Voulez, un peu plus de longueur à celles dii mûrier
& de l’amandier ; en général aux racines de tout arbre
qui les aura ou fort molles ou fort feches» D eu x,
trois ou quatre pouces de longueur fuffiront aux racines
moins importantes que les racines maîtreffes»
C ’eft affez d’un feul étage de racines, fur-tout fi elles
font bien placées. Des racines font bien placées,
quand elles fe diftribuent du pié circulairement, 6c
laiffant entr’elles à-peu-près des intervalles égaux,
enforte que les arbres fe tiendroient droits fans être
plantés, fur-tout pour ceux qui font deftinés au plein
vent ; cette condition n’eft pas néceffaire pour les
autres. Ce que nous venons de dire du choix & de
la préparation, fe réduit à un petit nombre de réglés
fi fimples, que celui qui les aura mifes en pratique
quelquefois fera auffi avancé que le jardinier le plus
expérimenté»
30. De la maniéré de planter les arbres. Commencez
par préparer la terre : faites-y des trous plus ou moins
grands , félon qu’elle eft plus ou moins feche. Ils ont
ordinairement fix piés en quarré dans les meilleurs
fonds ; deux piés de profondeur fuffifent pour les poiriers.
Séparez la mauvaife terre de la bonne, & ne
laiffez que celle-ci. Il eft très-avantageux de laiffer
le trou ouvert pendant plufieurs mois. Labourez le
fond du trou : remettez-y d’excellente terre à la hauteu
r d’un p ié, & par-deffus cette terre une couche
d’un demi-pié de fumier bien pourri : mêlez la terre
& le fumier par deux autres labours : remettez en-
fuite un fécond lit de bonne terre, un fécond lit de
fumier, 6c continuez ainfi, obfervant à chaque fois
de mêler la terre 6c le fumier par des labours.
Si la terre eft htimide 6c n’ a pas grand fond, on
n’y fera point de trou ; c’eft affez de l’engraiffer &
de la labourer. Après cette façon on y placera les arbres
fans les enfoncer, & l’on recouvrira les racines
à la hauteur d’un pié & demi, & à la diftance de quatre
à cinq en tous fens, avec de la terre de gafon bien
hachée-: enfoncez votre arbre plus avant, fi votre loi
eft fec 6c fablonneux. Si vous appliquez un efpalier
à un mur, que votre trou foit de huit piés de large
fur trois de profondeur, 6c à un demi-pié du mur.
Retenez bien encore les réglés fuivantes. Le tems
de planter eft , comme l’on fait, depuis la fin d’Oc-
tobre jufqu’à la mi-Mars. Dans cet intervalle, choi-
fiffez un jour fec 6c doux : plantez volontiers dès
la faint Martin , dans les terres feches 6c legeres ,
attendez Février, & n e plantez que fur la fin de ce
mois, fi vos terres font froides & humides : laiffez
entre vos arbres, foit efpaliers , foit buiffons, foit arbres
de tige, la diftance convenable : reglez à chaque
efpece fon canton, 6c dans ce canton la place à chacun
en particulier : difpofez vos trous au cordeau :
faites porter chaque arbre près de fon trou ; plantez
d’abord ceux des angles, afin qu’ils vous fervent d’alignement
; paffez enfuite à ceux d’une même rangée
; qu’un ouvrier s’occupe à couvrir les racines à
rnefure que vous planterez ; plantez haut 6c droit ;
n’oubliez pas de tourner les racines vers la bonne
terre ; fi vous plantez.au bord d’une allée, que vos
principales racines regardent le côté oppofé. Quand
vos arbres feront plantés, faites mettre deux ou trois
pouces de fumier fur chaque pié ; recouvrez ce lit
•d’unpeu de terre. Au défaut de fumier, fervez-vous
de méchantes herbes arrachées. Si la faifon eft feche
pendant les premiers mois d’A v r il, de Mai & Juin,
on donnera tous les quinze jours une cruchée d’eau
à chaque pié ; & afin que le pié profite de cette eau,
on pratiquera à l’entour un fillon qui la retienne.
Vous aurez l’attention de faire trépigner la terre de
vos petits arbres ; vos efpaliers auront la tête penchée
vers la muraille : quant à la diftance, c ’eft à la
^qualité de la terre à la déterminer; on laiffe depuis
çinq à fix piés jufqu’à dix, onze, douze entre les
elpafiers ; depuis huit à neuf jufqu’à douze entre les
buiffons, 6c depuis quatre toifes jufqu’à fept à huit
entre les grands arbres. Il faut dans les bonnes terres
laiffer plus d’efpace entre les arbres que dans les mau-
vaifes , parce que les têtes prennent plus d’étendue*
Les arbres qui jettent plus de bois, comme les pêchers
, les poiriers 6c les abricotiers, demandent auflt
plus d’efpace» Si on cultive la terre qui eft entre les
arbres, on éloignera les arbres les uns des autres de
huit à dix toifes, fur-tout fi ce font des poiriers ou
des pommiers ; fi on ne la cultive pas, quatre à cinq
toifes en tous fens fuffiront à chaque arbre. Laiffez
trois toifes ou environ entre les fruitiers à noyau,
foit en tige, foit en buiffon, fur-tout fi ce font des
cerifiers 6c des bigarotiers plantés fur merifiers ; s’ils
ont été greffés fur d’autres cerifiers déraciné, ne les
efpacez qu’à douze ou quinze piés. Les poiriers fur
coignaffiers plantés en buiffon , fe difpofent de douze
en douze piés, à moins que les terres ne foient très-
humides ; dans ce cas on les éloigne de quinze en
quinze piés. Il faut donner dix-huit piés aux poiriers
6c pommiers entés fut le franc , & plantés dans des
terres légères & fablonneufes ; vous leur en donnerez
vingt-quatre dans les terres graffes & humides :
c’eft affez de neuf piés pour les pommiers entés fur
paradis, fi l’on en fait un plan de plufieurs allées ;
c’eft trop fi on n’en a qu’une feule rangée : il ne leur
faut alors que fix piés. Donnez aux pêchers, abricotiers
& pruniers en efpalier, quinze piés dans les ter*
res légères, dix-huit piés dans les terres fortes ; aux
poiriers en efpalier huit ou dix p iés, félon la terre
Ne mettez jamais en contre-efpaliers, ni bergamotes,
ni bons-chrétiens, ni petit mufeat. On peut mêler des
pêchers de quatre piés de tige, ou environ de quinze
en quinze piés , aux mufeats mis en efpalier ; mais-
que les pêchers que vous entre mêlerez ainfi, foient
plantés fur d’autres pêchers : on peut fe fervir en
même cas de poiriers greffés fur coignaffiers,. pourvu
qu’ils ayent quatre piés, dé tige. Les châtaigniers, les
noyers, les pommiers 6c les poiriers mis en avenues ,
en allées & e n routes , demandent une diftance de
quatre, cinq ou fix toifes, félon la terre ; les ormes
6c les tilleuls deux ou trois toifes ; les chênes 6c les
hêtres neuf à dix piés ; les pins 6c les fapins quatre à
cinq toifes. Quant aux expofitions, nous observerons
en général que la plus favorable dans notre climat
eft le m idi, 6c la plus mauvaife le nord ; que
dans les terres chaudes le levant n’eft guere moins
bon que le midi ; enfin que le couchant n’eft pas mauvais
pour les pêches, les prunes, les poires, &c. mais
qu’il ne vaut rien pour les mufeats, les chaffelats 6c
la vigne. ,
4°. De la multiplication des arbres, & de leur taille*
Nous renvoyons le détail de ces deux articles, l’un à
Varticle T a il l e , l’autre aux articles Pl a n t e , VÉGÉTATION
, VÉGÉTAL, & même à l’article A n im a l ,.
où l’on trouvera quelques obfervations relatives à ce
fujet. Voye^ aujji les articles GREFFE , MARCOTTE ,
B o u r g e o n , Pin c e r , Pin c e m e n t , £ c.
5q . De Ventretien des arbres. Otez aux vieux arbres
les vieilles écorces jufqu’au v if, avec la ferpe ou une
bêche bien tranchante ; déchargez-les du trop de
bois vers le milieu de Février ; coupez-leur la tête à
un pié au-deffus dès fourches pour les rajeunir ; faites
en autant à vos efpaliers, contre-efpaliers, 6c
buiffons fur coignaffier & fur franc. Quand ils font
vieux ou malades, ce que vous reeonnoîtrez à la
couleur jaune de la feuille, faites-leur un cataplafme
de forte terre, de crotinde cheval .ou deboufe de vache
, bien liés enfemble. Quand on coupe des branches
, il faut toûjours les couper près du corps de
Y arbre. Pour cet effet ayez un fermoir, voye^ Fer m
o ir . Il y en a qui fur les greffes en fentes & fur le9
plaies des arbres, aiment mieux appliquer un mêlant
ge d’un tiers de ciré, d’un tiers de poix réfinë, d’un
tiers de fuif, le tout fondu enfemble. S’il eft nécef-
faire de fumer les grands arbres greffés fur franc, fai-
tesdes déchauffer au mois de Novembre d’un demi-
pié de profondeur fur quatre à cinq piés dé tou r, félon
leur groffeur ; répandez fiir cet efpace un demi-
pié de haut dé fumier bien gras & bien pourri : mais
à la diftance d’un pié de la tige , & un mois après remettez
la terre fur le fumier en mettant le galon en-
deffous. Il y en a qui fe contentent de les dé chauffer
en Décembre ou Novembre, & de les rechauffer en
Mars, ne leur procurant d’autre engrais que celui de
la faifon. N’oubliez pas de nettoyer la moufle des arbres
quand il aura plu : cette moufle eft une galle qui
les dévore*
Si le Naturalifte a fes diftributions d'arbres, le Jardinier
a auffi les tiennes. Il partage les arbres en fau-
vages qui ne font point cultivés, 6c en domeftiques qui
le font ; cette diftribution eft relative àl’avantage que
nous en tirons pour la nourriture. En voici une autre
qui eft tirée de l’origine des arbres. Il appelle arbre
de brin, celui qui vient d’une graine 6c où le coeur du
bois eft entier ; & arbre ie feiage, celui qui n’eft qu’une
piece d’arbre refendu , où il n’y a qu’une partie du
coeur, où l’on n’apperçoit même cette partie qu’à un
angle» Il donne le nom de croffette à celui qui vient de
marcotte; de taillis à celui qui croît fur louche; s’il
confidere les arbres par rapport à leur grandeur, il appelle
les plus élevés , arbres de haute futaie ; ceux qui
le font moins, arbres de moyenne futaie ; ceux qui font
au-deffous de ceux-ci, arbres taillis. Joint-il dans fon
examen l’utilité à la grandeur, il aura des arbres fruitiers
de haute tige 6c de baffe tige ou nains, & des arbres
fruitiers en buiffons; des arbrijjeaux ou frutex; &
des arbufies oufous-arbriffeaux, fuffrutex. S’attache-t-il
feulement à certaines propriétés particulières, il dit
que les pêchers fe metten t en efpaliers ; que les poiriers
forment des vergers ; que les pommiers donnent
dtspommiraies ; que les abricotiers font en plein-vent ;
que les châtaigniers font les ckâtaigheries ; les ceri-
liers, les cerifaies ; les faules, les fauffaies ; les ofiers,
les ojeraies ; les ormes, les charmes, les tilleuls, les
maronniers, les hêtres, les allées ; les charmilles 6c
les érables, les paliffades ; les chênes & tous les autres
arbres, les bois. Quelle foule de dénominations
ne verra-t*on pas naître, fil5n vient à confidérer les
arbres coupés & employés dans la vie civile ! Mais
Varbre coupé change de nom ; il s’appelle alors bois.
Voyeç Bois.
Des arbres en paliffades. Les efpaliers fe paliffent à
la mi-Mai. On les paliffe encore en Juillet, pour ex-
pofer davantage les fruits au foleil. Voy e^Pa l is s e r
& Pa l is s a d e s .
Des arbres à haute-tige. Il faut les placer à l’abri des
vents du midi, parce qu’au mois de Septembre, ces
vents les dépouillent de leurs fruits. Pour faire un
plant de ces arbres, il faut choifir un terrein qui ne
l'oit point battu des vents, ni mouillé d’eaux crou-
piffantes, & chercher la quantité d'arbres néceffaires
pour l’étendue du terrein, ce qu’on obtiendra parles
premières réglés de l’Arpentage & de la Géométrie ;
vous diviferez enfuite votre terrein ; vous marquerez
l’endroit 6c l’étendue de.s trous, 6c vous achèverez
votre plant, comme nous l’avons dit ci-deffus : mais
comme les arbres paffent ordinairement de la pépinière
dans le plant, il y a quelques obfervations à
faire fur la maniéré de déplanter les arbres.
Marquez dans votre pépinière avec une coutile
. ronde les arbres que vous voulez faire déplanter ;
marquëz-les tous du côté du midi, afin de les orienter
de la même façon, car on prétend que cette précaution
eft utile ; marquez fur du parchemin la qualité
de Y arbre 6c du fruit ; attachez-y cette étiquette,
6c faites arracher. Pour procédera cette opération,
levez prudemment 6c fans offenfer les racines , la
première terre; prenez enfuite une fourche ; émouvez
avec cette fourche la terre plus profonde : vui-
dez cette terre émue avec la pelle ferrée ; ménagez
toûjours lès racines. Cernez autant que vous le pourrez
; plus votre cerne fera ample , moins vous rif»
querez. Quand vous aurez bien découvert les racines
, vous les féparerez de celles qui appartiennent
aux arbres voifins ; vous vous affocierez enfuite deux
autres ouvriers ; vous agiterez toUs enfemble Y arbre
& l’arracherez. S’il y a quelques racines qui réfiftent,
vous les couperez avec un fermoir bien tranchant.
C’eft dans cette opération que l’on fent combien il
eft important d’avoir laiffé entre ces arbres une jufte
diftance.
Arbre de haut ou de plein vent, arbre de tige ou en
plein air. Toutes ces expreffions font fynonymes,
& défignent un arbre qui s’élève naturellement fort
haut & qu’on ne rabaiffe point. Il y a des fruits qui
font meilleurs en plein vent qu’en buiffon ou en
efpalier.
Arbre nain ou en buiffon : c’eft celui qu’on tient
bas auquel on ne laiffe que demi-pié de tige. On l’étage
en-dedans, afin que la fève fe jettant en-dehors,
fes branches s’étendent de côté, 6c forment une boule
ou buiffon arrondi.
Arbre en efpalier : c’eft celui dont les branches font
étendues 6c attachées contre des murailles, & qu’on
a taillé à main ouverte ou à plat ; il y a auffi des
efpaliers en plein air : ils font cependant taillés à
plat, 6c prennent l’air fur deux faces ; mais leurs
branches font foutenues par des échalas difpofés en
raquette.
Arbre fur franc : ce font ceux qui ont été greffés
für des fauvageons venus de pépins, ou venus de
boutures dans le voifinage d’autres fauvageons ; ainfi
on dit, un poirier greffefur franc , &c.
Arbres en contre-efpalier ou haies d'appui : ce font
des arbres plantés fur une ligne parallele à des efpa-
liers.
Obfervations particulières fur les arbres. t° . La racine
des arbres, même de toute plante en général, en
eft comme l’eftomac ; c’ eft-là que fe fait la première
& principale préparation du fuc. De-là il paffe, du
moins pour la plus grande partie, dans les vaiffeaux
de l’écorce, 6c y reçpit une nouvelle digeftion. Les
arbres creufés 6c cariés, à qui il ne refte de bois dans
leurs troncs que ce qu’il en faut précifément pour
foûtenir l’écorce , 6c qui cependant vivent & pro-
duifent, prouvent affez combien l’écorce eft plus im-
portante que la partie ligneufe.
20. Les arbres dont les chenilles ont rongé IesfeuiT*
les , n’ont point de fruit cette année , quoiqu’ils
ayent porté des fleurs, ou du moins n’ont que des
avortons : donc les feuilles contribuent à la perfection
du fuc nourricier. Hiß. de l ’Acad. pag. S i. an.
BHB
Les deux propofitions précédentes font de M. de
Réaumur : mais la première paroît contredite par
deux obfervations rapportées. Hiß.de ÜAcad. 1709.
pag. S i. En Languedoc, dit M. Magnol, on ente les
oliviers en écuffon, au mois de Mai, quand ils commencent
d’être en fève, au tronc ou aux groffes branches.
Alors on coupe l’écorce d’environ trois ou quatre
doigts tout autour du tronc ou des branches, un
peu au-deffus de l’ente ; de forte que le bois ou corps
ligneux eft découvert, & que Y arbre ne peut recevoir
de nourriture par l’écorce. Il ne perd pourtant
pas encore fes feuilles ; elles font nourries par le
fuc qui eft déjà monté. Ce qu’il y a de remarquable
, c’eft que Y arbre porte dans cette année desfleurs
& des fruits au double de ce qu’il avoit coûtume
d’en porter. Enfüite les branches au-deffus de l’en* |