ehrift dit à fes iiftiples ,. &e. H fert âe'l» ptépofi-
rion ad, dit ad illos. Les Latins difoient egalement
loauï alicuï, 8c loqui aidiquem, parler à quelqu un ; ,
àfferrc aliquid alicui, ou ad aliqucm , apporter quelque
chofe à quelqu’un, Oc. Si de ces deux maniérés
de s’exprimer nous avons choifi celle qui s énoncé
par la prépofition, c’eft que nous n avons point tle
datif. . . ,
i ° . Les Latins difoient auffiperttnere ad; nous di-
fons de même avec la prépofition appartenir a.
2°. Notre prépofition à vient ainli quelquetois de
la prépofition latine à ou ab ; auferre aliqujd alicui ou
ab aliquo , ôter quelque cho'fe à quelqu un : on dit
auffi, eripere aliquidalicui ou ab aliquo ; peterc veniarn
à Deo, demander pardon à Dieu.
Tout ce que dit M. l’abbé Regnier pour faire voir
que nous avons des datifs, me paroît bien mal afior-
ti avec tant d’obfervations judicieufes qui font répandues
dans fa Grammaire. S e lo n ce célébré aca-
démîcien ■ quand on dit
s'cli donné a moi, à mai eft au datif : mais n l oti dit
uh chiai qui s'eft adxifmi à moi, c e t* min ne fera plus
alors un datif ; c’e l ld i t - i l , la n B B
J’avoue que’ je nefauroisreconnoitrelaprepoùtion
latine dans adonné i , fans la voir auffi dans donna
i 8e que dans l’une & dans l’autre de ces phrales les
deux à -me paroiffent de même efpece,, 8c; avoir la
même origine, En un mot, puifque.ud aliquem.oa
db aliquo ne font point des datifs en latin, je ne vois
pas pourquoi à quelqu'un pourrait être un datit en
^Je regarde donc de & à comme de fimples prépo-
fitions, auffi bien que par, pour, avec, Sec. les unes
& les autres fervent à faire connoitre en françois les
rapports particuliers que l’ufage les a charges de marquer,
fâUf à la langue latine à exprimer autrement
ces mêmes rapports.
A l’égard H H H H H n’en, fais pas une daffe
particulière des mots fous le nom d article ; je les pla-.
t e avec les adjeûifs prépofitifs, qui ne fe mettent jamais
que devant leurs fubftantils, Sc qui ont chacun
un fervice qui leur eft propre. On pourrait les ap-
^eComme°Uft>ciété civile ne fauroit employer trop
de moyens pour faire naître dans le coeur des hommes
des fentimens, qui d’une part les p o r tâ t à éviter
le mal qui eft Contraire; à eette fociete, & de 1 autre
les engagent à pratiquer le bien , qui fert à la
fflainteniri à la rendre floriffante ; de même 1 art de
la parole ne fauroit nous donner trop de fecours pour
nous faire éviter l’obfcurité 8e 1 amphibologie, m
inventer unaffez grand nombre de mots, pour énoncer
non-feulement les diverfes idees quenousavons
dans l’efprit, mais encore pour exprimer les differentes
faces fous«quelles nous eonhderons les objets
de ces idées. I ,
Telle eft la deftination des:- prénoms ou adjectifs
«étaphyfiques, qui marquent, non des qualités phy-
fiqués des objets, mais feulement des points de vue
de l’efprit, ou des faces différentes tous lefquelles
l ’efprit confidere le même mot ; tels lont tout, clue-
aue , nul. aucun, quelque , certain, dans le lens de quidams
un, ce, cet .e a u , cri, U , la , les, auxquels on
peut joindre encore les adjectifs poffeflifs tires des
pronoms perfonnels; tels font mon,ma, mes, 8c les
noms de nombre cardinal, un-, deux, trois, Hcc.
■ Ainfi je mets le , la , les, an rang de Ces pronoms
ou adjeûifs métaphyfiques.-Pourquoiles.ôter de la
çlaffe de ces autres adjeûifs î
Ils font adjeûifs puilqu’ils modifient leur fubltan-
tifs 8c qu’ils lefont prendre dansuiie acception particulière
, individuelle, & perlonnelle. .Ce.font des
adjeûifs métàphyfiques , puifqu’ilsi marquent, non
<lës qualités phyfiques, mais: une umple vue particulière
de l’elptiu
Prefque tous nos Grammairiens (Regnier,^. iq.il
Reftaut ,p . 64.) nous difent que le , la , les , fervent
à faire connoître le genre des noms, comme fi c’etoit
là une propriété qui fût particulière à ces petits mots.
Quand on a un adjèâif à, joindre à un nom, on donne
à cet ad jeâ if, ou la terminaifon mafeuline , ou
la féminine. Selon ce que 1 ufage nous en a appris,
lî nous difons le foleil plûtôt que lafoleil, comme
les Allemands, c’eft que nous favons qu’en françois
foleil eft du genre mafeulin , c’eft-à-dire qu il eft
dans la claffe des noms des chofes inanimées auxquels
l’ufage a confacré la terminaifon des adjeâifs déjà
deftinée aux noms des mâles , quand il s agit des animaux.
Ainfi lorfque nous parlons du foleil, nous difons
le foleil, plûtôt que la , par la même raifon que
nous dirions beaufoleil, brillant foleil, plûtôt que belle
ou brillante.
Au réfte, quelques Grammairiens mettent le , la ,
les, au rang des pronoms : mais fi le pronom eft un
mot qui fe mette à la place du nom dont il rappelle
l’idée y le ,la , les, ne feront pronoms que lorfqu’ils feront
cette fonûion : alors ces mots vont tous feulsôc
ne fe trouvent point avec le nom qu’ils reprefentent.
La vertu e f aimable ; aime^-la. Le premier la eft adjectif
métaphyfique ; ou comme on dit article, il précédé
fon fubftantif vertu; il perfonifie la vertu ; il la
fait regarder comme un individu metaphyfique : mais
le fécond la qui eft après aime^, rappelle la vertu, U
c’eft pour cela qu’il eft pronom, Sc qu’il va tout leul ;
alors la vient de illam , elle. . '
C ’eft la différence du fervice ou emploi des mots,
Sc non la différence matérielle du fon , qui les fait
placer en différentes claffes : c’eft ainfi que l'infinitif
des verbes eft fouvent nom , le boire , lemangep.
Mais fans quitter nos mots, ce même fon la n’eft-il
pas auffi quelquefois un adverbe qui répond aux adverbes
latins, ibi, hâc, ifac, illac, il demeure là , il v a
là ? Oc. N’eft-il pas encore un nom fubftantif quand
il fignifie une note de nnifique ? Enfin n’eft-il pas auffi
une particule explétive qui fert à l’energie ? et jeune
hommè-là, cette femme-là, &c.
A l’égard de un, une, dans le (ens de-quelque ou
certain, en latin quidam , c’eft encore un adjeCtif pre-
pofitif qui défigne un individu particulier, tire d une
efpece, mais fans déterminer fingulierement quel eft
cet individu , fi c’eft Pierre ou Paul. Ce mot nous
vient auffi du latin, quis efiis homo, unus ne amator ?
(Plaut. Truc. I.ij.go.^) quel eft cet homme, eft-ce:là
Un amoureux ? hic e f unus fervus violentijfmus, (Plaut.
ibid. II. i. s s ) .\ c’eft un efclave emporté ; ficut unus
paterfamilias, ( C ic. de orat. i. 29.) comme un pere
de famille. Que variare cupit rem prodigialiter unam ,
(Hor.art.poet.v. zcf . ) celui qui croit embellir un
fujet, unam rem , en y faifant entrer du merveilleux.
Forüunamadfpicio adolefcentulam , ( Ter. And. acl. /.
fc. I .v . £ / .) j’apperçois par hafard une jeune.fille.
Donat qui a commenté Térence dans le tems que la
langue latine étoit encore une langue vivante, dit fur
ce paffage que Térence a parlé felonTufage, & que
s’il a dit unam, une, au lieu de quamdam, certaine ,
c’eft que telle étoit, dit-il, & que telle eft encore,Ia
maniéré de parler. E x confuetudine dicit unam, ut di*
cimus, unus efladolefcens : unam ergo tu iS'iaTur/xadixit,
vel unam pro quamdam. Ainfi ce mot n’eft en françois
que ce qu’il étoit en latin.
La Grammaire générale de P. R. pag. A g . dit que
un eft article indéfini. Ce mot ne me paroît pas plus
article indéfini que tout, article uni verfel, ou ce, cette,
ces, articles définis. L ’auteur ajoûte, qu’on croit d’ordinaire
que un n'a point de plurier ; qu'il e f vrai qu’il
n’en a point qui foit formé de lui-même : (o n dit ppur-
tant, les uns, quelques-unj ; & les Latins ont dit au
pluriel uni, unct, 6cc. Ex unis geminas mihi confdet
. nuptias. (Te r. And. a3 , lF ,fc . 1. v. âij) Aderit una
iti unis (tdibus. (T e r . Eun. acl. II.Je. iij. v. yS. Sc félon
MdeDacier, acl. IL.fc.jv. v .74 .) Mais revenons
à la Grammaire générale. Je dis, pourfuit l’auteur,
que un a un pluriel pris d'un autre mot, qui e f des, avant
les Jubf antifs, des animaux ; & de, quand Vadjectif
précède, de beaux lits. De un pluriel! cela eft nouveau.
Nous avons déjà obfervé que des eft pour de les, &
que de eft une prépofition, qui par conféquenf fuppo-
fe un mot exprimé oufoufentendu, avec lequel elle
puifle mettre fon complément en rapport : qu’ainfi il
y a ellipfe dans ces façons de parler; Sc l’analogie
s’oppofe à ce que des ou de foient le nominatif pluriel
d’«n ou d'une.
L’auteur de cette Grammaire générale me paroît
bien au-deffous de fa réputation quand il parie de ce
mot des à la page ç f : il dit que cette particule eft
quelquefois nominatif ; quelquefois accufatif, ou génitif,
Ou datif, ou enfin ablatif de l’article un. Il ne
lui manque donc que de marquer le vocatif pour être
la particule de tous les cas. N’eft-ce pas là indiquer
bien nettement l’ufage que l’on doit faire de cette
prépofition ?
Ce qu’il y a de plus furprenant encore, c’eft que
cet auteur foûtient, page 5 5, que comme on dit au dat
i f fihgulier à un, & au datif pluriel à des, on devrait
dire au génitif pluriel de dés ; puifque des e f , dit-il, le
pluriel d'un : que f i on ne Va pas fait ,c'efi, pourfuitil,
par une raifon qui fait la plupart des irrégularités des
langues, qui efi la cacophonie; ainfi, dit-il, félon la
parole d’un ancien, impetratum e f à ratione utpeccare
fuavitatis caufâ liceret;Sc cette remarque a été adoptée
par M. Reftaut, pag. y g. & yS.
Au refte, Cicéron dit, ( Orator, n. X LV I I j) que
impetratum efi à confuetudine, Sc non à ratione, utpec-
tare fuavitatis caufâ liceret : mais foit qu’on life à confuetudine,
avec Cicéron, ou à ratione, félon la Grammaire
générale, il ne faut pas croire que les pieux fo-
litaires de P. R. ayent voulu étendre cette permiffion
au-delà de la Grammaire.
Mais revenons à notre fujet. Si l’on veut bien faire
attention que des eft pour de les ; que quand on dit à
des hommes, c’eft à de les hommes; que de ne fauroit
alors déterminer à, qu’ainfi il y a ellipfe à des hommes,
é’eft-à-dire à quelques-uns de les hommes, quibufdam
ex kominibus : qu’au contraire, quand on dit le Sauveur
des hommes., la conftruûion eft toute fimple ; on
dit au fingulier, le Sauveur de l'homme, & ati pluriel
le Sauveur de les hommes; il n’y a de différence que de
le à les, Sc non à la prépofition. Il feroit inutile Sc ridicule
de la répéter; il en eft de des comme de aux,
l ’un eft de les, & l’autre à les : or comme lorfque le
fens n’eft pas partitif, on dit aux hommes fans ellipfe,
On dit auffi des hommes; dans le même fens général,
l'ignorance des hommes , la vanité des hommes.
Ainfi regardons i°. le, la, les, comme de fimples
adjeâifs indicatifs Sc métàphyfiques^ auffi-bien que
Ce, cet, celte, un, quelque., certain, &c.
2°. Confidérons de comme une prépofition, qui,
ainfi que par, pour, en, avec, fans, Sec. fert à tourner
l ’efprit vers deux objets, Sc à faire appercevoir le
ïapport que l’on veut indiquer entre l’un Sc l’autre.
30. Tnfin décompofons au, aux, du, des, faifant
attention à la deftination & à la nature de chacun des
mots décompofés , & tout fe trouvera applani.
Mais avant que de paffer à un plus grand détail ;
touchant l’emploi & l’ufage de ces adjeâifs, je crois !
qu’il ne fera pas inutile de nous arrêter un moment
aux réflexions fuivantes : elles paroîtront d’abord
étrangères à notre fujet ; mais j’ofe me flater qu’on
teconnoîtra dans la fuite qu’elles étoient néceffaires.
Il n’y a en ce monde que des êtres réels, que nous \
Tne connoiffons que par les impreffions qu’ils font fur
les organes de nos fens, ou par des reflexions qui
iuppofent toujours des impreffions fenfiblej.
Ceux de ces êtres qui font féparésdesautres, font
chacun un enfemble, un tout particulier par la liai—
fo n , la continuité, le rapport, & la dépendance de
leurs parties.
Quand une fois les impreffions que ces divers objets
ont faites fur nos fens, ont été portées jufqu’au
cerveau, & qu’elles y ont laiffé des traces, nous pouvons
alors nous rappeller l’image ou l’idée de ces objets
particuliers, même de ceux qui font éloignés de
nous ;•& nous pouvons par le moyen de leurs noms,
s’ils en ont un, faire connoître aux autres hommes,
que c’eft à tel objet que nous penfons plûtôt qu’à tel
autre. ^
Il paroît donc que chaque être fingulier devroit
avoir fon nom propre, comme dans chaque famille
chaque perfonne a le fien : mais cela n’a pas été pof-
fible à caui’e de la multitude innombrable de ces êtres
particuliers, de leurs propriétés Sc de leurs rapports*
D ’ailleurs, comment apprendre Sc retenir tant de
noms ?
Qu’a-t-on donc fait pour y fuppléer ? Je l’ai appris
en me rappellant ce qui s’eft paffé à ce fujet paf
rapport à moi.
Dans les premières années de ma v ie , avant que
les organes de mon cerveau euffent acquis un certain
degré de confiftance, Sc que j’euffe fait une certaine
proyifion de connoiffances particulières , les noms
que j’entendois donner aux objets qui fe préfentoient
à moi, je les prenois comme j’ai pris dans la fuite les
noms propres.
Cet animal à quatre pattes qui venoit badiner avec
moi, je l’entendois appeller chien. Je croyois par fen-
timent Sc fans autre examen, car alors je n’en étois
pas capable, que chien étoit le nom qui fer voit à le
diftinguer des autres objets que j ’entendois nommer
autrement.
Bientôt un animal fait comme ce chien vint dans
la maifon, & je l’entendis auffi appeller chien; c’efi,
me dit-on, le chien de notrevofin. Après cela j’en vis
encore bien d’autres pareils, auxquels on ffonnoit
auffi le même nom, à caufe qu’ils étoient faits à peu
près de la même maniéré ; Sc j’obfervai qu’outre le
nom de chien qu’on leur donnoit à tous, on les ap-
pelloit encore chacun d’un nom particulier : celui
de notre maifon s’appelloit médor; celui de notre
voifin, marquis; un autre, diamant, &c.
Ce que j’avois remarqué à l’égard des chiens, je
l’obfervai auffi peu à peu à l’égard d’un grand nombre
d’autres êtres. Je vis un moineau, enfuite d’autres
moineaux ; un cheval, puis d’autres chevaux ;
Une table, puis d’autres tables ; un livre, enfuite des
livres, &c.
Les idées que ces différens noms excitoient dans
mon cerveau, étant une fois déterminées, je vis bien
que je pouvôis donner à médor jSt à marquis le nom
de chien; mais que je ne pouvois pas leur donner le
nom de cheval, ni celui de moineau, ni celui de table,
ou quelqu’autre : èn effet, le nom de chien réveilloit
dans mon efprit l’image de chien, qui jeft différente
de celle de cheval, de celle de moineau, &c.
Médor avoit donc déjà deux noms, celui de médor
qui le diftinguoit de tous les autres chiens, & celui de
chien qui le mettoit dans une clafle particulière, différente
de celle de cheval, de moineau, de table, &c.
Mais un jour on dit devant moi que médor étpit un
joli animal ; que le cheval d’un de nos amis étoit un
bel animal ; que mon moineau étoit un petit animai
bien privé Sc bien aimable ; Sc ce mot Ranimai je ne
l*ai jamais oiii dire d’une table, ni d’un arbre, ni d’une
pierre, ni enfin de tout ce qui ne.marche pas, ne fent
pas, & qui n’a point les qualités communes Sc particulières
à tout ce qu’on appelle animal.
Médor eut donc alors trois noms, médor, chien0
animal.