différente de l’ancienne., Rome pour la
grandeur en tout genre 8c pour le nombre des
Citoyens, elle n’en comptoir que cent mille,
dont les. deux tiers *habitoient des. faubourgs
fans défenfè. Soliman avoit été le premier des
empereurs Turcs qu’on eût vu marcher à
Vienne en 15.25? , faifant trembler à la fois
l’Europe l’Àfié; mais il n’oia fe commettre-
contre Charles-Quint , qui veuoir au fecours