
enfin des prifonnïers de guerre Suédois , du premier
mérite, y ont été relégués par le czar Pierre.
Là partie feptentrionale de la Sibérie ne produit
ni grains , ni fruits, & la terre y eft abfolument
inculte au-delà du 60e. deg. dè lat.'Cependant
il eft des années où*l’orge vient à maturité,
près de Jakutski. Les habitans du pays;fe nour-
riffent de poiflbn & de la chair dés animaux
domëftiques 8c faiivages. Les contrées méridionales
prodaifent du bledy dont une partie s^en-
Tève! -pour la Ruffie les partîèr iur - tout qui
avoifinent le laçTde~Baikal, font affez fertiles
particulièrement-en le rapprochant $u fleûve
d’Argun ; mais ,• par l’indolence naturelle des
habitans , là plupart de ces terres reftent incultes^
& lës'/chofes nécéffaifes à la vie , y font au plus
vil prik/ ’ ■
Les pâturages' y font excelleris , & l’on-y
élève beaucoup £dël bétail ->& de- dhé vaux -, mais
à travers les -cantons habités, il s’en trouve qui
font abfolument1 dêl’erts.
A la réferve du voifinâge de la mer, où il
ne -croît point de bois , la plus grande partie
de là Sibérie e(V couverte de forêts de pins-,
il s’y trouve àufli1 quelques ' auprès* ëfpèèes de
bois -, mais1 point de .chênes. Lé cèdre de Sibérie
s’élève fort haut y il porte un fruit d’im goût
agréable1, dont il fé fait une grande confom-
mation , 8c on en tire une huile dont les gens
ailes fe fer vent au lieu de beurre.
On y a des coqs de bruyères, des gelinotes,
des perdrix y & eh général les volatiles y font
frès-multiplîés: Il s’y trouve deS’ chevreuils, des
rennes, des (ànglièrs, dés 'lièvres, des ours des
loups, desmnletsfanvagës, dès Il'ans j &c. 8tc .- |
On trouve en Sibérie 'dés renards- noirs , des
zibelines, des gloutons, des hermines y des
loups-cerviers, des petits-gris ou écureuils , des-
martres, dont les fourrures font ctès-recherchées.
On y voit suffi beaucoup de caftors y & 1 ceux
du K-amtzchatka, ëntr’autrës y font d’une grandeur
extraordinaire. Comme t6ute's: ces^elleteriêS
font fort précieufes, il ffeft permis;à qui que ée-
foit d’en faire négoce y mais lés habitans du pays
qui en o n t, font obligés de les porter aux commis
du tréfor, qui les doivent payer-à un prix réglé.
Le tribut des peuples de Sibérie , eft partie,en a r g
en t, partie en fourrures1. ’ (
Cette région reculée recèle d’ailleurs des mines'
d’argent d’un bon rapport celles d’Argun contiennent
de l’or. L’un & l’autre de ces métaiix-
fe rencontrent aufli dans la mine de cuivre de;
Kolywan y 8c en général le pays eft riche en'i
mines de cuivre & de fer: : 1 celle de cuivre fe
trouve à fleur de terre y le cuivré ên eft du&ile
&: le fer dë bonne qualité. Ajoutons que'cés.;
contrées fâuvages ne manquent pas -dé. pierres'
préciehfès y les topazes fur-tout font-tces-belles 8c approchent beaucoup de la qualité des topazes
orientales*
Oh y a découvert aufli des carnîoles, du
jafpe fanguin, minéral, qui fe trouve dans les
déferts de G ob i, du talc , particulièrement dans
le territoire de Jakutski. Dans toute la Sibérie ,
on s’en fert pour les fenêtres , au lieu de verre.
I l s’y rencontre aùffi des pierres d’aimant & des
mines de charbon de terre.
La Sibérie eft occupée par trois fortes d’ha-
bitans y (avoir, i° . par des peuples païens , qui
font les anciens habitans du pays y 2,". par des
Tartares mahométans , qui font ceux fur lefquels
les Ruffes l’ont conquife y 30. par les Ruffes qui
en font à préfent les maîtres.
Les peuples païens qui habitent la Sibérie ,
fe divifent en plufieurs nations, dont les prin->
cipales font les Voguluzes 8c les Samojèdes ,
qui habitent, les uns entre l’Oby & la Lena ,
vers la mer Glaciale , & les autres fur la côte
(eptentrionale de la Radie. Les Oftiaques habitent
vers le 6o* deg. de. lat. Les Tingôëfes , ou Tun-
gufes, occupent une grande partie de la Sibérie
orientale , 8c foojt divifés en plufieurs branches*
La plupart de ces peuples n’ont point d’habitations
fixes, y ils vivent fous dés huttes y ils demeurent
pendant l’hiver dans les forêts, cherchant
leur nourriture à la chaffe, & dans l’été ils vont
gagner les bords des rivières pour s’entretenir
de la pêche. Les peaux des poiflons font leur
habillement d’é té , 8c les peaux des élans & des
rennes leur. fervent au même ufage en hiver*
Un arci, une flèche , un couteau , une hache y
avec une marmite y font toutes leurs' richefles y
les râclures d’un certain bois- leur tiennent lieu
de lit de plumé pour fe coucher y les rennes/ 8c
l.es? chiens leur ; fervent de chevaux pour tirer
leurs traîneaux fur la neige. La religion de. ces
' différens peuples confifte en quelque honneur
qu’ils rendent au fole il, à la lune , & à leurs
idoles.
Les Tartares mahométans. font la fécondé partie
des habitans, de la: Sibérie y- ils occupent!iin grand
nombre de villages le long de J’Ir tis. 8c de la
Tobol j & ils ont le libre exercice.de leur religion*
Leurs principaux chefs font des murfes,.p.'; .
Les Ruffes , qui font la troifième.efpèce d’ha—
hitans aéluels de la Sibérie , font venus ?’y établir
depuis que ce pays eft fous- l’obéiffance de la
Riïifie , 8c leur nombre rs’e f t ; accru en - peu :de
temps. Au refte, ce, l'onf pour, la plupart des fugitifs.
ï
La Sibérie forme aujourd’hui deux grands goii-
vernemens : celui de Tbbolsk & celui d’Irkutski*
Le premier comprend les deyx;grandes provinces
de T obolsk& de Jeniffeia ou Jenil’eisk y, le fécond ,
qui eft:'fort vafte s’étend fur les -palatinats
d’ilimsk ,■ 4 ë? Selinginsk , de Nertfchinsk , d’Ia-,
kutski y fur le diftrïcl d’Ochotzk & fur le Kamtfÿ
chatka. Lès revenus annuels du gouverneur ,
outre les appôimtemens , font de 30,00a rouhles.
C h a q u e v i l le a i o n p a la tin o u y a iv a d e y q u i
eft chef du diftria , & a fous fes ordres: des
commandons ou baillis.
La monnoie de Ruffie éft la (feule qui ait cours
dans ce continent y mais elle y eft fort rare ,
£c tout le négoce s’y fait en échange , faute 4’argent. Le gouvernement fpirituel de la Sibérie
eft confié à un métropolitain du culte g re c , tel
qu’il eft reçu en Ruffie, 8c ce prélat refide a
Toboloskoy.
Qui croiroit que cette contrée a été long-temps
le féjour de ces mêmes Huns qui ont tout ravagé
jufqu’à Rome, fous Attila , & que ces Huns
venoient du nord de la Chine ? Les Tartares
U (becs ont fuccédé aux Huns , & les Ruffes aux
U(becs. On s’eft difputé ces contrées- fauvages,
ainfi qu’on s’eft exterminé pour les plus fertiles.
La Sibérie fut autrefois plus peuplée qu’elle ne
ï’e ft, fur-tout vers le midi y on en juge par des
tombeaux & par des ruines. Toute cette partie
du monde, depuis le 60e degré ou environ , '
jufqu’ aux montagnes éternellement glacees qui .
bornent les mers du nord, ne reffemble en rien
aux régions de la zone tempérée y ce ne font ni
les mêmes plantes , ni les memes animaux (iir
la terre, ni'les mêmes poiffons dans les lacs &
les ' rivières : il feroit curieux d’en avoir des
deferiptions par un naturalifte , & ce fera le fruit
du progrès des foieness en Ruffie. JVI. Gmelin a
déjà ouvert cette carrière fur les plantes de cette
froide contrée , par fa flora Siberica y Petropoli
2 7£0 , en z vol. in-40. avec fig.
A l’extrémité méridionale de la Sibérie , entre
les rivières d’ Irtish d’Obalet, au 50e deg. de
latitude , eft un .défeçt d’une étendue confidé-
rable , rempli en plufieurs endroits de tombeaux
ou de tertres , dont M. Bell & plufieurs voyageurs
ont parlé. Les habitans des environs continuent,
depuis plufieurs années , à chercher les tréfors
dépofés dans les tombeaux : ils y ont trouve-y
parmi les cendres 8c les offemens des* cadavres ,
quantité d’o r , d’argent, de cuivre , ainfi que des
poignées de fabres , des armures , des ornemens
de felle, des brides & autres harnois, avec des
os d’animaux j & en particulier d’éléphans. ^
La cour de Ruflie , informée de ces dépré-,
dations, envoya un officier général avec un corps
de troupes pour ouvrir ceux des tombeaux auxquels
on n’àvoit pas encore touché , & recueillir ,
au nom de la couronne, ce qu’ils contiendroient.
Cet offîèier, examinant les monumens fans nombre
difperfés dans ce vafte défert, conclut que le plus
gros tertre étoit fans doute la fépulture d’ un j
. prince ou chef.
En effet, après- l’enlèvement des terres & des
pierres, les ouvriers parvinrent à trois voûtejli|
groffièrement travaillées. Le corps du prince étoit
au centre y on le reconnoiffoit aifément au moyen
du fabre , de la lance, de l’arc, du carquois 8c r
des flèches qui étaient à fes côtés. Sous la voûte
Suivante on trouva fon cheyal, fa felle, fa bridé.
& fes étriers. Le corps du prince étoit couché
fur une feuille, d’ or étendue de la tête aux pieds ,
& couvert d’ une autre feuille d’or de la mérite
dimenfion y il étoit enveloppé d’un riche manteau
à franges d’o r , & garni de diamans y il avoir la
tête , le cou, la poitrine 8c les bras nuds , &
fans aucun ornement. La dernière voûte renfer-
moit le corps d’ une femme diftinguée par les
ornemens de fon fexe y elle portoit autour du cou
une chaîne d’or , enrichie de rubis, 8c des bracelets
d’or autour de fes bras fa tête , fa gorge- &
fes bras étoient nuds y fon corps , couvert d une
belle robe , étoit placé entre deux feuilles d’or
fin : ces quatre feuilles pefoient 40 livres. Les
robes du prince & de la princeffe (fembloient encore
brillantes & entières, mais elles tombèrent
en pouflière'dès qu’ on les toucha. On fouilla dans
la plupart des autres tombeaux y celui-ci étoit 1er
plus remarquable.
Cette delcription paroitroit romanefque, fi elle
n’étoit atteftée par une lettre de Paul Demidoff a
M. Collinfon, écrite de Péteribourg le 11 Septembre
17Ô4. Ces faits font tirés de Traités
relatifs à Vantiquité , publiés à Londres , in - 40*
en z vol. 1773. Voye{ la Galette de littérature y
tfik 1 6'? Z7.74. . ■ -
Les tombeaux répandus aux environs de cette
plaine, étoient probablement les lieux où avoient
été enterrés d’anciens héros Tartares , morts dans
les combats y mais on ignore abfolument l’époque
& l’hiftoire de ces événemens. Quelques Tartares
ont appris a M. Bell que ce pays aypit été Je
théâtre de plufieurs batailles entre Tamerlan 8c
les Tartares Calmoucks, que ce conquérant entreprit
en vain de fubjuguer. On lit enfuite dans
l’ouvrage anglois , cité , quelques oblervations
fur les antiquités., par M. Forfter, qui a demeuré
long-temps en Tartarie.
M. Hellant, académicien de Stockholm, conclut
la falubrité de l’ air du climat de la Sibérie ,
des regiftres de Kufamo, fous le cercle polaire
où le nombre des morts , pendant 30 ans , n’a
été que la moitié du nombre des naiffances. La
population y a augmenté dans le rapport de 100 a
175 y dans des pays plus peuplés 8c plus fertiles,
il faut 50 & quelquefois 100 ans pour produire
cette proportion.
Dans la paroiffe de Sodankile , fituée plus au
nord, le nombre des morts , pendant (fept ans,
a été à celui des naiffances, comme 78 à 175 y
& de 70 perfonnes, il n’en eft mort qu’ une feule'
par chaque année.
Voyez Collection acad. totn. X I y de la partie
étrangère, in-//?. Z772..
La defeription géographique de la Sibérie a
été mife au jour à Nuremberg , en 173° , in-fol»
Voyez aulîi le Voyage en. cette contrée de la
Terre , de M. Gmelin, 8c celui de M. l’abbé
Chappe d’Autroche , qui eft le plus récent. (R.)
SICANDRO ( île ) , île imaginaire de la met