t e , étant privées du fuc qui doit monter par l’écorce
, meurent, & les rejetions qui fortent de l’ente,
font un nouvel arbre ; il paroît de-là que le fuc qui
monte par l’écorce n’eft pas celui qui fait les fleurs
6c les fruits ; que c ’eft donc celui qui a paffé par la
moelle 6c qui y a été préparé ; que la quantité du
fuc qui devoit naturellement paffer par la moelle a
été augmentée de celui qui ne pouvoit plus palier
par l’écorce , 6c que c’eft-là ce qui a caulé la multiplication
des fleurs 6c des fruits. En effet, ajoute M-.
Magnol, la moelle des plantes eft, comme celle des
animaux, un amas de veficulesqui paroiffent defti-
nées à filtrer 6c à travailler un fuc plus finement
qu’il ne feroit néceffaire pour la feule nourriture du
bois ; & les plantes qui ont beaucoup de moelle ,
comme le rofier, le troëfne, le lilas, ont aufli beaucoup
de fleurs 6c de graines : dans les plantes féru-
lacees, la moelle monte de la tige jufqu’à la femen-
ce ; & les longues femences du myrrhis odorata, n’étant
pas encore mûres, ne font vifiblement que de
la moelle.
Un orme des Tuileries , qui à l’entrée du prin*
tems de 1708 étoit entièrement dépouillé de fon
écorce depuis le pié jufqu’aux branches, ne laiffa pas
de pouffer la fève dans toutes fes parties, & d’entretenir
fes feuilles pendant tout l’été fuivant, cependant
avec moins de vigueur que les autres ormes. Le
premier Jardinier le fit arracher en automne, perfua-
dé qu’il ne pouvoit plus fubfifter à l’avenir. C ’eft
dommage , dit M. de Fontenelle , qu’on ne l’ait pas
laiffé vivre autant qu’il auroit pû : mais les intérêts
de la Phyfique & ceux de la beauté du jardin fe font
trouvés différens. M. Parent a montré à l’Académie
une atteftation deM. Dupuis ( c’étoit le premier Jardinier)
qui méritoit en effet d’etre bien certifiée ; car
on a cru jufqu’à préfent l’écorce beaucoup plus néceffaire
à la vie des plantes. L’Académie avoit donc
alors changé d’avis, 6c nepenfoitpas fur ce point en
1709, comme en 1707.
3 . Un arbre abandonné à lui-même, pouffe à une
certaine hauteur un certain nombre de branches plus
ou moins grand : par exemple 1 , 3 , 4 , 5 , félon l’ef-
pece , le fol, l’expofition & les autres circonftances.
Si ce même arbre eft cultivé par l’amendement de la
terre , par le labour au pié de Y arbre, & par l’arro-
fement durant les fechereffes, il pouffera peut - être
un plus grand nombre de branches 6c de rameaux ;
mais la culture par le retranchement d’une partie de
fes branches, contribue plus qu’aucune autre induf-
trie à la multiplication : de forte qu’on peut dire que
plus on retranche de cette forte de corps vivans jufqu’à
un certain point, plus, on les multiplie.
• Cela montre déjà combien font abondantes les
reffources de cette forte d’êtres vivans ; car on peut
dire que depuis l’extrémité des branches jufqu’au pié
de Y arbre , il n’y a prefque point d’endroit, fi petit
qu’on le puiffe aéfigner ,.où il n’y ait une efpece d’embryon
de multiplication prêt à paroître, dès que l’oc-
caifion mettra Y arbre dans la néceffité de mettre au
jour ce qu’il tenoit en réferve.
Si on n’avoit jamais vû d'arbre ébranché jufqu’à
fa racine , on croiroit qu’un arbre eh eft eftropié fans
•reffource 6c n’eft plus bon qu’à être abattu, pour
être débité en charpente ou mis au feu. Cependant
fi un orme, ou un chêne, ou un peuplier, en un mot,
un arbre dont la tige s’étend affez droite du pié à la cime
, eft ébranché de bas en haut, il pouffera depuis
le colet des branches retranchées jufqu’à la cime de
la tige , de toutes parts, un nombre infini de bourgeons
, qui pouffant des jets de tous côtés feront d’un
tronc haut de trente à quarante piés, comme un gros
bouquet de feuilles fi touffu, qu’à peine verra-t-on le
corps de Y arbre.
. Si on n’avoit jamais vû $ arbre étêté par un tourbilion
de v en t, t>u par le retranchement exprès de
fon tronc au collet des branches , il n’y a perfonne
qui ne regardât durant fix mois, un arbre mis en cet
état, comme un tronc mort & inhabile à toute gé*
nération ; cependant cet arbre étêté repouffera dû
tronc au-deffous de l’endroit pii il avoit pouffé fes
branches, un grand nombre de jets * ou au couronnement
, ou vers le couronnement;
On en peut dire autant des arbres coupés à rafe ter*
re ; car il repouffent autant 6c plus qu’à toute hauteur
•: c’eft ce qui fait les arbres nains, en buiffon ou
en efpalier, entre les fruitiers ; 6c le taillis entre les
fauvageons. Voye£ Mém. de VAcad. an. 1700. page
140. Je rappelle ces faits, afin qu’on fe détermine à
réfléchir un peu plus fur cette reproduction , & à en
tirer plus d’avantages encore qu’on n’a fait jufqu’à
préfent, foit pour l’ornement des jardins, foit pour
l’utilité du Jardinier.
40. Comme il eft néceffaire que les bois ayentune
certaine courbure pour la bonne 6c facile conftrue-
tion des vaiffeaux, il y a long-tems que l ’on a propo-
fé de les plier jeunes dans les forêts : mais il ne paroît
pas que jufqu’à préfent on ait fuivi cette idée ;
feroit-ce qu’elle eft d’exécution difficile ?
50. Dans les environs de Paris, M. Vaillant comp»
toit en 1700 , jufqu’à 137 efpeces de moufles ou
plantes parafites, qui font dans le régné végétal, ce
que les infedtes font dans le régné animal. Toutes
ces plantes fucent la fève des arbres par une infinité
de petites racines ; & c’eft une forte de maladie pédiculaire
dont il feroit très-important de les guérir.
Pour cet effet, l’expédient le plus fimple qui fe pré-
fente , feroit de la racler, fur-tout dans.un tems de
pluie, comme nous l’avons prefcrit plus haut : mai«
outre que cette opération feroit longue dans bien
des cas, elle feroit dans tous très-imparfaite ; c’eft-
là ce qui détermina M. deReffons à propofer à l’Académie
en 17 16 , un moyen qu’on dit être plus court
& plus fur : c’eft de faire avec la pointe d’une fer-
pette une incifion en ligne droite , qui pénétré au
bois, depuis les premières branches jufqu’à fleur de
terre ; cette longue plaie fe referme au bout d’un certain
tems, après quoi l’écorce eft toujours nette 6c
il n’y vient plus de moufle. Le tems de cette opération
eft depuis Mars jufqu’à la fin d’Avril. En Mai,
lecorceauroit trop de fève &.s’entrouvriroit trop.
Ce remede a été fuggéré à M. de Reffons d’une maniéré
finguliere ; il s’apperçut que les noyers auxquels
c’eft la coûtume en Bourgogne de faire des in-
cifions, n’a voient point de lepre , & il conjeélura
qu’ils en étôient garantis par cette opération. Voyeç
dans les Mémoires de PAcadémie, année 171 <f. pag. 3 1.
de l'Hijloire, le rapport qu’il y a entre le remede 6c
le mal.
6°. Pour peu qu’on ait fait attention à l’état des arbres
qui forment les forêts, on aura remarqué que
ceux qui font plus près des bords font confidérable-
ment plus gros que ceux qui font plus proches du milieu
, quoiqu’ils l'oient de même âge ; d’où il s’enfuit,
dit M. de Réaumur, dans un mémoire fur l’amélioration
de nos forêts, que quand on n’a pas une grande
quantité de terrein o ù l’on puiffe élever des arbres
en futaie, il eft plus avantageux de les laiffer élever
fur des lifieres longues & étroites, que de laiffer élever
la même quantité d1 arbres fur un terrein plus large
& moins long. Voye[ Mém. de P Acad. an. 1721.
M Ê Ê m ; . , , , .
70. Le rigoureux riyver de 1709, dont la mémoire
durera long-tems, fit mourir par toute la France un
nombre prodigieux d'arbres : mais on remarqua , dit
M. de Fontenelle, Hifi. de P Acad. 1710. p. Sg. que
cette mortalité ne s’étendoit pas fur tous indifféremment
: ceux qu’on auroit jugé en devoir êtré les
plus exempts par leur force, y furent les plus fujets.
Les
Les arbres Us plus durs, & qui confervent leurs feuilles
pendant l’hyver, comme les lauriers, les cyprès,.
les chênes verds, &c. 6c entre ceux qui font plus ten-
ïdres, comme les oliviers, les châtaigniers, les noyers,
'&c.ceux qui étoient plus vieux 6c plus forts mouru-
i£nt' prefque tous. On chercha dans l’Académie la
caufe de cette bifarrerie apparente ( cela fuppofe
qu’on s’étoit bien affûré de là réalité ) ; & M. Caflini
le fils en donna une fort fimple à l’égard des vieux arbres.
Il dit avoir remarqué que le grand froid avoit
détaché leur écorce d’avec le bois, de quelque maniéré
que cela fût ’arrivé. Ëneffet, il eft bien naturel
que l’ecorce foit plus adhérente au bois dans les jeunes
arbres que dans les v ieux, beaucoup plus remplis
de fucs, & de fucs huileux. M. Chomel en imagina
une autre raifon. M. Homberg tenta aufli d’expliquer
le même phénomène. Voye\_ leurs conjectures Hans,
les Mémoires de P Académie.
Quoi qu’il en foit, il eft confiant que plufieurs arbres
qui fembloient avoir échappé à ce cruel hyver,
parce qu’ils repoufferent des branches & des feuilles
à la fève du printems, ne purent profiter de celle de
l’automne, & périrent tout-à-fait. Quand on les cou-
poit, on les trouvoit plus noirs 6c plus brûles dans le
coeur, que Vers l’aubier 6c vers l’écorce ; le coeur,
qui eft plus dur, avoit été plus endommagé que l’aubier
; & il étoit déjà mort , que l’aubier confervoit
encore un petit refte de vie.
8°. Dans plufieurs arbres fruitiers, comme les pommiers
, les poiriers, les châtaigniers, 6c généralement
dans ceux qui en imitent le port, tels que font les
noyers, les chênes, les hêtres, la bafe ae la touffe
affeéte toûjours d’être parallèle au pian d’où fortent
les -tiges, foit que ce plan foit horifontal ou qu’il ne
le foit pas, foit que les tiges elles-mêmes foient perpendiculaires
ou inclinées fur ce plan ; 6c cette affectation
eft fi confiante, que fi un arbre fort d’un endroit
où le plan foit d’un côté horifontal, 6c de l’autre incliné
à l’horifon, la bafe de la touffe fe tient d’un côté
horifontale, 6c de l’autre s’incline à l’horifon autant
que le plan. C ’eft M. Dodart qui s’eft le premier
apperçû de ce phénomène extraordinaire , 6c qui en
a recherché la caufe..
Nous ne rapporterons point ici les conjectures de
M. Dodart, parce que nous ne defefpérons pas qu’on
n’en forme quelque jour de plus vraiffemblables &
de plus heureufes ; 6c que ce feroit détourner les ef-
prits de cette recherche, que donner quelque fatif-
faûion à lacuriofité. Quand la folution d’une difficulté
eft éloignée, notre pareffe nous difpofe à prendre
pour bonne la première qui nous eft préfentée : il fuf-
fit donc d’avoir appris le phénomène à ceux qui l’i-
gnoroient.
90. Tout le monde connoît ces cercles peu réguliers
d’aubier & de bois parfait, qui fe voyent toûjours
dans le tronc d’un arbre coupé horifontalement, &
qui marquent les accroiffemens en grofl’eur qu’il a
pris fucceflivement ; par-là on compte fon âge affez
Jurement. Le dernier cercle d’aubier qui eft immédiatement
enveloppé par l’écorce, 6c la derniere production
du tronc en groffeur, eft d’une fubftance plus
rare & moins compacte, eft bois moins parfait que le
cercle qu’il enveloppe lui-même immédiatement, 6c
qui a été la production de l’année précédente ; & ainfi
de fuite jufqu’au coeur de Y arbre : mais on s’apper-
çoit qu’à mefure que les cercles concentriques font
plus petits, la différence des couleurs qui eft entr’eux
difparoît.
On croit affez communément que ces cercles font
plus ferrés entr’eux du côté du nord que du côté du
midi ; & on en conclut qu’il feroit poflible de s’orienter
dans une forêt en coupant un arbre. En effet,
il paroît affez naturel que les arbres croiffent plus en
groffeur du côté qu’ils font plus expofés aux rayons
Tome /,
du foleil : cependant ce fentiment n’eft pas général ;
on foûtient que c’eft du côté du midi que les cercles
font plus ferrés ; & on en donne la raifon phyfique,
bonne ou mauvaife : quelques-uns même font pour
le levant, & d’autres pour le couchant.
On a trouvé par un grand nombre d’expériences
que ces faits oppofés font vrais. L’arbre a de groffes
racines qui fe jettent les unes d’un côté les autres de
l’autre : s’il en avoit quatre à-peu-près égales , qui
tendiffent vers les quatre points cardinaux de l’hori-
fon , elles fourniroient à tout le tronc une nourriture
égale, & les différens cercles auroient chaque
année un même accroiffement, une même augmentation
de largeur ou d’épaiffeur , fauf les inégalités
qui peuvent furvenir d’ailleurs : mais fi une des quatre
racines manque, celles du nord, par exemple, ce
côté-là du tronc fera moins nourri, & les cercles par
. çonféquent feront moins larges ou plus ferrés du côté
du nord : mais une groffe branche qui part du
tronc d’un certain côté ,,fait le même effet qu’une
•groffe racine ; la nourriture qui a dû fe porter à cette
branche en plus grande abondance, a rendu les cercles
plus larges de ce, côté - là ; & de-là le refte s’enfuit.
Mais on voit que tout cela fuppofe une direction
régulière dans le mouvement des fucs de Y arbre
: or fi une parfaite régularité n’eft pas dans la
nature; il faut y calculer des à-peu-près, réitérer des
expériences , 6c reconnoître une caufe générale à-
travers les petites altérations qu’on remarque dans
fes effets.
D ’où il s’enfuit que plus fes groffes racines font
également diftribuées autour du pié de Y arbre, & les.
groffes branches autour du tronc, plus la nourriture
fera également diftribuée dans toute la fubftance
de Y arbre ; de forte qu’on aura un ligne extérieur d’une
de fes principales qualités, relativement à l ’ufage
des bois.
L’aubier fe convertit peu-à-peu en bois parfait,'
qu’on appelle coeur : il lui arrive par le mouvement,
loit diredl, foit latéral de la fè v e , des particules qui
s’arrêtent dans les interftices de fa fubftance lâche ,
6c la rendent plus ferme & plus dure. Avec le tems,
l’aubier n’eft plus aubier ; c’eft une couche ligneu-
fe : le dernier aubier eft à la circonférence extérieure
du tronc ; & il n’y en a plus quand Y arbre ceffe de
croître.
Un arbre eft d’autant plus propre au fervice,, qu’il
a moins d’aubier & plus de coeur ; 6c MM. Duhamel
6c de Buffon, dont nous tirons ces remarques, ont
trouvé, par des expériences réitérées, que les bons
terreins ont toûjours fourni les arbres qui avoient le
moins d’aubier; 6c que plus les couches d’aubier ont
d’étendue, plus le nombre en'èft petit. En effet, c’eft-
l’abondance de nourriture qui leur donne une plus
grande étendue ; & cette même abondance fait qu’elles
fe convertiffent plus promptement en bois, & ne
■ font plus au nombre des couches d’aubier.
L’aubier n’étant pas compté pour bois de fervice ,’
deux arbres de même âge & de même efpece peuvent
être tels par la feule différence des terreins, que celui
qui aura crû dans le bon, aura deux fois plus de bois
de fervice que l’autre , parce qu’il aura deux fois
moins d’aubier. Il faut pour cela que les.arbres foient
d’un certain âgé.
On croit communément qu’en plantant les jeunes
arbres qu’on tire de la pépinière, il faut les orienter
comme iis l’étoient dans la pépinière ; c’eft une erreur
: vingt-cinq jeunes arbres de même efpece, plantés
dans un même champ , alternativement orientés
6c non orientés comme dans la pépinière, ont tou§
également réufli.
Le froid par lui-même diminue le mouvement d&
la fèv e, & par çonféquent il peut être au point de
l’arrêter tout-à-fait, 6c Y arbre périra : mais le cas eft
Eeee