U h DÉLIMITATION DES ESPÈCES.
être nnturalisée en quelques points de l'Ecosse orientale, c'est-à-dire dans
une portion de la Grande-Bretagne moins humide que les côtes du nordouest.
La principale direction de la limite est du nord-ouest au sud-est : du comté
d'York, ou, si l'on veut, de l'Ecosse orientale, vers la Carniole et le royaume
de Naples. Ceci peut faire présumer que l'espèce craint tantôt les froids
excessifs de l'hiver, tantôt la sécheresse de l'été, peut-être ces deux circonstances
également. En Allemagne ce pourrait être le froid, qui augmente
vers l'est; en Italie ce serait la sécheresse, car les hivers sont bien doux.
D'un autre côté, la plante n'est pas haute, elle vient souvent parmi des
broussailles qui l'abritent un peu contre la gelée, et que la neige recouvre en
hiver. D'ailleurs, je la vois supporter en Suisse des minima très rigoureux
(— 25" à Genève, — 28" ou même — 30° dans la Suisse centrale), sans
paraître le moins du monde aifectée.
La comparaison des chiffres, dans le tableau, confirme le peu d'importance
du froid de l'hiver. Le mois de janvier en donne assez bien la mesure, et
nous voyons léna et Innsbruch avoir des moyennes plus basses que certaines
localités où l'espèce n'existe plus. D'ailleurs, au pied des montagnes
de Dalmatie et d'Illyrie, le froid n'est pas rigoureux et l'espèce manque.
Ce serait donc la sécheresse de l'été, combinée avec la température des
mois suffisamment humides, qui réglerait la limite, et voici de quelle manière
je comprends cette double action.
Dans le royaume de Naples, la sécheresse est prolongée pendant quatre
mois environ ; mais à dater des pluies d'automne jusqu'au printemps suivant,
la chaleur est assez considérable et l'humidité assez constante pour que la
plante puisse végéter. Elle fleurit à Naples au mois de janvier. En Sicile et
en Grèce, l'Helleborus foelidus n'existe plus, sans doute à cause de la sécheresse
plus longue et plus intense, qui atteindrait la plante jusqu'à la souche.
Plus au nord, la végétation est suspendue par la sécheresse, et dans le
reste de l'année la chaleur n'est pas toujours suffisante. Les températures
d'hiver inférieures à 2" ou 3° ne permettent guère à l'espèce dç végéter
activement; les fonctions doivent s'accomplir dans les- mois d'automne et
surtout de printemps. L'uniformité de température, sur toute la limite,
dans le mois d'avril, confirme cette manière de voir. Pour arriver à des
preuves, il faudrait connaître le point où la sécheresse et le froid interrompent
la végétation ; mais comment y parvenir, surtout à l'égard de la
sécheresse. J'ai consulté le nombre des jours de pluie; il est certainement
moindre à l'orient de la limite, mais les moyennes mensuelles et l'observation
ordinaire de l'espèce ne permettent pas de préciser des époques où la
sécheresse détermine la suspension. C'est un phénomène de sa nature assez
LIMITES POLAIRES DES ESPECES SPONTANEES. 135
vague et irrégulier. Cependant il faudrait adopter un point de départ pour
calculer les sommes de température au-dessus de tel ou tel degré, c'est-àdire
la température utile, entre les époques de suspension de végétation, en
dedans et en dehors de la limite.
Si l'on poursuit ces hypothèses, le plus difficile à expliquer serait peutêtre
la présence de l'espèce dans le Milanais, et son absence des environs
de Venise et de Trieste. D'après le nombre des jours de pluie, la sécheresse
est plus prolongée sur cette côte que vers la chaîne des Alpes; d'après
la quantité de pluie , c'est moins évident, pourvu que l'on ne compare
pas des localités exceptionnelles, comme Udine, avec celles du littoral.
La température est favorable de part et d'autre. Il y a là des circonstances
tenant à la sécheresse dont on devrait se rendre compte. Je n'insiste
pas davantage, non seulement à cause de la difficulté du sujet dans l'état
actuel des documents, mais aussi parce que l'Helleborus foetidus, plante
toujours bizarre, ne présente pas véritablement de limite polaire ; elle n'a
que des limites occidentales et orientales, déterminées essentiellement par
trop ou trop peu d'humidité.
i 4 . P e g a n u m Ilarmala. —Yoy. p. 122, et pl. I, % . 9.
La floraison a lieu en été, dans le Caucase (Bieb., F l . Cauc.,\'.T), au
mois de juin ; en Italie (Bertol. F l . , ^ , p. 6) ; au mois de juillet en Espagne
(Boiss., Voy., II, p. 126). On peut présumer, en conséquence, que les
mois de l'été sont ceux qui influent le plus sur la délimitation de l'espèce.
Dans la Russie orientale, la limite part d'Orenbourg, dont les moyennes
thermométriques sont presque inconnues ; elle passe à Lougan, et ensuite
entre la Crimée et Odessa. Ces derniers points sont connus. Voici les
chiffres :
-
TEMPÉRATURES MOYENNES.
VILLES.
Hiver. Print. Été. Automne. Année.
Sur la limite orientale. 0 0
Lougan, 48° 35' lai. (a) - 8 , 5 22,4 9 , 3 G
d,8 10,2 21,7 12,6 11,5
- 1 . 3 7,0 20,0 11,5 9 , 3
Pointiniermédiairc entro Sévaslopol et Odessa. 0,25 8,G 20,85 12,05 10,4
(a) Observations de 1838 à 1841, dans Dove, Ueb. die nicU period. Aender. ,IU, i^. 94.
{h) Mahlmann, dans Martins, Méléor., p. 177, etc.
(c) Observations inédites de Wilkins et Morozow, à 9 bernes du matin et 9 heures du
soir, de 1821 à 1831, corrigées pour le calendrier, selon le procédé de M. Kupflcr.
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