16 EFFRTS DE LA TEMPÉRATURE ET Î)E LA ì.ììMIÈAE SUR LES VÉGÉTATK.
Quoi qu'il en soit, une queslion bien plus importante est de savoir si les
végétaux sont atTectés par Tinsolation et le rayonnement cVune manière
semblable à une boule de cuivre, à une boule de thermomètre, ou ordinaire,
ou contenant de l'eau, du mercure, de l'alcool, ou recouverte d'une substance
noire, d'une substance peu conductrice, etc. On doit se demander
aussi jusqu'à quel point et par quels procédés l'impulsion donnée à la machine
végétale par les rayons du soleil peut être comparée à la marche
d'un thermomètre. De ces deux questions, la première est du domaine de
la pliysique; la seconde, sur laquelle j'ai donné mon opinion dans le chapitre
P'-, est plutôt physiologique et même d'une physiologie assez abstraite.
Tous les auteurs ont compris que la coloration variée des plantes ne
permet pas de les assimiler sous le point de vue dont il s'agit à la boule d'un
thermomètre noirci. Les effets de l'insolation et du rayonnement y sont évidemment
moins intenses, moins extrêmes. M. de Gasparin trouve, avec raison,
plus d'analogie avec un thermomètre recouvert d'un millimètre de terre,
et M. Dove (a) avec un thermomètre non noirci. Cela réduit sensiblement
l'action solaire; mais bien d'autres causes agissent dans le même sens, et
elles sont à peine indiquées par les physiciens. Un corps presque solide,
comme une feuille, une branche, ne peut pas s'échauffer à la manière d'un
liquide contenu dans une boule, surtout quand le corps solide est un
mauvais conducteur, et que le liquide auquel on le compare est un métal
à i a fois mobile et bon conducteur. Le tissu végétal est rafraîchi pendant
le jour par l'ascension continuelle de la séve et par l'évaporation; pendant
la nuit, ces causes de modification cessent presque complètement, et lô
rayonnement produit tout son effet. Le transport de la séve vers lêB
feuilles amène, sous l'influence de la lumière, une évaporation considérable,
qui diminue encore l'effet calorifique du soleil. Les tiges et
quelquefois les feuilles sont verticales, et en général les parties d'une
plante ne se présentent pas sous l'angle qui produirait le plus d'échauffement
et le plus de rayonnement. En outre, elles se font ombre mutuellement.
Dans une forêt, dans une prairie, sur les branches d'un arbre
isolé, il n'y a que certaines parties des surfaces qui soient exposées directement
aux rayons du soleil. Les autres sont tournées vers le nord, ou
abritées plus ou moins complètement. Lorsqu'un arbre isolé est touffu,
ou qu'il se trouve dans une forêt, ce n'est guère que la dixième ou la
vingtième partie peut-être de sa surface qui reçoit l'action solaire et qui
rayonne librement vers l'espace. D'ailleurs, plus la plante est échauffée et
activée par les rayons calorifiques et chimiques du soleil, plus elle éva-
(a) l'âge 127 du Mémoire cito.
EFFETS DmECTS DU SOLEIL ET INFLUENCE IJE L'EXPOSITION. 17
pore; ce qui diminue la température des parties vertes. En raison de tous
ces motifs, si Ton admet que la moyenne de température à l'ombre soit
pendant la belle saison, et sous une certaine latitude, de ou inférieure
à celle d'un thermomètre exposé au soleil et au rayonnement, il
faudrait, pour apprécier l'effet sur les plantes, réduire cette différence
d'une quantité considérable. Elle deviendrait peut-être, si l'on pouvait bien
en juger, une fraction de degré seulement, et alors les, diversités possibles,
sous ce point de vue, entre les climats maritimes et les climats continentaux
seraient réduites à des fractions de fractions de degré, au moins pour
les pays situés à peu près sous les mêmes latitudes. Dès lors il ne serait
pas mauvais de se servir des observations thermométriques faites à l'ombre.
Elleâ représenteraient passablement la condition des parties ombragées
des végétaux, et même des parties exposées au soleil, à cause de l'évaporation
qui affecte principalement celles-ci.
L'observation commune confirme assez cette manière de voir, du moins
dans les pays tempérés. Si l'insolation modifiait considérablement, par
exemple d'une manière égale à 2° ou 3% les fonctions des parties de
végétaux qui lui sont exposées, on verrait le côté nord des arbres isolés
fleurir et mûrir ses fruits beaucoup plus tard que le côté sud. Dans les
allées dirigées de l'est à l'ouest, l'un des côtés serait notablonent plus
avancé que l'autre quant aux divers phénomènes physiologiques, car une
différence de quelques degrés du thermomètre équivaut souvent à plusieurs
degrés de latitude. Or on ne voit pas qu'il en soit ainsi. Dans les ar])res
isolés ou plantés régulièrement on ne voit pas de grandes différences selon
la position des branches. Au moment où j'écris ces lignes, j'observe des
catalpas en ileurs : les branches inférieures et intérieures de la cime sont
un peu en retard (de quelques jours), mais la surface générale est lleurie
simultanément au nord et au midi. J'en conclus que pour les arbres isolés
la chaleur distribuée est peu différente de côté et d'autre, ou plutôt qu'elle
ne produit pas sur la machine végétale les mêmes effets que sur des thermomètres.
Les usages de l'agriculture sont plutôt favorables à l'idée d'une faible
•fiction de l'ombre sur les plantes, soit parce que l'ombre est rarement complète,
soit par d'autres motifs. Ainsi, dans la cueillette des cerises, des
pommes et des raisins, on ne fait pas deux récoltes, l'une pour le côté méridional
des arbres, l'autre pour le côté septentrional et pour les branches
recouvertes. La diversité est assez légère pour qu'on puisse la négliger,
tandis que 2° ou S"* de température moyenne écarteraient de plusieurs
>semaines l'époque de la maturité. Chez nous, un grand nombre de
propriétaires ont des vignes dans diverses expositions, même au nord.
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