9 2 DELIMITATION DES ESPÈCES.
cetle partie de TEurope. Il n'en serait pas de même si la végétation pouvait
commencer plus tôt, mais le mois d'avril à Moscou et celui de mars à Odessa
étant l'un inférieur à 6% l'autre inférieur à 1% sont probablement
trop froids pour que l'espèce commence à végéter un peu activement, et
ensuite, du moment où le thermomètre s'élève jusqu'au moment où arrive
la sécheresse, il ne s'écoule pas assez de temps pour que la plante achève le
cycle de ses fonctions.
Supposons que l'espèce demande une moyenne de pour commencer
sa vie, et voyons la somme de chaleur dans les îles Orcades. Pendant
la longue période d'avril à octobre le produit de la température par le nombre
de jours donne 2225% et ce chiffre représente à peu près la température
entre la limite de 6% car il y aurait quinze jours à retrancher en avril et
quinze jours à ajouter en novembre qui tombent au-dessous de cette limite
supposée nécessaire,
A Drontheim , les moyennes mensuelles sont trop mal déterminées pour
que l'on puisse en faire usage avec sécurité. Cependant le produit de
mai à septembre, 1818°, augmenté de quinze jours d'octobre, à 7° environ,
devient 1903, disons 1900°. A Sôndmôr, (62° 30'), au midi de la
limite, comme Drontheim au nord, la somme de ou plus est de 1895;
ainsi l'on peut admettre 1900 sur la limite. Ce chiffre ne s'éloigne
pas beaucoup de 2225, et comme d'ailleurs la longue durée des jours
d'été sous le 63« degré ajoute aux effets ordinaires du soleil, on peut dire
que l'hypothèse ne cadre pas mal avec les faits. A Caristadt, la moyenne de
6° tombe vers le milieu d'octobre, si l'on en juge par quelques villes
peu éloignées dont les moyennes mensuelles sont connues ( Christiania,
Stockholm, Koenigsberg). Le produit 2 1H, augmenté de quelques jours
d'octobre, serait de 2200 environ, ce qui se rapproche beaucoup des premiers
chiffres. A Mitau, la somme de 6« ou plus, est de 2 / i70, mais
nous avons remarqué déjà que les moyennes données pour cette ville sont
probablement un peu trop fortes, et la limite passe au nord-est de Mitau.
A Wilna, la somme de chaleur est de 2570". L'espèce, il est vrai, dépasse
Wilna, mais le chiffre me fait présumer que dans cette région où
la chaleur suffit, la sécheresse devient nuisible.
D'après l'hypothèse, la plante devrait vivre à Stockholm, car la somme de
6° ou plus y est de 2 2 6 8 , mais ou la sécheresse de Tété y est déjà trop
grande, ou les moyennes (fondées sur les observations de 1 7 5 7 à 1 8 0 7 ) sont
un peu trop élevées, comme cela arrive souvent pour les valeurs calculées
anciennement. A Saint-Pétersbourg, le chiffre n'est pas tout à fait assez
élevé (189Zi). Enfin à Moscou , et plus loin au sud-est, il est évidemment
dépassé, et ce ne peut être que la sécheresse qui exclut l'espèce.
LIMITES POLAIRES DES ESPÈCES SPONTANÉES. 93
L'hypothèse sur laquelle j e viens de raisonner, que leRadiola commence
à végéter lorsque la température est de 6" au moins, n'est pas suffisamment
établie. J'ai essayé des hypothèses de b"" et de 7% et les chiffres
répondent aux faits presque aussi bien. Les données météorologiques ne
permettent pas de décider.
Dans le doute, et pour les régions où la sécheresse ne fait pas obstacle
à l'espèce, j e m'arrête à la règle suivante : à dater du moment où la
moyenne est de 6^ ou plus, jusqu'au moment où elle cesse de l'être, il
faut que le produit du nombre de jours écoulés par la température moyenne
de ces jours soit, de 2225^^ environ, sous le ciel nébuleux des Orcades,
ou de 2200 sous la même latitude en Suède, ou de 1 9 0 0 seulement sous le
eS'^ degré de latitude enNorwége, la longueur des jours devenant une
force nouvelle, dont la plante se ressent, même avec la lumière diffuse, à
cause des rayons chimiques du soleil.
Pour démontrer que Tinfluence de la lumière, sous ces latitudes avancées,
n'est pas une illusion de ma part, j e vais présenter les chiffres obtenus selon
les latitudes :
Duree du Somme à
Lat. plus long jour partir de tio
Wilna.. 54 1/2 li 25 7 o '
Mitau 56 , 3 9 ' 17 1/2 24 7 0
Orcades 59 18 3/4 22 2 5
Caristadt 59 1/3 18 3 / 4 22 0 0
Drontheim 63 1/4 20 1900
Moscou étant un peu plus au nord que Wilna et ayant 252Zi degrés de
somme, et Tambow (52^ 43') ayant 2639, devraient posséder l'espèce, mais
probablement la sécheresse fait obstacle dans cette direction, et surtout vers
Odessa qui offre 3356° de somme au-dessus de 6 ^ La chaleur entre l'hiver
et le commencement de la sécheresse n'est pas suffisante dans cette région
du sud-est de la Russie. J e soupçonne même, d'après le chiffre élevé de
Wilna, que déjà dans cette partie de l'empire russe la chaleur et la
lumière ne sont pas les seuls agents qui règlent la limite, et que la sécheresse
y joue un rôle.
3. ^aponaria vaccaria, L . — Voy. p. 76, et pl. II, fig. 1 .
Cette espèce fleurit, sur sa limite septentrionale, en Hanovre, par exemple,
dans les mois de juin, juillet et août; elle fructifie jusqu'en septembre (Meyer,
Chloris Hanov.^ p. 191) . La végétation pouvant se prolonger ainsi du prin-
(a) D'après Malte-Brun, Cours de géogr., v. II, p. 620.