
quatre.religieux- de l’ordre de S. Benoît, fous les
débris du toit de Ste Agathe. Plufieurs châteaux,
dans le territoire de Catane 8c de Syracufe , furent
renverfés: on vit paroître de nouvelles fources
tandis que d’anciennes difparurent. On vit s’affaiffer
la cîme de la montagne du côté de Tauromenium.
La fource de la fontaine Aréthufe, fi fameufe par
la limpidité & fa douceur, devint alors boueufe
& fàlee. La fcntaine d’A jo , dont la fource fort'
eu village de Saraceni, ceffa de couler pendant
deux heures, & reprit enfuite fon cours avec
plus de vigueur. On vit fes eaux devenir couleur
de fan g , & conferver cette couleur une heure
entière. A Meffine, la mer, fans être agitée,
abandonna fes rives ; en revenant, elle monta
au-delà de fes limites ordinaires, baigna les murs
de la ville, & entra dans les rues par les portes.
Une multitude de perfonnes qui avoient fui- fur
le rivage, furent englouties dans les flots. Ludovico
Aurelio rapporte que les vignes, les bleds & les
arbres de toute efpèce furent incendiés, & que
les campagnes devinrent, incultes, par la grande
quantité de pierres dont elles furent couvertes.
12°. Douze ans après, en 1 1 S 1 , l’Ztna f t une
éruption terrible du côté de l’orient. Les lames de
feu parcourant le penchant du mont, environnèrent
l’églife de 5. Etienne fans la brûler.
13 Quarante-huit ans après cette éruption ,
c’eft-à-dire, en 1329, le 23 juin, il y eut' une
éruption confidéraile, dont Nicolas Spéciale a
donné la defcription fuivante.
«C e jo u r - là , dit — il ^ à-l’heure de vêpres,
l’Etna trembla fortement, & jeta des mugiflemens
épouvantables : il glaça d’effroi non-feulement fes
propres habitans, mais tous ceux de la Sicile,
lout-à-coup un feu terrible s’élança du midi, &
fortit des roches du Mazzara, qui font en tout
temps couvertes de neige. Ce feu étoit accompagné
de beaucoup de fumée. Le foleil couché,
les flammes & les, pierres volèrent jufqu’aux nues.
Le feu vorace, &femblable à un torrent impétueux,
s’ouvrit un chemin , & brûla ou renverfa tous les
édifices que la piété des anciens avoit confacrés à
la divinité. La terre s’ouvrant, abforba plufieurs
rui fléaux & plufieurs fources. Ces tremblemens
firent , tomber plufieurs écueils de Mafcali dans la
mer. Tandis que ces malheurs fe fuccédoient les
uns aux autres, le 15 juillet, l’Etna réitéra fes
mugiflemens ; l’incendie de Mazzara durcit toujours.
La terre' s’ouvrit dans le voifinage de l’églife de
S. Jean que l’on appelle il Paparintccer. Du. côté
du fud-eu, il en fortit du feu avec violence ; & ,
pour combler l’horreur de cette journée, le foleil
s’éclipfa depuis le matin jufqu’au foir , c’eff-à-dire
qu’il fut offnfqué par des nuages de fumée ou de
cendres. Nicolas Spéciale fe tranfpcrta vers cette
nouvelle bouche, 8c alla ohfervèr le feu, les
pierres brûlantes qui fortoient du fein du volcan f
la terre mugiffoit & vacilloit ; & il vit venir quatre
fois, dans de courts intervalles, des pierres ardentes
avec un bruit fi terrible, qu’il'n’en avoit,
difoit-il, jamais entendu de pareil.
Quelques jours après, une pluie de feu & de
cendres fulfureufes brûla toutes les campagnes ; les
oifeaux & les quadrupèdes, ne trouvant pas de
quoi fe nourrir, périffoient en grande quantité.Il
mourut aufli beaucoup de poiflbns dans les fleuves
& dans les mers voifines. Je ne crois pas, ajoute-t-il,
que jamais, ni à Babylone, ni le feu qui brûla
Sodome, ait jamais caufé tant d’épouvante. Les
aquilons du nord qui fouffloient, portaient les
cendres jufqu’à Malte : beaucoup de perfonnes de
l’un & de l’autre fexe expirèrent d’épouvante.
14*. Quatre ans s’étoient à peine écoulés, que
l’Etna fit une nouvelle explonofi, lança des
pierres, en faifant trembler les campagnes : cette
éruption eft de l’année 1333.
15°. Quarante-huit ans après , le 25 août 1381,
une éruption de l’Etna fe répandit fur les confins
du terrivoire de Catane, & brûla les oliviers qui
étoient près de cette ville'.
i6 \ En 1444, foixante-trois ans après cet incendie,
un torrent de lave fortit de l’Etna , &
courut vers Catane ; le mont trembla ; & , par la
violence des fècouffes, de gros rochers fe déta-
tachèrent du fommet, .& tombèrent dans te gouffre»
ce qui en rendit les mugiflemens plus affreux. ^
170. L’Etna fut à peine tranquille pendant dix-
huit mois ou deux ans; le 27 feptembre 1446,
jour de dimanche, une heure après le coucher du
foleil, une éruption en-fortit près du lieu appelé
■ la Pietra di Ma^ara: cette éruption ne fut pas
longue.
i£ -. L’année fuivante, le 21 feptembre 1447 «.
il y en eut une autre', accompagnée de beaucoup
de flammes; mais elle fut aufli ce courte durée.
190. L’Etna ne jetoit plus de f e u x & apparemment
depuis long-temps ies habitans, non-feulement
montoient jufqu’au. fommet, mais même,
s’il en faut croire ce qu’on dit, ils defeendoient
dans le gouffre, & ils croyaient que la matière du
volcan etoit ép uifée lorfque, le 25 avril 15.36,
près d’un fiècle après la légère éruption de 1447,
un vent effroyable fouflla du côté de l’oueft, &
une épaiffe nuée parut fur le fommet du mont;
le centre en étoit rougeâtre: au même inffantune
groffe maffe de feu s’élança du gouffre & defeendit
bientôt avec un grand murmure,. comme un torrent,.
le long de la montagne du coté du levant, dé-
trnifant les rochers qu’elle trouvoit;, paflant près
d’A v i , elle emporta les troupeaux & les animaux
qu’elle rencontra. De cette même bouche, fituée
au fommet du mont, il fortit-*en même temps un
grand torrent de feu, qui courut vers le couchant,
plus épouvantable que l’autre. Il courut fur Broute,
Adrano & Cafft-lli. La matière de cette éruption
volcanique éteit toute de fouffre & de «bitume.
Ce.même jour, l’églife de S.. Léon, qui étoit
dans un bois, s’écroula par ies fècouffes du tremblement
de terre, & fut enfuite confumée par le feu*
Plufieurs ouvertures s’étoient faites fur le flanc de
la montagne ; il en fortit du feu & des cailloux
enflammés qui s’élançoient en l’air , avec un bruit
I femblable à celui d’une forte artillerie. François
Negro de Piazza, célèbre médecin, habitant de
; Leontini, voulut voir de près ces éruptions, &
faire quelques obfervations qu’il croyoit néceffaires ;
il fut miférablement emporté &. réduit en cendres
par une falve de ces cailloux ardens. Cet incendie
de l’Etna dura quelques femaines.
2,0«. Une année ne s’étoit pas encore tout-à-
fiiit 'écoulée, que le 7 avril 1537, le fleuve Si-
meto fe gonfla fi prodigieufement, qu’il inonda
les plaines voifines, &. qu’il entraîna les animaux,
les beftiaux & les gens de la campagne. Dans le
même temps les environs de Paterno, ies châteaux
qui l’entourent, & plus de cinquante maifons furent
renvérfées par les débordeniens du fleuve. Les
tourbillons d’un vent impétueux déracinèrent beaucoup
d’arbres. Ces malheurs étoient caufés par
l’Etna, qui, le 11 mai fuivant, s’ouvrit dans
beaucoup d’èndrcits, forma plufieurs gouffres, &
fit fuecéder à ces inondations un déluge de feu ,
dont les torrens étoient plus terribles que ceux dé
l’année précédente. Ils prirent leur cours vers le
monaftère de S. Nicolas d’Aréna : ils en brûlèrent
les jardins & les vignes ; puis fe portant vers
Nicolofi, ils incendièrent Mcntpilleri & Fallica, où
ils firent périr les vignes & beauconp d’habirans.
Lorfque l’incendie s appaifoit, la cîme du mont
s’écroula avec un bruit fi effroyable , que dans
toute l’île , chacun crut être au dernier jour du
monde, & que de toutes parts on s’empreflbit
de recevoiiMes derniers facremens.
Ces calamités continuèrent toute l’année , &
fur-tout pendant juillet & août, que toute la Sicile
fut couverte de.deuil. Lafiimée, les tremblemens,
les fracas étoient tels, que la montagne entière &
toute l’île en furent ébranlées, & que, s’il en faut
croire Filoteo, qui rapporte cet événement, beaucoup
de Siciliens en devinrent fourds, beaucoup
d’édifices en furent renverfés, entre autres le
château de Corléone, quoiqu’éloigné du volcan
de plus de vingt-cinq lieues.
2i°. Après trente années de repos, en 1567,
toute la Sicile fut ébranlée par une nouvelle
éruption : l’Etna jeta des feux, & couvrit les
campagnes d’une immenfe quantité de cendres qui
détruifirent toute efpèce de récolte.
22°. En 1579, l’Etna fit encore des ravages,
dont on; ne nous a tranfinis* aucun détail.,
230. Vingt-quatre ans après, au mois de juin,
1603, l’Etna fe ralluma avec une fureur nouvelle.
Pierre Carrera affure qu’il jeta des flammes jufqu’en
1636, c’eff-à-dlr« , trente trois ans fans difeontinuer,
mais avec plus ou moins de violence. En 1607,
les torrens de la lave brulèreut les bois & les
vignesà l’occident de la montagne. E11 1609, ils
tournèrent du côté d’Aclerno, & y détruifirent une
■ partie de la forêt del Pino, & une partie du bois
qu’on appelle ta Sciambrita , ainfi que beaucoup de
vignes dans cette région qu’on appelle Cojlcma.
Ces torrens coulèrent pendant trois mois. En 1614,
une nouvelle fecouffe de l’Etna ouvrit une nouvelle
bouche , & porta le feu fur Randezzo-, dans
la région que l’on nomme il Pire. Les flammes
durèrent encore dix ou douze ans.
24?. Le même Pierre Carrera rapporte un
horrible incendie arrivé en 1664, dont il fut le
témoin. II arriva le 13 décembre, & dura, avec
plus ou moins de force, & à-peu-près fans difeontinuer,
jufqu’à la fin de mai 1678. Mais dès 1669,
les habitans de Nicolofi avoient été contraints de
fortir de leurs maifons, qui s’écroulèrent peu de
temps apres qu’ils les eurent abandonnées. La
bouche de l’Etna n’annonçcir rien, & elle fur
tranquille jufqu’au 23 mars. Mais le 8 de ce mois,
une heure avant la fin du jour , ou v it, au village de
la Pedara & autres circonvoifosi, l’air s’obfcurcir *
les habitans de ce pays crurent qu’il arrivoit u; e
éclipfe prefqué totale: Peu après le coucher du
foleil, commencèrent de fréqnens tremblemens de
terre. .D ’abord, ils furent foibles , mais par degrés
ils devinrent affreux jtifqu’au point dn jeer^Le
pays de Nicolofi fu t , de tous les pays de cette
■ partie de l’Etna, celui qui éprouva les plus fortes
fseouffes au point qu’à midi, toutes les maifons
étoient renverfées, les habitans conff.rnés, difi.
perfés au loin , invoquoient le ciel.'Le lendemain,
10 mars , il fe fit à la montagne une ouverture
de plufieurs milles de long , & de cinq à fix pieds
de large, d’où fortit une éclatante lumière, deux
heures avant le jour. On voyoit en l’air une forte
vapeur de fouffre qui fe répandoit dans l’atmo-
fphère.
Vers onze:heures du même jour, après de
tenables tremblemens de terre, il s’ouvrit une
bouche à la colline appelles des Noifitia, d’où il
fortit d’étonnans globes de fumée, fans feu, cendres
ni pierres , mais avec de grands & multipliés coups
de tonnerre de tous les genres, roulant, tramant,
éclatant; Sc.ce qu’il y a de fmgulier à dbferver ’
c’eft que l’ouverture qui. fe fit, étoit dans le fois
de la méridienne du fommet à la bafe de la motir
tagne. Ce jour même, il s’en fit une autre à. deux
milles de-là, plus bas ; elle jeta beaucoup de fumée
en tourbillons avec d’horribles mugiflemens St de
violentes fécondés de la terre;. Si jufqu’au foir de
ce même jour, il s’en ouvrit quatre autres, toujours
vers le midi, dans la même direflion, jufqu’à la
colline appelée la FuJ'ara, accompagnées des mêmes,
circonftances.
A douze pas plus loin il s’en fit une autre
toujours dans le même genre; & la nuit fuivante’
cette dernière fente jeta des pierres au milieu d’une
grande fumée noire qui venoit en même temps.
Elle jeta aufli des flocons de matière, qui, étant
durcis, après leur chute fur la terre , devenoiens
femblables à des éponges noires, grifes , couleur
de terre,. Il fortit du. gouffre une lave qui ails fe