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eft encore de nos jours le fond de celui de leurs J
fucceffeurs.
I I I.
E x c u r f io n s des TcÛofages.
On prétend que les Teâofages, outre leur
penchant naturel pour la guerre , avoient des
raiions particulières de porter les armes chez
lès nations étrangères. C’étoit d’abord leur trop
grand nombre qui faifoit que, la même contrée
qui les a=voit vu naître, ne pouvoit fuffire poulies
nourrir tous ; & puis les difienfions prefque
inféparables de la multitude, & d’autres caufes de
cette efpèce. Mais fans entrer dans 'ces difcuihons
qui paroîtroient étrangères à mon fujet, je vais
fliivre les Teâofages dans leurs différentes excurfions.
Les Gaulois commencèrent à quitter leur pays
vers l’an de Rome 162. Bellovèfe & Sigovèfe furent
les chefs de leurs premières expéditions. On fait
que Bellovèfe dirigea fa marche vers l’Italie. '
Comme les Teâofages ne fàifoient point partie
de fon armée, & qu’il eft certain , au contraire ,
qu’ils faifoieut la principale partie de l’armée dé
de Sigovèfe, il faut laiffer là l’expédition du
premier, pour ne parler que de celle de l’autre &
de fes fuites.
Céfar, ainfi que Tite-Live, nous apprend que
la forêt d’Hercynie étoit échue en partage à Si-
eovèfe, & que ce fameux capitaine" alla s’y
établir avec les Gaulois de fa fuite. Les Teâofages
étoient de ce nombre, comme je viens, de l’avancer.
En voici une preuve. Il y eut un temps, dit
Céfar, que les Gaulois, furpaffant en valeur les
Germains , leur déclaroient volontiers la guerre ;
& que tant a caufe de leur, nombre , qu’à caufe
de la ftérilité du pays qu’ils habitoient, ils en-
yoyoient des colonies au-delà du Rhin. .C’eft
pourquoi, les Voîces Teâofages , s’étant emparés
des campagnes les plus, fertiles de la 'Germanie,
qui font à l’entour de la forêt d’Herçynie ... y
établirent leur demeure. On ne peut donc révoquer
en doute que les Teâofages n’aient fuivi
Sigovèfe, lorfqu’il alla chercher une demeure aux
environs de la forêt d’Hercynie.'
Les Teâofages devenus maîtres du voifmage
de la forêt en queflion, s’y maintinrent plufienrs
fiècles de fuite, puifqu’il y. en avoir encore du
temps de Céfar. Mais ce fut fans doute de-là
que partirent les diverfes colonies qui fe répandirent
dans la Grèce, la Thrace & l’Afie. Us
étendirent d’abord leurs conquêtes dans la Pannonie
& l’Ulyrie, ayant fréquemment la guerre
avec leurs voifins. Cependant, on en vit pafler
les monts Riphées, & porter leurs arnjes jufqii’à
l’extrémité de l’Europe. Les favans Bénédiâins ,
auteurs de l’hiftoire de Languedoc, placent ici
fous l’an de Rome 432, ce que nous apprenons
<le Polycn, qu’Antigonus étant en guerre avec
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Antipatér, prit à fa folde des Teâoiagcs ", qui
furent commandés par Briderius. Le bombât s’étant
engagé, Antipater fut vaincu, & les Gau-.,
lois mal rècompenfès par le prince qu’ils avoient
Ti Bien fervi. P o ly cn , Stra ta °. L . i v , c . 6.
Dans la fuite, des Gaulois, ayant à leur tête
Cambaules, pénétrèrent dans Ta Thrace ; mais
ils n’ofèrent pas paffer outre, parce qu’ils ne fe
croyoient pas en état de réfifter aux Grecs. Il
n’eft plus parlé de Cambaules depuis cette expédition.
Cependant l’heureux fuccès qu’elle à voit
eu, excita bientôt les Gaulois à porter de' nouveau
la guerre chez d’autres nations. Les chefs
qui commandoient l’année fe partagèrent. Céré-
thrius entra dans le pays des Thràces & .celui
des Triballiens; Bèlgins, dans la Macédoine &
l’Illyrie ; Brennus & "AcLchorius allèrent■ dans la
Péonie. A la vue d’une armée .fi formidable,
tous les peuples trembloient de frayeur. Ptolemée,
rei dë Macédoine, fut le feul qui ne s’en alarma
point. Il marcha à la rencontre des ennemis;
mais le fuccès ne répondit pas à fes efpérances.
Il perdit la vie avec la bataille. Belgius, fatisfait
apparemment ce de qu’il avoit fait, ne fe mit pas
en peine de profiter de la viâoire ; ce qui donna
le temps à Softhènes d’affembler quelques jeunes
gens, & avec cette nouvelle - armée, il rétablit
les affaires des Macédoniens , en chaffant les Gaulois
de deffus leurs terres. Cqtte aâion de valeur
mérita la couronne -à Softheries.
Brennus, informé de la conduite de Belgius.;
I dont il ne fera plus fait mention, non plus que de
Céréthrius , fans qu’on fache ce qu’ils devinrent,
en fut indigné; & pour ne pas laiffer échapper
la dépouille d’un pays suffi riche, il pdWiiada aux
Gaulois de tenter une fécondé expédition. Il fe
rendit lui-même dans la -Macédoine, à la tête
d’une armée nombreufe. Softhènes entreprit encore
de réfifter; mais il fut vaincu , & * tout le pays
ravagé. .
Brennus , dit Juftin , dédaignant, pour ainfi
dire, les dépouilles terreftres, forma là réolution-
de s’emparer de celles des dieux. Le temple de
Delphes, rempli de richefies immenfes, excita
fur tout fon avidité. Ayant pris 'avec lui Aci-
çhorius, il fè mit en marche. Il paroît que. les.
pays qu’ils rencontrèrent- fur le chemin , furent
faccagés ; car , félon Paufanias, non-feulement la
Macédoine, mais l’lonie, la Theffaliè, & c. furent
expofées à leurs excurfions. Cependant les
Grecs envoyèrent une armée qui fe faifit du paf-
fage des Thermopylcs. Pendant qu’elle y etoit
campée , on apprit que les ennemis étoient déjà
maîtres de la Magnéfie & de la Phthiotide. C’efl:
pourquoi, on détacha un corps de cavalerie pour
leur difputer. le paffage du Sperchius, Brennus,
auffi rufé qu’expérimenté, eut bientôt trouvé le
moyen de paffer ce fleuve , fans que les Grecs
s’en apperçuffent. Le Sperchius une fois pafie ,
aufîi-bien . que le territoire d’Héraclée, qui fut
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abandonné au pillage, Brennus s’avança vers les
Thermopyles , dans le deffein d’attaquer l’armée
grecque. Il fut prévenu & obligé de céder. Quelques
jours après , on tenta inutilement de forcer
le paffage du mont (Eta. Enfin , Brennus apres
avoir perdu beaucoup de monde , & fait ravager
l'Etolie par un corps de troupes qui s'ètoit rendu
dans cette contrée, en traverfant la Theffalie.,
fous la conduite de Combines S i d’Oreftrius, engagea
les Eniens & les'Héracléens à lui montrer
un chemin par. où il pût paffer le mont (Eta. Ce
moyen lui réufiïf; Les Grecs, qui ne s etoiest
apperçus de rien , fe trouvèrent tout-à-coup invertis.
Après une défenfe vigoureufe, ils-furent
obligés de fe retirer.
• Alors Brennus, n’ayant plus d’ennemis à combattre
, né; penfa plus qu’à l’exécution de fon
projet facrilège. Pendant qu’Acichorius, qu’il-avoit
laiffé pour garder le camp , venoit le joindre , il
marcha vers le temple de Delphes. Perfonne
n’ignore le fuccès de cette entreprife, ni les pro-
.diges fabuleux que les écrivains de l’antiquité ont
ajoutés à la-vérité du fait. Ainfi, il eft inutile
de s’y arrêter. Cette expédition fut fi funefte aux
Gaulois , que 3 félon Juftin & Paufanias, il ne s’en
fauva pas un feul. Il eft .vrai que Juftin, en cela,
n’eft pas d’accord avec lui - même , puifqu’il dit
ailleurs qu’après la monde Brennus, ceux d’entre
les Gaulois qui s’étoient fauvés de la déroute
prefque générale , paffèrent les uns dans la Thrace,
les autres dans l’Afie.
• Quoi qu’il'en foit, il eft certain qu’une armée
de Gaulois, fous la conduite de Comontorius ,
entra l’année-fuivânte dans la Thrace, & que les
Byzantins , en particulier, fouffrirent considérablement
de leurs excurfions, ayant été contraints
de payer annuellement un impôt, qu’on augmenta
infenftblement jufqu’à la fournie de quatre-vingts
talens. Ce fut de- là . qu’une partie paffa enfuite^
dans l’Af ieou les villes d’Ancyre & de Peflî-'
nunte furent les' prêmiers fruits de fes excurfions,
tandis qu’une autre reyint fur fes pas.
Je reprendrai l’hiftoire des Gaulois, qui fe retirèrent
dans TAfie, après que j’aurai' fait con-
noître la marche des autres.
■ Parmi ces derniers , il y en eut (c’étoient des
Teâofages), qui retournèrent à Touloufe, leur
ancienne patrie. Mais quelques-uns, conduits par
Bathanatus, s’arrêtèrent le long du Danube , vers
l’embouchure de la Save, où ils fixèrent leur demeure.
On voit que ce pays faifoit parue de celui
où- leurs ancêtres s’étoient fixés long-temps auparavant;
& comme il eft hors de doute qu’ils
n’avoient pas tous quitté le pays en queftion,
ainfi qu’on le verra ci-après, lorfqu’on envoya
des colonies de côté & d’autre, il eft à préfumer
que ceux qui revinrent de Thrace, ne firent que
le réunir à leurs compatriotes. Juftin prétend qu’ils
y prirent le nom de Scordifques.
' «Un ancien hiftorien, difent les favans Béni-
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„ diâins, affure que la route que prirent les Gaulois
57 pour fe rendre dans ce pays, s’appeloit encore
» de fon temps , le chemin de Bathanatus, & qu’on
» nomma ces mêmes Gaulois, Bathanates, du
> nom de ce général. Cet auteur loue beaucoup le •
7) mépris que les Scordifques fàifoient de .1.or. Mais
» il inveâive en même temps contre leurs brigan-
» dages. Ces peuples étendirent , en effet, leurs
. » excurfions dans la Pannonie & dans une partie
77 de la Thrace; & s’étant enYuite mêlés & con-
77 fondus avec les naturels du pays ; ils portèrent
» leurs armes che^ les peuples voifins , .& firent
77 des courfes dans rillyrie, & jufques vers l’em-
»bouchure du Danube dans le Pont-Euxin ». .
Je placerai encore ici quelques autres expéditions
, auxquelles les Gaulois , revenus de Thrace,
eurent fans doute part. Juftin nous apprend que
les- Gaulois que Brennus avoit laiffés en partant,
pour garder & défendre les frontières de la nation ,
affemblèrent une armée de quinze mille hommes
de pied , & de trois mille chevaux ; & qu’après
avoir mis en fuite les Gères’ & les Triballiens,
ils députèrent vers le roi de Macédoine, pour lui
offrir la paix. Antigonus fit un bon accueil aux
ambaffadèurs , & leur . montra fes richefies. De
retour chez eux, les ambaflàdeurs grofiirent les
objets, pour exciter ceux de leur nation à faire
la guerre- aux Macédoniens. Elle fut en effet entreprife.
Le camp du roi fut pris ; mais tandis qu’ils
pilloient les vaiffeaux ^ lorfqu’ils s’y attendoient
le moins, on les attaqua, & on en fit un horrible
carnage.
| Sans doute qu’Antigonus fe réconcilia avec les
) Gaulois ; car on en vit- l’année fuivante dans fon
armée, lorfqu’il fut attaqué par Pyrrhus , qui avoit
| aufîi des Gaulois à fon Service ; de forte qu’on vit
I alors ces peuples combattre les uns contre les
autres. Antigonus ayant été vaincu , Pyrrhus s’em-
! para de la plupart des villes de la Macédoine. Il
j laiffa en garnifon dans celle d’Egée la principale
! de toutes , une partie des Gaulois auxiliaires qui
I pillèrent cette ville ; & fouillèrent même jufqu’aux
tombeaux des rois, pour en enlever les richeflès
qu’on y enfeveliffoit avec eux. Pyrrhus, qui fen-
toit le befoin qu’il avoit des Gaulois, fit femblant
d’ignorer cette efpèce de révolte. Ce prince fe
fervit enfuite de ces peuples pour aller faire le
fiège de Sparte , qu’il fut oblige de lever, ayant
fait une perte conSidérable. De-là il marcha vers ,
la ville d’Argos, ,& à peine étoit—il en chemin,
que les ennemis, étant tombés fur l’arrière-garde ,
compofée de Gaulois & de Moloffes, les maffa-
crèrent prefque tous. Ceux qui échappèrent, fui-
virent Pyrrhus à Argos, où s’étant d’abord dif-
tinguês, ils tombèrent enfuite entre les mains
d’Antigonus, qui étoit venu au fecours des
Ar«riens, & qui fe rendit maître de l’armée de
Pvrrhus, après la mort tragique de ce prince.
' J’ai déjà d it, d’après Polybe , qu’une partie
de cette colonie Gauloife étoit allée fe fixer ^dans