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262 DÉLIMITATION DES ESPÈCES.
que telle ou telle espèce exige de chaleur et de lumière diffuse pour
végéter. Partant de là, toute élévation d'une espèce à une hauteur où la
température observée à l'ombre est plus faible que le chiffre nécessaire
prouvera qu'il existe des influences favorables additionnelles, savoir plus
de chaleur dans le sol, plus d'action calorifique sur les parties aériennes
des plantes, enfin plus d'action chimique de la lumière. La végétation
elle-même donnera la mesure de ces influences compliquées des rayons
du soleil, qui ne peuvent pas s'apprécier directement et complètement au
moyen des thermomètres, ni des autres appareils proposés.
Dans le chapitre II (page Í 8 ) , j'ai déjà suivi cette .marche, en calculant
la valeur de l'insolation au moyen de la différence de hauteur des
limites de plusieurs espèces sur les pentes méridionales et septentrionales
des montagnes. Dans le chapitre actuel, je pourrai appliquer la même
méthode aux limites en altitude, comparées à celles observées dans les
plaines pour les mêmes espèces. Ces deux applications de la méthode se
complètent l'une l'autre et tendent au même but,.celui d'éclairer la physiologie
au moyen des faits de la géographie botanique.
§ V. EXPOSITION.
La pente du terrain augmente singulièrement l'influence de l'exposition.
Cette circonstance, à peu près insignifiante dans la géographie botanique
des plaines, devient essentielle à considérer quand il s'agit des montagnes.
L exposition au midi reçoit, presque perpendiculairement, les rayons du
soleil au moment le plus chaud de la journée. En outre, chaque point de
la pente profite de l'abri contre les vents du nord, déterminé par les ter--
rains ou les rochers situés au-dessus. Le premier de ces effets est important
pour les régions supérieures, vu la rareté de l'air. Le second profite
surtout aux localités inférieures des chaînes de montagnes. On connaît son
importance en Italie, au pied des Alpes et des Apennins. Le résultat de
l'exposition, quant aux limites des espèces, peut être fort différent, selon
leur nature. Les plantes qui s'arrêtent sur les montagnes à cause du défaut
de chaleur, doivent s'élever davantage sur une pente bien exposée au midi;
celles qui se trouvent arrêtées par la sécheresse de certaines régions élevées,
doivent, m contraire, s'arrêter plus bas. Comme les arbres demandent
de l'humidité, les forêts sont ordinairement assez restreintes sur les
pentes méridionales. Enfin, les plantes qui ont besoin d'être couvertes de
neige en hiver, parce qu'elles redoutent les grands froids, s'élèveront peutêtre
moins haut, sur certaines montagnes, du côté du midi, où la neige fond
LIMITES SUPÉMEURES ET INFEUIEULLES DES ESPECES, 263
plus vite, et où le soleil, succédant aux gelées nocturnes, aggrave l'action du
froid. Quant aux limites inférieures des espèces, elles descendent moins
bas du côté du midi, par l'effet combiné de la chaleur et de la sécheresse, à
moins de quelque cause locale qui détruise l'effet de l'exposition.
Le côté septentrional, ou plutôt le côté tourné vers le pôle est nécessairement
moins réchauffé par le soleil et conserve mieux l'humidité dans le
terrain. Les limites d'espèces doivent s'y élever moins haut si elles tiennent
àia chaleur, plus haut si elles dépendent de l'humidité. Les limites inférieures
doivent descendre plus bas, à moins de circonstances locales exceptionnelles.
De toute manière, l'exposition doit modifier notablement les limites.
Ajoutons cependant que, d'après le cours apparent journalier du soleil
sous les divers degrés de latitude, les deux expositions se trouvent également
éclairées sous l'équateur, tandis que dans les régions tempérées, la
différence de lumière augmente. Sous l'équateur, les deux côtés d'une
montagne peuvent être, l'un desséché, l'autre humide par l'effet de
causes locales, comme la direction des vents, et dans ce cas l'exposition
est importante à observer. Dans les pays tempérés et septentrionaux,
une certaine différence d'humidité peut aussi exister; mais la diversité
d'action solaire et de chaleur y sera habituellement seule, principalement
vers le nord, où l'humidité manque rarement. Enfin, vers les
régions polaires, le soleil, pendant l'été, parcourt un grand espace de
l'horizon, de sorte que les montagnes sont éclairées de tous les côtés ; mais
la végétation ne s'élève pas dans ces pays jusqu'à une hauteur un peu
grande, où l'atmosphère présente peu d'obstacle aux rayons du soleil.
Ceux-ci sont toujours très obliques et rencontrent habituellement des vapeurs,
en sorte que la différence des expositions doit perdre beaucoup de
son importance.
En résumé, on peut s'arrêter par le raisonnement aux principes suivants,
dont la vérification se trouvera dans les faits observés :
1" L'exposition a de l'importance sous les tropiques, seulement lorsque
deux côtés d'une montagne reçoivent des pluies en quantité différente, ce
qui arrive assez souvent pour les côtés est et ouest des chaînes dirigées du
nord au sud.
2" Dans les régions tempérées, l'exposition au nord ou au midi sera
toujours essentielle à considérer. Elle prend d'autant plus d'importance
que les hauteurs que l'on considère sont plus élevées et dans une atmosphère
plus transparente. Elle en aura aussi beaucoup dans la partie inférieure,
si une chaîne est dirigée de façon à abriter contre les vents les
plus froids.
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