dans le feu, pour les plonger, après qu’elles font un
peu refroidies, dans de l’eau fécondé, où on les laif-
fe féjourner un peu de teins. I
La troifieme, c’eft de les poncer; les poncer, c’eft
après qu’elles ont été recuites, les éclaircir en les
frottant à l ’eau avec une pierre ponce.
La quatrième confifte à faire réchauffer médiocrement
la piece éclaircie, & à la replonger dans
l ’eau fécondé. Elle fera chaude au degré fuffifant
pour être plongée, fi l’ébullition qu’elle cauferadans
l’eau , en y entrant, eft accompagnée d’un peu de
bruit. Le but de cette quatrième opération eft de
difpoferla piece, en lui donnant de petites inégalités
infenfibles, à prendre plus fermement les feuilles
d’argent qui doivent la couvrir.
Lorfqu’on veut que l’argenture foit folide & durable
, on fait fuccéder l’opération dont je vais parler,
à celle qui précédé. Cette opération qui fera la cinquième
confiftera à hacher les pièces, c’eft-à-dire à
y pratiquer un nombre prodigieux de traits en tout
fens. Ces traits s’appellent des hachures ; & ils fe font
avec le tranchant d’un couteau d’acier, dont la forme
& la grandeur font proportionnées aux différentes
parties de l’ouvrage à hacher. Les Fig. u , 1 2 ,1 4 ,
de la Planche de l'Argenteur, repréfentent trois fortes
de couteaux à hacher, & la figure première de la
même Planche eft celle d’une femme qui tient une piece
d’ouvrage de la main gauche, & qui la hache de
la main droite.
La fixieme opération confifte à bleuir les pièces hachées.
Pour cet effet on les fait rechauffer, pour ne
plus les laiffer refroidir qu’elles ne foient achevées.
Cette opération s’appelle bleuir, parceque le degré
de chaleur qu’il convient de donner, eft celui qui
change en bleu la furface de la piece qui étoit auparavant
d’une belle couleur jaune, fi c’étoit du cuivre.
Mais comme les pièces doivent être chaudes dans
tout le refte du travail, on eft obligé de les monter
fur des tiges ou fur des chaffis de fer, qu’on appelle
mandrins. Il y a des mandrins d’une infinité de formes
& de grandeurs différentes, félon le befoin & les différentes
fortes d’ouvrages qu’il faut argenter. S’il s’ag
it, par exemple , d’argenter une piece plate, telle
qu’une affiette, on la montera fur le mandrin à chaffis
ou à couliffe, qu’on voit fig. i5 . Si c’eft au contraire
un pié de chandelier, ou autre piece femblable
percée d’un trou, on y fait paffer ùne broche de fer,
terminée par une vis,fur laquelle broche on fixé l’ouvrage
par le moyen d’un écrou. Cette broche qui fe
peut mettre dans un étau, quand il en eft befoin, s’appelle
auffi un mandrin.il n’y a guère de reffemblance
entre la forme de ce mandrin & Celle du mandrin
précédent : mais l’ùfage étant abfolument le même ,
on n’a pas fait deux noms, & l’on a eu raifon. On
diftingue feulement ces outils par ceux des pièces
auxquelles ils doivent fervir ; ainfi on dit r mandrin
à aiguierre, mandrin à ajfiette, mandrin a plat , mandrin
à chandelier , &c.
. Les feuill es d’argent dont on fe fert ici pour argenter,
ont cinq pouces en quarré. Quarante-cinq de ces
feuilles pefent un gros : on commence par en appliquer
deux à la fois fur lès pièces chaudes que l ’on
veut argenter. Cette opération eft la feptieme ; elle
confifte proprement à argenter, mais elle s’appelle
charger-: on prend lés feuilles d’argent de la main
gauche, avec les pinces que l’on voit fig. / j .& qu’on
appelle bruxelles : on fient de l’autre main un bru-
niffoir d’acier reprefenté féparémentfig. 8. & g . C e
bruniffoir s’appelle bruniffoir à ravaler : l’aâion de
ravaler confifte à préffér avec cet inftrument les feuilles
appliquées contre la piece en les frottant. Cette
opération eft r èpréfentée ƒ#. 2.
On a des bruniffoir s a ravaler de différentes formes
& grandeurs, pour fervir aux différentes parties des
ouvrages, ils font les uns droits, lès autres courbes ;
mais tous d’un bon acier bien trempé, très-polis ,
& parfaitement arrondis par leurs angles, de maniéré
qu’ils puiffent aller & venir fur l’ouvrage fans y faire des raies : ils font aufli emmanchés de bois ; ce
manche de bois eft un bâton cylindrique, de longueur
& groffeur convenable, garni d’une frette de cuivre
par le bout, & percé dans toute fa longueur d’un trou
dans lequel eft cimentée la tige du brumffoir : la frette
empêche le manche de fendre, ou en contient les parties
quand il eft fendu.
S’il arrivoit que la piece eût été trop frappée de
feu dans quelques endroits, on la grattebofferoit: grat-
teboffer une piece, c’eft en emporter avec un inftrument
de laiton appellé gratteboffe, une poufliere noire
qui s’eft formée à fa furface : cela fait, on continue
d’appliquer des feuilles ou de charger comme auparavant.
Il eft à-propos de favoir qu’on travaille deux pièces
à la fois, & que tandis que l’une chauffe, on opéré
fur l’autre, foit quand on charge , foit quand on
brunit. On entend, comme on v o it , par charger, la
même chofe que par appliquer.
Après que la piece eft chargée de deux feuillesd’ar-
gent, on la fait rechauffer à-peu-près au même degré
de chaleur qu’elle avoit auparavant ; puis on la reprend
, & on lui applique quatre feuilles d’argent à-
la fois ; ces quatre feuilles deviennent adhérentes entre
elles & aux deux premières ; & pour égalifer partout
cette adhérence, on paffe fur cette fécondé application
ou charge un bruniffoir à brunir. Les bru-
hijfoirs à brunir font d’acier ; il y en a de différentes
grandeurs & figures ; ils ne different de ceux à ravaler,
que par la longueur de leur manche. V?ye{ en
deux différentes formes ,fig. 6. & 7 .
Cette première bruniffure ne fe donne point à fond,
comme celle qui doit terminer l’ouvrage, & que nous
expliquerons plus bas. On continue de charger quatre
à quatre feuilles, ou fix à fix , jufqu’à ce qu’on en
ait mis les unes fur les autres, jufqu’à trente, quarante
, cinquante, foixante, félon que l’on veut donner
à la piece une argenture plus durable & plus belle.
Lorfque les pièces font autant chargées qu’on le
veu t, on les brunit à fond; c’eftla derniere opération.
Le travail de l’argenture fe finit avec les bruniffoirs
repréfentés fig. G. & y. & par l’opération à laquelle
on voit la fig. 3 . occupée : c’eft un ouvrier qui tient
le bruniffoir de la main droite par le manche ; & de
la main gauche, près du fer, la droite tend à élever
le manche, la gauche à baiffer le fer ; d’où il arrive'
que celle-ci fait point d’appui, & que l’autre extrémité
du bruniffoir eft fortement appuyée contre la
piece. L’ouvrierfait aller & venir cette extrémité fur
toute l’argenture, & l’ouvrage eft achevé.
Nous renvoyons à Varticle D o r u r e , l’argenture
des métaux, fur bois, fur to ile , &c. parce qu’elle fe
fait de la même maniéré que leur dorure.
On defargente en faifant chauffer la piece argentée
, & la trempant dans l’eau fécondé ; la faifant
chauffer , & la trempant de rechef, jufqu’à ce que
l’eau ait pris toute l’argenture ; on pratique cette
opération quand il s’agit de fondre des p ièces, ou de
les réargenter ; dans le cas où il s’agit de les réargenter
, il ne faut pas laiffer féjourner pendant long-tems
la piece dans l’eau fécondé, fur la fin fur-tout de l’opération;
car l’eau fécondé prendroit infailliblement
fur le corps de la piece, & y formeroit des inégalités
quand on la réargenteroit ; ce qui donneroit à fa
furface un air raboteux & défagréable.
ARGENTEDR, f. m. ouvrier dont l’art eft d’apr
piiquerde l’argent en feuilles fur quelques ouvrages
ou en bois ou en fer, ou en d’autres métaux, ou fur
le papier. Les Argentéurs font un corps affez confidé-
rable à Paris. Leurs ftatuts font de Charles IX. ils ont
pour fête la fainte-EIoy, & leur chapelle eft aux
grands-Auguftins.
ARGENTIER, f. m. ([Commerce.) dans les anciennes
Ordonnances, eft le nom qu’on donnoit à ceux
qui fe mêloient du commerce de l’argent, comme les
Banquiers, les Changeurs.
A rgentier , (JLift. mod.) fignifioit aufli autrefois
en France le furintendant des finances du roi. Le fameux
Jacques Coeur étoit argentier du roi Charles
VII. ■
* ARGENTIERE, ( l’) petite v ille de France en
Languedoc, dans le Vivarais. Long. 21. 55. lat. 44.
3 °*. A rgen tiere, (/’) Glog. pet.ite île de l’Archipel
, proche celle de Milo. Elle a été ainfi nommée de
fes mines d’argent auxquelles on ne travaille point.
Long. 42. 40. lat. 36 . 5 o.
ARGENTINE, plante qui doit être rapportée au
genre des pentaphylloïdes. V">yt\ Pen taphylloï-
DES. ( / )
* Sa racine eft noirâtre, aftringente, tantôt Ample
, tantôt fibreufe. Ses feuilles font conjuguées,
lemblables à celles de l’aigremoine, compofees de
plufieurs grands lobes, obtus & dentelés profondément
vers les bords, entremêlés d’autres lobes plus
petits. Ses feuilles font vertes par-deffus, & garnies
par-deffous de petits poils blancs argentins. Ses fleurs
naiffent feule û feule de l’aiffelle des feuilles qui em-
braffent les petites tiges par leurs appendices ; elles
font portées fur de longs pédicules velus, & compo-
fées de cinq pétales jaunes. Leur calice eft d’une feule
piece divifée en cinq parties pointues, entre lefquel-
Ies il y en a cinq autres plus petites ; elles renferment
plufieurs étamines garnies de leurs fommets
de même, couleur. Le piftil fe change en une tête
fphérique de trois lignes de diamètre, couvertè de
plufieurs petites graines arrondies , jaunâtres , &
femblables à celles du pàvot. Elle eft commune dans
les lieux humides, le long des_chemins, fur le bord
des rivières ; elle trace par dès jets comme le firaifier.
Sa racine, fes feuilles, & fa graine, font d’ufage en
Medecine.
Diftillée fraîche au bain-marie, elle donne un flegme
limpide, infipide & fans odeur ; une liqueur limpide,
obfcurément acide, puis manifeftement acide,
enfin fort acide. Ce qui eft refté dans l’alembic, dif-
îillé à la cornue, a donné une liqueur rouffâtre, foit
acide, foit auftere, foit alkaline urineufe; une liqueur
rouffe empyreumatique , urineufe , remplie
de beaucoup de fel volatil urineux ; du fel volatil
urineux concret, & de l’huile de la confiftance du
beurre. La mafle noirereftée dans la cornue, a donné
, après une calcination de treize heures au feu de
reverbere, des cendres noirâtres, dont on a tiré par
la lixiviation du fel fixe alkali.
Toute la plante a un goût d’herbe un peu falé &
ftyptique. Son fuc rougit le papier bleu ; d’où il eft
clair qu’elle eft compofée d’un fel ammoniacal & un
peu alumineux & vitriolique , uni avec une huile
épaiffe. Elle paffe pour rafraîchiffante, aftringente,
deflicative, repereuflive, & fortifiante. On la met
au rang des plantes vulnérairès, àftringentes ; & en
effet elle arrête toute forte d’hémorrhagies. On la
prefcritntileirient dans le crachement de fang, dans
les pertes de fatig, & dans les hémorrhoïdes. On lui
attribue encôre la vertu de foulager dans la diarrhée
& les flux de fang. Geoff. mat. méd.
* ARGENTINUS , f. m. (\Mythol.) dieu de l’argent,
fils de là dëeffe Pecunia.
' * ARGENTO, (Géogfij f iviere de la Turquie en
Europe ; elle coule dans l’Albanie & fe jette dans le
golfe de Venife.
* A R G E N T O N , (Géog.) ville & contrée de
France, dans le duché de Berri, divifée en deux par
la Creufe ; l’une de ces parties eft appellée la haute
ville, & l’autre la ville baffe. Long. ic). 10. lat. 40.30*
* ARGENTON-LE-CHATEAU, petite ville de
France en Poitou, généralité de Poitiers.
* ARGENTOR, riviere de France dans l’Angou-
mois, formée de deux ruiffeaux, l’un nommé argentx
l’autre or; elle fe jette dans la Charente, au village
de Porfac.
ARGENTURE, f. f. fe prend en deux fens différons;
ou pour l’art d’appliquer des feuilles d’argent
fur quelque corps, ou pour les feuilles mêmes appliquées.
yoye{ l’art de Y argenture à ¥ article ARGENTER.
Quant à ¥ argenture prife dans le fécond fens ,
il faut qu’elle foit forte, fortement appliquée, égale
par - tout, bien unie. Le but de cette façon elf de
donner l’apparence de l’argent à ce qui n’en eft pas ;
fi donc on apperçoit à l’oe il, dans la piece argentée,
quelque différence d’avec une pareille piece qui fe-
roit d’argent, ¥ argenture eft mal faite ; elle eft mau-
vaife fi elle eft inégale, mal adhérente, legere, ôc
raboteufe, & fi l’argent eft mauvais.
* ÀRGIAN ou ARREGIAN, ville du Chuliftan,'
province de Perfe ; elle eft fur la riviere de Sirt,
proche du golfe de Balfora.
* ARGIENNE ou ARGOLIQUE, (Myth.) fur-:
nomdejunon. Voye{ C an a th o .
* ARGILE, vcye{ A r g y l e .
A R G I L L E , argilla, 'f. f. ( Hifl. nat. foff'.') terre
pèfante, compaôe, graffe, & gliffante. L’argille a
de la ténacité & de la duôilité lorfqu’elle eft humide
, mais elle devient dure en féchant, & ce changement
de confiftance n’en defunit point les parties ;
c’eft pourquoi cette terre eft propre à différens ufa-
ges. On en fait des vafes de toute efpece, des tuiles,
des briques, des carreaux, des modèles de fculp-
ture > &c. car on peut lui donner toutes fortes de for-
mes lorfqu’elle eft molle, & elle les conferve après
avoir été durcie au feu. Dans cet état elle réfifte à
l’humidité ; & fi on pouffe le feu à un certain point,
on la vitrifie. II y auroit pour ainfi dire une infinité
d’efpeces à?argille, fi on vouloit les diftinguer par les
couleurs ; il y a des argilles blanches, jaunes, grifes,
rouffes, bleues, noires, &c. on en voit qui font veinées
comme les marbres. L ’argille fe trouve partout,
•mais à différentes profondeurs ; elle fert de bafe à la
plûpart des rochers. C’eft une matière des plus abondantes
& des plus utiles que nous connoiffîons.
M. de Buffon a prouve que ¥ argille forme une des
principales bouches du globe terreftre ; & il a traité
cette matière dans toute fon étendue. C ’eft en réflé-
chiffant fur la nature de cette terre, qu’il en découvre
l’origine, & qu’il fait voir que fa fituation dans le
globe eft une preuve de l’explication qu’il donne de
la formation du globe. Comme cette explication fait
partie de la.Théorie de la terre, que M. de Buffon nous
a donnée dans le premier volume de 1 'Hiß. nat. gêner.
& part, avec la deferip. du cabinet du Roi, il faudroit
pour la bien entendre avoir une idée fuivie de l’en-
femble de cet ouvrage. Nous ne pouvons rapporter
ici que ce qui a un rapport immédiat avec ¥ argille.
Les fables, dit M. de Buffon, dont les parties con-
ftituantes s’uniffent parle moyen du feu, s’aflîmilent
& deviennent un corps dur, très-denfe, & d’autant
plus tranfparent que le fable eft plus homogene ; ex-
pofés au contraire long-tems à l’air, ils fe décompo-
fent par la defunion & l’exfoliation des petites lames
dont ils font formés, ils commencent à devenir terre,
& c ’eft ainfi qu’ils ont pû former les terres & les argilles.
Cette poufliere, tantôt d’un jaune brillant, tantôt
femblable à dès paillettes d’argent, dont on fe fert
pour fécher l’écriture, n’eft autre chofe qu’un fable
très-pur, en quelque façon pourri, prefque réduit en
fes principes, & qui tend à une décompofition parfaite;
avec le tems les paillettes fe feroient atténuées