
57 fituee à la droite de ce fleuve, qui fut foumife
o aux Romains ».
Je crois qu’il fuffit d’avoir rapporté la réponfe ,
pour en montrer le foible. Il n’eft certainement
pas vraifemblable que les Romains ayant fournis
les Teétofages , euffent abandonné la partie de
leur pays qui étoit au - delà de la Garonne.
Concluons donc que ces peuples dévoient être
néceflairement bornés par ce fleuve , & que c’eft
-trop hafarder , pour ne rien dire de plus, que
de donner une plus grande étendue à leur pays,
•jftir ce que le diocèfe de Touloufe comprenoit
jadis celui de Lombez.
Mais pourquoi , objectera-1-on peut-être , le
diocèfede Touloufe, par exemple , fe' trouvoit-il
anciennement étendu au - delà de la Garonne ?
Je penfe qu’on pourroit en apporter plufieurs rai-
fons. En voici d’affez vraifemblables , qu’on doit
appliquer à tous les cas de cette efpece. Il efl
hors de doute que la ville des Élufates fut érigée
en évêché avant celle des Aufces. Le titre de
métropole qu’elle porta d’abord, en fait foi. En
ccnféquence*, le reffort de l’évêque d’Eaufe au-
roit été d’une étendue, très-conflderable , s’il n’a-
voit eîi d’antres limites que la Garonne. Il y a
apparence que dans ce cas l’on aura fournis à la
jnrifdi&ion de l’évêque de Touloufe , tous les
peuples qui habiteient le long de ce fleuve du
côté de l’Aquitain?. Car enfin, ils étoient bien-
plus à fa bienféance qu’à celle de l’autre évêque, ■
oui s’en trouvoit fort éloigné. Gn pourroit encore
dire que , dans les premiers temps de l’églife,
un évêque aveit pour l’ordinaire fous fa jurifdic-
tion, quant au fpirituel, les peuples qui avoient
été éclairés des lumières de l’évangile , ou par
fon canal, ou par celui de fes prédéceffeurs. O r ,
i l pourroit très-bien fe faire que les anciens habitans
du diocèfe de Lombez fuflent dans ce cas , par
rapport à l’évêque de Touloufe.
2.°. Les Conforanni , qui habitaient entre les
fources de la Garonne & les Pyrénées, dévoient
être auffi de la dépendance des Teâofages. Stra-
bon attribue aux Àrécomiques , tous ces petits
peuples 'peu connus , qui s’érendoient jufqu’aux
Pyrénées (*). D’un autre côté , le même auteur,
ainfi que plufieurs autres déjà cités , ne donne
aux Aquitains que le pays entre la Garonne &
les Pyrénées, il eft donc évident que tout ce qui
étoit au - delà de la Garonne le long des Pyré-
. nées , devoit appartenir aux Teôcfages , qui font
défienés fous le nom général d’A récomiques. Par
conlecnent, le territoire des Conforanni leur appartenait
auffi. ,
A l’autorité que je viens d’employer, on peut
teindre celle d’un pafiage qui fe trouve dans la
vie de faint Lyzier , ancien évêque de Conferans :
' ( l ) Ê ü A Si iff'jlv eiSiÇct e&r» VMi irapaxii/utya
ioïç Jïgin.cfAurxoi6 tlvfilvK, Strab, L. i v , p, i86,
obiit ( fantfus Lyccrius ) irt territo'rio Tolofano îti
civitate qua vocatur Conférants. Çe paflàgè eft auffi
rapporté dans la notice de la Gaule de M. de
Valois , & dans celle de M. d’Anville. On pourroit
cependant me faire , ce me femble , une forte
objeftion ; c’efl que Pline place les Conforanai
parmi les Aquitains. Cet écrivain a railôn , pourvu
qu’on l’entende du temps où il vivoit. Le pays
des Conforanni étoit en effet pour lors compris
dans l’Aquitaine, parce qu’il y avoit été renfermé
lors de l’arrangement des provinces de la Gaule
fait par Augufte. Tel eft lè fentiment de M. d’An-
ville.
Les Bènédi&ins eux-mêmes femblent l’embraf-
fer, lorfqu’ils difent que quand même le Conferans
& toute la partie qui eft à la droite de la
Garonne, auroient appartenu à la province Romaine
, & conféquemmcnt aux Te&ofages , du
temps de Céfar & de Pompée, il .eft certain que
depuis Augufte ces pays firent partie de l’Aquitaine.
Mais , dira-t-on peut-être , pourquoi ap-
peller le Conferans , le territoire de Touloufe,
plufieurs fiècles après fa réunion à l’Aquitaine ?
Cela ne doit pas paraître furprenant. C a r , fans
fortir des exemples què j’ai produits plus haut, le
Condomois eft depuis long-temps de la dépendance
de la Guyenne , & cependant il eft toujours
compté parmi lés pays qui compofent la
Gafcogne.
3°. On ne peut difeonvenir que les autres
peuples qui étoient fitués le long des Pyrénées
jufqu’à la mer Méditerranée vers Cervéra , ou le
port de Vénus , ne dêpendiffent auffi des Tec-
tofages. Si cela n’étoit fuffifamment établi par les
témoignages de Strabon & de Ptolemée , on joind
ra it celui de M. de Marca , qui , en faifant voir
que les limites de la Narbonnoife alloient juftfues
vers le promontoire de V énus, a prouvé ce que
^avance.
4°. Il eft encore eOnftafit que les états des Tec-
tofages s’étêndirent depuis les^Pyrénées le long
de la Méditerranée , jufques vers l’embouchure de
l’Éraut. Car on ne fauroit douter que les dépendances
des villes , telles qu’Iliberis, Rufcinum,
Narbo, Bæterræ , &c. , que Ptolemée, comme
je l’ai obfervé, attribue aux Teèlofages, fie s’é-
rendiflent le long de cette mer.
5°. Mais, la plus grande difficulté, c’eft de dé^
terminer au jufte les limites qui féparoient les V ol-
cesTeélôfages des Volcès Arécomiques. M. d’Ân.-
ville eft perfuadé qu’une, ligne de divifion entre
les deux peuples , ferait téméraire & trop hafar-
dée. Cependant, comme il paroît certain que Ici
Bæterræ s’avançoient jufqu’à l’Éraut, ce qui femble
■ confirmé par la pofition de Ceflbrofùr cette rivière
, & que les Lutevani, auffi fitùés en - deçà
de la même, rivière , au rapport des Bénédi&ins ,
appartenoient aux Teftofages ; On 'nè peut guère
révoquer en doute que ces peuples ne fuflent diT
tingués de lqufs yoifins £ar l’Éraut, En effet P
l’Èraift, qui prend fes fources aux Cévennes, &
va fe rendre enfuite dans la Méditerranée, femme
une ligne pratiquée par la nature même, pour divifer
les deux peuples. D’ailleurs , on doit fe rappeler
que Strabon donne aux Teâofages la partie méridionale
des Cévennes , jufqu’aux promontoires ",
ce qui me paroît confirmer ce que je viens d’établir.
C ar , i°. au-delà, des fources de lÉraut,
les Cévennes prennent une autre 1 direftion ; en-
forte que la partie méridionale de ces montagues
devient orientale. 2°. Strabon , par ces ^promontoires
dont il parle a fans doute voulu défigner
le promontoire qu’on voit fur toutes les cartes
à l’embouchure de l’Éraut. Cela eft aflez vraifemblable
d’après la defeription qu’il.fait lui-même.
Toutes ces circonftances pourront du moins contribuer
à autorifer la borne que j’ai pofée.
Néanmoins, les Bénédiâins , ainfi que je lai
t'apporté ailleurs, prétendent que le pays occupe
par les Teélofages alloit jufqu’à Cette ; c’eft-à-dire ,
qu’ils donnent à ces peuples la partie du diocèfe
d’Agde qui eft au-delà de l’Éraut. Leur fentiment
ne peut être fondé que fur les memes rai-
fons pour- lefquelles ils ont étendu les états de
ces memes peuples au - delà de la Garonne.
Par conféquent, un tel fentiment n’eft pas aflez
fondé. Au refte , je viens d’éxpofer les motifs
qui m’ont déterminé à choifir l’Éraut pour
limites de nos Te&ofages ; je m’en rapporte pour
la décifion à l’illuftre compagnie qui doit ixe
juger ainfi que pour les autres endroits , ou je
n’ai pas cru devoir fuivre aveuglement le fentiment
de ceux qui ont travaillé avant moi fur
la même matière.
6°. De ce qui précède, il s’enfuit que la partie
méridionale des Cébennes , depuis les fources
4e l’Éraut,. dépencloit également des Te&ofages,
& même en fe retournant , une partie du côté
ftptentrional de ees mêmes montagnes , comme
le témoigne Strabon dans un pafiage cité. Mais,
ce géographe , fuivi par Aufône, ne donnant aux
Teètofages qu’une très-petite partie de pays de ce
côté ( i) , il eft hors de doute que le territoire
de ces'peuples ne devoit pas s’étendre au-clela
du Tore, mais feulement le long de cette rivière,
qui , après avoir pris fa fource aux Cebennes,
va fe jeter dans l’Agout. De - la , il devoit encore
s’étendre le long de ce dernier fleuve , juf-
qu’à fon embouchure ; puis le long d’une ligne
iufqu’au Tefcon , le long de cette rivière iufqu’au
Tarn où elle fe rend .; de-là enfin , le long du
Tarn jufqu’au confluent de ce fleuve & de la
Garonne.
D’après l’autorité de Strabon , & même de
celle d’Aufone , les Te&ofages ne devaient pas
s’étendre au - delà du T o re , & de cette autre
. (i) E’<pçwrT#VT«i çf* >cotl itou xyofrct/rtCT^y irtyupov
cwv KîjMjM/va'y. Sttab. p. 287«
partie Je l’Agout que j’ai marquée. Ajoutez à cela
que M. d’Anville, l’un d’entre nos plus célébrés
géographes, place en-deçà de ces deux nv.eres
les peuples tels' que les Umbracmi & les Ruteni
provinciales. Quoique l’on n’ait pas des P^uve,
hien certaines de la pofition de ces peupes,
fur-tout des premiers , on doit du moins conjecturer
,. par ce qu’en, dit M. d’Anville, qu ils pori-
voient très-bien être fitués dans ce canton. D ailleurs
, un autre auteur met des Ruteni dans le
yoifiiiafe du Tou'.oufain. . , ., .
Depuis la réunion de i’Agout & du T a r n , J ai
fuppofé une ligne jufqu’au Tefcon ou Tefcou
& depuis cette rivière jufqu’à fon embouchure, y
conçoit que la ligne n’eft fuppofée que pour joindre
le Tefcon qui fervit anciennement de bornes,
aux pays des Touloüfains. Nous en trouvons une
preuve authentique dans la vie de S. Théodore ,
archevêque de Narbonne. Hic ( Tafco ) , lit-on fur
la fin de cette v ie , fuo demrfu, confima Tolojanc
Caturcenjifque ruris liquida dirimit patenter inflexu ,
qui. . . . poil modicum terra fpatium Tarno^ mmergi-
tur flumini. De plus, il y avoit autrefois fur c
Tefcon un lieu appellb. Fines. C’etoit: la roy e “ e
Touloufe à Cahors. Le même M, d Anville dit
qu’on peut appliquer à cette pofition ces de*x
vers de Théodulphe.
Nempe Tolofani locus tjl rurifque Cadurci
Extimus, hoc finit pagus uterque loco.
Poiir la partie du Tarn , que j’ai encore dé-
fignéepour limites des Teâofages, il n y â nulle
difficulté ; tout le monde convenant, d’apres le
témoignage de Pline, que les Teâofages etoient
féparés de leurs veifins par ce fleuve 5 vers ion
embouchure. Tame que Amne difered a Tolojanis
Petrocori. Scaliger , qu’on fuit ordinairement, a cru
appercevoir ici une erreur; c e ft-à -d ire , que ce
n’ét'oient pas les Petrocori qui étoient diftingues
des Tolofates par le Tarn. En cela , il na pas
tort ; mais je ne crois pas qu’il ait raifon d y
mettre eu place les Nidobroges ,* les anciens habi—
tans de fa patrie. Du n^oins, il ne paroît pas que
ceux-ci s’étendifîent jufqu’au Tarn. ^ C étoient les
Cadurces qui y aboutifloient, vers l’embouchure ;
cela eft inçonteftable. Cétoient donc eux auffi
qui dévoient être féparés des Toüloufains, par
le fleuve en- qûeftion. Ce qui eft encore attefte
par ce qui vient d’être dit, au fujet de Tefcon.
D’après ce qui a été expofé dans cette qua-
I trième partie , il paroît que les Te&ofages ont
! pofledé anciennement les diocefes de Touloufe,
! de Rieux, de Couferans , de Painiers, de Perpignan,
d’Alet , de Mirepoix , cle Carcafîonne,
de Saint-Papoul , de 'Narbonne , 'de Saint-Pons ,
de Béziers , de Lodève, de LaVaur, de Montait* I ban, avec la partie du diocefe de Comminges
en-deçà de1 la Garonne & celle du diocèfe d’Agc^
1 en^eçà Je l’Éraut».
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