
T u n is 'e fl ancienne , & &3 pays qui en dépend
, répond à l’Afrique proconfulaire des Romains.
Elle fut pofledée par leà Carthaginois |
par-les Romains, enfuite par les Vandales,
qui la faccagèrent du temps de S. Auguftin.; Les
Arabes mahométans relevèrent cètte ville , &
l’embellirent de plufieurs édifices , quoiqu’ ils
aient été depuis fixer leur demeure trente lieues
plue loin dans le pays , où ils bâtirent Carvan.
Les Almohades devinrent alors maîtres de
Tunis, dont ils furent dépofledés par Abu Ferez ,
qui par fes conquêtes prit le titre glorieux de
roi d’Afrique & de Tunis. Après la mort de fon
f ils , les rois de Fez fé rendirent fi puiflans ,
qu’ ils le firent reconnoître pour fouverains par
tous les mahométans d’Af.ique; cependant les
rois dè Tunis fe maintinrent dans leurs états
jufqu’à Muley Hafleti , qui èn fut chafle par
Barberoufle I I , lorfqu’ il reprit cette ville fur les
Elpagnols. '
Barberoufle étoit un homme étonnant ; il
mourut chargé d’années en 1 547 , après avoir
ravagé à plufieurs reprifes toutes fes côtes d’Italie.
A l’âge de 80 ans, il s’ occupoit encore
à Conftantinople à mettre fa flotte en mer, fans
que fon âge , la grofleur 8c la pelanteur de fon
corps , euflent pu le guérir de l’amour des
femmes. x
En 15 7 0 , Alu ch A l i , gouverneur d’A lg e r ,
s’empara de Tunis au "nom du grand-feigneur ;
mais quelque temps après , dom Juan d’Autriche
débufqua les Turcs de cette place , & établit
pour gouverneur de la ville Gabriel V illon , Sc
Pedro Carrero eut le commandement de la Gou-
lette. Enfin le fultan Amurat, que l’agrandif-
fement des Efpagnols inquiétoit, équipa une;
flotte des plus formidables fous la conduite de
l’amiral Ochiali, 8c leva une puiflante armée dé
terre fous les qrdres du bacha Sinan. Les Turcs
emportèrent dé vive force la Gouletté 8c la citadelle
de la v ille , dont ils font demeurés en
poflellion depuis ce temps : ce qui mit fin au
royaume de Tunis , qui'avoit duré trois cent
foixante-dix âns.
C ’efl: devant Tunis , qu’ il afllégeoit , que
S. .Louis finit fes jours en 12.70 , à 56 ans.
Aucun roi de France ne fit paroître plus de
valeur , plus de juftice & plus d’amour pour
fon peuple. Les flatuts de ce prince pour le ,
commerce, une nouvelle police établie par lui
dans Paris , fa pragmatique-iànclion qui aflura
la difciplrne de Tégtife gallicane, l’ére&ion de
fes quatre grands baillages auxquels reflortif-
foient les jugemens de les vaflaux, 8c qui pa-
xoiflent être l’origine du parlement de. Pans.,
fes réglemens 8c fa fidélité fur les monnoies ,
tout indique que la France eût été floriflante
fous ce monarque, fans le furie fie préjugé des ,
croifad.es qui «aufa fes malheurs ,, Sc qui le fit
mourir fur les fables d’Afrique. Vbye{ fa y\é Sa
fon cara&ère à l’article Poissy.
Tunis , fameufe par les pirateries, a plufieurs
belles mofquées , entre lelquelles on en distingue
une magnifique , fituée au couchant de
la ville. Long, z t i, zG ; lat. 3 6 ,74».
A trois lieues de Tunis , le trouvent les ruines
de Carthage fi fameufe autrefois:, la rivale
de Rome. Elle fut détruite par Scipion-Emilien
146 ans avant Jé'fus - Chrift. Elle fut rétablie
par Jules-Céfar, mais les Sarrafins l’ayant prife
en 698 , ils la détruifirent de fond en comble.
A l’orient de Tunis font les petites îles de
Lampedoüfe V de Linofe , & de Pantalafie,- qui
en dépendoient autrefois : les deux premières
appartiennent aux chevaliers de Malte -, & la
troifième au duc de Requefens , fous la protection
de la couronne d’Efpâgne , à laquelle il
en fait hommage.
p u royaume de Tunis dépend le Gerid propre,*
qui renferme le royaume de Tocorte. Il eftiitué
au midi, 8c au-delà du mont Atlas. (R,)
TUNQUIN ( l e ) , royaume d’A fié , dans la
prefqu’île orientale de l’ Inde. Il^eft berné au
nord 8c au levant par la Chine,-au midi par
le golfe & le royaume de la Cochinchine,. au-
couchant par le royaume de Laos.
Le Tunquin efl un des plus confidéfables royaumes
de l’Orient , par fa population , par fa fertilité
, & par les richefles du monarque qui le
gouverne. On lui donne deux cent cinquante
lieues de longueur, & cent cinquante de largeur.
La plus grande partie de ce pays con-
lifte en defpacieufès plaines, entourées de mon-
tagïîes qui produifent, de l’eau, des lacs, des
étangs & des rivières en abondance, de là vient
qu’o i iy fait de grandes récoltes de r iz , qui ne
croît 8c ne parvient à fa maturité qu’à force
d’eau.
, Le théifme y domine : c’efl: la religion de
Confucius , dont les dogmes y font plus révérés
-encore qu’ à la Chine. Mais il n’y a pas,
comme à la Chine , le même accord entre les
principes' du gouvernement, la religion , les
loix, l’opinion, & les tites. Aufli, quoique le
Tunquin ait le même légiflateur, ik s ’ en faut
bien qu’ il ait les mêmes moeurs. On n’y a ni
ce refpeâ pour les païens ,' ni cet amour pour
le prince., ni ces.égards réciproques, ni ces.
vertus fbciales qui régnent à la Chine. On n’y
retrouve point le bon ordre , la police , l’indu
ftrie , 8c l’activité , qui font en vigueur dans,
l’empire, des Chinois.
Les Portugais , les Hollandois., les. François
& les Anglais, qui avaient efl’ayé. de former
quelques, liaifons de commerce au Tunquin , f»
font vus forcés. d.’y renoncer, par les diflen-
tions & les agitations continuelles qui boule-
verfent cet état. 11 n’y a eu depuis , entre les
Européens, que quelques né.gocians de Madras>
qui aient repris le fil de leurs relations. Ils y
partagent avec, les Chinois , l’exportation du
cuivre. & des foies communes , qui font les
branches de trafic les plus importantes du pays.
L’air en efl: fain. Comme dans toutes les contrées
comprilès entre les deux tropiques, on y
diftingue deux faifons ; l ’une fèche , l’autre plu-
vieufe. La première commence au mois de Mai.,
& dure jufqu’à la fin d’Août •, la chaleur efl
alors exceflive, fur-tout quand le foleil fe dégage
des nuages •, les , vents s’y font peu fentir.
Depuis le mois de Septembre jufqu’au mois de
Janvier, l ’air efl: aflez tempéré. Les mois fuî-
vans font fujetÿ à des brouillards épais , & à
des pluies froides. Le mois d’Avril- efl abfolu-
meht tempérer.
Le terroir du Tunquin efl: très - fertile, particulièrement
en r iz , 8c en fruits excellens. Les
oranges,'8c fur-tout les ananas y croifleht dans
une abondance extraordinaire. Le pays abonde
aufli en quadrupèdes & oiiéaux domefliques &
fauvages. Il ne s’y trouve ni moutons , ni ânes,
ni lions | mais les forêts y font pleines de tigres ,
de cerfs , 8c de linges ; & les campagnes de
boeufs , de vaches,, Sc de pourceaux. Il y a aufli
beaucoup de poules 9 de canards-, 8c de tourterelles;
La mer , les rivières , 8c les étangs- y
fourniflent uné quantité prodigieufe de. poifl’oh;
& vers les côtés de la Cochinchine j on trouve
beaucoup de tortues dont la chair efl délicieufé.
Le petit peuple y efl: fort adonné au larcin ,
quoiqu’on le punrfle févèrement È les grands font
fiers & h'autains, & les foldats infolens. La
polygamie y efl: permifer
• Les Tunqùinois font tributaires de la Chine.!
Ils ont deux rois ; l’un appelle Boua n’efl: proprement
/qu’un fimü’ acre ou fantôme de r o i ,
qui n’a que les .honneurs & . l’apparence de la
royauté , avec le privilège d’habiter l ’ancien palais
royal -, le Choua, qui efl: l’autre ro i, a fous
là main toutes l.es forces de l’éta t, les gens de
guerte, les principaux officiers de la couronne,
& les revenus du royaume; Kecho en efl la
capitale.
Les peuples du Tunquin font en général de
moyenne taille ; ils ont le teint bafané comme
les Indiens, mais avec cela la peau fi belle;
fi unie , qu’ on peut s’appercevoir du moindre
changement qui arrive fur leur vifage Hhî'fqu’ils
pâliflent ou qu’ils rougiflent : ce qu’on ne peut
pas reconnoître fur ie vifage des autres Indiens.
11^ ont communément le vifage plat & ovale ,
le nez. & les lèvres aflez bien' proportionnés, les
cheveux noirs, longs & fort épais ; ils fe rendent
les dents aufli noires qu’il leur efl pofiible. La
chevelure noire , déliée 8c néglige'e , efl: celle
qu’ils efliment davantage •, mais leurs bonzes,
qui font leurs prêtres, fe rafent la tête.
Le peuple va prefque nud la plus grande
partie de l ’année. Les plus riches portent au lieu
de chemife, uneToutanellé!de foie qui leur pend
jufqu’aux genoux , & par-deffus une longue robe
légère. Les bonzes portent par magnificence une
forte de pourpoint a rézeaux-, 8c leurs femmes,
au lieu de bonnet, ©nt une demi-mitre ornée
tout autour d’un rang de grains de verre oit
de criflal de différentes couleurs, enfilés avec
quelque fymmétrie.
Les maifbns des Timquinois font toutes de
bois & de chaume -, les cloifons font de rofeaux
nommés bambous , goudronnés enfemble y le plancher
efl de terre bien battue , 8c le toit efl
couvert de paille.
Il n’efl pas permis de fe préfenter chaufTé
chez le roi •, il faut y aller pieds nuds fans fou-
liers-, lui feiil fe fert de pantoufles; 8c fon fils
meme , ^quand il va lui rendre vifite^ fe dé-
chaufle a la porte, où il trouve un page avec de
l’eau qui lui lave les piedss II efl encore défendu
à qui que ce l’oit de fé fèrvir de fon; éventail en
préfence du roi ; & quoique la chaleur fort exr
treme, tout le monde met fon éventail dans la
manche-, tenant fes mains en repos dans une des
manches de fa robe toutes deux couvertes ,8c
-appliquées fur..la poitrine.
Lorfqu’on entre dans la (aile d’audimice, avant
que dé joindre' le roi pour le faluer , on, efl:
obligé de faire quatre génuflexions , les deux
genoux en terre ; après la quatrième on fe lève ,
& joignant Jes mains avec les/doigts entrelacés
1 un dans l’autre , & couvertes des manches de
la!' robe de deflus, oh les porte en cette poflure
julque fur la tête ; alors, après une petite inclination
, qui efl la dernière , on fafue le monarque
, en difant a vive lé roi l’efpace de deux
« mille ans. #
Lorfque les grands mandarins f après avoir eu
audience, prennent congé de ce* prince , ils
fortent avec empreflement de fa chambre, &
s en retournent chez eux en courant ; s’ils en
Hloient autrement, ce feroit une incivilité inex-
cufabîe. Au Tunquin , tous les mandarins civils
& militaires font eunuques, & c’étoit autrefois
la meme chofe à la Chine, pour les gouverneurs
des villes.
On ne fe fert point de fiéges dans le Tun-
quin pour la converfation ; on s’y contente d’ une
j ^ e jf°'n étend fur la tprre,. Les perfonnes
dimnguées^ s’entretiennent fur une efpèce d’ef-
trade élevée d’un pied, 8c couverte d?une belle
natte- au lieu de tapis. Si quelqu’un de leur même
condition leur rend vifite , ils lui donnent place
fur la mêine eflrade y 8c s’il efl inférieur, ils le
font afleoir plus bas lur une natte double, la
donnant fimple aux perfonnes de médiocre; condition,
& ne laiflant- que la térre fans natte à
ceux qui font de la populace. Ils ne traitent- jamais
d’affaires en fe promenant., mais toujours,
aflis ou debout, fans remuer les mains-, Si mx
Tunquinois en rencontre un autre qui. lui foi»