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3 / l EFFETS DE LA TEMPÉRATURE ET DE LA LUMIÈRE SUR LES VÉGÉTAUX,
Les Yoici :
Certaines plantes sont tuées par le froid, sans que la température
descende à 0°;
Une infinité d'espèces peuvent contenir momentanément, même dans
les organes les plus délicats, des liquides congelés, de véritaMes petits
glaçons, sans en éprouver de dommage.
Le premier de ces faits se vérifie toutes les fois que la température d'une
serre chaude s'abaisse accidentellement aux environs de + 5° à + (a).
Quand une plante de serre chaude est exposée à + 1% à 0% même à —
—• 2% il n'y a pas de congélation des liquides intérieurs, et cependant eUe
périt. Il est difficile de dire si c'est par un ralentissement de certaines
fonctions, par l'impossibilité d'accomplir certaines opérations chimiques,
ou enfin par une action physiologique sur la force mystérieuse appelée vie,
mais la plante meurt et assez promptement. Nous devons donc noter pour
la géographie botanique, que des minima supérieurs à O'^ peuvent arrêter
dans leur expansion géographique certaines espèces, aussi bien que des
minima inférieurs à peuvent en arrêter d'autres.
Le second phénomène avait été constaté de la manière la plus positive
par du Petit-Thouars, en 1817, dans un de ses meilleurs ouvrages (b). On
l'avait ensuite oublié. Je fis la même observation à Genève, lors du froid
rigoureux de 1838 (c). M. le docteur Coindet faisait alors des expériences
sur la pénétration de la température dans le tronc des arbres, et me montra
des glaçons extraits du centre d'un gros arbre, à la suite d'une gelée de
plusieurs semaines. Je remarquai des glaçons dans l'intérieur des herbes
et des bourgeons, qui cependant n'en souffrirent point. M. Dunal (d) a
insisté sur le même phénomène, dont MM. Goeppert, Morren et Lindley se
sont occupés d'une manière plus spéciale (e).
Au point de vue de la géographie botanique, il nous importe davantage
de constater combien les transitions brusques d'une température trop
basse à une température modérée sont nuisibles aux végétaux. Les agriculteurs
et les physiologistes sont unanimes à cet égard. Les rayons directs
du soleil tombant sur un organe qui-vient de souffrir du froid sont particulièrement
nuisibles. Les abaissements de température semblent donc
{a) M. Hardy, Catal des végét. cuit, à Alger, brochure 1850, indique des espèces
qui ont péri à Alger sous des températures de -f- 5°, -f"
[h) Sur les effets de la gelée dans Jes plantes {Le verger français, etc., in-8, Paris,
1817, p. 18, 28, etc.).
(c) Sur les effets du froid rigoureux du mois de janvier 1838, brochure in-8, dans
Bulletin de la classe d'agric. de la Soc. des arts de Genève, 120, dont j'ai distribué
plusieurs exemplaires à l'étranger.
(d) Des effets de la gelée {Mém. Acad. Mo7Üpellier, 1848).
(e) Voyez Lindley, Trans. ïïortic. Soc.. série, p. 299-
TEMPÉRATURES BASSES CONSIDÉRÉES COMME SOUVENT INUTILES. 35
devoir être dangereux, surtout dans les pays ou localités à variations horaires
considérables et à ciel serein, tels que l'intérieur des continents et les
montagnes élevées. Toutefois une autre cause agit en sens contraire, et
rétablit peut-être l'égalité : c'est que le froid produit un effet plus fâcheux
dans les lieux humides et sur des plantes gorgées de liquide, conditions
assez fréquentes dans les pays maritimes et au fond des vallées.
Rappelons enfin qu'une certaine température trop basse ne produit pas
toujours le même eifet sur une même espèce. La durée du froid, que les
thermomètres à minimum ne peuvent pas exprimer, l'état de la plante,
son age, l'humidité du sol et de l'air, la nature du terrain, la présence de
la neige, toutes ces causes influent beaucoup. Telle espèce peut périr à
— 10", qui résistera une autre fois à — 15"; telle autre, à —
résistera ailleurs à — 1 8 ^ ou — 20". Les auteurs (a) en citent une foule
d'exemples, et sans les répéter, je dirai que ce doit être un avertissement
pour la manière de traiter certaines questions de géographie botanique dont
nous parlerons plus tard.
ARTICLE VL
DES TEMPÉRATURES BASSES CONSIDÉRÉES COMME SOUVENT INUTILES AUX
VÉGÉTAUX, ET DE LA MANIÈRE DE LES ÉLIMINER DES MOYENNES.
La végétation d'une plante phanérogame peut être considérée comme
suspendue quand une température inférieure à 0" a pénétré dans le tissu
et dans le terrain autour des jeunes racines. Quelques modifications chimiques,
une légère circulation intérieure peuvent encore avoir lieu sous
une température plus basse, en particulier dans les plantes à feuilles persistantes,
mais ce sont des phénomènes si rares ou si peu actifs, qu'il
est permis de les négliger.
Au-dessus de 0", chaque espèce, pour germer, pour entrer en séve,
ou pour développer ses feuilles, puis ses fleurs et ses fruits, exige une certaine
chaleur. Lorsqu'on sème des graines par 1% et de température,
h plupart pourrissent au lieu de lever. Chacune semble rester inerte audessous
d'un certain degré, et se développer au-dessus, quoique sans doute
les variations incessantes de la température et la lenteur des premiers développements
ne permettent pas de bien préciser la limite. Les graines venant
(a) Du Petit-Thouars, Mém. cit., p. 4 3 ; de Candolle, PhysioL hoL, p. 1122', Alph. de
Candoile, Mém. cit, ; de Gasparin, Cours d'agricuU.^yol. 11, 2® édit., p. 54.