ont été dépouillées de blé , que jufqu’en Mars qu’on
les enlèmence de menus grains. On ne leur donne
qu’un ou deux labours, l’un avant l’hyver, l’autre
avant de femer. Ceüx qui veulent amender ees ter-
r e s y laiffent le chaume, ou le brûlent : ils donnent
le premier labour aux environs de la Saint-Martin,
& le fécond vers le mois de Mars.
On n’employe en Franceqjue des chevaux ou des
boeufs. Le boeuf laboure.plus profondément, commence
plutôt, finit plus tard, eft moins maladif,
coûte moins en nourriture 6c enharnois, & fe vend
quand il eft vieux : il faut les accoupler ferrés, afin
qu’ils tirent également. On fe fert de buffles en Italie
, d’ânes en Sicile ; il faut prendre ces animaux jeunes
, gras-'vigoureux, & c .
x. '’N-’àUtez point aux champs fans connoître le
fonds, fans que vos bêtes foient en bon état, 6c fans
quelque outil tranchant. La terre n’eft bonne que
quand elle a dix-huit pouces de profondeur.
2. Choififfez un tems convenable ; ne labourez ni
trop tôt' ni trop tard ; c’eft la première façon qui décidera
des autres quant aux terres.
3 . Ne labourez point quand la ferre efi trop feche:
ou vous ne feriez que l’égratigner par un- labour fu-
perficiel, ou vous dilïiperiez fa fubftance par un labour
profond. Le labour fait dans les grandes chaleurs
doit être fuivi d’un demi-labour avant la fe-
ma'ille.
4. Si vous labourez par un tems trop mou, la
terre chargée d’eau fe mettra en mortier ; enforte
que ne devenant jamais meuble, la femenee s’y por-
teroit mal. Prenez le tems que la terre efi adoucie ,
après les pluies ©nies brouillards.
c. Renouveliez les labours quand les herbes commencent
à pointer, 6c donnez le dernier peu de tems
avant la femaille. J
6. Labourez fôrtement les terres graffes, humides
6c fortes, 6c les novalës ; legerement les terres
fablonneufes, pierreufes , feches, & legeres,& non
à v ive jauge.
7. Ne pouliez point vos filions trop loin, vos bêtes
auront trop à tirer d’une traite. On dit qu’il feroit
bon que les terres fuffent partagées en quartiers, chacun
de quarante perches de long au plus pour les chevaux
, 6c de cent cinquante piés au plus pour les
boeufs ; ne les faites repofer qu’au bout de la raie.
8. Si vous labourez fur une colline, labourez ho-
.rifontalement, 6c non verticalement.
9. Labourez à plat & uniment dans les pays où vos
terres auront belôin de l’arrofement des pluies. Labourez
en talus, à dos d’âne, & en filions hauts,
les terres argilleufes 6c humides. On laide dans ces
dernierscas un grand fillon aux deux côtés du champ
pour recevoir 6c décharger les eaux.
10. Que vps filions loient moins larges , moins
unis & plus élevés, dans les terres humides que dans
les autres. Si vos filions font étroits, 6c qu’ils n’ayent
que quatorze à quinze pouces de largeur fur treize
à quatorze de hauteur, labourez du midi au nord ,
•afin que vos grains ayenl le foleil des deux côtés.
Cette attention efi moins néceffaire fi vos filions
font plats. Si vous labourez à plat & en planches des
terres humides, n’oubliez pas de pratiquer au milieu
de la planche un fillon plus profond que les autres,
qui reçoive les eaux. Il y a des terres qu’on laboure
à uni, fans filions ni planches, & où l’on fe contente
de verfer toutes les raies du même côté, en ne prenant
la terre qu’avec l’oreille de la charme ; enforte
qu’après le labour on n’apperçoit point d\ n r u e ; on
fe fért alors d’une charme à tourne-oreille.
11. Sachez que les filions porte-eaux ne font permis
que quand ils ne font point de tort aux voifins,
& qu’ils font abfolument néceffaires.
12. Donnez letroifieme labour de travers, afin
que votre terre émotée en tout feus fe nettoye plus
facilement de pierres, 6c s’imbibe plus aifémentdes
eaux de pluie.
13. Que votre dernier labour fait toûjours plus
profond que 1§ précédent ; que vos filions foient
preffés. Changez rarement de foc : ne donnez point
à la même terre deux fois, de fuite la même forte de
grains : ne faites point labourer à prix d’argent ; fi
vous; y êtes forcé, veillez à ce que votre ouvrage fe
faffe bien.
14. Ayez une bonne charme. Voyer^ à Varticle
CHARRUE, une cajfe-motte yUne herfe des pioches, &c.
Voulez-vous connoître le travail de votre année ?
le voici.
En Janvier. Dépouillez les gros légumes ; retournez
les jachères ; mettez, en oeuvre Les chanvres 6c
lins ; nettoyez, raccommodez yos charrettes, tombereaux
, 6c apprêtez des échalas & des ofiers; coupez
les faules 6c les peupliers ; relevez les foliés ; façonnez.
les haies; remuez les terres des vignes ; fumez
ceux des arbres fruitiers qui languiront; émondez les
autres ; elfartez les prés ; battez les. grains ; retournez
le fumier ;. labourez les terres legeres 6c fablonneufes
qui ne l’ont pas été à la Saint-Martin : quand il fera
dou x, vous recommencerez à planter dans les vallées.
Entez les arbres 6c arbriffeaux hâtifs ; enterrez
les cormes, amandes, noix, &c. faites tiller le chanvre
6c filer ; faites faire des fagots 6c du menu bois ;
faites couver les poules qui demanderont ; marquez
les agneaux que vous garderez ; falez le cochon. Si
vous êtes en pays chaud, rompez les guérets; préparez
les terres pour la femaille de Mars, &c.
En Février. Continuez les ouvrages précédens ;
plantez la vigne ;. curez, taillez, échaladez les vignes
plantées ; fumez les arbres, les champs, les prés, les
jardins, & les couches ; habillez les prairies; élaguez
les arbres ; nettoyez-les de feuilles mortes, de vers,
de moufle, d’ordure, &c. donnez la façon aux terres
que vous femerez en Mars ., fur-tout à celles qui font
en coteaux : vous femerez l’avoine -, fi vous écoutez
le proverbe. Semez les lentilles, les pois chiches, le
chanvre, le lin , le paftel ; préparez les terres à fain-
foin ; vifitez vos vins s’ils font délicats ; plantez les
bois, les taillis ,le's remettons ; nettoyez le colombier,
le poulaillier, &c. repeuplez la garenne; raccommodez
les terriers ; achetez des ruches & des mouches.
Si votre climat efi chaud, liez la vigne à l’é-
chalas ; rechauffez les piés des arbres ; donnez le verrat
aux truies, linon attendez.
En Mars. Semez les petits blés, le lin, les avoines
, 6c les mars ; achevez de tailler & d’échalader
les vignes ; donnez tout le premier labour ; faites les
fagots de farmens ; foûtirez les vins ; donnez la fécondé
façon aux jachères ; fardez les blés; femez
-les olives , & autres fruits à noyau ; dreffez des pe-
pinieres ; greffez les arbres avant qu’ils bourgeonnent
; mettez vos jardins en état ; femez la lie d’olive
fur les oliviers languiffans ; défrichez les prés ; achetez
des boeufs, des veaux, des geniffes, des poulains,
des taureaux, &c.
En Avril. Continuez de femer les mars & le fain-
foin ; labourez les vignes & les terres qui ne l’ont pas
encore été; greffez lesarbres fruitiers ; plantez les
oliviers ; greffez les autres ; taillez la vigne nouvelle ;
donnez à manger aux pigeons, car ils ne trouveront
plus rien ; donnez l’étalon aux cavales, aux âneffes,
6c aux brebis ; nourriffez bien les vaches qui vêlent
ordinairement dans ce tems ; achetez des mouches ;
cherchez-en dans les bois ; nettoyez les ruches, 6c
faites la chaffe aux papillons.
En Mai. Semez le lin , le chanvre, la navette, le
colfa, le millet, & le panis, fi vous êtes en pays
froid ; plantez le fafran ; labourez les jachères ; fard
e z les blés ; donnez le fécond labour 6c les foins néceffaires
à la vigne ; ôtez les pampres 6c les farmanS
fans fruit ; coupez les chênes 6c les aulnes pour qu’ils
pelent ; émondez 6c entez les oliviers ; loignez les
mouches à miel, 6c plus encore les,vers à foie ; tondez
les brebis ; faites beurre & fromage ; rempliffez
vos-vins ; châtrez vos veaux; allez chercher dans les
forêts du jeune feuillage pour vos beftiaux.
En Juin. Continuez les labours 6c les femailles
des mois précédens : ébourgeonnez & liez la vigne ;
continuez de foigner les mouches , 6c de châtrer les
veaux ; faites provifion de beurre 6c de fromage. Si
vous êtes en pays froid, tondez vos brebis ; donnez
le deuxieme labour aux jachères ; charriez les fumiers
6c la marne ; préparez 6c nettoyez l’aire de la grange ;
châtrez les mouches à m ièl, tenez leurs ruches nettes
; fauchez les prés, 6c autres verdages ; fanez le
foin; recueillez les légumes qui font en maturité; feiez
fur la fin du mois vos orges quarrés. En Italie, vous
commencerezà dépouiller vosfromens ; partout vous
voiis difpoferez à la moiffon ; battez du blé pour la femaille
; dépouillez les cerifiers ; amaffez des claies,
6c parquez les beftiaux.
En Juillet. Achevez de biner les jachères ; continuez
de porter les fumiers ; dépouillez les orges de
primeur, les navettes , colfas, lins , vers à foie, récoltes,
les légumes d’été ; ferrez ceux d’hy ver ; donnez
le troifieme labour à la vigne ; ôtez le chiendent ;
unifiez la terre pour conferver les racines ; déchargez
les pommiers 6c les poiriers des fruits gâtés 6c fuper-
flus ; ramaffez ceux que les vents auront abattus, &
faites-en du cidre de primeur ; faites couvrir vos vaches
; vifitez vos troupeaux ; coupez les foins ; vuidez
6c nettoyez vos granges ; retenez des moiffonneurs :
en climat chaud, achetez à vos brebis des béliers ,
6c réchauffez les arbres qui font en plein vent.
En Août. Achevez la moiffon, arrachez le chanvre
; faites le verjus ; en pays froid , effeuillez les
feps tardifs ; en pays chaud, ombragez-les ; commencez
à donner le troifieme labour aux jachères ;
battez le feigle pour la femaille prochaine, continuez
de fumer les terres ; cherchez des foürces, s’il
.vous en faut, vous aurez de l’eau toute l’année, quand
vous en trouverez en Août ; faites la chaffe aux guêpes
; mettez le feu dans les pâtis pour en confumer
les mauvaifes herbes ; préparez vos preffoirs, vos cuves
, vos tonneaux, 6c le refte de l’attirail de la vendange.
En Septembre. Achevez de dépouiller les grains 6c
.les chanvres, & do labourer les jachères ; fumez les
terres ; retournez le fumier ; fauchez la deuxieme
coupe des prés ; cueillez le houblon, le fenevé , les’
pommes, les poires, les n oix, & autres fruits d’au-
tonne ; ramaffez le chaume pour couvrir vos-étables
; commencez à femer les feigles, le méteil 6c
même le froment ; coupez les riz 6c les millets; cueilliez
6c préparez le paftel 6c la garence ; vendangez fur
la fin du mois. En pays chaud, femez les pois , la
vefee , le fénegré , la dragée, &c. caffez lès terres
:pour le fainfoin ; faites fie nouveaux prés ; raccommodez
les vieux ; femez les lupins , 6c autres grains
de la même nature ; 6c faites amas de cochons maigres
pour la glandée.
En Octobre. Achevez votre vendange 6c vos v ins,
6c la femaille des blés ; recueillez le miel & la cire ;
nettoyez lès ruches' ; achevez la récolte du fafran ;
■ ferrez les orangers ; femez les lupins, l’orge quarré ,
les pois, les féverolles, l’hyvernache ; faites le cidre
■ & le raifiné ; plantez les oliviers ; déchauffez ceux
qui font en pie ; confifez les olives blanches ; com-
•mencez fur la fin de ce mois à provigner la vigne,
à la nieller, fi c’eft l’ufage ; veillez aux vins -nouveaux
; commencez à abattre les bois, à tirer la marn
e & à planter. En pays chaud, depuis le 10 jufqu’au
Tome ƒ,
23 , vous femerez le froment ras & barbu, 6c même
le lin qu’on ne met ici en terre qu’au printems.
En Novembre. Continuez les cidres ; abattez les
bois ; plantez ; provignez 6C déchauffez la vigne ;
amaffez les olives quand elles commencent à changer
de couleur ; tirez-en les premières huiles ; plantez
les oliviers , taillez les autres; femez de nouveaux
pies ; recollez les marons & châtaignes , la garence
6c les ofiers ; ferrez les fruits d’autonne 6c d’hy ver ;
amaffez du gland pour le cochon, ferrez les raves ;
ramaffez 6c fàitesfécher des herbes pour les beftiaux ;
charriez les fumiers 6c la marne ; liez les vignes ; rapportez
ôc ferrez les échalas ; coupez les branches de
iâules ; taillez-les ou fendez ; faites l’huile de noix ;
commencez à tailler la vigne ; émondez les arbres ;
coupez les bois à bâtir 6c à chauffer; nettoyez les
ruches, 6c vifitez vos ferres 6c vos fruiteries. On a
dans un climat chaud des moutons de ce mois ; on
lâche le bouc aux chevres ; on féme le blé ras 6c
barbu, les orges, les fèves & le lin. En pays froid ôc
tempéré , cette femaille ne’ fe fait qu’en Mars.
En Décembre. Défrichez les bois ; coupez-en pou?
bâtir Sc chauffer ; fumez ôc marnez vos terres ; battez
votre blé ; faites des échalas, des paniers de jonc 6c
d’ofier, des rateaux, des manches; préparez vos ou-*
tils ; raccommodez vos harnois & vos uftenfiles; tuez
ôc falez le cochon ; couvrez de fumier les pies des-ar-
bres 6c les légumes que vous voulez garder jufqu’aii
printems ; vifitez vos terres ; étêtez vos peupliers &
vos autres arbres, fi vous voulez qu’ils pouffent fortement
au printems ; tendez des rets & des pièges, &
recommencez votre année. Voyelle détail de chacune
de ces opérations à leurs articles.
Voilà l’année, le travail, ôc la maniéré de travailler
de nos laboureurs. Mais un auteur Anglois à pro-
pofé un nouveau fyftème d'agriculture que nous allons
expliquer, d’après la traduélion que M. Duhamel
nous a donnée de l’ouvrage Anglois, enrichie de
fes propres découvertes.
M. Tull diftingue les racines, en pivotantes qui
s’enfoncent verticalement dans la terré, 6c quifoû-
tiennent les grandes plantes, comme les chênes 6c les
noyers ; ôc en rampantes , qui s’étendent parallèlement
à la furface de la terre. Il prétend que celles-ci
font beaucoup plus propres à recueillir les fucs nourriciers
que celles-là. Il démontre enfuite que les feuilles
font des organes très-néceffaires à la fanté des plantes,
& nous rapporterons à l’article Feuille les preuves
qu’il en donne : d’où il conclut que c’eft faire un
tort confidérable aux lufernes 6c aux fainfoins , que
de les faire paître trop fouvent par le bétail, & qu’il
pourroit bien n’être pas auffi avantageux qu’on fe l’imagine
, de mettre les troupeaux dans les blés quand
ils font trop forts.
Après avoir examiné les organes de la vie des
plantes , la racine 6c la feuille, M. Tull paffe à leur
•nourriture : il penfe que ce n’eft autre chofe qu’une
poudre très-fine, ce qui n’eft pas fans vraiffemblance,
■ ni fans difficulté ; car il paroît que les fubftances intégrantes
de la terre doivent être diffolubles dans
l’eau ; ôc les molécules de terre ne femblent pas avoir
cette propriété : c’eft l’obfervation de M. Duhamel.
M.Tullfe fait enfuite une queftion très-embarraffan-
te ; il fe demande fi toutes les plantes fe riourriffent
d’un même fuc ; il le penfe : mais plufieurs auteurs
ne font pas de fon avis ; 6c ils remarquent très-bien
que telle terre eft épuifée pour une plante , qui ne
l’eft pas pour une autre plante ; que des arbres plantés
dans une terre où il y a eu beaucoup & long-
tems de la même efpece , n’y viennent pas fi bien
que d’autres arbres ; que les fucs dont l’orge fe nourrit
, étant plus analogues à ceux qui nourriffent le
blé, la terre en eft plus épuifée qu’elle ne l’eût été
par l’avoine ; & par conféquenj que tout étant égal