de (es articles. Dans l’article même il Ait qut r é t a me
cil pour U moins anjji abominable que l alhclf.me.
C ’eft ainfi qu’il s’explique d’abord : mais les contradiûions
qu’11 SS fireot, Er° ? of<ir 1 H
avec les reftriffions tiiivantes. « L idolâtrie des an-
» ciens payens il’eft pas un mal p us affreux que 11-
«anorance de Dieu dans laquelle on tomberait,
» o u par l l M H B I par détaut d’attention, fans
» une malice préméditée y fondée fur le deffein e
»ne fentir nub remords en s’adonnant à toutes
» fortes de crimes». Enfin dans fa continuation des
penfées dîverfes , il changea encore la queftion. 11
fuppofa deux anciens philofophes, qui s étant mis en
tête d’examiner l’ancienne religion de leur p a y s ,
euffent ôbfervé dans Cet examen les lois les plus ri-
gouteufes dé la recherche de la vente. | N i l “ “
» l’autre de ces deui examinateurs ne fe proposent de
» fe procurer uff fÿflènte’favorable à leurs interets ; ils
» mettent à part I M , B commodités de la
» v ie l'tduteid morale ; en un mot Us ne cherchent
» qu’ à éClâirè'r leur efprit. L’un deux ayant compare
» autant qu’il a pû & fans aucun prejupe les preuves
» & tes objections, tes réponfes, les répliques, con-
» dut que la nature divine n eft amre chofe que la
» vertu-qui meut tous les corps p a rles ois neceffai-
» rés & immuables1 ; qu’elle n’a pas plus d egard à
» l’homme qu’aux autres 1 parties de 1 univers.; qu elle n’entend point nos piieres ; que nous ne pouvons
» lui H H plàifir ni chagrin » , c eftd-dire , en un
mot que le premier philofophe deviendrait athee. Le
fécondphilofophe , a^rès le meme examen, tombe
d a n s ’les erreurs les plus groffieres du paganifme.
M. Bavle- foûtiènt que le péché du premier ne (e-
roit pas plus énorme que le péché du dernier , &
que même cê dernier aurait l’efprit plus faux quede
premier. On voit par ces échantillons combien M.
Bayle s’eflp lû à embarraffer cette queftion : divers
fa vans l’ont réfuté fur-tout M. Bernard, dans différens
éndroits defeshoUédles de la rymbliquedes
lettres f 8é-M; -Warbufoii, dans fès differtations (ur
runibn d elà religion Vde la mqrale&dela politique.
C ’eft Une chofe'tont-à-fait indifferente à la^vraie Religion
i de fàvoir lequel de l’athéifme ou de 1 idolâtrie
eft un plus grand mal. Les interets du Chriftianifme
font tellement fépàrés de ceux de 1 idolâtrie
payenne , qu’il n’a rien à perdre ni à gagner, foit
qu’elle pàffe pour moins mauvaife ou pour plus mau-
vaifé que l ’irreligion. Mais quand on examine le parallele
de' i’âthéifme & du polythéifme par rapport à
laïdciété', Ce rt’eft plus un problème indifferent. II
paraît que le but de' M. Bayle étoit de prouver que
l’âthéifme ne tend pas à la deftruûion de la fociete ;
& c’èff-là le point qu’il importe de bien développer •
mais avant de toucher à cette partie de fonfyftème.
examinons la première ; & pour le faire avec ordre I
n’dublions pas la diftinftion qu on fait des aehccs de
tHéofte 81 des athées de pratique. Cette diftinétion
une fois établie, on peut dire que l’athéifme prati-
qiiè-renferme un degré de malice, qui ne fe trouve
pas dans le polithéifme : on en peut donner plufieurs
raifdns’.- -' J • .
Là première éft qu’un payen qui otoit à Dieu 1
faintété & la juftice, lui laiffoit non-feulement l’è
xiftence , mais aiifii la connoiffance & la puiffance,
bu lieu qu’un athée pratique lui ôte tout. Les payens
pouvoient être regardés comme des calomniateurs
qui flétriffoient la gloire de Dieu ; les athées pratiques
l’outragent & l’affaffinent à la fois. Ils reffem-
blent à ces peuples qui maudiffoient le foleil, dont
là chaieufles incommodoit, & qui l’euffent détruit,
fi cela eût étépoflible. Ils étouffent, autant qu’il eft
en eux, la perfuafion de [’exiftence de Dieu ; & ils
ne fe portent à 'cet excès' de malice, qu’afin de fe dé-
ùvrer des remords de leur confidence.
La fécondé eft que la malice eft le cara&ere de
l’athéifme pratique 1 mais que l’idolâtrie payenne
étoit un péché d’ignorance ; d’où l’on conclut que
Dieu éft plus offerifé par lés athées pratiques que par
les payens, & que leurs crimes de lefe-majefté divine
font plus injurieux au vrai Dieu que ceux des payens.
En effet ils attaquent malïcieufemënt la notion de
Dieu qu’ils trouvent: dans leur coeur & dans leur
efprit; ils s’efforcent de l’étouffer ; i l i agiffent encela
Contre leur confeience, & feulement par lé motif de
fe délivrer d’un joug qui les empêche de ^’abandonner
à toutes fortes de crimes. Ils font donc directement
la guerre à Dieu; & ainfi l’injure qu’ils font au
fouverain Être eft plus offenfante que linjure qu’il
recevroit des adorateurs’ dés idoles. Dû môiris ceux-
ci étoient bien intentionnés pour la divinité en general
, ils la cherchoient dans le deffein^ de la fervir &
de l’adoter ; & croyant l’avoir trouvée danS'des objets
qui n’étoient pas Dieu , ils l’honoroient félon
leurs faux préjugés , autant qu’il leur étoit poffible. Il
faut déplorer leur ignorance ; mais en mêhle ^tems il
faut reconnoître que la plupart n’ont point lû qu’ils
erroient. Il eft vrai que leur confeience étoit erronée :
mais du rhoins ils s’y conformoient, patCe quils la
croyoient bonnè.' ” - ' • . 4 ^
Pour l’athéifme fpéculatif, il eft moins injurieux
à D ie u , & par conféquent un moindre maP'qüe le
polythéifme. Je pourrois alléguer grand ridnibre de
paffages d’auteurs, tant anciens que_modernes; qui
reconnoiffent tous unanimement qu’il y-a plus d’extravagance
, plus de brutalité, plus de fureur, plus
d’aveuglement dans l’opinion d’u n homme qùf ad met
tous lès dieux deS Grecs & des Romains , que dans
l’opinion de celui qui n’en admet point du tout.
« Qu o i, dit Plutarque, ( Traité de la Super/lè) Celui
»•qùi ne croit point qu?il y ait des dieux ; eft impie;
» & celui qui croit qu’ils font tels que lés fupeifti-
» tieux fë les figurent,' ne"le fera pas ? Pour moi ,
» j’aimerois mieux qu'e 'tôtis‘'les hommes du monde
» diffent que Plutarque n’a jamais été', que s ils di-
» fbient, Plutarqiie'eft un homme incbhftant, le-
>» g er, colère, qui fe venge des moindfes'bffenfes ».
M. Boffuet ayant donné lé précis de la théologie que
"Wiclef a débitée dans fon trialogùe y ajoûte ceci :
« Voilà un extrait fidele de fes* blafphèmés : ils fe
» rédüifent en deux chefs ; à faire uri dieu domine par
» la néceffité ; & ce qui en eft une fuite , un dieu
» auteur & approbateur de tous les crimes,' c’eft-à-
» dire un dieu que les athées auroient râifon de nier s
» de forte que la religion d’un fi grand réformateur
» eft pire que l’athéifme ». Un des beaux "endroits
de M. de la Bruyere eft celui-ci : « Si ma religion
» étoit fauffe , je l’ avoue , voilà le piège 4e mieux
» dreffé qu’il foit poffible d’imaginer : il étoit inévi-
» table de ne pas donner tout au-travers, ,& de n’y
» être pas pris. Quelle majefté ! quel éclat' des myf-
« teres ! quelle fuite & quel enchaînement de toute
» la dëâririe ! quelle raifon éminente ! quelle can-
» deùr ! quelle innocence de moeurs ! quelle force
»invincible & accablante de témoignages rendus
» fucceffivemènt & ^pendant trois fiecles entiers par
» des millions de perfonnes leS plus fages;, les plus
» modérées quffuffent alors fur la terre ! Dieu meme
» pouvoit-il jamais mieux rencontrer pour me fédui-
•» re ? par oh échapper, où aller, où me jetter, je ne
» dis pas pour trouver rien de meilleur , mais quel-
» que chofe qui en approche ? S’il faut périr, c eft
» par-là que je veux périr ; il m’cjlplus doux de nier
» Dieu, que de Raccorder avec une tromperie fi fpe-
» cieufe & fi entière ». Voye^ la continuation des penfées
diverfes'de M. Bayle.
La comparaifon de Richeome nous fera mieux fentir
que tous les raifonnemens du monde, que c’eft un
J fentiment moins outrageant pour la divinité, de ne la
point croire du tout, que de croire ce qu’elle n’eft
pas, & ce qu’elle ne doit pas être. Voilà deux portiers
•à l’entrée d’une maifon: on leur demande, peut-on
parler à votre maître ? II n’y eft pas, répond l’un :
il y e ft, répond l’autre, mais fort occupé à faire de
la fauffe monnoie, de faux contrats, des poignards,
.& des poifons, pour perdre ceux qui ont exécuté fes
deffeins.: M athée reffembleau premier de ces portiers,
Je payen à l’autre. Il eft donc vifible que le payen
offenfe plus grièvement la divinité que ne fait Vathée.
On ne peut comprendre que des gens qui auroient
été attentifs à cette comparaifon, euffent balancé à
dire que la fuperûition payenne valoit. moins que
l ’irréligion.
S’il eft v ra i, i ° . que l’on offenfe beaucoup plus
celui que l ’on nomme, fripon, fcélèrat, infâme, que
celui auquel on ne fonge pas, ou de qui on ne dit ni
bien, ni mal : i 0.. qu’il n’y a point d’honnête femme,
qui n’aimât' mieux qu’on la fîtspafferpour morte, que
pour proftituee : 30. qu’il n’y a point de mari jaloux
qui n’aime mieux que fa femme faffe voeu de contb
nence, ou en général qu’elle ne veuille .plus entendre
parler de commerce avec un homme, que fi elle
fe proftituoit à tout venant : 40.. qu’un roi chaffé de
fon throne s’eftime plus offenfe, lorfque fes fujets
rébelles font enfuite très-fideles à un autre roi, que
s’ils n’en mettoient aucun à fa place : 50. qu’un roi
qui a une forte guerre fur les bras, eft plus irrité contre
ceux qui embraffent avec chaleur le parti de fes
ennemis, que contre ceux qui fe tiennent neutres. Si,
dis-je, ces cinq .propofitions font vraies, il faut de
toute neceffite, que l’offenfe que les Payens faifoient
à D ieu , foit plus atroce que celle que lui font les
athées fpéculatifs, s’il y en a : ils ne fongent point à
Dieu ; ils n’en difent ni bien ni mal ; & s’ils nient
fon exiftence, c’eft qu’ils la regardent non pas comme
une chofe réelle, mais comme une fi&ion de l’en
tendement humain. C ’eft un grand crime, je l’avoue :
mais s’ils attribuoient à Dieu tous les crimes les plus
infâmes., comme les Payens les attribuoient à leur
Jupiter & à leur Vénus ; fi après l’avoir chaffé de fon
throne,ils lui fubllituoientune infinité de faux dieux
leur offenfe ne feroit-elle pas beaucoup plus grande ?
Ou toutes les idées que nous avons des divers degrés
de péchés font fauffes, ou ce fentiment eft véritable.
La perfe&ion qui eft la plus chere à Dieu eft
la faintété ; par conféquent le crime qui l’offenfe le
plus, eft de le faire méchant: ne point croire-fon
exiftence, ne lui point rendre de culte , c’eft le dégrader
; mais de rendre le culte qui lui eft.dûâ une
infinité d’autres êtres, c’eft tout-à-la-fois le dégrader
& fe déclarer pour le démon dans la guerre qu’il fait
à Dieu. L’Ecriture nous apprend que c’eft au diable
que fe terminoit l’honneur rendu aux idoles d'd
gentium daemonia. Si au jugement des perfonnes les
plus raifonnables & les plus juftes , un attentat à
l honneur eft une injure plus atroce qu’un attentat à
la vie ; fi tout ce qu’il y a d’honnêtes gens conviennent
qu’un meurtrier fait moins de tort qu’un calomniateur
qui flétrit la réputation, ou qu’un juge corrompu
qui déclare infâme un innocent ; en un mot
fi tous les hommes qui ont du fentiment, regardent
comme une aftion très - criminelle de préférer la vie
à l’honneur, l’infamie à la mort: que devons-nous
penfer de D ieu , qui .verfe lui-même dans les âmes
ces fentimens nobles & généreux? Ne devons-nous
pas croire que la faintété, la probité, la juftice, font
fes attributs les plus effentiels, & dont il eft le plus
jaloux : donc la calomnie des Payens, qui le chargeant
de toutes fortes de crimes détruit fes perfections
les plus précieufes, lui eft une offenfe plus in-
jurieufe que l’impiété des athées, qui lui ôte la con
noiffance & la direction des évenemens.
, G eft un grand, défaut d’efprit de n’avoir pas re-
Tome I,
connu dans les ouvragés de la hature un Dieu fou-
verainement parfait ; mais c’eft un plus grand défaut
e Pnt cncore, de croire qu’une nature finette aux
panions^ les plus injuftes & les plus falés, foit un
Dieu , & .mérité nos adorations t le premier défaut
eft celui Aus aehees, & le fécond celui des Payens.
-, c elt une lniure fans doute bien grande d’effacer
de nos coeurs l’image de la Divinité qui s’y trouve
naturellement empreinte : mais cette injure devient
beaucoup plus atroce, lorfqu’on défigure cette image,
& (}u on 1 expofe au mépris de tout le monde.
Les aehmit ont effacé l’image de Dieu , & les Payens
1 ont rendue meconnoiffable ; jugez de quel c ô t éW
renie a été plus grande.
, grand crime desathées parmi les Payens eft de
n avoir pas mis le véritable Dieu fur le throne,) après
en avoir ü juftement & fi raifonnablement précipité
tous les faux dieux: mais ce crime, quelque criant
qu il pmffe e tre, eft-il une injure aufli f anglante pour
le vrai Dieu que celle qu’il a reçue des Idolâtres, qui,
apres 1 avoir déthroné, ont mis fur fon throne les plus
infâmes divinités qu’il fût poffible d’imaginer ? Si la
reineEhfabeth chaffée de fès états, avoir appris que
fes fujets révoltés lui euffent fait fuccéder la plus infâme
proftituee qu’ils euffent pû dérerrer dans Lon-
dres, elle eût ete plus indignée de leur conduite, que
s ils euffent pris une autre forme de gouvernement
ou que pour le moins ils euffent donné la couronne à
une illuftre princeffe. Non-feulement la perfonne de
fe reine Ehfabeth eut été tout de nouveau infultée
par le choix qu’on auroit fait d’une infâme courtifk-
ne, mais aufli Je caraftere royal eût été deshonoré,
profane : voilà l’image de la conduite des Payens à 1 egard de.Dieu. Ils .le font révoltés contre lui - &
après l ’avoir chafle du ciel, ils ont fubftitué à fa place
une infinité de dieux chargés de crimes, & ils leur ont
donné pour chef un Jupiter, fils d’un ufiirpateur &
ufurpateur lui-même. N’ctoit-ce pas flétrir & deshonorer
le caraftere divin, expofer au dernier mépris
fe nature & la majefté divine ?
A toutes ces raifons, M. Bayle en ajoûte une autre
, qui eft que rien n’éloigne davantage les hommes
de fe convertir à la vraie religion, que l’idola-
tne : en effet, parlez à un Cartéfien ou à un Péripa-
teticien, d’une propofition qui ne s’accorde pas avec
les principes dont il eft préoccupé , vous trouvez
qu’il fonge bien moins à pénétrer ce que vous lui
dites, qu’à imaginer des raifons pour le combattre :
parlez-en à un homme qui ne foit d’aucune fefte *
vous le trouvez docile, & prêt à fe rendre fans chicaner.
La raifon en eft, qu’il eft bien phis mal - aife
d’introduire quelque habitude dans une ame qui a
déjà contra&é l’habitude contraire , que dans une
ame qui eft encore toute mie. Qui ne fait, par exemple,
qu’il eft plus difficile de rendre libéral un homme
quia été avare toute fa vie, qu’un enfant qui n’eft
encore ni avare ni libéral? De même, il eft beaucoup
plus aife de plier d’un certain fens un corps qui
n’a jamais été plié, qu'un autre qui a été plié d’un
fens contraire; Il eft donc très-raifônnable de penfer
que les apôtres euffent converti plus de gens à J. C.
s’ils l’euffent prêché à des peuples fans religion,qû’ik
n en ont converti, annonçant l’Evangile à des na dons
engagées par un zele aveugle & entêté aux cultes fi1-
perftitieux du Paganifme. O n m’avouera, que fi Julien
l’apoftat eût été athée, du cara&ere dont il étoit
d ailleurs, il eût laiffé en paix les Chrétiens ; au lieu
qu’il leur faifoit des injures continuelles , infatué
qu’il étoit des fuperftitions du Paganifme, & tellement
infatué, qu’un hiftorien de Ta religion n’a pû
s’empêcher d’en faire une efpece de raillerie; difant
que s’il fut retourné viâorieux de fon expédition
contre les Perfes, il eût dépeuplé la terre de boeufs
à force de facrifîces. Tant il eft vrai, qu’un homme
11 i i i ij