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BE L'AIRE DES ESPÈCES.
CHAPITRE Vil.
D E L'AIRE DES ESPÈCES.
A R T I C L E PREMIER.
E X P O S I T I O N ET DÉFINITIONS.
Nous avons scruté les causes variées qui limitent l'habitation de chaque
espèce (chap. IV); nous avons vu (cliap. V) que la forme générale ou
moyenne des habitations est une ellipse, dirigée-de Testa l'ouest, mais peu
allongée ; liiaintenant nous devons considérer les habitations sous le rapport
de leur étendue, c'est-a-dire delà surface de pays qu'elles occupent. C'est
la ce qu'on nomme Vàire des espèces, du mot latin area, surface.
Ce sujet m'a occupé depuis longtemps, parce qu'il me semblait pouvoir
conduire à des lois importantes, relatives à la proportion des espèces de
diverses familles ou de diverses classes dans chaque pays, à la distinction
des régions botaniques, etc. A l'occasion d'une monographie (a) et d'un
ouvrage destiné à l'enseignement (b), j'ai indiqué jadis les principaux
résultats auxquels j'étais alors parvenu. Voici le moment d'y revenir et de
donner plus de détails. On me dispensera cependant, je suppose, de publier
les tableaux, extrêmement compliqués, au moyen desquels je suis arrivé
laborieusement à mon but.- Il suffira d'en indiquer le système et d'en
extraire les chiifres les plus saillants.
Avant d'entrer en matière, je dirai pourquoi j'ai renoncé à quelques
termes dont l'usage, autrefois, m'avait paru convenable.
Un grand nombre d'espèces existent clans un seul pays ; d'autres dans
deux, dans trois, dans plusieurs pays à la fois. Des faits analogues se présentent
pour les genres. On a essayé d'introduire des expressions propres
a caractériser ces faits. Mon père avait employé pour les genres dont toiites
les espèces sont groupées dans une même région, le terme de endémique,
et pour ceux dont les espèces sont dispersées dans diverses régions, le
terme de sporadique (c). Ces mots étaient empruntés au langage médical.
Je m'en suis servi égalérriènt autrefois pour les espèces : j'appelais eildémiques,
celles dont tous les individus sont groupés dans le même pays,
et sporadiques, celles où les individus sont répandus dans divers pays. On
(a) Monographie des Campanulëes, in-4, 1830, p. 70 à 88.
(5) introduction à Véiude delà botanique, 1835, v. Il, p. 287.
(c) Diet. sc. nat., 1820, art. GÉOGR. BOT. (p. des exemplaires tirés à part) ; Mém.
mr les Mélastomacces, p. 12.
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DE L AIRE DES ESPECES. !\7Ò
a fait des objections à ces termes. Sporadique signifie trop espèce dispersée^
ce qui peut s'entendre, ou d'espèces dont les individus sont clair-semés, ou
d'espèces qui habitent des pays fort éloignés. Endémique veut dire propre
à un peuple, et par extension du sens, propre à un pays, mais on peut
croire que cela signifie originaire d'un pays, et alors sporadique indiquerait
des espèces qui se sont dispersées par l'effet de transports d'un lieu à
l'autre. Ce n'est pas là le sens, ou du moins il vaut mieux ne pas décider
par des mots la grave question des origines. Les espèces répandues à la
fois dans plusieurs pays, contigus ou séparés, pourraient bien être originaires
de plusieurs de ces pays à la fois. Les termes doivent exprimer des
faits, non des théories. M. Fenzl (a) a reconnu, en partie au moins, ces
objections, et il a proposé de remplacer le mot sporadique par polydémique,
qui signifie ayant plusieurs patries, ou plus littéralement, selon
l'étymologie grecque, appartenant à plusieurs peuples. .11 applique le mot
pandémiques aux espèces qui seraient dans le monde entier, s'il en existe.
A toutes ces expressions dérivées de on peut objecter le sens de
ce mot, qui est celui de peuple, et non de pays ou région (b).
Mais il y a des objections plus graves, tenant au fond môme des choses.
Le monde n'est pas divisé en un certain nombre de régions, sur lesquelles
on puisse tomber facilement d'accord. Sans doute il y a des îli3S,
des péninsules et quelques pays continentaux assez distincts ; mais pour la
majorité des archipels ou des continents, la division sera sujette à contestations.
Cela vient de ce qu'on peut établir des régions purement géographiques,
ou des régions physiques, ou enfin des régions botaniques, dont
la définition sera difficile dans beaucoup de cas. Tel auteur se proposera
de faire des régions à peu près égales en surface ; tel autre ne fera pas
attention à l'étendue, et désignera, par exemple, chaque île éloignée ou
archipel comme une région. Je suppose néanmoins qu'on pût s'entendre
sur la division ; aussitôt un autre embarras se présente. Peut-on dire d'une
espèce qui habite dans une petite partie seulement d'une région, qu'elle
occupe la région désignée? Et si une espèce, comme cela arrive assez souvent,
existe sur les confins de deux régions, de trois regions, sans peut-être
se trouver dans toute l'étendue d'aucune de ces régions, dira-t-on qu'elle
ést de deux ou de trois régions? Enfin si une espèce habite dans deux régions
éloignées, ne sera-t-elle pas dans des conditions qui doivent attirer l'attention,
bien plus que si elle existait dans deux pays contigus? Je comprends
que là surface de terrain occupée par une certaine espèce soit envisagée
(a) Alsinées, p. 19.
(b) l\ aurait fallu employer le mot x^o^cf,, (pii veut dire pays, contrée ; d'où l'on a lire
le nioL cfiorégraphie.
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