foit qu’on i’expofe au plus grand froid naturel ou
artificiel, foit qu’on le condenfe en le comprimant
fortement. On n’a jamais remarqué dans aucun de
ces cas qu’il fe foit réduit en parties folides ; cela
vient de fa rareté, de fa mobilité, & de la figure de
fes parties. M. Formey. Voyt{ Fluide & Son , dre.
Ceux qui> fuivant le fentiment de Defcartes, font
confifter la fluidité dans un mouvement perpétuel
& inteftin des parties, trouveront ce cara&ere dans
Y air. Ainfi dans une chambre obfcure où les repré-
fentations des objets extérieurs ne font introduites
que par un feül rayon, on voit les corpufcules dont
l’air eft rempli dans une fluâuation perpétuelle ; &
les meilleurs thermomètres ne font jamais dans un
parfait repos. Voye^ THERMOMETRE.
Quelques philofophes modernes attribuent la cau-
fe de la fluidité de Vair , au feu qui y eft entremêlé,
fans lequel toute l’atmofphere, lelon eux, fe durci-
roit en une maffe folide & impénétrable ; 8c en effet,
plus le degré de feu y eft confidérable, plus elle eft
fluide, mobile 8c perméable ; 8c félon que les différentes
pofitions du foleil augmentent ou diminuent
ce degré de feu, Vair en reçoit toûjours une tempe-
rature proportionnée. Voye^ Feu .
C ’eft-là, fans doute en grande partie, ce qui fait
que fur les fommets des plus hautes montagnes, les
ienfations de l’oiiie, de l’odorat, 8c les autres, fe
trouvent plus foibles. Voye^ Montagne.
Comme Vair eft un fluide, il preffe dans toutes
fortes de directions avec la même force, c ’eft-à-dire,
en haut, en bas, latéralement, obliquement, ainfi
que l’expérience le démontre dans tous les fluides.
On prouve que la preflîon latérale de Vair eft égale
à la preflîon perpendiculaire par l’expérience fui-
vante , qui eft de M. Mariotte. On prend une bouteille
haute, percée vers fon milieu d’un petit trou ;
lorfque cette bouteille eft pleine d’eau, on y plonge
un tuyau de verre ouvert de chaque cô té, dont
l’extrémité inférieure defeend plus bas que le petit
trou fait à la bouteille. On bouche le col de la bouteille
avec de la cire ou de la p o ix, dont on a foin
de bien enveloper le tuyau, enforte qu’il ne puiffe
point du tout entrer d’air entré le tuyau 8c le col :
lors donc que le tuyau fe trouvé rempli d’eau & que
le trou latéral de la bouteille vient à s’ouvrir, l’eau
S’écoule en partie du tuyau, mais elle s’arrête proche
de l’extrémité inférieure du tuyau à la hauteur
du trou, & toute la bouteille refte pleine. Or fi la
preflîon perpendiculaire de l’air l’emportoit fur la
preflîon latérale, toute l’eâu devroit être pouffée ,
hors du tuyau, 8c ne manquerait pas de s ’écouler;
c ’eft pourtant ce qui n’arrive pas, parce que l’air
preffe latéralement avec tant de force contre le trou,
que l’eau ne fe peut échapper de la bouteille. Mujfch.
tjf. de Phyf.
II. Lapefanteur ou la gravité. Cette propriété de
l’air eft peut-être une fuite de ce qu’il eft une fub-
ftance corporelle; la pefanteur étant ou une propriété
effentielle de la matière, ou du moins une
propriété qui fe rencontre dans tous les corps. Voye^
Attraction, Pesanteur, Gravité.
Nous avons une infinité de preuves de cette propriété
par les expériences. La pefanteur de l’air paraît
d’abord en ce qu’il n’abandonne point le centre
de la terre. Si on pompe l’air d’un verre, & qu’on
ouvre enfuite ce verre en-haut, l’air fe précipitera
fur le champ dans le verre par l’ouverture, & le
remplira. Toutes les expériences de la machine
pneumatique prouvent cette qualité de l’air. Voye^
Pneumatique. Qu’on applique la main fur l’orifice
d’un vaiffeau vuide d’air, on fent bien-tôt le
poids de l’atmofphere qui la comprime. Des vaif-
feaux de verre dont ont a pompé Vair, font aifément
£>rifés par la pefanteur de l’air qui les comprime en
dehors. Si l’on joint bien exaftement deux moitiés
d’une fphere creufe, & qu’on en pompe l’air, elles
feront preffées l’une contre l’autre par le poids de
l’air voifin, avec une force égale à celle d’un poids
de cent livres.
Lorfqu’on pofe fur un récipient de machine pneumatique
un difque mince & plat de plomb ou de
verre, 8c qu’on pompe enfuite l’air du récipient,
l’air extérieur prefle alors par fa pefant’eur le difque
de plomb dans le récipient, ou il brife en pièces avec
beaucoup de violence le verre en le pouffant en
dedans. Si on enveloppe un cylindre ouvert par en
haut, d’une veflie de cochon bien mince, dès qu’on
aura pompé l’air de ce cylindre , la veflie fera déchirée
avec beaucoup de violence. Lorfqu’on pofe
fur la plaque de la machine pneumatique des verres
ou vafes fphériques dont on pompe l’air, ils fe trouvent
d’abord preffés avec beaucoup de force contre
cette plaque, par la pefanteur de l’air extérieur qui
les comprime ; de forte qu’on ne peut les en retirer"
enfuite qu’avec beaucoup de force.
Autre expérience : Prenez un tuyau fermé par un
bout, empliffez-le de mercure, plongez-le par le
bout ouvert dans un baflin plein du même fluide, &
le tenez droit; le mercure fera fufpendu dans le
tuyau à la hauteur.d’environ 27 à 28 pouces, au-
deflùs de la furface du mercure qui eft dans le baflin.
La raifon de cette fufpenfion eft, que le mercure du
tuyau ne fauroit defeendre plus bas fans faire monter
celui qui eft dans le baflin, lequel étant preffé
par le poids de l’atmofphere qu’il fupporte, ne permet
pas .à celui du tuyau de defeendre, à moins que
le poids de ce dernier n’excede celui de l’air qui
prefle fur le baflin. Ce qui prouve que c’eft-là la
caufë de cette fufpenfion, c’eft que fi l’on met le
baflin & le tuyau fous le récipient de la machine
pneumatique, à mefure que l’on pompera Vair, le
mercure du tuyau baillera ; & réciproquement à mefure
que l’on laiflera rentrer Vair, le mercure remontera
à fa première hauteur. C ’eft-là ce qu’on appelle
Vexpérience de TorticelLi.
C’eft aufli à la pefanteur de Vair qu’on doit attribuer
l’effet des pompes. Car fuppofons un tuyau de
verre ouvert de chaque côté, 8c qu’on pouffe dedans
jufqu’en bas un pifton attache à un manche ,
qu’on mette ce tuyau dans un petit baflin de mercure,
& qu’on tire le pifton en haut, qu’en arrivera
t-il ? Comme il n’y a pas d'air & par conféquent
point de réfiftance ni aucune caufe qui agiffe par la
preflîon, entre le pifton & le mercure qui eft dans le
petit baflin, placé à l’ouverture du tuyau, il faut
que le mercure du baflin étant preffé par Vair fupé-
rieur 8c extérieur, monte dans le tuyau & fuive le
pifton ; 8c lorfque le pifton eft arrivé à la hauteur
de 28 ponces environ, 8c qu’on continue de le tirer,
il faut que le mercure abandonneje pifton, 8c qu’il
refte fufpendu dans le tuyau à la hauteur de 28 pouces.
Car le poids de l’air extérieur n’a pas la force
de l’élever davantage. Si on prend de l’eau au lieu
du mercure, comme elle eft environ 14 fois plus légère
, Vair la fera aufli monter plus haut, c’eft-à-dire
jufqu’à environ 3 2 pieds.
L’aftion des enfans qui tetent ne différé pas beaucoup
de celle d’une pompe ; car un enfant qui tete,
avale l’air qui eft dans fa bouche ; il bouche les narines
par-derriere dans le gofier, 8c prend le mam-
melon qu’il ferre tout autour avec fes levres. II gonfle
enfuite fes joues 8c produit de cette maniéré un
vuide dans fa bouche. L’air preffe par fa pefanteur
fur les mammelles, & pouffe le lait vers le mam melon
, & de-là dans la bouche.
On peut aufli expliquer l’aâion des ventoufes
par le même principe. Car la partie de la peau qui
eft enfermée fous la ventoufe, fe trouve fous un
vafe dont on a pompé l’air ; de forte queles humeurs
du corps font pouffées vers cette partie par l ’aftion
de Vair extérieur: ce qui fait que la peau & fes vaif-
feaux fe gonflent & fë lèvent fous la ventoufe.
MuJJch.
Enfin on peut pefer Vair; car fi l’on met un v aiffeau
plein d’air commun dans une balance bien jufte,
on le trouvera plus pefant que fil ’air en avoit été retiré
; 8c le poids fera encore bien plus fenfible, fi l’on
pefe ce même vaiffeau rempli d’air condenfé fous un
récipient d’où on aura pompé Vair. Voye{ Balance
HYDROSTATIQUE.
Quelques perfonnes douteront peut-être que Vair
foit pefant de lui - même, 8c croiront que fa pefanteur
peut venir des vapeurs & des exhalaifons dont
il eft rempli. Il n'y a aucun lieu de douter que la
pefanteur de lWrne dépende effectivement en partie
des vapeurs, comme on peut l’expérimenter, en
prenant une boule de verre pleine d’air, qu’on pompera
enfuite fort exactement. Pour cet effet on mettra
en-haut fur l’ouverture par laquelle Vair devra
rentrer dans la boule, un entonnoir fait exprès, qui
aura une cloifon percée de petits trous ; on mettra
enfuite deffus de la potaffe fort feche, où du fel de
tartre, & on laiflera entrer Vair lentement à-travers
ces fels dans la boule. On attendra affez Iong-tems
afin que la boule fe rempliffe d’air, 8c qu’ elle ne fe
trouve pas plus chaude que Vair extérieur, en cas
qu’il puiffe s’échauffer par quelque fermentation en
paffant à-travers les fels. Si Vair de l’atmofphere eft
fe c , on trouve que Vair qui avoit auparavant rempli
la boule, étoit de même pefanteur que celui qui
y eft entré en traverfant les fels ; & s’il fait un tems
humide, on trouvera que l’air qui a pafle à - travers
les fels, eft plus leger que celui qui auparavant avoit
rempli la boule. Mais quoique cette expérience prouve
que la pefanteur de l’air dépende en partie des
vapeurs qui y nagent, on ne peut s’empêcher de re-
connoître que Vair eft pefant de lui-même ; car autrement
il ne ferait pas poflible de concevoir comment
les nuées qui pefent beaucoup pourraient y
refter fufpendues , ne faifant le plus fouvent que
floter dans l’air avec lequel elles font en équilibre.
Otez cet équilibre, & vous les verrez bientôt fe précipiter
en bas. Mujfch.
Le poids de l’<zir varie perpétuellement, félon les
différens degrés de chaleur & de froid. Riccioli efti-
me que fa pefanteur eft à celle de l’eau, comme un
eft à 1000: Marfene, comme un eft à 1300, ou à
13 56 : Galilée, comme un èft à 400 : M. Boyle, par
une expérience plus exaCte, trouve ce rapport aux
environs de Londres, comme un eft à 93 8 ,8c penfe
que tout bien confidéré, la proportion de un à 1000
doit être regardée comme fa pefanteur refpe&ive
moyenne ; car on n’en fauroit fixer une précife, attendu
que le poids de l’air, aufli bien que celui de
l’eau même, varie à chaque inftant : ajoûtez que les
mêmes expériences varient en différens pays, félon
la différente hauteur des lieux, & le plus ouïe moins
de denfité de Vair, qui réfulte de cette différente hauteur.
Boyle, Phyf. méchan. expér.
II faut ajouter cependant que par des expériences
faites depuis en préfence de la fociété royale de Londres
, la proportion du poids de Vair à celui de l’eau
s’eft trouvée être de un à 840 ; dans une expérience
poftérieure, comme un eft à 852 ; & dans une troi-
lieme, comme un eft à 860, Phil. Tranf. n0. 181 ; 8c
enfin en dernier lieu, par une expérience fort fimple
& forte exa&e, faite par M. Hawksbée, comme un
eft à 885. Phyf. méch. expér. Mais toutes ces expériences
ayant été faites en été, le doâeur Jurin eft
d’avis qu il faut çhoifir un tems entre le froid & le
chaud, 8c qu’alors la proportion de la pefanteur de
l’air à celle de l’eau fera de un à 800.
M. Muffchenbroek dit avoir quelquefois trouvé
que la pefanteur de l’air étoit à celle de l ’eau comme
1 à 606, lorfque Vair étoit fort pefant. Il ajoute qu’en
faifant cette expérience en différentes années & dans
des faifons differentes, il a obfervé une différence
continuelle dans cette proportion de pefanteur ; de
forte que fuivant les expériences faites en divers endroits
de 1 Europe, il croit que le rapport de la pefanteur
de l’air à celle de l’eau doit être réduit à certaines
bornes , qui font comme un à 60 6 ,8c de - là jufqu’à
1000.
L air une fois reconnu pefant 8c fluide, les lois de
fa gravitation 8c de fa preflîon doivent être les mêmes
que celles des autres fluides ; & conféquemment
fa preflion.doit être proportionnelle à fa hauteur perpendiculaire.
Voye^ Fluide.
D ’ailleurs cette conféquence eft confirmée par
les expériences. Car fi l’on porte le tube de Torri-
celli en un lieu plus é lev é, où par conféquent la colonne
d air fera plus courte, la colonne de mercure
foutenue fera moins haute, & baiffera d’un quart de
pouce lorfqu’on aura porté le tube à cent piés plus
haut, 8c ainli de cent piés en cent piés à mefure qu’on
montera.
De ce principe dépend la ftru&ure 8c l’ufage du
baromètre. Voye^ Baromètre.
De ce même principe il s’enfuit aufli que Vair ,
comme tous les autres fluides, preffe également de
toutes parts. C’eft ce que nous avons déjà démontré
ci-deffus, 8c dont on voit encore la preuve, fi l’on
fait attention que les fubftances molles en foûtien-
nent la preflîon fans que leur forme en foit changée,
8c les corps fragiles fans en être brifés, quoique la
preflîon de la colonne d’air fur ces corps foit égale à
celle d’une colonne de mercure de 30 pouces, ou
d’une colonne d’eau de 3 2 piés. Ce qui fait que la figure
de ces corps n’eft point altérée, c eft la preflîon
égale de Vair qui fait qu’autant il preffe d’un côté, autant
il réfifte du côté oppofé. C ’eft pourquoi fi l’on
ôte ou fi l’on diminue la preflîon feulement d’un
cô té , l’effet de la preflîon fur le côté oppofé fe fen-
tira bien-tôt.
De la gravité 8c la fluidité confédérées conjointement,
s’enfuivent plufieurs ufages & plufieurs effets
de Vair. i°. Au moyen de ces deux qualités conjointes
, il enveloppe la terre avec les corps qui font
deffus, les preffe, 8c les unit avec une force confidérable.
Pour le p rouver, nous obferverons que dès
qu’on connoît la pefanteur fpécifique de l’air, on
peut favoir d’abord combien pefe un pié-cube d’air;
car fi un pie-cube d’eau pefe 64 livres , un pié-cube
d’air pefera environ la 800e partie de 64 livres : delà
on pourra conclure quel eft le poids d’une certaine
quantité d’air. On peut aufli déterminer quelle
eft la force avec laquelle l’air comprime tous les corps
terreftres. Car il eft évident que cette preflîon eft la
même que fi tout notre globe etoit couvert d’eau à la
hauteur de 3 2 piés environ. Or un pié - cube d’eau
pefant 64 livres, 3 2 piés peferont 3 2 fois 64 livrés ;
ou environ 2048 livres ; 8c comme la furface de là
terre contient à-peu-près 5547800000000000 piés
quarrés, il faudra prendre 2048 fois ce grand nombre
pour avoir à-peu-près le poids réduit en livres
avec lequel l’air comprime notre globe. Or on voit
aifément que l’effet d’une telle preflîon doit être fort
confidérable.Par exemple elle empêche les vaiffeaux
artériels des plantes 8c des animaux d’être exceflî-
vement diftendus par l’impétuofité des fucs qui y
circulent, ou par la force élaftique de Vair dont il
y a une quantité confidérable dans le fâng. Ainfi nous
ne devons plus être furpris que par l’application des
ventoufes, la preflîon de l’air étant diininuée fur une
partie du corps , cette partie s’enfle ; ce qui caufe
néceffairement un changement à la circulation des