' 'à ' ..
- l i
i
¿52 REPARTITION DES INDIVIDUS DANS L'HABITATION DE I/ESPÈCE.
viers, etc., etc. On peut classer dans cette catégorie certaines stations
rares et offrant des transitions avec d'antres, comme les tourbes, les bords
de chemins, les troncs d'arbres servant aux fausses parasites. Ces stations
d'ordre tertiaire offrent toujours des transitions. Par ce motif déjà, elles
ont moins d'importance. En outre, la même espèce, dans le même pays,
habite quelquefois dans deux ou plusieurs de ces stations, et si l'on
passe d'un pays à l'autre, il n'est pas rare d'observer des changements.
Telle espèce propre en Sicile aux prairies humides, se trouvera en Angleterre
dans les prairies sèches ; telle autre habitant en Italie, dans les forêts
épaisses et humides, se trouvera plus au nord dans les clairières ou dans
les forêts peu touffues. La nature minéralogique des sols et l'exposition
contribuent à déterminer ces causes ou stations d'ordre tertiaire. Dans
beaucoup de cas, une prairie est sèche parce qu'elle est calcaire ou exposée
au midi, un sable est mouvant parce qu'il est siliceux, une terre est
compacte parce qu'elle est alumineuse, une prairie est humide parce
qu'elle est tournée au nord, etc. L'action locale d'un vent habituel et
intense peut avoir un effet à peu près de même valeur. Lidiquer la nature
minéralogique ou la nature physique d'une localité, revient quelquefois au
même; cependant, il n'est pas inutile de les indiquer toutes les deux. En
ayant soin de le faire, on pourra, dans certains pays et à l'égard de certaines
plantes, déduire l'existence de causes d'un ordre quaternaire. Par
exemple, si les prairies sèches, calcaires et alumineuses, ont, dans une
Flore, des espèces différentes ; si des forêts, également humides, sur granite
et sur calcaire, se composent dans le même pays d'arbres différents, il
sera certain que la nature minéralogique du sol a de l'influence. Le phénomène
est probablement local, concernant un très petit nombre d'espèces,
d'une manière peu tranchée, et par ce motif, la cause est d'une valeur
très faible, mais on fera bien de ne pas la négliger. Si l'on parvient à démontrer
que telle nature minérale du sol, en raison de propriétés chimiques,
exclut certaines espèces, peut-être une sur mille, ou une sur deux
mille, on devra compter les propriétés chimiques des sols comme une cause
locale d'importance minime. Enfin, l'action des animaux dans chaque localité
peut avoir une importance assez grande, mais elle est variable cà tous
égards.
Telle est la subordination des causes locales. Voyons maintenant d'un
peu plus près comment ces causes influent sur les espèces, en particulier
sur leur degré de fréquence.
DU MODE D'ACTION DES CAUSES LOCALES SUR LES ESPÈCES. /|5S
ARTICLE IL
DU MODE D'ACTION DES CAUSES LOCALES SUR LES ESPÈCES.
Les causes locales agissent sur chaque espèce de deux manières très différentes,
l'une positive et directe, l'autre négative et indirecte.
Il peut arriver, en effet, qu'une cause soit éminemment favorable ou
défavorable à la végétation d'une espèce. C'est l'action positive ou directe.
Il peut aussi arriver qu'une cause agisse directement sur d'autres
espèces, soit pour les développer beaucoup, soit pour les arrêter ou les
exclure, et que cette circonstance influe indirectement sur la fréquence de
l'espèce qu'on envisage en particulier. Ainsi, le développement des arbres,
même celui des broussailles, est nuisible à beaucoup de plantes; le développement
excessif de quelques cypéracées dans les marais tend à expulser
les graminées, celui des carottes et des plantains dans les prairies sèches
diminue la proportion des autres plantes ; les espèces vivaces excluent les
annuelles, etc. La lutte existe partout entre les êtres organisés, ce qui favorise
l'un nuit à l'autre. Liversement, ce qui nuit aux uns favorise les
autres. On voit des localités contraires à beaucoup d'espèces, et où, par
une conséquence naturelle, d'autres espèces délicates viennent à prospérer.
Ce n'est pas alors, comme on le croirait, parce que telle ou telle circonstance
est nécessaire, mais simplement parce que les plantes faibles, d'une
croissance un peu lente ou ayant peu de graines, ont besoin, pour vivre,
que la place leur soit abandonnée. Le révérend M. Herbert, horticulteur
habile, expliquait ainsi pourquoi certaines espèces délicates réussissent
mieux dans les jardins que dans la nature, et pourquoi, en général, certaines
plantes habitant dans des localités exceptionnelles, peuvent réussir
sous des conditions très différentes. En généralisant davantage cette observation,
je suis tenté de croire qu'elle s'applique souvent aux plantes cultivées
en grand. Les espèces de céréales, la pomme de terre, etc., prospèrent
d'autant plus qu'on les débarrasse des mauvaises herbes et du voisinage
des arbres et arbustes; si ces espèces sont peu ou point connues à l'état
sam'age, si elles ne deviennent nullement spontanées, malgré la diffusion
continuelle de leurs semences, ne doit-on pas l'attribuer surtout aux obstacles
apportés par les autres espèces de végétaux, dans le cours naturel
des choses, puisque les conditions de climat leur permettent évidemment
de vivre dans nos régions tempérées ? L'agriculteur, comme l'horticulteur,
ne fait souvent que protéger les faibles contre l'invasion des forts.
11 croit exercer une action directe, qui souvent n'est qu'indirecte.
: rt