
Tycké, prononcez, Tuquè. Cette partie, terminée
au nord par le rocher, s’étendoit dans fa
partie fepfentrionale depuis le bord de la mer
( car FAcradine occupoit une efpëce de promontoire
de forme demi-circulaire ) , où il y avoir un
fort, jufqu’a FEpîpoîe, à l’oued , fêparée auffi de
Tyché , par une muraille & un fort. Si de cet
angle on tire une ligne ,. qui, allant du nord-oued:
auYud-ed viendront joindre, aux deux tiers de la
longueur, la muraille qui enfermoît FAcradine à
l’oued , on auroit toute l’étendue de cette partie
de Syracufe : cela donne à-peu-près la forme d’un
clavecin. Toute cette partie du fud étoit bornée
par la forme du rocher lui - meme, dont c étoit
l’extrémité : outre cela cependant il y avoit des
murailles.
En partant de Foued, ou l’angle étoit afîez
aigu , on trouvoit à lred un teigple.
Puis un palais de Denys au fud, & un temple
de Diodes au nord.
Un peu au fud-ed de ce temple êtok un cadran
polaire , condruit par lés ordres de Denys l’ancien;
cet ouvrage étoit magnifique.
Au fud-ed du palais de. Denys , fl y avoit un
temple de la Fortune.
Les comnoiflànces. nous manquent pour donner
une idée de la diftribution des rues. On retrouve
feulement l’indication d’une place publique, vers
le fud-ed du temple dont je viens de parler..
Vers Fèd r en gagnant l’Acradine , étoit un temple
d’Hercule.
Et tout près de l’angle où Ce termmoit le rocher ,
prefque contre la muraille de FAcradine, on Inon-
troit un tombeau que- l’on difoit être celui de
Lygdamon, Syracufain , d’une fi haute âature ,
que Paufanias, en parlant de lu i, le compare à
Hercule le Thébain. Il fut vaincu, dans les jeux de
Pancrace , à la x x vm e olympiade.
Neapolis. Au bas du rocher qui contenait la
partie appelée Tyché, du côté du fud, le terrain
formoit une efpèce de vallée, dans laquelle, du
nord-oued au fud-ed, couloir le Timeris r qui v e-
noit fe rendre dans lé grand p o r t to u t près de
Fixthme & des bains de Daphné.
Un peu au fud - oued, mais coulant dans le
même fèns, étoit le petit fleuve Anapus*
Entre ces deux fleuves, au nord-oued, il y
avoit une petite élévation de terrein appelée,.
d’après le premier de ces fleuves j colline. Témirite.
La partie de cette vallée comprîfe entre le
Timeris & les fortifications du fud de Tyché étoit
nommée ATeapohs , ou la nouvelle ville. Les murailles
qui renfermaient au fùd-cued,. fuivoient à-
peu-près le cours du fleuve, & alloient joindre la
fortereffe qui étoit à l’extrémité de T y c h é , près
de l’Epipole: elle avoit auffi une. forme triangulaire
txès-albngée.
Cette partie de la ville étoit trayerféè dans fa
soiigiieur; par un très-long aqueduc.
On tronvoît, à partir du nord-oued , une fiafuef
d’Apollon , enfuite le palais de Timoléon, puis
un temple 8c la porte Mcnétide.
En le rapprochant du port on trouvoit lin
temple de Cérès 8c de Froferpine, où fe célè-
broient des fêtes dans le temps de la moiffon.
Au nord de l’aqueduc 8c tout près de l’angle
où le Tyché touchoit FAcradine, on trouvoit dans
un même local, à - peu-prés, le théâtre, une latomie
( on verra bientôt cdtque c’eft ) , 8c l’em-
phithêâtre.
Epipolis. L’Epipole, c’efl-à-dire, partie ajoutée
à la ville, [étoit au nord - oued. Elle ouvroit la
tplace de ce côté. On y trouvoit une fortereffe, un
temple ,. une prifon. Le Timeris bordoi't cette partie
au fiid-ouefh
Au-delà du fleuve Ànape, on trouvoit quelques
fources ; la plus confidêrable ed celle de la fontaine
Cyane , près de laquelle il y avoit un temple*
Un peu plus loin étoit une autre fontaine, qui
j .eut 'ie nom. de fontaine dé Archimède. Véuus Calli-
pygie avoit auflï un temple de ce côte.
Et dans i’efpace compris entre la fontaine
Cyane 8c la colline qui, pendant quelque, efpace
fépare ce terrein- du cours de l’Anapus, il y avoit
une campagne charmante ,. occupée par plufieùrs
! belles maifons de campagne.
Le long de la partie- nord-oued du port i f y-
; avoit un bel- arfenal-, condruit par Denys ; & fur
la partie occidentale une petite chapelle- où les
marins offraient dès offrandes- 8c faifoientdes voeux
avant de s’embarquer.
Sur la partie de File qui bordoit le port au fud
fl y avoit une fortereffe.
Je vais actuellement eflayer de faire connoître
plus particulièrement quelques-uns de ces monu-
mens , d’après ce qu’en rapporte M. Houël.
Si l’on fuppofe un. voyageur d’ans la partie de
l’Acradine qui- approche vers le port, la roche lui
; paroît inclinée du couchant au levant.. A quelque
didance du palais de Judice font de vades cavités
creufées dans la i^che r c ’eft ce que l’on appeloit
Latomies. Cette roche ed calcaire 8c compacte. 11'
ed très-probable- que lès Syracufains- en tiroient la
pierre dont ils bâtirent 8c ornèrent leur ville. Ces
; latomies offrent dans leurs, profondeurs, des. grottes
; immenfes.
Le fol s’àbai'ffbit auffî par le fûd jijfqu’àu port;,
& dans cet efpace on. trouve .encore quelques
; monumens, mais ce ne. font guère que ceux qui
ont été. taiMés à même la roche, 8c qui n’ont pas été
terminées. Voici-comment s’exprime M*.Hoüel ( i) .
« Le génie füblime des architectes de ces temps
antiques prévoyant la barbarie, dès, hommes 8c les
(i;) On me jugeroit avec trop de rigueur,, û l’on
me blâmoit d’anticiper ici fur la. géographie moderne.
Ouand on lira ce qui y eft dit de l'état- de Syracufe
moderne, on verra bien au moins que ce que je dis
ic i„ ne font pas des répétitions fuperflues,.
fcfàgès des flècles , jaloux de ttanfme'ttrè leurs
travaux à la podérité la plus reculée, ont fait
entrer- dans leurs monumens les productions les
plus indedru&ibles , 8c ils les y ont fait entrer en
les altérant le moins poflîble. Ainfi, fouvent ils
n’ont fait que tailler le rocher, félon les dïmendons
affignées- par leur art, relativement à l’édifice qu’ils
fe .propofoient de condruire. Ces monumens font
à-peu-près les feuls qui nous redent de l’ancienne
Syracufe.
»G’ed en vain que de cette roche élevée on
jette un coup-d’oeil attentif fur l’emplacement qu’oc-
cupôit cette ville fuperbe, 8c que l’on cherche ces
palais , ces temples, ces tribunaux, ces panthéons.,
çescolonnades fi variées,, fi riches, fi .élégantes;
ces places publiques ornées d’obélifques, de colonnes
triomphales ou_ adronomiqueSy_.de datues,
de bronze 8c de marbre ; ces places où des autels
étoient élevés, à la bienfaifance 8c à l’amitié ; ces
mufæum, ces lycées, ces cirques, ces hippodromes ,
ces naumachies , ces gymnafes où les héros fe for-
moient au grand art des combats;, cette foule de
monumens fomptueux, dont le fouvenir étonne
l’imagination: c’ed en vain qu^pn les .chefchq.,
l’qeil ne voit plus que des campagnes cultivées,
8c le rocher dérile , dont les cavités attedent encore
que les édifices de Syracufe furent puifés dans foq
fein.
j» De tant de merveilles il ne nous rede plus
qu’un amphithéâtre, un vade théâtre, des grottes
fervant dé tombeaux, une prifon , des tombeaux
fculptés dans le roc 8c décorés d’architeélure ; d’im-
menfes catacombes ,, des • forts, quelques murs
énormes qui partageoient les différens quartiers de
Syracufe ; quelques débris d’un édifice d’une conf-
tru&ion fingulière, ceux de trois temples; un
efcalier creufé dans le roc à une profondeur con-
fidérable, 8c au bas duquel on trouve un bain ,
des'chemins, des grottes1 fingnlières, telles que
celle qu’on appelle ï oreille de Denys.
Mirafcella , né à Syracufe , 8c auteur d’une
hidoire de cette ville, rapporte que cette grotte
fut fiirnogjmée Tortille de Denys, à caufe du parti
qu’on avoit tiué de fa difpofidon. Selon lui, on
y enfermoit, au. temps de Denys, les prifonniers-
d’importance 8c le geôlier, en fe plaçant dans
un certain endroit d’un corridor qui exide encore
à une certaine hauteur,, 8c dont on voit Fouverture
à une grande hauteur , entendoit leur entretien '3
quelque bas qu’ils,parlaffent: il les repertoit enfuite
à Denys. Mais, dit M. Houël, la forme de ces
grottes 8c l’écho , qui y ed très-confidêrable , a
peut-être fuffi pour faire imaginer ce petit conte.
Ce fut, dit - o n , dans ce lieu que Denys fit-
enfermer le philofophe Philoxène, auquel il avoit
témoigné tant d’amitié, niais qui- cependant avoit
eu le noble courage de lui dire que fes vers étoient
mauvais»
Ce fut aufli dans cette grotte 8c dans quelques
autres, que les Syracufains enfermèrent les prifonn-ier s
Athéniens ; après la défaite de -Nieras,, & que,
faute d’une nourriture fuffifante, ils niourent de
mifère ■>■>.
N. B. La petite partie circulaire du plafond de
. l’oreille de Denys contribue beaucoup à l’effet de l’écho
que produit cette grotte ; 8c,cet écho feroir bien
plus fur & par co,nféquent bien plus fort, fi cette grotte
n’étoit pas tapiffée en plufiéurs endroits d’herbes 8c de
moufTes qui ont pouffé le long des murs, 8c dont
la végétation ed entretenue perpétuellement par
L’eau d’un canal condruit fifr cette grotte, 8c qui
filtre fans ceffè Ji travers les,. pores de la pierre*
Ces herbes nuifent à la répercuffîon des fons.
« Cet écho merveilleux a , dans toute la Sicile ,
une réputation fi grande,, que tout Sicilien , ou
tout étranger qui vient à Syracu'è, paffe pour
n’avoir rien v u , s’il 'n’a pas. été l’entendre.
” Ceux qui vifitent cette grotte , y arrivent avec
une grande prévention. Les uns y c^fcendent avec,
des indrumens y joniffent d’une fingulière ca-
cophonie, qui n’ed pourtant pas dedituée' d’agré-
tnens. La confufion des fons offre des rédiltats
fingiiliers. Elle enchante les uns , elle déplaît aux
autres. Quelques-uns y portent des pidolets, des
fiifils, 8c alors l’effet de Féch.oedfi violent, qu’il
peut à peine fe foutenir, 8c qu’une oreille délicate
coiirroit rifque d’y devenir fourde.
Ce qui rede de l’amphithéâtre de Syracufe peut
entrer dans le nombre des preuves clu fentiment
rapporté précédemment fur le foin que lès archi-
teéles anciens prenoient de s’aider des avantages
que leur offrpit la nature. Cet amphithéâtre avoit
été taillé, à moitié -dans, la roche, yoici comment:
Toute la partie inférieure avoit été creufée dans le
rocher ; la partie fupérieure feidement avoit été
condruite en pierre 8c en moellon.
N. B. Cette dernière partie, fur laquelle les
hommes 8c les necles ont exercé leur pouvoir ,.
a été-détruite,. 8c. a long-temps .couvert de fes décombres
la partie taillée dans la roche, 8c, en
quelque fprte, indedruélible. Les vents entaffèrent,.
parmi ces débris, de là potiffière 8c des terres qui
achevèrent de les dérober'entièrement à la vue.
Des curieux y ont fait fouiller il y a quelques
années, 8c iis y trouvèrent des gradins raillés dans-
la roche même : leur forme ovale étoit très-régulière.
Continuant toujours d’enlever des terres 3 ils
rencontrèrent une galerie. Elle fuivoii la dire&ion
des gradins ; elle étoit condruite en î.Joëllons &
en mortier. Elle fontenoit les efcaliers dé l’amphithéâtre..
r
Le theatre de Syracufe, tout détruit qu’il ed
par le laps du temps 8c par la barbarie des-
hommes, pffre encore des- beautés touchantes. Si
,| examine ,. ;dîé. M. Hoiiel, fa forme générale:
jufquès dans les détaifs , fi l’on contemple les- belles
inades de fes débr i soù l’on voit " jufqu’à fes>
profils,, tout interefle, tout parle aux- yeux- 8t-àf