peut déduire d’aucune des propriétés dont nous venons
de parler. C ’eft pour cela que M. Boyle a com-
pofé un traité exprès, intitulé Conjectures fur quelques
propriétés de Voir encore inconnues. Les phénomènes
de la flamme & du feu dans le vuide portent à
croire, félon cet auteur, qu’il y a dans l’air une fubftance
vitale & finguliere, que nous ne connoiffons
pas, en conféquence de laquelle ce fluide eft fi né-
cefîaire à la nutrition de la flamme. Mais quelle que
foit cette fubftance, il paroît en examinant l’air qui
en eft dépouillé, & dans lequel conféquemment la
flamme ne peut plus fubfifter, qu’elle y eft en bien
petite quantité en comparaifon du volume d’air qui
en eft imprégné, puifqu’on ne trouve aucune altération
fenfible dans les propriétés de cet air. Voye^
Flamme.
D ’autres exemples qui fervent à entretenir ces con-
je&ures, font les fels qui paroiflent & qui s’accroif-
ient dans certains corps, qui n’en produiroient point
du tout, ou en produiroient beaucoup moins s’ils n’é-
toient pas expofés à l’air. M. Boyle parle de quelques
marcaflites tirées de deflous terre, qui étant
gardées dans un endroit fec, fe couvraient allez vite
d ’une efflorefcence vitriolique, & s’égrugeoient en
peu de tcms en une poudre qui contenoit une quantité
confidérable de couperofe, quoique vraiflembla- ;
blement elles fuflent reliées en terre plufieurs fiecles
fans fe difloudre. Ainfi la terre ou la mine d’alun &
de quantité d’autres minéraux, dépouillée de fes fels,
de fes métaux & autres fubftances, les recouvre avec
le tems. On obferve la même chofe du fraifi dans les
forges. Voyc^ Mine, Fer, &c.
M. Boyle ajoute, que fur des enduits de chaux de
vieilles murailles , il s’amaffe avec le tems une.efflo-
refcence copieufe d’une qualité nitreufe dont on tire
du falpetre. Le colcothar de vitriol n’eft point naturellement
corrofif, & n’a de lui-même aucun fel:
mais fi on le laifle quelque tems expdfé à l’air, il
donne du fel, & beaucoup. Voye^ Colcothar.
Autre preuve qui conftate ces propriétés cachées
de Yair; c ’eft que ce fluide , introduit dans les médi-
camens antimoniaux, les rend émétiques, propres à
caufer des foiblefles de coeur & des brûlemèns d’entrailles
; & qu’il gâte & pourrit en peu de tems des
arbres déracinés qui s ’étoient confervés fains & entiers
pendant plufieurs fiecles qu’ils étoient reftés fur
pié. Voye^ AN T IM O IN E .
Enfin les foies dans la Jamaïque fe gâtent bien-tôt,
fi on les laifle expofées à l’air, quoiqu’elles ne perdent
pas toujours leur couleur; au lieu que quand
on ne les y expofe pas, elles confervent leur force
& leur teinture. Le taffetas jaune porté au Brefil y
devient en peu de jours gris-de-fer, fi on le laifle
expofé à l’air ; au lieu que dans les boutiques il con-
ferve fa couleur. A quelques lieues au-delà du Para-
gu a i, les hommes blancs deviennent tannés : mais
dès qu’ils quittent cette contrée , ils redeviennent
blancs. Ces exemples, outre une infinité d’autres que
nous ne rapportons point i c i , fuffifent pour nous
convaincre que nonobftant toutes les découvertes
qu’on a faites jufqu’ici fur l’air, il refte encore un
vafte champ pour en faire de nouvelles.
Par les observations qu’on a faites fur ce qui arriv
e , lorfqu’après avoir été faignédans des rhûmatif-
mes on vient à prendre du froid, il eft avéré que l’air
peut s’infinuer dans le corps avec toutes fes qualités,
& vicier toute la malle du fang & des autres humeurs.
Voye^ Sang.
Par les paralyfies., les vertiges & autres affections
nerveufes que caufent les mines, les lieux humides
& autres, il. eft évident que l’air chargé des qualités
qu’il a dans ces lieu x, peut relâcher 6c obftruer
tout le fyftème nerveux. Voye[ Humidité , &c. Et
les coliques, les fluxions, les toux, & les confomplions
que produit un air humide, aqueux & nitreux '
font bien voir qu’un tel air eft capable de gâter & de
dépraver les parties nobles, &c. Voyez l'article Atmosphère.
M. Defaguliers a imaginé une machine pour chan--
ger l’air de la chambre d’une perfonne malade , en
en chalfant l’air impur, & y en introduifant du frais
par le moyen d’une roue qu’il appelle roue centrifuge,
fans qu’il foit befoin d’ouvrir ni porte, ni fenêtre ;
expédient qui ferait d’une grande utilité dans les mi-;
nés, dans les hôpitaux, & autres lieux femblables,
oii l’air ne circule pas. On a déjà pratiqué quelque
chofe de femblable à Londres, pour évacuer de ces
lieux l’air échauffé par les lumières & par l’haleine
& la fueur d’un grand nombre de perfonnes, ce qui
eft très-incommode, fur-tout dans les grandes chaleurs.
Voye£ Tranfàcl. philof. n°. 43 7 . page 41.
M. Haies a imaginé depuis peu une machine très-
propre à renouveller l’air. Il appelle cette machine
le ventilateur. Il en a donné la defcription dans un ouvrage
qui a été traduit en François par M. de Mours*.
do&eur en Medecine, & imprimé à Paris il y a peu
d’années. Voye[ Ventilateur.
Air inné, eft une fubftance aerienne extrêmement
fubtile, que les Anatomiftes fuppofent être enfermée
dans le labyrinthe de l’oreille interne, Sc
qui fert, félon eux , à tranfmettre les fons au fenfo-
rium commune, Voye^ Labyrinthe, Son, Ouïe.
Mais par les queftions agitées dans ces derniers
tems au fujet de l’exiftence de cet air inné, il commence
à être fort vraifîemblable que cet air n’exifte
pas réellement.
Machine à pomper l'air. Voye^ Machine PNEUMATIQUE.
(O)
Ai r , ( Théol.) L'air eft fouvent défigné dans l’Ecriture
fous le nom de ciel ; les oifeaux du ciel pour les
oifeaux de l'air. Dieu fit pleuvoir du ciel fur Sodome lé
foufrc & ïs feu; c’eft-à-dire i l fit pleuvoir de l'air. Que.
le feu defcendu du c iel, c’eft-à-dire de Pair. Moyfe
menace les Ifraélites des effets de la colere de D ieu ,
de les faire périr par un air corrompu : percutiat te
Dominus aere corrupto ; ou peut-être par un vent brûlant
qui caufe des maladies mortelles, ou par une fé-
cherefle qui fait périr les moiffons. Battre l'air, parler
en l'air, font des maniérés de parler ufitées même
en notre langue, pour dire parler fans jugement,fans
intelligence, fe fatiguer en vain. Les puiffances de l ’air,
( Ephef. xj. 2.) font les démons qui exercent princi--
palement leur puiflance dans l'air, en y excitant des
tempêtes, des vents, & des orages. Gen.xjv. 24.
I V . Reg.j, 10. Deut. xxij. 2 2 .1. Cor.jx. 24. xjv. c}.
Dict. de la Bible du P. Calmet, tome I. k.page 8<). (G j
* Air. Les Grecs adoraient l'air, tantôt fous le
nom de Jupiter, tantôt fous celui de Junon. Jupiter
régnoit dans la partie fupérieure de l’atmofphere,
Junon dans fa partie inférieure. L'air eft aufli quelquefois
une divinité qui avoit la lune pour femme 8c
la rofée pour fille. Il y avoit des divinations par le
moyen de l'air ; elles confiftoient ou à obferver le vol
& le cri des oifeaux, ou à tirer des conjeûures des
météores & des cometes, ou à lire les évenemens
dans les nuées ou dans la direction du tonnerre. Mé-
nelas dans Iphigénie attefte l'air témoin des paroles
d’Agamemnon : mais Ariftophane traite d’impiété ce
ferment d’Euripide. Plus on confidere la religion des
Payens, plus on la trouve favorable à laPoéfie ; tout
eft animé, tout refpire, tout eft en image ; on ne.
peut faire un pas fans rencontrer des chôfes divines
& des dieux, & une foule de cérémonies agréables à
peindre, mais peu conformes à la raifon.
* Air , Maniérés , cohjidérés grammaticalementl.
L'air femble être né avec nous; il frappe à la première
vue. Les maniérés font d’éducation. On plaît
par l'air; on fe diftingue par les maniérés, L'air prévient,
les maniérés engagent.Tel vous déplaît & vous
éloigne par fon air, qui vous retient & vous charme
en fui te par fes maniérés. On fe donne un air ; on af-
feéte fes maniérés. On compofe fon air; on étudie
des maniérés. Voyeç les Synonymes François. On ne
peut être un fat fans favoir fe donner air & affeéler
des maniérés; pas même peut-être un bon comédien.
Si l’on ne fait compofer fon air & étudier fes manières
, on eft un mauvais courtifan ; & l’on doit s’éloigner
de tous les états où l’on eft obligé de paroître
différent de ce qu’on eft.
Air , fe dit en Peinture, de l’impreflion que fait un
tableau, à la vue duquel on femble réellement ref-
pirer l'air qui régné dans la nature fuivant les différentes
heures du jour : frais, fi c’eft un foleil levant
qu’il repréfente ; chaud, fi c’eft un couchant. On dit
encore qu’il y a de l'air dans un tableau, pour exprimer
que la couleur du fond 8c des objets y eft diminuée
felon les divers degrés de leur éloignement :
cette diminution s’appelle la perfpeclive aérienne. On
dit aufli air de tête: tel fait de beaux airs de tête. On
dit encore attraper, faifirl'air d’un vifage, c’eft-à-
dire le faire parfaitement reflembler. En ce cas l'air
fembleroit moins dépendre de la configuration des
parties, que de ce qu’on pourrait appeller le gefie du
vifage. (R)
Air , en Mufîque, eft proprement le chant qu’on
adapte aux paroles d’une chanfon ou d’une petite
piece de poéfie propre à être chantée ; & par exten-
lion on appelle air la chanfon même. Dans les opéra
on donne le nom d'airs à tous les morceaux de mufi-
que mefurés, pour les diftinguer du récitatif qui ne
l’eft pas ; & généralement on appelle air tout morceau
de mulique , foit vocale, foit inftrumentale,
qui a fon commencement 8c fa fin. Si le fujet eft di-
vifé entre deux parties, l'air s’appelle duo; fi entre
trois , trio, &c.
Saumaife croit que ce mot vient du Latin oera ; &
M. Burette eft de fon opinion, quoique Menage combatte
ce fentiment dans fon étymologie de la langue
françoife.
Les Romains avoient leurs lignes pour le rythme,
ainfi que les Grecs avoient les leurs ; 8c ces lignes,
tirés aufli de leurs caraéleres numériques, fe nom-
moient non-feulement numerus, mais encore ara ,
c ’eft-à-dire nombre, ou la marque du nombre ; nu-
meri nota , dit Nonius Marcellus. C ’eft en ce fens
qu’il fe trouve employé dans ce vers de Lucile :
Hcec efl ratio ? perverfa ara ? fumma fubducla
improbe ?
Et Sextus Rufus s’en eft fervi de même. Or quoique
ce mot ara ne fe prît originairement parmi les Mu-
ficiens que pour le nombre ou la mefure du chant,
dans la fuite on en fit le même ufage qu’on avoit fait
du mot numerus ; 8c l’on fe fervoit d'ara pour défi-
gner le chant même : d’où eft venu le mot françois
air , & l’italien aria pris dans le même fens.
Les Grecs avoient plufieurs fortes d'airs qu’ils appelaient
nomes, qui avoient chacun leur caraélere , ■
8c dont plufieurs étoient propres à quelques inftru-
mens particuliers , à-peu-près comme ce que nous I
appelions aujourd’hui pieces ou fonates.
La mulique moderne a diverfes efpeces d'airs qui
conviennent chacune à quelque efpece dedanfedont
ils portent le nom. Voye^ Menuet, Gavotte , Musette
, Passepié , C hanson , &c. (S j
Air , (Jard.) On dit d’un arbre qu’il eft planté
en plein vent ou en plein air, ce qui eft fynonyme.
Voyeç Air. (R)
Air , en Fauconnerie ; on dit l’oifeau prend l'air,
c cft-à-dire qu’il s’élève beaucoup.
* Air ou Ay r , ( Géog.) ville d’Ecoffe à l’emboùchute
de la rivière de fon nom. Long. 14. 40. lat.
SS. 22.
AIRAIN ou CUIVRE JAUNE, f. m. (a /m .)c ’eft
un métal faétice compofé de cuivre fondu avec la
pierre de calamine qui lui communique la dureté &
la couleur jaune. Voye{ Méta l, Cuivre.
On dit que les Allemands ont pofledé long-tems
le fecret de faire ce métal. Voici préfentement comment
on le préparé. On mêle avec du charbon de
terre de-la pierre calamine calcinée & réduite en
poudre : on incorpore ces deux fubftances en une
feule malle par le moyen de Peau ; enfuite quand
cela eft ainfi préparé, on met environ fept livres de
calamine dans un vafe à fondre qui doit contenir
environ quatre pintes, & on ÿ joint à-peu-près cinq
livres de cuivre : on met le vafe dans une fournaife
à vent de huit piés de profondeur, & on l’y laifle
environ onze heures, au bout duquel tems l'airain
eft forme. Quand il éft fondu, on le jette en malles
ou en bandes. Quarante-cinq livres de calamine
crue, trente livres étant brûlée ou calcinée, & foi-
xante livres de cuivre, font avec la calamine cent
livres d'airain. Du tems d’Erker, fameux Métallur»
gifle, foixante & quatre livres de cuivre ne don-
noient par le moyen de la calamine , que quatre-
vingts-dix livres d'airain.
Airain, qui autrefois ne fignifioit que le cuivre &
dont on fe fert préfentement plus particulièrement
pour lignifier le cuivre jaune, fe dit encore du métal
dont on fait des cloches,& qu’on nomme aufli bronze.
Ce métal fe fait le plus communément avec dix parties
de cuivre rouge & une partie d’étain ; on y ajoûte
aufli un peu de zinc.
L'airain de Corinthe a eu beaucoup de réputation
parmi les anciens. Le cônful Mummius ayant
faccagé & brûlé Corinthe 146 ans avant J. C. on dit
que ce précieux métal fut formé de la prodigieufe
quantité d’o r , d’argent & de cuivre dont cette ville
étoit remplie, & qui fe fondirent enfemble dans cet
incendie. Les ftatues, les vafés, &c. qui étoient faits
de ce métal , étoient d’un prix ineltimable. Ceux
qui entrent dans un plus grand détail, le diftinguent
entrois fortes : l’or étoit le métal dominant de la première
efpece ; l’argent de la fécondé ; & dans la troi-
fieme, l’o r, l’argent, & le cuivre, étoient en égale
quantité.
Il y a pourtant une difficulté au fujet du cuivre dit
Corinthe ; c’eft que quelques auteurs difent que c e
métal étoit fort recherché avant le fac de Corinthe
par les Romains ; ce qui prouverait que le cuivre de
Corinthe n’étoit point le produit des métaux fondus
confufément dans l’incendie de cette v ille , & que les
Corinthiens avoient pofledé particulièrement l’art
de compofer un métal où le cuivre dominoit,& qu’on
nommoit pour cela cuivre de Corinthe. Voye{ Cuivre*
L'airain ou cuivre jaune eft moins fujet à verdir que
le cuivre rouge : il eft aufli plus dur, c’eft de tous les
métaux le plus dur ; c’eft ce qui a fait qu’on s’en eft
fervi pour exprimer la dureté : on dit-an Jiecle d?airain,
un front d'airain, & c . Les limes qui ne peuvent
plus fervir à Vairain font encore bonnes pour
limer le fer ; ce qui prouve que le fer eft moins dur
que l 'airain. (ÀH
AIRE, area, f. f. Une aire eft proprement une fur-
face plane fur laquelle.on marche. Voye^ Plan.
Le mot latin area , d’où vient aire , lignifie proprement
le lieu oii l’on bat le blé ; il eft dérivé de
arere, être fec.
Aire , en Géométrie, eft la furface d’une figure
reétiligne, curviligne, ou mixtiligne, c’eft - à - dire
l’elpace que cette figure renferme. Voye£ Surface
Figure , &c.
' Si une aire, par exemple un champ, a la figure
d’un quarré dont le côté foit de 40 piés, cette air»