publia fon excellent Livre : Methodus inveniendi li-
ncas curvas maximi vd minimi proprietate gaudentes..
Dans le fupplément qui y avoit été ajoute, cet il-hif-
tre Géomètre démontre que dans les trajectoires cpie
des corps décrivent par des forces centrales, la vitef-
le multipliée par l’élement de la courbe, fait toujours
l in minimum. Ce théorème eft une belle application
du principe de M. de Maupertuis au mouvement des
planètes.
Par le Mémoire du 1 5 Avril 1744 que nous venons
de citer', on voit que les réflexions de M. de Maupertuis
fur les lois de la réfraction, l’ont conduit au
théorème dont il s’agit. On fait le principe que M,
de Fermât, de après lui M. Leibnitz, ont employé
•pour expliquer les lois de la réfra&ion. Ces grands
"Géomètres ont prétendu qu’un corpufcule de lumière
qui va d’un point à un autre entraverfant deux milieux
différens, dans chacun defquels il a une vîteffe
differente ; doit y aller dans U tems le plus court qu’il
eft poflible : 6c d’après ce principe, ils ont démontré
géométriquement que ce corpufcule ne doit pas
•aller d’un point à l’autre en lis;ne droite, mais qu’étant
arrive fur la furface qui fepare les deux milieux,
il doit changer de direction, de maniéré que le finus
-de fon incidence foit au finus de fa réfraaion, comme
fa vîteffe dans le premier milieu eft à fa vîteffe
dans le fécond; d’oii ils ont déduit la loi fi connue
du rapport confiant des Sinus, Foye^ S i n u s , Réf
r a c t io n , & c.
Cette explication, quoique fort ingénieufe, eft fusette
à une grande difficulté ; c’eft qu’il faudroit que
le corpufcule s’approchât de la perpendiculaire dans
les milieux où fa vîtefle eft moindre, 6c qui par conséquent
lui réfiftent davantage : ce qui paroît contraire
à toutes les explications méchaniques qu’on a
données jufqu’à prél'ent de la réfradlion dés corps, ■
6c en particulier de la réfraâion de la lumiïèrë.
L ’explication entre autres qu’a imaginée M. Newton
, la plus fatisfaifante de toutes celles qui ont été
données jufqu’ic i, rend parfaitement raifon du rapport
confiant des finus, en attribuant- la réffaâion
des rayons à la force attraftive des milieux-; d’où il
"s’enfuit que les milieux plus denfes, dont l’attraftion
eft plus forte, doivent approcher le rayon de la perpendiculaire
: ce qui eft en effet confirmé par l’expérience.
Or l’attra&ion du milieu ne fauroit approcher
le rayon de la perpendiculaire fans augmenter
fa vîteffe, comme on peut le démontrer aifemént :
ainfi., fuivant M. Newton, la réfra&ion doit fe faire
en s’approchant de la perpendiculaire lorfque la v îteffe
augmente; ce qui eft contraire à la loi de MM.
Fermât êc Leibnitz.
M. de Maupertuis a cherché à concilier l’explication
de M. Newton aveclesprincipesmétaphyfiques.
Au lieu de fuppofer avec MM. de Fermât 6c Leibnitz
qu’un corpufcule de.lumière va d’un point à un
‘ autre dans le plus court temspoffible, ilfuppofe qu’un
corpufcule de lumière va d’un point à un autre, de ■
maniéré que la quantité d’«c?io/z foit la moindre qu’il
eft poflible. Cette quantité $ action, dit-il, eft la
vraie dépenfe que la nature ménage. Par ce principe
philofophique, il trouve que non-feulement les finus
font en raifon confiante, mais qu’ilsfont en raifonin-
verfe des vîteffes (,cë qui s’accorde avec l’explication
de M. Newton), 6c non pas en raifon direfte, comme
le prétendoient MM. de Fermât 6c Leibnitz.
Il eft fingulier quêtant de Philofophes qui ont écrit
fur la réfraction , n’ayent pas imaginé une maniéré
' fi fimple de concilier la métaphyfique avec la mécba-
nique ; il ne falloir pour cela que faire Un affez léger
changement au calcul fondé fur le principe de M. de
Fermât. En effet, fuivant ce principe, le tems c’eft-
à:dire l’efpace divifé par la vîteffe, doit être un minimum
; de forte que fi l’on appelle £ l’efpaçepaxçouru
dans le premier milieu avec la-vîteffe F , t k e l’efpàc«
parcouru dans le fécond milieu avec la vîteffe v , ôn
aura -y + *- = à un minimum, c’eft- à-dire y- 4- d~
— 0. Qr il eft facile de voir que les finus d’incidence
& deréff aétionfont entr’eux comme d £ à — d e ; d’où
il s’enfuit que ces finus font en raifon directe des vîteffes
F v , 6c c’eft ce que prétend M. de Fermât, Mais
pour que ces finus fuflent en raifon inverfe de vîteffes
, il n’y auroit qu’à fuppofer Vd E -\-vde— 0 *
ce qui donne E x F - \ - e x = k\m m i n im u m : 6c c’eft
le principe de M. de Maupertuis. V o y e ^ M in im u m .
On peut voir dans les Mémoires de l’Académie de
Berlin, que nous avons déjà cités ; toutes les autres
applications qu’il a faites de ce même principe, qu’on
doit regarder comme un des plus généraux de la mé-
chanique.
Quelque parti qu’on prenne fur la Métaphyfique
qui lui fert de bafe, ainfi que fur la notion que M. de
Maupertuis a donnée de la quantité d ’a c tio n , il n’en
fera pas moins vrai que le produit de l’efpace par la
vîteffe eft un m in im u m dans les lois les plus générales
de la nature. Cette vérité géométrique dûe àM.
de Maupertuis, fubfiftera toujours ; 6c on pourra, fi
l’on veut, ne prendre le m o t d e q u a n ti té d 'a c t io n , que
pour une maniéré abrégée d’exprimer le produit de
l’efpace par la vîteffe. (O )
A c t io n , ( B e lle s - L e ttr e s . ) en matière d’éloquence
, fe dit de tout l’extérieur de l’Orateur, de fa: contenance,
de fa vo ix , de fongefte, qu’il doit affortir
au fujet qu’il traite.
L’a c tio n , dit Cicéron, eft pour ainfi dire l’éloquen*
ce du corps relie a deux parties, la v oix & le gefte.
L’un frappe l’oreille, l’autre les y eux ; deux lens, '
dit Quintilien, par lefquels nous faifons paffer nos
fentimens 6c nos pallions dans l’ame des auditeurs.
Chaque paflion a tin ton de v o ix, un air, un gefte
qui lui font propres ; il en eft de même des penfees
le même.tonnè convient pas à toutes les expreflions
qui fervent à les rendre.
Les anciens entendoient la même chofe par p r o n
o n c ia tio n , à laquelle Demofthene donnoit le premier
, le fécond 6c le trdifieme rang dans l’éloquenc
e , c’èft-à-dire, pour réduire fa penlee à fa jufte valeur
, qu’un difeours médiocre foûtenu de toutes les
forces 6c de toutes les grâces de Y a c tio n , fera plus
d’effet que le plus éloquent difeours qui fera dépourvu
de ce charme puiflànt.
La première chofe qu’il faut ob'ferver, c’eft d’a-
voirlatête droite, comme Cicéron lé recommande«'
La tête trop élevée;dorine un air d’arrogance ; fi elle
eft baiffée ou négligemment penchée, c’eft une marque
de timidité ou a indolence. La prudence la méttra
dans fa véritable fîtUation. Le vifagé eft'ce qui domine
le plus dans I a c tio n . Il n’y a , dit Quintilien,point
de mouvemens ni de paflions qu’il n’exprirhe : il menace,
il careffe, il ffipplie, il eft trifté, il eft gai, il
' eft humble, il marque la fierté , il fait entendre uns
infinité de chofes; Notre ame fe manifefte aiîflï par
les yeux. La joie’léiir donne de l’éclat ; la tfiftéffe les
‘ couvre d’un efpéce de nuage : ilsfohf vifs , étince-
lans dans l’indignation, bàiffés dans lahbhte, ten-
'dres 6c baignés de larmes dans la pitié.' M
Au refte l ’a c tib n des anciens étoit beaucoup plus
véhémente que celle de nos Orateurs. Çléori, général
Athénien', qui avoit une forte d’éloquènce im-
pétueufe, fut le premier chez les Grées qui donna
l’exemple d’aller 6c de venir fur la tribune en haranguant.
Il y avoit à Rome des .Orateurs qui âvoient
ce défaut ; ce qui faifoit demander pàr un certain
Virgiliusà un Rhéteur, qui fe promenoit de la' forte-
' combien de milles il avoit parcouru en déclamant en
Italie.Les Prédicateurs tiennent encore qu'eîque chofe
de cette cqptùtne, U a c t i o n d e s nôtres, quoique
§ligÊÊÊÊ^^ÊtÊÊÊltlSÊtÊÊÊSÊÊÊttÊÊÊiÊÊtÊÊÊÊÊ^ÊSâ
plus modérée que celle des Italiens, eft infiniment
•plus v ive que celle des Anglois , dont les fermons fe
réduifent à lire froidement une diflertation théologique
fur quelque point de l’Ecriture,fans aucun mouvement.
Foyc^ D é c l a m a t io n , G e s t e , Pr o n o n c
ia t io n .
A c t io n du Poème,me‘ q *) c Ç1
Po e m e & Ép o p é e .
A c t io n dans la ; Foye%\ T r a g é d ie & D r a -
\FoyeA 1
Tragédie. J b MATIQUE.
A c t io n en Poèjïe, ce qui fait le fujet ou la matière
d’un poëme.
On en diftingue de deux fortes : l’action principale,
.qu’on nomme proprement action ou fable ( F>ye%_ Fa b
l e ) ; 6c l’action incidente, qu’on appelle autrement
épifode. Voye1 E p is o d e & E p is o d iq u e . Nous ne
traiterons que de la première.
Comme le grand poëme fe divife en épique 6c en
dramatique, chacune de ces efpeces a aufli fon action
particulière. Celle du poëme dramatique doit
etre une , intriguée , dénouée , & complété , 6c d’une
durée beaucoup moindre que celle qu’on donne à
Vaction du poeme épique. Foye^D r a m a t iq u e , I n t
r ig u e ,D é n o u e m e n t ,U n it é ,T r a g é d ie , & c.
U action du poëme épique doit être grande, une ,
entiçre, merveilleufe, 6c d’une certaine durée.
i° . Elle doit être grande , c’eft-à-dire , noble 6c
intéreffante. Une avanture commune, ordinaire, ne
fourniffant pas de fon propre fonds des inftruftions
que fe propofe le poëme epique , il faut que l’action
foit importante 6c héroïque. Ainfi dans l’Enéide, un
héros échappé des ruines de fa patrie , erre long-
tems. avec les reftes de fes concitoyens qui l’ont
choifi pour roi ; 6c malgré la colere de Junon qui le
pourfuit fans relâche, il arrive dans un pays que lui
promettoient les deftins, y défait des ennemis redoutables
; 6c après mille travérfes furmontées avec
autant de fageflë que de valeur, il y jette lès fonde-
mens d’un puiffant empire. Ainfi la conquête de Jé-
rufalem par les Croifés ; celle des Indes par les Portugais
; la réduction de Paris par Henri le Grand,
malgré les efforts de la Ligue, font le fujet des poë-
mes du T affe, du Camoens, 6c de M. de Voltaire ;
d’où il eft aifé de conclure qu’une hiftoriette, une intrigue
amoureufe, ou telle autre avanture qui fait le
fonds de nos romans , ne peut jamais devenir la matière
d’un poëme épique, qui veut dans le fujet de la
robleffe 6c de la majefté.
Il y a deux maniérés de rendre l’action épique in-
îérefl’ante : la première par la dignité 6c l’importance
des perfonnages. C ’eft la feule dont Homere faffe
iifàge, n’y ayant rien d’ailleurs d’important dans les
modèles -, 6c qui ne puifle arriver à des perfonnages
ordinaires. La fécondé - eft l’importance de l ’action
en elle-même, comme l’établiflèment ou l’abolition
d’une religion ou d’un état, tel qu’eft le fujet choifi
par Virgile, qui en ce point l’emporte fur Homere.
L ’action de la Henriade réunit dans un haut degré ce
double intérêt.
Le P. le Boffu ajoute une troifieme maniere de jet-
ter de l’intérêt dans l’action; fa v o ir , de donner aux
lefteurs une plus haute idée des perfonnages du poëme
que celle qu’on fe fait ordinairement des hommes,
& cela en comparant les héros du poëme avec les
hommes du fieclé préfent. Foye{ Héros & C aractère..
z ° . U action doit être une, c’eft-à-dire, que le poëte
doit fe borner à une feule 6c unique entreprife illustre
exécutée par fon héros, 6c ne pas embraffer l’hif-
toire de fa vie toute entière. L’Iliade n’eft que l’hif- •
toire de la colere d’Achille ; 6c l’Odyfféè*, que celle
du retour d’Ulyffe à Itaque. Homere n’a voulu dé-
crireni toute la vie de ce dernier ,-hi toute la guerre
4« Troie. Stace au contraire, dansfon Achillcide, 6c
Tome I. 1
Lucain dans fa Pharfale 3 ont entaffé trop d’évene-
mens découfiis pour que leurs ouvrages méritent le
nom de poèmes épiques, On leur donne celui d'hérob
ques, parce qu’il s’y agit de héros. Mais il faut pren-
dre garde que l’unité du héros ne fait pas l’unité de
l’action. La vie de l’homme eft pleine d’inégalités ; il
change fans ceffe de deffein, ou par l’inconftance de
fes paflions, ou par les accidens imprévus de la vie.
Qui voudroit décrire tout l’homme, ne formeroit
qu un tableau bifarre, un contrafte de paflions op-
pofées fans liaifon 6c fans ordre. C’eft pourquoi l’é-
popee n’eft pas la loiiange d’un héros qu’on le propofe
pour modèle, mais le récit d’une action grande
6c illuftre qu’on donne pour exemple.
Il en eft de la Poéfie comme de la Peinture. L’unité
de l’action principale n’empêche pas qu’on n’y
mette plufieurs incidens particuliers, ôc cesincidenS
fe nomment épifodes. Le deffein eft formé dès le commencement
du poëme, le héros en vient à bout en
franchiffant tous les obftacles : c’eft le récit de ces
oppofitions qui fait les épifodes, mais tous ces épifodes
dépendent de faction principale, 6c font tellement
liés avec elle 6c fi unis entr’eu x, qu’on ne perd
jamais de vue ni le héros, ni faction que le poëte s’eft
propolé de chanter. Au moins doit-on lui vre inviola-
blement cette réglé , fi l’on veut que l’unité faction
foit confervée, Difeours fur le Poème épiqiie à la tête
duTélemaq. p. 12. & 13. Princip,pour la lecl. des Poètes
, tom. II. p . 10 9 .
3°'. Pour l’intégrité de l’action, il faut, félon Arif-
tote , qu’il y ait un commencement, un milieu, 6c
une fin : precepte en loi - même affez obfcur , mais
que le P. le Boffu développe de la forte. « Le com-
» mencement, dit-il, ce lont les ca-ufes qui influeront
» (ux une action, 6c la réfolution que quelqu’un prend
» de la faire ; le milieu, ce font les effets de ces cau-
» fes,6cles difficultés qui en trâverfent l’exécution;
» 6c la fin, c’eft le dénouement 6c la cefiàtion de ces
» difficultés.
» Le poëte ,* ajoute le même a u te u rd o it corn-
« mencer fon action de maniéré qu’il mette le lecteur
» en état d’entendre tout ce qui fuivra , 6c que de
» plus ce commencement exige néceflàirement une
» fuite. Ces deux mêmes principes pris d’une ma-
» niere inverfe, auront aufli lieu pour la fin ; c’eft-
» à-dire, qu’il faudra que la fin rie laiffe plus rieh à
» attendre, 6c qu’elle foit néceffairement la fuite de
» quelque choie qui aura précédé : enfin il faudra
» que le commencement foit lié à la fin par le milieu,
» qui eft l’effet de quelque chofe quia précédé, 6c la
» caufe de ce qui va fuivre ».
Dans les caufes d’une action on remarque deux
plans oppofés. Le premier 6C le principal eft celui
du héros : lê fécond comprend les deffeins qui nui-
fent au projet du héros. Ces caufes oppofées pro-
duifent aufli des effets contraires ; favoir, des efforts
de la part du héros pour exécuter fon plan, 6c des
efforts contraires de la part de ceux qui le traverfènt :
comme les caufes 6c les deffeins , tant du héros que
des autres perfonnages du poëme, forment le commencement
de l’action, les efforts contraires en forment
le milieu. C ’eft-là que fe forme le noeud ou l’intrigue,
en quoi confifte la plus grande partie du poëme.
Foye[ Intrigue , Noeud.
La folution des obftacles eft ce qui fait le dénouement
, 6c ce dénouement peut fe pratiquer .de deux
maniérés, ou par une reconnoifl’ance , ou fans re-
connoifiance ; ce qui n’a lieu que dans la tragédie.
Mais dans le poëme épique, les différens effets que
le dénouement produit, 6c les divers états dans lesquels
il laiffe les perfonnages du poëme, partagent
faction en autant de branches. S’il change le fort des
principaux perfonnages, on dit qu’il y à péripétie, 6C
alors l’action eft implexe, S’il n’y a pas de péripétie ,