relâchement des fibres en tems de pluie. U air fec
produit le contraire. Le relâchement des fibres dans
les endroits oh la circulation du fang eft imparfaite,
comme dans les cicatrices 8c dans les parties luxées
ou contufes, caufe de grandes douleurs. M. Formey.
Un des exemples de l’efficacité merveilleufe de
Y air, c’eft qu’il peut changer les deux régnés, l’animal
& le végétal, l’un en l’autre. Voye{ Animal , &c.
En effet, il- paroît que c’eft de Yair que procédé
toute la corruption naturelle 8c l’altération des fubf-
tances ; & les métaux, 8c fingulierement l’or, ne font
durables & incorruptibles que parce que Y air ne les
fauroit pénétrer. C’eft la raifon pourquoi on a vû des
noms écrits dans le fable ou dans la pouffiere fur de
hautes montagnes, fe lire encore bien diftinûement
au bout de quarante ans, fans avoir été aucunement
défigurés ou effacés. Voye[ Corruption , Altération
, &c.
Quoique Y air foit un fluide fort délié, il ne pénétré
pourtant pas toutes fortes de corps. Il ne pénétré pas,
comme nous venons de dire , les métaux : il en eft
même quelques-uns qu’il ne pénétré pas , quoique
leur épaiffeur ne foit que de ■— de.pouce ; il pafferoit
à-travers le plomb, s’il n’étoit battu à coups de marteau
: il ne traverfe pas non plus le verre, ni les pierres
dures & folides, ni la cire, ni la p oix, la réfine,
le fuif & la graille ; mais il s’infinue dans toutes fortes
de bois, quelque durs qu’ils puiffent être. Il paffe à-
travers le cuir fec de brebis, de veau, le parchemin
fec, la toile feche, le papier blanc, bleu ou gris, &
une veffie de cochon tournée à l’envers ; mais lorfque
le cuir, le papier, le parchemin ou la veffie fe trouvent
pénétrés d’eau , ou imbibés d’huile ou de graille,
Y air ne paffe plus alors à-travers : il pénétré auffi
bien plus facilement le bois fec que celui qui eft encore
verd ou humide. Cependant lorfque Y air eft dilaté
jufqu’à un certain point, il ne paffe plus alors à-
travers les pores de toutes fortes de bois. Muffch.
Venons aux effets que les différentes fubftances
mêlées dans Y air produifent fur les corps inanimés.
Uair n’agit pas uniquement en conféquence de fa pe-
fanteur 8c de fon élafticité ; il a encore une infinité
d’autres effets, qui réfultent des différens ingrédiens
qui y font confondus.
Ainfi, i°. non-feulement il diffout 8c atténue les
corps par fa preffion 8c fon froiffement, mais auffi
comme étant un cahos qui contient toutes fortes de
menftrues, 8c qui conféquemment trouve par-tout à
diffoudre quelque forte de corps. V. Dissolution.
On fait que le fer 8c le cuivre fe diffolvent aifé-
ment & fe rouillent à Y air, à moins qu’on ne les ga-
rantiffe en les enduifant d’huile. Boerhaave affûre
avoir vû des barres de fer tellement rongées par Y air,
qu’on les pouvoit mettre en poudre fous les doigts.
Pour le cuivre, il fe convertit à Y air en une fubftance
à-peu-près femblable au verd-de-gris qu’on fait avec
le vinaigre. Voyei Fer , Cuivre , Verd-de-gris ,
Rouille, & c.
M. Boyle rapporte que dans les régions méridionales
de l’Angleterre les canons fe rouillent fi promptement
, qu’au bout de quelques années qu’ils font
reftés expofés à Y air, on en enleve une quantité con-
fidérable de crocus de Mars.
Acofta ajoûte que dans le Pérou Yair diffout le
plomb, & le rend beaucoup plus lourd j cependant
l’or paffe généralement pour ne pouvoir être diffous
par Y air, parce qu’il ne contrafte jamais dérouillé,
quelque long-tems qu’on l’y laiffe expofé. La raifon
en eft que le fel marin, qui eft le fel menftrue capable
d’agir fur l’or, étant très-difficile à volatilifer
il n’y en a qu’une très-petite quantité-dans Y air, à proportion
des autres fubftances. Dans les laboratoires
de Chimie, oh l’on prépare l’eau régale, Y air étant
imprégné d’une grande quantité de ce fe l, l’or y
contra&e de la rouille comme les autres métaux.’
V?yeç O r , &c.
Les pierres même fubiffent le fort commun aux
métaux : ainfi en Angleterre on voit s’amollir & tom«
ber en pouffiere la pierre de Purbec , dont eft bâtie
la cathédrale de Salisbury ; 8c M. Boyle dit la même
chofe de la pierre de Blacaington. Voye^ Pierre.
Il ajoûte que Y air travaille confidérablement fur
le vitriol, même lorfque le feu n’a plus à y mordre.
Le même auteur a trouvé que les fumées d’une liqueur
corrofive agiffoient plus promptement 8c plus
manifeftement fur un métal expofé à Y air que ne
faifoit la liqueur elle-même fur le même métal, qui
n’étoit pas en plein air.
2°. L’air vplatilife les corps fixes : par exemple
fi l’on calcine du fel, 8c qu’on le fonde enfuite,
qu’on le feche 8c qu’on le refonde encore , & ainfi
de fuite plufieurs fois, à la fin il fe trouvera tout-à-
fait évaporé, 8c il ne reftera au fond du vafe qu’un
peu de terre. Voye{ Volatil, Volatilisation,
& c .
Van-Helmont fait un grand fecret de Chimie de
volatilifer le fel fixe de tartre ; mais Y air tout feul
fuffit pour cela : car fi l’on expofe un peu de ce fel
à Y air dans un endroit rempli de vapeurs acides, le
fel tire à lui tout l’acide ; 8c quand il s’en eft foulé, il
fe volatilife. Voye{ T artre, &c.
3®. Uairûxe auffi les corps volatils : ainfi quoique
le nitre ou l’eau-forte s’évaporent promptement au
feu, cependant s’il y a près du feu de l’urine putréfiée
, l’efprit volatil fe fixera 8c tombera au fond.
4°. Ajoûtez que l’air met en a&ion les corps qui
font en repos, c’eft-à-dire qu’il excite leurs facultés
cachées. Si donc il fe répand dans Y air une vapeur
acide, tous les corps dont cette vapeur eft le menfi-
true en étant diffous, font mis dans un éfat propre à
l’aétion. Voyei Acide, &c.
En Chimie il n’eft point du tout indifférent qu’un
procédé fe faffe à Yair ou hors de Yair, ou même à
un..air ouvert, ou à un air enfermé. Ainfi le camphre
brûlé dans un vaiffeau fermé, fe met tout en fels ; au
lieu que fi pendant le procédé on découvre le vaiffeau
, 8c qu’on en approche une bougie , il fe diffi-
pera tout en fumée. De même pour faire du foufre
inflammable, il faut un air libre. Dans une cucur-
bite fermée on pourroit le fublimer jufqu’à mille fois
fans qu’il prît feu. Si l’on met du foufre fous une cio*
che de verre avec du feu deffous, il s’y élevera un
efprit de foufre ; mais s’il y a la moindre fente à la
cloche par oh l’air enfermé puiffe avoir communication
avec Y air extérieur, le foufre s’enflammera auffi*
tôt. Une once de charbon de bois enfermée dans un
creufet bien luté, y reftera fans déchet pendant quatorze
ou quinze jours à la chaleur d’un fourneau toû-
jours au feu ; tandis que la millième partie du feu
qu’on y a confumé, Fauroit mis en cendres dans un
air libre. Van-Helmont ajoûte que pendant tout ce
tems-là le charbon ne perd pas même fa couleur noi- •
r e , mais que s’il s’y introduit un peu d'air, il tombe
auffi-tôt en cendres blanches. II faut dire la même
chofe de toutes les fubftances animales 8c végétales
qu’on ne fauroit calciner qu’à feu ouvert, 8c qui
dans des vaiffeaux fermés ne peuvent être réduits
qu’en charbons noirs.
L’air peut produire une infinité de changemens
dans les fubftances, non-feulement par rapport à fes
propriétés méchaniques, fa gravité, fa denfité, &c.
mais auffi à caufe des fubftances hétérogènes qui y
font mêlées. Par exemple, dans un endroit oh il p
a beaucoup de marcaffites, Y air eft imprégné d’un
fel vitriolique mordicant, qui gâte tout ce qui eft
fur terre en cet endroit, 8c fe voit fouvent à terre en
forme d’efflorefcence blanchâtre. A Fahlun en Suède
, ville connue par fes mines de cuivre, qui lui ont
fait auffi donner le nom de Copperberg, les exha*
laifons minérales affe&ent Yair fi fenfiblement, que
la monnoie d’argent 8c de cuivre qu’on a dans la
poche en change de couleur. M. Bayle apprit d’un
bourgeois qui avoit du bien dans cet endroit, qu’au-
deffus des veines de métaux 8c de minéraux qui y
font, on voyoit fouvent s’élever des efpeces de colonnes
de fumée, dont quelques-unes n’avoient point
du tout d’odeur, d’autres en avoient une très-mau-
vaife, 8c quelques-unes en avoient une agréable.
Dans la Carniole, 8c ailleurs, oh il y a des mines,
Y air devient de tems en tems fort mal-fain j d’oh il
arrive de fréquentes maladies épidémiques , &c. Ajoûtons que les mines qui Bonne-Efpérance, erivoyentf odne tf iv hooifrirniebsl edsu v acpape udres
d’arfenic dont il y a quantité, qu’aucun animal ne
fauroit vivre dans le voifinage ; 8c que dès qu’on les
a tenues quelque tems ouvertes, on eft obligé de les
refermer.
On obferve la même chofe dans les végétaux :
ainfi lorfque les Hollandois eurent fait abattre tous
les girofliers dont l’île deTernate étoit toute remplie
, afin de porter plus haut le prix des clous de girofle
, il en réfulta un changement dans Y air qui fit
bien voir combien étoient falutaires dans cette île
les corpufcules qui s’échappoient de l’arbre 8c de fes
fleurs : car auffi-tôt après que les girofliers eurent été
coupés, on ne vit plus que maladies dans toute l’île.
Un médecin qui étoit fur les lieux, 8c qui a rapporté
ce fait à M. B o y le , attribue ces maladies aux exha-
laifons nuifibles d’un volcan qui eft dans cette île ,
lefquelles vraiffemblablement étoient corrigées par
les corpufcules aromatiques que répandoient dans
Y air les girofliers.
L’air contribue auffi aux changemens qui arrivent
d’une faifon à l’autre dans le cours de l’année. Ainfi
dans l’hyver la terre n’envoye guere d’émanations
au-deffus de fa furface, par la raifon que fes pores
font bouchés par la gelée ou couverts de neige. Or
pendant tout ce tems la chaleur foûterraine ne laiffe
pas d’agir au-dedans, 8c d’y faire un fond dont elle
le décharge au printems. C ’eft pour cela que la même
graine femée dans l’automne 8c dans le printems,
dans un même fol 8c par un tems également chaud,
viendra pourtant tout différemment. C ’eft encore
pour cette raifon que Feau de la pluie ramaffée dans
le printems, a une vertu particulière pour le froment,
qui y ayant trempé, en produit une beaucoup
plus grande quantité qu’il n’auroitfait fans cela. C ’eft
auffi pourquoi il arrive d’ordinaire, comme onl’ob-
ferve affez conftamment,qu’un hyver rude eft fuivi
d’un printems humide 8c d’un bon été.
De plus, depuis le folftice d’hyver jufqu’à celui
d’été, les rayons du foleil donnant toûjoursde plus
en plus perpendiculairement, leur aétion fur la fur-
face de la terre acquiert de jour en jour une nouvelle
force , au moyen de laquelle ils relâchent,
amolliffent 8c putréfient de plus en plus la glebe ou
le fol, jufqu’à ce que le foleil foit arrivé au tropique
, oh avec la force d’un agent chimique, il réfoud
les parties fuperficielles de la terre en leurs principes,
c ’eft-à-dire en eau, en huile, en fels, &c. qui
s’élèvent dans l’atmofphere. Voye^ Chaleur.
Voilà comme fe forment les météores qui ne font
que des émanations de ces corpufcules répandus dans
Y air. Voyt{ MÉTÉORE.
Ces météores ont des effets très-confidérables fur
Y air. Ainfi, comme on fait, le tonnerre fait fermenter
les liqueurs. Voye^ T onnerre, Fermentatio
n , &c.
En effet tout ce qui produit du changement dans
le degré de chaleur de l’atmofphere, doit auffi en produire
dans la matière de Y air. M. Boyle v a plus loin
fur cet article, 8c prétend que les fels 8c autres fub-
Tome /.
fiances mêlées dans Yair, font maintenus par le chaud
dans un état de fluidité, qui fait qu’étant mêlées en-
femble ils agiffent conjointement ; 8c que par le froid
ils perdent leur fluidité 8c leur mouvement, fe mettent
en cryftaux, & fe féparent les uns des autres.
Si les colonnes (Yair font plus ou moi ns hautes, cette
différence peut caufer auffi des changemens, y ayant
peu d’exhalaifons qui s’élèvent au-deffus des plus hautes
montagnes.On en a eu la preuve pgr certaines maladies
peftilentielles, qui ont emporté tous les habi-
tâns qui peuploient un côté d’une montagne, fans
que ceux qui peuploient l’autre côté s’en foient aucunement
fentis.
On ne fauroit nier non plus que la féchereffe 8c
l’humidité ne produifent de grands changemens dans
l’atmofphere. En Guinée, la chaleur jointe à l’humidité
caufe une telle putréfaction, que les meilleures
drogues perdent en peu de tems toutes leurs vertus ,
8c que les vers s’y mettent. Dans l’île de Saint-Jago,
on eft obligé d’expofer le jour les confitures au foleil,
pour en faire exhaler l’humidité qu’elles ont contractée
pendant la nuit, fans quoi elles feroient bien-tôt
gâtées.
C ’eft fur ce principe que font fondés la conftruc-
tion 8c l’ufage de l’hygrometre. Voye^ Hygromètre.
Ces différences dans Yair ont auffi une grande influence
fur les expériences des Philofophes, des Chi-
miftes, 8c autres.
Par exemple, il eft difficile de tirer l’huile du foufre
, per campanam, dans un air clair 8c fec, parce qu’ -
alors il eft très-facile aux particules de ce minéral de
s échapper dans Y air : mais dans un air groffier 8c
humide, elle vient en abondance. Ainfi tous les fels
fe mêlent plus aifément, 8c étant fondus agiffent avec
plus de force dans un air épais 8c humide ; toutes les
féparations de fiibftances s’en font auffi beaucoup
mieux. Si le fel de tartre eft expofé dans un endroit oh
il y ait dans Y air quelque efprit acide flotant, il s’en
imprégnera, 8c de fixe deviendra volatil. De même
les expériences faites fur des fels à Londres, oh Y air
èft abondamment imprégné du foufre qui s’exhale
du charbon de terre qu’on y brûle, réuffiffent tout
autrement que dans les autres endroits du royaume,
oh l ’on brûle du bois, de la tourbe, ou autres matières.
C ’eft auffi pourquoi les uftenciles de métal fe
rouillent plus vite ailleurs qu’à Londres ; oh fl y a
moins de corpufcules acides 8c corrofifs dans Y air ,
8c pourquoi la fermentation qui eft facile à exciter
dans un lieu oh il n’y a point de foufre, eft impraticable
dans ceux qui abondent en exhalaifons fulphu-
reufes. Si du vin tiré au clair après qu’il a bien fermenté
, eft tranfporté dans un endroit oh Y air foit imprégné
des fumées d’un vin nouveau qui fermente
aôuellement, il recommencera à fermenter. Ainfi le
fel de tartre s’enfle comme s’il fermentoit, fi on le
met dans un endroit oh l’on prépare de l’efprit de nitre
, du vitriol, ou du fel marin. Les Braffeurs, les Dif-
tillateurs 8c les Vinaigriers font une remarque qui
mérite bien d’avoir place ici : c’eft qu’il n’y a pas de
meilleur tems pour la fermentation dés fucs des plantes,
que celui oh ces plantes font en fleurs. Ajoûtez
que les taches faites par les fucs des fubftances v égétales
ne s’enlevent jamais mieux de deffus les étoffes
, que quand les plantes d’oh ils proviennent font
dans leur primeur. M. Boyle dit qu’on en a fait l ’expérience
fur des taches de jus de coing, de houblon,
8c d’autres végétaux ; 8c que fingulierement une qui
étoit de jus de houblon, 8c qu’on n’avoit pas pû emporter
, quelque chofe qu’on y f î t , s’en étoit allée
d’elle-même dans la faifon du houblon.
Outre tout ce que nous venons de dire de Y air,
quelques naturaliftes curieux & pénétrans ont encore
obfervé d’autres effets de ce fluide, qu’on ne
.6 g ij